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Approche semi-classique de la réaction de transfert

3.3 Expérience de Tokai

4.1.3 Approche semi-classique de la réaction de transfert

Lorsque l’énergie du faisceau change, pour un angle de détection fixe, on change la distance minimale d’approche entre le projectile et la cible. À basse énergie, dans les réactions de transfert entre noyaux lourds de charges Z1, Z2, la probabilité de pénétrer la barrière coulombienne est donnée par P = exp(−2πη), où η le paramètre de Sommerfeld est très faible [von Oertzen and Vitturi, 2001] :

η= Z1Z2e2 ¯hv = Z1Z2e2p 2ECM¯h = Rmin (4.3)

v est la vitesse dans le centre de masse, λ = 1/k la longueur d’onde de Broglie et p la norme de l’impulsion.

On voit là apparaître la distance minimale d’approche Rmin, qui est d’autant plus grande que les ions sont lourds.

La distance minimale d’approche peut-être calculée ainsi [Broglia and Winther, 1981] :

R0min = Z1Z2e2 4π0 1 2ECM 1 + 1 sinθCM 2 ! (4.4)

Il est pratique d’utiliser le paramètre de recouvrement d0 défini par la relation [von Oertzen and Vitturi, 2001] :

d0 = Rmin

A1/31 + A1/3 2

(4.5) qui permet de normaliser la distance minimale d’approche pour tout couple faisceau-cible. Dans le cas général, on peut considérer que d0 = 1.25 fm correspond à la surface du noyau en la définissant comme la surface pour laquelle la densité de matière nucléaire est la moitié de la densité de l’intérieur du noyau. En considérant que la surface du noyau a pour épaisseur ∆d00.2 fm, l’approximation de la trajectoire coulombienne négligeant la force nucléaire est pleinement justifiée pour d0 >1.45 fm.

C’est le cas pour des réactions ayant lieu à des énergies proches de la barrière cou-lombienne. Dans ces réactions, aussi nommées réactions froides, la trajectoire dépend uniquement de la force coulombienne et donc du produit des charges. Cette hypothèse s’applique dans l’expérience de Tokai, où les paramètres d0étaient 1.64, 1.60, 1.54, 1.50 fm.

4.1.3.2 Probabilité de transfert

On peut définir l’amplitude de transition Tab qui donne la section efficace différentielle pour une transition particulière entre un niveau a du noyau 1 et un niveau b du noyau 2 :

dσ(θ)

d

!

tr

= |Tab(θ)|2. (4.6)

Cette amplitude est donnée par une intégrale radiale à 6 dimensions [von Oertzen and Vitturi, 2001] :

Tab =Z χ2b(kf, −r

f)F (R1a(ki, −r

i)dR . (4.7) Dans le calcul des fonctions d’ondes distordues χ2b(kf, −r

f) et χ1a(ki, −r

i) des états initiaux et finaux, on négligera la non-localité des intégrales en prenant −rf = −ri =R, ce

120 4.1. Introduction

qui revient à considérer que la poussée exercée sur les noyaux par le transfert des nucléons est négligeable.

Cette hypothèse, et le fait de négliger la force nucléaire permettent de factoriser cette intégrale en une partie correspondant à la diffusion fsc(θ) et une partie F (Rmin(θ)) associée au facteur de forme, dépendant de la distance minimale d’approche :

Tab = fsc(θ)F (Rmin(θ)). (4.8) En reprenant l’expression 4.6, on voit alors apparaître l’expression :

dσ(θ) d! tr ∼ |F(Rmin(θ))|2 dσ(θ) d! sc . (4.9)

Cette expression permet de définir la probabilité de transfert comme le ratio entre la section efficace de transfert et de la section efficace de diffusion élastique :

Ptr(θ) ∼ |F (Rmin(θ))|2 = σtr(θ)

σe(θ). (4.10)

La probabilité de transfert Ptr(θ) dépend des coordonnées radiales des fonctions d’onde. À ce titre, on s’attend qu’à des rayons suffisamment grands, on obtienne une dépendance exponentielle par rapport à ce rayon. On écrira donc

Ptr(θ) ∼ N exp(−2αRmin) (4.11)

N est un facteur de normalisation qui contient le facteur spectroscopique et α est la constante de décroissance moyenne définie par [von Oertzen and Vitturi, 2001, Rafferty

et al., 2016] :

