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Homicides et blessures involontaires Inobservation d’un règlement (S5A) Chef gare GRAMAT Chef gare ASSIER

Il y a individualisation des fautes

Figure 42 – L’arbre des fautes.

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"La ligne BRIVE - FIGEAC est une voie unique de 90 km dotée de 6 points de croisement, dont les Gares de GRAMAT et d’ASSIER, où la voie se dédouble afin de permettre, de retenir un train, (au moyen d’un signal d’arrêt à main) sur une voie, tandis que le train croiseur est renvoyé sur l’autre voie."

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En l’espèce, et suivant ledit tableau :

- le Corail 6153 arrive à ASSIER le samedi (du 29 juin au 7 septembre) à 15 heures 40 et doit repartir vers FIGEAC à 15 heures 44 ;

- l’autorail 7924, quotidien, arrive à ASSIER à 15 heures 41 et repart vers GRAMAT à 15 heures 43."

ASSIER est la gare de croisement.

Avant le 29 juin, ainsi qu’il ressort du même tableau, le train 6151 roulait le samedi à la place du 6153 et croisait l’autorail en gare de GRAMAT.

15h10 15h20 15h30 15h40 15h50 16h00 16h10 RODEZ-BRIVE RAILCAR PARIS-RODEZ EXPRESS TRAIN ROC AMADOUR GRAMMAT FLAUJAC ASSIER LE POURNEL FIGEAC

BRIVE LA GAILLARDE - TESSONNIERES

Figure 43 - Graphique des horaires des trains.

"- Le règlement S 4 A, relatif au régime général d’exploitation de lignes à voie unique, posant l’obligation que, dans une gare intermédiaire dans laquelle se croisent deux trains, chacun desdits trains ne sont expédiés qu’après l’arrivée du train croiseur. Ce même règlement prescrit en outre la tenue d’un “registre de circulation” sur lequel l’agent inscrit l’heure des dépêches (communications téléphoniques échangées de gare à gare) reçues et émises, ainsi que les heures des arrivées, des passages ou des départs des trains.

- La consigne d’établissement S 6 A n° 1, s’appliquant aux gares de GRAMAT et d’ASSIER, qui établit que l’agent de circulation n’a aucune manœuvre à effectuer (notamment en matière d’aiguillage) et n’a qu’à placer un signal d’arrêt à main en face du conducteur du train. Ce dernier ne peut donc plus quitter la gare avant l’arrivée du train croiseur.

- Le règlement S 1 A aux termes duquel tout agent quel que soit son grade doit obéissance passive et immédiate aux signaux le concernant et notamment le signal d’arrêt à main.

- Le règlement S 5 A, organisant le système du “cantonnement”, qui est le fondement de la sécurité et du respect de l’espacement des trains".

La ligne est divisée en cantons. Aux extrémités de chacun d’eux se trouve un poste dans lequel se trouvent un agent habilité et les signaux nécessaires pour arrêter et faire partir les

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signaux et laisse passer un autre train. De la sorte, un train est toujours protégé par le maintien à la fermeture des signaux du poste d’entrée du canton. En voie unique, le cantonnement est fait par les agents, de gare à gare, et par voie téléphonique.

L’annonce du départ de chaque train, se fait non pas après le départ du train comme en double voie mais avant.

Deux types d’annonces existaient en 1985 :

• la demande de voie en annonce simple (prévue par le règlement S 4 A) aux termes de laquelle l’agent de circulation d’une gare - avant d’expédier un train - obtient par téléphone, de son collègue vers la gare duquel se porte le train, l’assurance que la voie est libre et va le rester.

• l’annonce conditionnelle, système autorisé et développé dans les petites unités où de multiples diligences sont nécessaires quand un train est en gare. Celle ci consiste à faire l’annonce d’un train à la gare suivante avant l’arrivée du train expédié par cette dernière, mais toujours avant de l’expédier. Cette annonce est matérialisée sur le registre de circulation par l’apposition d’une croix devant le texte.

Figure 44 -Procédure d'annonce conditionnelle.

