• Aucun résultat trouvé

Application des méthodes empiriques aux boues résiduaires

J. C Baudez et al [52] ont appliqué la méthode d’adimensionnalisation développée par P Coussot [53] sur les rhéogrammes obtenus par la rhéométrie rotative Pour une boue

2.8.2 Application des méthodes empiriques aux boues résiduaires

J.C. Baudez et al. [52] ont appliqué la méthode d’adimensionnalisation développée par P. Coussot [53] sur les rhéogrammes obtenus par la rhéométrie rotative. Pour une boue activée (de siccité d’environ 15%) prémalaxée et ensuite stockée pendant différentes durées, les rhéogrammes peuvent tous être représentés par le modèle de Herschel- Bulkley. Compte tenu de cette similarité de comportement, les termes de contrainte et de taux de cisaillement sont adimensionnalisés par le seuil de contrainte et la viscosité de référence (la viscosité du liquide interstitiel). Les comportements rhéologiques des boues vieillies (de 0 à 65 jours de stockage anaérobique) se rassemblent finalement sur une même courbe maîtresse, représentée par un modèle de Herschel-Bulkley adimensionnel. Cette courbe peut être utilisée pour prédire le comportement d’une boue vieillie sur la base de son comportement au début du stockage. J.C. Baudez et al. [54] ont ensuite appliqué cette méthode d’adimensionnalisation à différentes boues prémalaxées d’origines différentes et de différentes siccités (de 5% à 15%). La nouvelle courbe maîtresse obtenue peut prédire le rhéogramme d’une boue, en connaissant sa siccité et son seuil de contrainte. J. Jiang et al. [50] ont aussi obtenu une courbe similaire pour une boue digérée et concentrée, dont la siccité variait de 8 à 16%. Cependant, cette méthode d’adimensionnalisation ne peut pas être extrapolée aux boues de plus haute siccité, car des fractures sont observées lors du cisaillement du matériau par le rhéomètre [52]. Par conséquent, cette méthode s’applique aussi aux boues fluides exclusivement.

N. Tixier et al. [55-56] ont développé une méthode basée sur une boucle d’hystérésis, pour caractériser la propriété thixotropique des boues en fonction de la siccité et de la quantité des microorganismes filamenteux. Le protocole mis en œuvre sur un rhéomètre à cylindres coaxiaux est le suivant : une augmentation linéaire de la vitesse de cisaillement, ensuite un maintien de la vitesse de cisaillement constante, et finalement une diminution linéaire de la vitesse de cisaillement. La surface d’hystérésis est la surface entourée par ces trois courbes de la contrainte en fonction de la vitesse de cisaillement. La valeur de ce paramètre traduit l’intensité de la propriété thixotropique du matériau. Les auteurs ont constaté qu’une boue filamenteuse de très basse siccité (<1%) se montrait très thixotropique. La quantité des microorganismes filamenteux a aussi un effet très important sur les propriétés rhéologiques des boues.

C. Segalen et al. [57-58] ont combiné les caractérisations électrique et rhéologique sur les boues activées (concentrées ou déstructurées de siccité entre 3 et 17,6%) pour identifier les effets de la siccité, de la structure et de la température. La conductivité et le module de stockage G’ mesurés en fonction de la siccité ont, tous les deux, montré un changement de régime : passage d’un régime liquide à un régime solide pour un seuil de siccité à 3%. Les propriétés électriques des boues peuvent être les indicateurs de ses propriétés rhéologiques. Toutefois, à l’heure actuelle, il est encore difficile d’établir des corrélations pour les boues ayant la particularité liquid-like ou solid-like.

2.8.2 Application des méthodes empiriques aux boues résiduaires

Les boues concentrées sont très similaires à des sols mouillés. Les méthodes empiriques développées dans le domaine de la mécanique des sols sont aussi utilisées pour caractériser le comportement mécanique des boues.

2.8.2.1 Limites d’Atterberg

Les limites d’Atterberg sont les indices primordiaux pour déterminer l’état physique et pour évaluer les propriétés mécanique et géotechnique des boues de haute siccité (entre 42 et 56%), notamment en vue d’un épandage ou d’un enfouissement [59-61]. La différence absolue entre les limites de liquidité et de plasticité est dite l’indice de plasticité. La valeur de cet indice montre que les boues sont similaires aux argiles de haute plasticité selon le Système de Classification des Sols Britannique.

K. Wichmann et A. Riehl [62] ont utilisé les méthodes de caractérisation développées en mécanique des sols pour déterminer les propriétés mécaniques de boues industrielles. Les auteurs ont en particulier mesuré la plasticité (limites d’Atterberg) par les dispositifs de Casagrande, la solidité à l’aide d’un scissomètre et d’un pénétromètre et le niveau de consolidation par l’œdomètre. L’objectif de ces travaux était de contrôler et de garantir le comportement mécanique et rhéologique au cours de la valorisation, comme par exemple lors de l’enfouissement. Les auteurs ont prouvé que le scissomètre et le pénétromètre étaient les méthodes pertinentes et fiables pour mesurer la solidité des boues de haute siccité au laboratoire et sur terrain.

T. Ruiz et al. [63-65] ont aussi mesuré ces limites pour étudier le potentiel de déshydratation des boues par l’évaluation de la distribution de l’eau (hydro-texture). Ils ont caractérisé trois types de boues digérées et déshydratées. En adoptant la méthode normalisée de mesure des limites d’Atterberg, ils ont déterminé les limites de liquidité SL et de plasticité SP des boues, Tableau 2-1.

