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3. les dispositifs techniques de la chambre d’Ussing

3.3. Origine des courants mesurés en Ussing

3.3.2. Approche physiologique et technique du problème

3.3.2. Approche physiologique et technique du problème

En réalité, la résistance du tissu est très faible et voisine de celle du liquide physiologique utilisé. D’où la nécessité à chaque fois de supprimer la résistance du fluide (compensation du fluide) au cours des expérimentations afin que la différence VT – Vf - Vm soit égale à zéro.

Dans les conditions de court-circuit, Vm = 0, ce qui conduit à la relation VT = Vf. En somme, lorsque l’équation est respectée, le courant qui correspond au flux du transport actif des ions est le courant de court-circuit (Isc). Le courant qui résulte des trois potentiels différents VT, Vf et Vm est additionné comme la somme des dérivations et relié à un amplificateur opérationnel à gain élevé puis utilisé à la sortie pour développer un courant de court-circuit. Durant le temps de l’initialisation, l’amplificateur opère proportionnellement au self contrôle. Pour avoir une erreur voisine de zéro et une fréquence voisine de zéro, l’amplificateur opère comme un intégrateur à une constance de temps de 30 millisecondes ou moins. Ces conditions assurer la stabilité, un faible bruit de fond faible et une erreur minimale.

Pour obtenir Vf on admet que la résistance de la solution physiologique utilisée, le tissu actif et inactif entre les deux électrodes sont constants à la fréquence et au courant utilisés. La ddp supprimée à travers cette partie du système est égale au produit de la résistance et du courant Ce qui n’est autre que la transposition de la loi d’Ohm à un gradient électrochimique.

U = R. I (équation 3) Où :

U = différence de potentiel (ddp) en millivolts (mV) R = résistance du tissu (Ohm/cm²)

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3.3.2.1. La différence de potentiel membranaire

La différence de potentiel membranaire est due à l'existence d'une différence du nombre de charges électriques présentes à un instant donné de part et d’autre de la membrane étudiée. Ces charges électriques sont portées par les ions provenant des électrolytes qui baignent la membrane. La nature de la membrane impose une répartition inégale des ions de part et d'autre de cette membrane ce qui crée une différence de potentiel (ddp), appelée le potentiel membranaire ou tissulaire s'il s'agit d'un tissu biologique tel qu'un épithélium polarisé.

3.3.2.2. Le courant ionique

Le courant ionique tire son origine de la polarisation apicale-basolatérale des entérocytes et de l'existence de jonctions serrées qui lient les cellules épithéliales entre elles. A l’état physiologique, ce courant est un courant ionique dû à l'existence d'un flux ionique au travers de l’épithélium. Ainsi, on observe que les cellules constitutives de la membrane sécrètent des ions Cl- et HCO3- vers la phase apicale tandis que se produit simultanément une absorption d'ions Na+ par ces mêmes cellules depuis le milieu apical (figure 12).

Figure 12 : Origine des courants ioniques s'établissant de part et d'autre d'une membrane épithéliale.

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Pour cette raison, la face muqueuse d'un épithélium est donc chargée négativement par rapport à la face séreuse. Dans les conditions expérimentales, le système de voltage-clamp génère constamment un courant de court-circuit (Isc) qui annule la différence de potentiel qui existe de part et d'autre du tissu. Le courant de court-circuit mesuré, Isc, suit donc la variation de la ddp et représente les flux net ioniques à travers le tissu (Matysiak-Budnik et al., 2004) comme le montre l'équation suivante:

Isc = J = Jnet Na+ + Jnet Cl-+ Jnet HC03- - Jrésiduel (équation 4)

Une augmentation de la valeur du courant de court-circuit traduit une absorption de cation(s) et/ou une sécrétion d’anion(s) par les cellules épithéliales (par exemple entérocytes dans le cas de l’intestin). Ainsi, un changement de cet Isc indique une variation du flux des électrolytes au travers de la membrane. Ceci permet donc d'étudier finement le ou les mécanismes cellulaires qui en sont la cause.

La compréhension des mécanismes d’absorption du glucose via le cotransporteur Na+/glucose (voir plus loin la figure 13 et 14) et la sécrétion des ions chlorures

(voir plus loin la figure 15) sont deux exemples très connus qui illustrent clairement l'intérêt de la mesure du courant de court-circuit.