Il est à noter, ce que ne mentionne pas le jugement, que cette annonce conditionnelle revêt un formalisme particulier qui se traduit par l’expression suivante : ‘’Bien qu’attendant le train n° 456 je t’envoie le train 123’’ formalisme qui n’a pas été utilisé par les deux chefs de gare. Nous verrons par la suite l’importance que peut avoir, en matière de sûreté de fonctionnement, le non respect d’un tel formalisme.

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voies, signaux, trains…), réglementaires (toutes les procédures évoquées ci-dessus), humains (chefs de gare, chef de train…) et organisationnels, c'est-à-dire à toutes les relations existant entre les différents éléments composant le système concerné. Mais il va faire plus, il va imaginer, en outre, les différents scénarii qui pourraient se produire en essayant de mettre en évidence pour chacun d’eux la nature des risques encourus et les relations particulières liant les différents éléments composant le système. Ce qui suppose bien entendu de l’avoir au préalable délimité. Ce dernier point est très important car de la découpe dans l’espace et

dans le temps initialement retenue va découler le nombre et la nature des éléments pris en compte.

Parmi la multitude de scénarii possibles, nous en retiendrons trois car très caractéristiques du système ferroviaire qui vient d’être évoqué.

Chaque scénario va décrire un mode de fonctionnement particulier de la ligne BRIVE - FIGEAC. Mais dans la réalité, ce sont en fait des milliers, des millions, voire plus, de scénarios différents qui se produisent et peuvent se produire tout au long des années.

Dans le premier scénario, tous les trains sont à l’heure. Leurs déplacements se déroulent conformément aux horaires fixés. Les chefs de gare titulaires sont à leurs postes. Les procédures sont appliquées à la lettre et avec le formalisme voulu.

Ainsi donc le train Corail 6153 arrive à GRAMAT à 15 h 26 et s’arrête au signal. Le chef de gare de GRAMAT avant de l’expédier l’annonce au chef de gare d’ASSIER selon la formule consacré "Allo ici GRAMAT je t’annonce le 6153". Le chef de gare d’ASSIER lui répond "Bien compris tu m’envoies le 6153". Puis les deux chefs de gare remplissent leurs registres en portant le numéro du train annoncé à savoir le numéro 6153. A l’heure prévue, le chef de gare de GRAMAT expédie le train annoncé. Pendant ce temps le chef de gare d’ASSIER pose sur les quais où vont être reçus les trains 6153 et 7924 deux signaux d’arrêt. A l’heure prévue le Corail arrive à ASSIER et s’arrête au signal. L’autorail 7924 arrive comme prévu à 15 h 41 et s’arrête au signal. Les passagers montent et descendent des trains. Conformément à la procédure et selon le formalisme préconisé le chef de gare d’ASSIER annonce à GRAMAT qu’il va lui envoyer le 7924, puis il annonce à FIGEAC le départ du 6153. Ceci fait, il expédie l’autorail vers GRAMAT à 15 h 43 et le Corail vers FIGEAC à 15 h 44. Le croisement est terminé. Tout s’est passé comme la planification l’avait prévu.

Dans le deuxième scénario le cindynicien va faire varier certains éléments par exemple : les trains ne sont plus à l’heure, les chefs de gare ne sont pas les titulaires mais des agents de remplacement, et les annonces faites ne respectent pas le formalisme prévu.

Le train Corail 6153 part de BRIVE avec 15 mn de retard et arrive à GRAMAT à 15 h 39 au lieu de 15 h 26, accusant 13 minutes de retard et s’arrête au signal. Le chef de gare de GRAMAT avant de l’expédier à 15 h 40 l’annonce au chef de gare d’ASSIER selon la formule habituelle, mais qui n’est pas réglementaire, "Allo ici GRAMAT je t’envoie le Parisien7". Toutefois il précise que ce train à 13 minutes de retard. Le chef de gare d’ASSIER lui répond "OK, bien reçu" formule aussi non réglementaire. Le chef de gare d’ASSIER

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En effet dans de nombreuses gares les chefs de gare désignent souvent les trains par le nom de la ville d’où ils proviennent, ce qui est une cause de confusion certaine.