Les limites d’Atterberg mesurées, pour les trois types de boues, varient beaucoup en fonction de la distribution de l’eau, de la teneur en matière volatile et des traitements que subissent les boues. Cela nous indique que la caractérisation rhéologique des boues ne dépend pas seulement de ses propres propriétés physiques, mais encore des caractéristiques du procédé de traitement envisagé. La limite de plasticité Sp nous sera

utile pour justifier si le matériau peut être considéré comme un milieu continu.

Boues Digestion Procédés de déshydratation MO/MS Sini SL SP Seaulibre Ssolidedur

1 anaérobie convection 53% 20,6% 21% 38% 65% 71%

2 anaérobie filtre-presse 59% 25,3% 29% 50% 52% -

3 aérobie filtre-presse 75% 13,4% 16% 42% 43% -

Tableau 2-1: Récapitulation des résultats de T. Ruiz et al. [63-64] : MO/MS pourcentage

massique de matière organique dans matière sèche ; Sini siccité initiale de boues

centrifugées ; Seaulibre siccité au dessus de laquelle il n’y a plus d’eau libre (liquide

interstitiel) et Ssolidedur siccité à partir de laquelle le volume des boues ne diminue plus

2.8.2.2 Test d’affaissement modifié en estimation du seuil d’écoulement des boues

Le test d’affaissement était initialement conçu avec une forme conique, Figure 2-32, pour évaluer la maniabilité du béton en génie civil. N. Pashias et al. [66] ont remplacé la forme conique par une forme cylindrique pour adapter le dispositif à la mesure du seuil d’écoulement des suspensions. J.C. Baudez, et al. [54] [67] ont emprunté le test d’affaissement de N. Pashias pour la détermination du seuil d’écoulement des boues résiduaires urbaines directement sur le site de la station d’épuration. Il a été appliqué aux boues ayant des siccités entre 5 et 15%. Pour les boues difficiles à mettre en écoulement, une charge verticale a été ajoutée au-dessus de l’échantillon cylindrique afin de forcer les boues à s’écouler, Figure 2-34. La confrontation avec les résultats obtenus par la rhéométrie conventionnelle s’est avérée très satisfaisante. Ce test est très pratique pour évaluer le comportement rhéologique des boues in situ.

Figure 2-34: Test d’affaissement modifié par Baudez, J. et al. [54] pour étudier le

comportement rhéologique des boues résiduaires urbaines de siccité de 5 à 15%

Lors de l’ajout de la charge verticale, si l’échantillon cylindrique se déforme et s’élargit, le produit peut s’écouler très lentement avec un seuil de contrainte limite. Au contraire, si l’échantillon cylindrique se déforme quasi uniformément et garde sa forme cylindrique, le produit est à l’état solide. 2.8.3 Facteurs d’impact sur les propriétés rhéologiques des boues Les propriétés rhéologiques sont fortement dépendantes de 4 facteurs principaux : - la teneur en solide, qui modifie l’état physique des boues ; - la microstructure, qui fixe la distribution de l’eau au sein des boues ; - la composition, qui contribue à la microstructure des boues ;

- et la température, qui rend les boues plus ou moins visqueuses selon leurs histoires thermiques.

Parmi ces facteurs, la siccité est considérée comme le facteur le plus important dans les études sur le comportement rhéologique des boues.

2.8.3.1 Impact de la siccité

Avec l’augmentation de siccité, les boues se comportent d’abord comme un liquide newtonien, ensuite comme un liquide non-newtonien, puis comme un fluide à seuil, un solide mou et enfin comme un solide dur. Ce changement de l’état fluide à l’état solide dépend fortement et simultanément de la composition, de la siccité et de la morphologie des solides contenus dans les boues. Ainsi, pour une même boue dans les mêmes conditions de mesure, l’augmentation de la siccité fait augmenter le module élastique, la viscosité et le seuil de contrainte, ce qui rend la boue de plus en plus difficile à s’écouler [37-39,41-42, 44-48, 50-52, 55-58, 68-69].

2.8.3.2 Impact de la microstructure

L’impact de la microstructure des boues se traduit directement par la distribution de l’eau, qui décide à la fois des interactions entre les particules floculées et la consistance des flocs. Pour une boue concentrée, les interactions et la consistance des flocs sont responsables de son comportement rhéologique. Les impacts de la fraction de matière organique, du vieillissement et du malaxage trouvent tous leur origine à la modification de la distribution de l’eau dans les boues [17, 39, 46-47, 51, 55-58, 63-65, 68, 70-73]. C’est la raison pour laquelle, l’impact de la microstructure est considéré comme le deuxième facteur le plus influent sur les propriétés rhéologiques des boues concentrées.

2.8.3.3 Impact de la composition

La composition des boues dépend fortement des procédés mis en œuvre dans la station d’épuration. Cette composition des boues résiduaires urbaines est très similaire à celle des sols, même si les proportions sont différentes [60] [65] [74]. Les matières organiques contribuent le plus au comportement viscoélastique des boues [46-47, 52, 69, 75-84]. La dégradation des matières organiques conduit à une diminution de la viscosité. C’est aussi la raison pour laquelle le vieillissement est un facteur non négligeable à prendre en compte lors de la caractérisation rhéologique des boues.

2.8.3.4 Impact de la température

Les propriétés rhéologiques des boues peuvent être également modifiées par un changement de température. Le comportement rhéologique est, en plus, dépendant non seulement de la température, mais aussi de l’histoire thermique du produit [39, 50-51, 58, 70, 73, 83, 85-92]. L’échauffement ou la surgélation peuvent diminuer la viscosité, le seuil d’écoulement et la consistance de la structure des flocs et rendre les boues plus faciles à s’écouler. Après le retour à température initiale, les boues ne retrouvent pas leurs propriétés initiales : il s’agit donc d’une modification irréversible.