• Aucun résultat trouvé

Section 1.2. Revue de littérature sur les facteurs explicatifs des fraudes sur factures

1.2.2. Application des Droits de douane élevés

40 En effet, les statistiques « Miroir » ont plusieurs fois été utilisées pour examiner la fraude douanière12 et d'autres régimes de contrebande dans le commerce, et ces facteurs n’ont pas suffi à expliquer certaines des différences dans les statistiques du commerce international (Fisman et Wei, 2007; Berger et Nitsch, 2008). Il est alors évident que même si on évoque les erreurs humaines ou encore le coût du transport entre pays partenaires commerciaux, ces raisons n’expliquent pas à elles seules la croissance des divergences dans le commerce international ; car les différences de comparaison sont très importantes. Des études suggèrent de ce point de vue que la hausse des tarifs et de la corruption globale dans un pays sont en corrélation avec des écarts plus importants entre les statistiques du commerce bilatéral et constituent donc des facteurs de fraude sur facture dans le commerce (Javorcik et Narciso, 2007, 2017; Berger et Nitsch, 2008). Nous examinons dans la suite l’effet des droits de douanes élevés sur la fraude sur facture.

1.2.2. Application des Droits de douane élevés

L'incitation à éviter de payer des taxes en réponse à une pression fiscale accrue a été reconnue depuis les travaux de Bhagwati (1964, 1967) comme principale cause de l’activité illégale. Le niveau de taux d'imposition est liée à la sécurité de la base d'imposition, donc plus grandes sont les taxes, plus grand est le risque pour la base. Selon Gutmann (1977), des impôts plus élevés proviennent de plus en plus de l'économie souterraine, au-delà de la portée du collecteur d'impôts. De même, pour Norton (1987), l'augmentation du taux de droit de douane reflète, non seulement les écarts de prix entre pays transfrontaliers, mais aussi induit un niveau important de contrebande dans l’économie.

Le signe de la relation entre le niveau du taux d'imposition et le montant des revenus déclarés par le contribuable, cependant, est la question toujours pas résolue de façon satisfaisante. Dans le modèle pionnier d’Allingham et Sandmo (1972), la relation entre les taux d'imposition et l'évasion est ambiguë, et dépend de la dérivée troisième de la fonction d'utilité. Ils montrent que pour une maximisation individuelle neutre au risque de l'utilité espérée

12

Les problèmes d'évasion fiscale et tarifaire sont étudiés dans le cas de nombreux pays, tels que l'Allemagne et 10 pays d'Europe de l'Est (Javorcik et Narciso, 2008), l'Inde (Mishra et al., 2008), le Mozambique (Dunem et Arndt, 2009), Tanzanie (Levin et Widell, 2014), Autriche (Berger et al., 2016), Chine et Hong Kong (Fisman et al., 2008), Chine (Rotunno et Vezina, 2012), Amérique et Chine (Ferrantino et al., 2012), l'Afrique du Sud (Sequeira, 2016) et 15 pays qui ont rejoint l'OMC (Javorcik et Narciso, 2017).

41 implique que l’évasion aura tendance à augmenter avec le taux marginal d'imposition, lorsque l'aversion au risque est permise. Cependant, ils concluent qu’aucune hypothèse claire n’émerge quant à la relation entre le taux d'impôt régulier et le revenu déclaré. En résumé de cette analyse, Yitzhaki (1974) montre que le taux d'imposition du modèle de Allingham et Sandmo (1972) a un effet de substitution favorisant l'évasion et un effet décourageant sur le revenu et que l’effet net est incertain. Bien que l'ambiguïté théorique de la relation entre les taux d'imposition et l'évasion, Bhagwati (1964) lie explicitement les écarts entre les données d'importation de la Turquie et les données d'exportation de ses pays partenaires et suggère que les écarts entre les importations et les exportations correspondantes de ces pays peuvent être expliqués par la sous-évaluation ou une mauvaise classification des importations à la frontière dans le but de réduire les charges tarifaires. Ainsi, l’auteur en analysant les données du commerce de la Turquie et de ses principaux partenaires commerciaux trouve une forte indication pour la sous-facturation des importations dans les équipements de transport et machines et que ces deux catégories de produits disposent des tarifs élevés.

