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Un arrêt du flux migratoire de 1945 à 1970 : la main-d’œuvre suffisante

Nonobstant une défaite cuisante à la fin de la Seconde Guerre mondiale, il ne faut au Japon qu’une dizaine d’années pour se remettre sur pieds. Peu après débute ce qui est appelé le « miracle » japonais durant la période de 1955 à 1980. Ce miracle se traduit par une période de haute croissance économique : durant la période de 1955 à 1973, le PIB japonais est quintuplé puis doublé pendant la

64 Ryûhei 龍平 HATSUSE 初瀬, « Gaikokujin rōdōsha : Sōgo shugi no dōnyū 外国人労働-相互主議

の導入 (L’introduction des travailleurs étrangers selon le Principe de réciprocité) », Kôbe hôgaku

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période de 1974 à 199065. Pour autant, le Japon n’a pas immédiatement recours à

une main-d’œuvre allogène contrairement aux pays occidentaux, notamment en Europe de l’Ouest.

i. Les travailleurs étrangers en Europe : le cas de l’Allemagne

Il serait d’abord utile de se pencher sur le cas de la République Fédérale d’Allemagne pour ensuite procéder à une comparaison avec le Japon pendant la même période. Ce sous-chapitre prendra appui sur l’article de Randall HANSEN66,

il y retrace l’Histoire de l’immigration en Europe depuis l’après-guerre. Il se concentre plus particulièrement sur la France, le Royaume-Uni et la République Fédérale d’Allemagne (RFA). Selon l’auteur, il existait deux types de migration en Europe : celle issue des régimes coloniaux ainsi que les politiques qui visent à accueillir des guest workers de façon temporaire.

Ces travailleurs étrangers ne sont accueillis qu’avec un seul objectif : occuper les nombreux emplois qui naissent avec le décollage économique en Europe. A partir du milieu des années 1950, la main-d’œuvre locale est déjà insuffisante, aussi bien en Allemagne après les réformes monétaires de 1948, que dans le reste de l’Europe. L’Allemagne de l’Ouest fait le choix, dans un premier temps, d’importer des gastarbeiter en négociant avec des pays du Sud de l’Europe, les jugeant plus aptes à s’adapter au marché du travail européen. Le gouvernement se tourne ensuite vers la Turquie et les pays du Maghreb. Les gastarbeiter sont accueillis sur la base d’un système de rotation (rotation system). Celui-ci consiste à les accueillir de façon temporaire, pendant deux à trois ans, puis au terme de leur contrat, ils ont pour obligation de retourner dans leur pays. Ce système est un véritable échec puisqu’au lieu de rentrer, les guest workers s’installent progressivement jusqu’à devenir des résidents permanents.

ii. La main-d’œuvre rurale et les oldcomers : la force ouvrière durant le « miracle économique »

65 Claude MEYER, Chine ou Japon : quel leader pour l’Asie ?, Paris, Presses de Sciences Po, 2010,

p.43.

66 Randall HANSEN, « Migration to Europe since 1945: Its History and its Lessons », The Political

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Au Japon, il n’est aucunement question d’accueillir de la main-d’œuvre étrangère dans les années qui suivent l’après-guerre. En effet, aucun système d’accueil n’est mis en place au niveau national. Précisons tout de même que cela ne tient pas qu’à une volonté du Japon, à l’époque certains pays voisins étaient d’anciens pays colonisés et les autres d’anciens ennemis durant la guerre.

Durant cette époque, les anciens sujets de l’empire colonial japonais ou

oldcomers installés au Japon perdent leur statut de sujet après la signature du

traité de San Francisco en 1952. Ils seraient approximativement 500 000 Coréens et 20 000 Chinois à s’être installés au Japon, pour des raisons liées à l’instabilité politique et économique de leur pays respectifs67. Ils ne sont alors plus

considérés comme Japonais et sont devenus du jour au lendemain des étrangers comme le déclare en 1952 le ministère de la Justice japonais : « tous les Coréens, Taiwanais et Chinois ainsi que tous les ressortissants résidant au Japon ne sont désormais plus des citoyens japonais ». Ces derniers sont par la suite la cible de contrôle intempestif de la part du gouvernement japonais68.

Selon YAMAWAKI, le gouvernement japonais n’estime pas que les

étrangers méritent d’être couverts par la juridiction japonaise, ne possédant pas la nationalité japonaise. Leur droit de vivre comme des membres légitimes de la société japonaise leur est retiré à cause d’une discrimination basée sur la nationalité69.

Ce sont pourtant ces oldcomers ainsi que la main-d’œuvre issue de l’exode rural des années 1950 et 1960 qui font partie de la force ouvrière nécessaire au marché du travail lors du « miracle économique » japonais. A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, l’avènement du « miracle japonais » dans les années 1950 et 1960 apporte un nombre considérable de travailleurs dans la capitale ou des grandes villes comme Osaka. Entre 1955 et 1965, la population de métropole de Tōkyō augmente de 15 à 21 millions, dont 600 000 personnes en plus chaque année. Ici se dessine une différence majeure : tandis que les Européens ont recours

67 Hiroshi KOMAI, « Immigrants in Japan », Asian and Pacific Migration Journal, 9-3, 2000, p. 311‑

326.

68 Ibid.

69 K.啓造 YAMAWAKI 山脇, Kindai nihon no gaikokujin rōdōsha mondai 近代日本の外国人労働者

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à une importation massive de guest workers nécessaires à leur développement économique, le marché du travail japonais peut jusqu’à la fin des années 1970 s’appuyer sur ses travailleurs locaux70. Si la période d’après-guerre aux années

1970 est marquée par la quasi-absence de migration de travail malgré une période de haute croissance économique les années 1980 constitue une période de grand bouleversement au niveau de l’économie japonaise qui connaît une croissance fulgurante dû au « gonflement » de la bulle spéculative (baburu keiki バブル景).

C. L’afflux migratoire des années 1980 : la croissance économique et les

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