α= (α1+ α2)/2. (4.12)

où α1 et α2 sont calculées par rapport au noyau receveur et par rapport au noyau donneur. Pour chaque noyau (receveur ou donneur), on a :

α =

2µEB

¯h . (4.13)

µ= mtr m1,2

mtr+m1,2 est la masse réduite du cluster et du noyau receveur ou donneur. mtr est la masse transférée et EB est l’énergie de liaison des nucléons transférés. Lorsque des protons sont transférés, la barrière coulombienne intervient. De même lorsque des clusters sont transférés, l’énergie de liaison des nucléons à l’intérieur de ce cluster intervient. Ainsi dans ces deux derniers cas, il sera nécessaire de définir une énergie de liaison effective EBef f

pour reproduire les données expérimentales.

4.1.3.3 Angle de grazing

La relation entre l’angle d’émission de l’éjectile et la distance minimale d’approche (paragraphe 4.1.3.1) permet de comprendre pourquoi la section efficace n’est pas constante selon l’angle d’émission de l’éjectile : à énergie constante, la distance minimale d’approche diminue lorsque l’angle d’émission de l’éjectile augmente, augmentant la probabilité de transfert. Si l’angle d’émission est suffisamment grand, les deux noyaux entrent en contact. L’angle d’émission correspondant est appelé angle de grazing : θ = θgr.

Chapitre 4. Sections efficaces et énergies d’excitation 121

Pour tout angle d’émission supérieur à l’angle de grazing la section efficace de diffusion élastique diminue très fortement, car le flux est absorbé par d’autres réactions : fusion et diffusion inélastique.

Ainsi la plus grande section efficace de transfert se situe théoriquement à l’angle de grazing. En réalité, ce maximum ne correspond cependant pas toujours à l’angle de grazing. En effet le rayon des noyaux peut changer en fonction de la déformation et la probabilité quantique de passer la barrière coulombienne permet aux réactions de fusion et de diffusion inélastique d’avoir lieu, même pour θ < θgr.

4.1.3.4 Chaleur de réaction et énergie d’excitation

Lors d’un transfert de nucléons, des quantités sont transférées : masse M, charge

Z, énergie E, moment angulaire L... Ces variables définissent l’orbite de la trajectoire, jusque là considérée comme dépendant uniquement de Z1, Z2, et Ei

CM. Le transfert de ces quantités va modifier les trajectoires et donc les sections efficaces.

On peut donc modifier l’équation 4.9 pour prendre en compte ces changements dans le système, pour y ajouter un facteur correctif F (Q, L). La section efficace différentielle de transfert se décomposera alors :

dσ(θ) d! tr = (θ) d! sc Ptr(θ)F (Q, L). (4.14) On définit le Q de réaction comme la différence de masse avant et après la réaction. Dans le cas d’une réaction endothermique, Q sera une valeur négative et −Q correspond donc à l’énergie minimale à apporter pour que la réaction puisse avoir lieu :

M1+ M2 = M3+ M4+ Q. (4.15)

Qdépend donc de l’excitation des noyaux avant et après la réaction. Q00 correspond à la valeur de Q pour une réaction entre les états fondamentaux des noyaux.

Le transfert de nucléons implique un changement dans la trajectoire, avant et après le transfert. Le transfert de protons induit un fort changement de la trajectoire coulom-bienne. On peut alors calculer la valeur du Q de réaction optimale qui va minimiser le changement de trajectoire. Une approche calculatoire incluant les moments angulaires est possible en DWBA [von Oertzen and Vitturi, 2001]. On peut également considérer une approche plus simple qui consiste à chercher la valeur de Q pour laquelle les distances minimales d’approche avant le transfert (Ri

0) et après le transfert (Rf

0) sont égales :

Rmin = Ri

min = Rf

min. (4.16)

D’après l’équation 4.4, on obtient [Buttle and Goldfarb, 1971,Rafferty et al., 2016] :

Qopt =Ef CM − ECMi (4.17) =Ei CM  1 −Z3 Z4 Z2Z1  . (4.18)

Par rapport à la trajectoire, l’énergie la plus favorable au transfert correspond à celle où

E+ Q = 0. Ainsi l’énergie disponible E

opt pour l’excitation interne des noyaux sera :