Pour tester les hypothèses théoriques sur les déterminants de falsifications des transactions commerciales, une littérature théorique a émergé en utilisant principalement l'écart du commerce calculé à partir des données de balance des paiements pour mesurer l'étendue des falsifications des transactions commerciales. McDonald (1985) analyse le rapport de divergence entre pays en développement et pays industrialisés et constate que la sous-facturation de l’exportation est corrélée positivement avec les taxes à l'exportation et la prime du marché noir.

Yeats (1990) quant à lui constate que les données commerciales des pays africains indiquent que les activités de contrebande à grande échelle varient en fonction de la catégorie de produit. Plus récemment, Fisman et Wei (2004) examinent l'écart des importations de la Chine en provenance de Hong Kong et conclut que la sous-déclaration des valeurs d'importation et les erreurs d'étiquetage des produits les plus taxés sont très répandues que ceux qui sont moins taxées. Egalement, Fisman et Wei (2007) analysent le commerce illégal de biens culturels et trouvent que les falsifications dans ces produits sont fortement corrélées à l'étendue de la corruption dans le pays exportateur, une constatation confirmée par Berger et Nitsch (2008) en utilisant un ensemble étendu de catégories de produits. Farzanegan (2008) applique une approche de multiples indicateurs, multiples causes (MIMIC) pour étudier les déterminants et l’ampleur du commerce illégal ben Iran. Il constate que les falsifications des transactions commerciales en Iran varient entre 6 et 25 % du total des échanges de la période

42 1970-2002. Cependant, pour les PED, il s’avère que ce type de contrebande bien existant est sous-estimé en raison du manque de données des services des douanes (Golub, 2012, Benjamin et Mbaye, 2012).

Néanmoins, il ressort clairement de ces travaux qu’il y a une relation positive entre la fraude sur facture et le niveau des taxes (Bhagwati, 1964) en ce sens que l’ampleur des fraudes sur facture est en majeur partie du temps due à la hausse des droits de douane, ce qui conduit d’une certaine manière à la perte en recette fiscale.

Pritchett et Sethi (1994) examinent la corrélation entre les taux tarifaires en utilisant les données de la Jamaïque, du Kenya, et du Pakistan et trouvent une faible relation entre les taux

de facto tarifaires obtenus en divisant les recettes tarifaires avec la valeur des importations

pour chaque produit, et les taux légaux. Cette relation non linéaire entre les taux collectés et les taux tarifaires légaux indique que les incitations pour fausses déclarations augmentent avec un taux de droit de douane plus élevé. Fisman et Wei (2004) examinent les données commerciales bilatérales entre Hong Kong et la Chine dans une tentative d'identifier l'effet de l'impôt sur l'évasion fiscale, et ils notent que l'écart de l'évasion est fortement corrélée avec les taux d'imposition. Selon leur conclusion, des baisses tarifaires, en particulier pour les articles fortement taxés, se traduiraient par une augmentation substantielle des revenus. Ils concluent que, les pratiques telles que la sous-facturation des valeurs unitaires à l’importation et les erreurs d’enregistrement sur produits plus taxés, comme sur les produits des catégories moins taxées sont très répandues.

Van Dunem et Arndt (2009) en utilisant la même approche pour le cas du Mozambique, trouvent que pour une augmentation de 1 point de taux d’imposition, l’évasion fiscale augmente de 1,4%. Cette élasticité trouvée représente environ la moitié de celle trouvée dans le cas de la Chine. En appliquant la même approche du commerce entre l'Allemagne et dix États d'Europe orientale de 1992-2007, Javorcik et Narciso (2008) soutiennent l'hypothèse selon laquelle, le niveau des tarifs plus élevé stimule des niveaux plus élevés de fraude douanière avec des élasticités estimées qui ont tendance à être plus faibles que ceux trouvés par Fisman et Wei (2004). Javorcik et Narciso (2008) montrent également que la relation entre le ratio des écarts aux droits de douane est plus forte pour les produits différenciés. Ils montrent par-là, la grande facilité à cacher la valeur réelle des biens quand ils sont différenciés, comme l’a suggéré Bhagwati (1967).

43 Ces études empiriques suggèrent que les fraudes en raison de droits de douane élevés ne sont pas spécifiques à quelques pays. Toutefois, étant donné la nature des importations et des données d'exportation, l'hypothèse de déficit commercial (fraude douanière) implique que dans les pays avec des tarifs élevés, les commerçants auraient tendance à sous-évaluer la valeur des importations et à signaler la véritable valeur des exportations au pays d'origine (Epaphra, 2015).

Documents relatifs