3.3.2.3. La résistance et la conductance transépithéliales

Les tissus épithéliaux se distinguent des autres tissus par la polarisation des cellules qui les constituent. Cette asymétrie est due à une différence de répartition des protéines à la face apicale et basolatérale des cellules qui constituent la membrane et par le fait que les cellules sont fortement liées entre elles par l'existence de jonctions serrées intercellulaires qui assurent une grande étanchéité du tissu.

Les jonctions serrées ou zonula occludens ("tight junctions") scellent les cellules épithéliales et endothéliales entre elles grâce à la présence de plusieurs protéines Elles jouent un rôle très important dans la régulation de la perméabilité membranaire. Toutefois, l'étanchéité n'est pas totale et certaines molécules peuvent emprunter l'espace intercellulaire qui existe entre deux cellules contiguës afin de passer d'un côté ou de l'autre de la membrane. Cette voie de passage constitue la voie paracellulaire. Les jonctions serrées régulent de manière sélective le passage paracellulaire des molécules extracellulaires.

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En situation physiologique, le passage des molécules par la voie paracellulaire est limité par la masse moléculaire et par le degré de lipophilie de la molécule, mais en situation pathologique, l’ouverture des espaces intercellulaires, due à un affaiblissement des jonctions serrées peut permettre le passage de molécules de masse molaire élevée (40 kDa), voire la translocation bactérienne.

Plusieurs études ont cherché à préciser les bases moléculaires de l'augmentation de la perméabilité épithéliale dans des situations pathologiques par exemple ou bien en présences de certaines molécules exogènes et ont permis de montrer que l'affaiblissement et la fragilisation des jonctions serrées étaient en cause (Nusrat et

al., 2001; Otte et al., 2004; Resta-Lenert et al., 2003; Resta-Lenert et al., 2006). Cette

diminution de l’étanchéité membranaire, et donc de la résistance membranaire, peut être directement mesurée en chambre d’Ussing.

En mesurant le courant ionique en fonction du temps, Isc(t), et la différence de potentiel (ddp), on détermine la résistance R (t) ou la conductance G(t) en fonction du temps. La loi d’Ohm indique que la résistance R peut s’écrire :

R = U/I (équation 5)

La conductance (G) étant la réciproque de la résistance, il vient :

U = R x I = (1/G) x I (equation 6)

d'où après réarrangement, la conductance G peut être exprimée par :

G = I / U (équation 7)

La conductance électrique G mesure la facilité avec laquelle un courant se déplace entre deux points. Elle est fréquemment exprimée en millisiemens par unité de surface tissulaire exposée (mS/cm²).

Dans la pratique, et en condition expérimentale d’Ussing, la conductance (G) est mesurée par le rapport du courant de court-circuit (Isc) et de la différence de potentiel expérimentale (ddp).

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G= Isc / ddp (équation 8)

Du point de vue ionique, il est admis que la conductance caractérise la facilité avec laquelle les ions traversent la membrane biologique, notamment via le port aqueux de la protéine canal. Ainsi, (Madara et al., 1985) ont montré dès 1985 que la résistance électrique semblait dépendre de l'intégrité des protéines transmembranaires impliquées dans les jonctions serrées. Ainsi, la variation de la conductance est généralement attribuée à des changements dans la voie paracellulaire et représente un bon indicateur du passage passif des électrolytes au travers de l’épithélium. En conclusion, la ddp et l’Isc sont les deux paramètres électriques qui représentent plus particulièrement le transport transcellulaire, tandis que la variation de la conductance correspond plutôt à des modifications de la voie paracellulaire et à l'établissement de transports d’électrolytes via les jonctions serrées (Griesmard, 1994).

La conductance membranaire (G), ou sa réciproque (R), est une grandeur qui caractérise la perméabilité hydroélectrique du tissu et donc son intégrité physique. A ce titre, il constitue un bon indicateur, déterminable en temps réel, de l’intégrité des tissus et peut aussi être utile pour distinguer le mécanisme d’action et les effets non spécifiques directs des molécules sur les tissus étudiés, par exemple les effets des réactifs utilisés dans les études de passage de molécules d'intérêt (Caraballo et al., 2011; Clarke, 2009).

3.3.3. Intérêts et applications de la mesure des paramètres électrique Isc, ddp,

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