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sort de son bureau et pose le signal d’arrêt à main sur le quai où il a prévu de recevoir le Corail.

Conformément à l’annonce faite par FIGEAC l’autorail 7924 arrive en gare d’ASSIER à 15 h 42 avec une minute de retard et s’arrête au signal. Les passagers montent et descendent du train. Les minutes passent. Le chef de train de l’autorail s’impatiente et interpelle le chef de gare d’ASSIER en lui indiquant que le croisement s’effectue non pas à ASSIER mais à GRAMAT. Le chef de gare d’ASSIER reste ferme quant au point de croisement et justifie l’attente en lui indiquant que le Parisien est parti de GRAMAT avec 13 minutes de retard. Le Corail arrive enfin à ASSIER à 15 h 50 et s’arrête au signal. Après avoir annoncé à GRAMAT le 7924 et à FIGEAC le 6153 le chef de gare d’ASSIER expédie les deux trains vers leurs gares réciproques. Le croisement est terminé. Tout s’est bien passé. Les disfonctionnements évoqués ci-dessus (retard, absence des titulaires non respect du formalisme des procédures) n’ont pas eu d’impacts réels. Ils ont été maîtrisés grâce à l’information fournie par le chef de gare de GRAMAT à savoir le retard de 13 minutes pris par le Corail, information qui a permis au chef de gare d’ASSIER de maintenir le croisement dans la gare prévue.

Le troisième scénario retenu par le cindynicien correspond à la séquence accidentelle ayant conduit au drame. Comme dans le deuxième scénario : les trains ne sont pas à l’heure, les chefs de gare ne sont pas les titulaires, et les annonces faites ne respectent pas le formalisme prévu mais de plus les interactions humaines vont être en partie différentes.

Le train Corail 6153 part de BRIVE avec 15 minutes de retard, arrive à GRAMAT à 15 h 39 et s’arrête au signal. Avant d’expédier le Corail à 15 h 40 chef de gare de GRAMAT l’annonce à d’ASSIER selon le même formalisme qu’au scénario n° 2 à savoir "Allo ici GRAMAT je t’envoie le Corail", mais il ne mentionne pas le fait que ce train à 13 minutes de retard. Le chef de gare d’ASSIER lui répond "OK, bien reçu". Les deux chefs de gare remplissent leurs registres en portant le numéro du train annoncé, et le chef de gare d’ASSIER comme pour le scénario précédent se trompe. Il inscrit sur son registre le numéro 7921 au lieu du numéro 6153. Il sort de son bureau et pose le signal d’arrêt à main sur le quai où il a prévu de recevoir le Corail.

L’autorail 7924 arrive en gare d’ASSIER à 15 h 42 avec 1 minute de retard et s’arrête au signal. Les passagers montent et descendent du train. Les minutes passent. Le chef de train de l’autorail s’impatiente et demande au chef de gare d’ASSIER les raisons de leur attente. Ce dernier lui répond qu’il attend le Parisien en provenance de GRAMAT. Le chef de train du 7924 s’étonne et lui indique qu’il pense que le croisement a lieu à GRAMAT et non à ASSIER, d’autant que son service se termine dans cette ville.

Le chef de gare d’ASSIER (intérimaire, rappelons le) est déstabilisé. Il va dans son bureau pour vérifier où se fait le croisement, regarde son registre de circulation, constate qu’il a commis une erreur en inscrivant le train 7921 qui circule tous les jours de la semaine sauf le samedi, or on est un samedi. Il reprend le tableau de successions de trains pour vérifier le dire du chef de l’autorail à quai. Il cherche un train circulant le samedi et croisant le 7924 (actuellement en gare d’ASSIER) à GRAMAT. Il en trouve un : le 6151 qui répond bien à ces deux critères mais il ne poursuit pas plus avant son investigation. Dans sa précipitation, il ne