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Partie III : Les antigènes tumoraux

B. Les antigènes codés par des gènes viraux ou mutés

Les antigènes viraux résultent d'infections virales associées aux cancers. Les cancers

d’origine virale expriment des protéines dérivées de virus pouvant être reconnues par le

système immunitaire (Figure 15). Dans le cancer du col de l’utérus, ou les cancers

ano-génitaux en général, on peut citer l’exemple des oncoprotéines E6 et E7 issues du virus HPV

(Human Papilloma Virus)

294–296

. Les peptides dérivés de l'oncoprotéine E7 peuvent être

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présentés par les molécules HLA-A2 à des LTC. On peut également citer l’exemple des

infections dues à l’EBV (Epstein-Barr Virus) associées à certains lymphomes

297,298

.

2. Antigènes codés par des gènes mutés ou

néoantigènes

Les néoantigènes proviennent généralement de mutations ponctuelles

299

, de mutations

décalant le cadre de lecture

300

ou de translocations chromosomiques produisant des protéines

de fusion

301

. Ces antigènes sont hautement spécifiques des cellules tumorales portant les

altérations géniques dont ils dérivent.

Un grand nombre de LTC isolés à partir du sang ou de tumeurs de patients atteints de

cancer sont capables de reconnaître des antigènes qui résultent de mutations ponctuelles de

gènes exprimés de manière ubiquitaire

302–305

. Dans la plupart de ces cas, la mutation change

un acide aminé dans la séquence peptidique, ce qui permet à un peptide muté de se lier à une

molécule du CMH de classe I et de créer un nouveau déterminant antigénique qui est reconnu

par des LTC (Figure 15).

Les mutations provoquant un décalage du cadre de lecture, peuvent également

conduire à la production de nouveaux peptides antigéniques

306,307

. Par exemple, dans les

cancers colorectaux à instabilité microsatellitaire, la perte de fonction du système MMR (DNA

Mismatch Repair system) peut conduire à des insertions ou délétions au niveau de courtes

séquences répétées codantes de l’ADN, engendrant un décalage du cadre de lecture et la

génération de nouvelles protéines

300

. Le premier néoantigène de ce type à avoir été décrit

comme immunogène est issu de la mutation (-1) du gène codant le récepteur du TGF-β de

type II (TGFβRII (-1)). Cette mutation se produit dans une séquence polyA (10 résidus

Adénine) de l’exon 3 du gène TGFβRII

307

.

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Figure 15 : Les antigènes tumoraux reconnus par les lymphocytes T cytotoxiques

Les antigènes tumoraux sont classés selon le profil d'expression du gène dont ils dérivent. La production de peptides antigéniques par les cellules tumorales (panneau supérieur) et par les cellules normales (panneau inférieur) est représentée. Les antigènes viraux sont exprimés uniquement dans des cellules infectées par un virus (première colonne à gauche). Les antigènes dérivés de gènes mutés peuvent générer un peptide modifié capable de se lier aux molécules HLA de classe I tandis que le peptide de type sauvage ne peut pas se lier (deuxième colonne à gauche). La mutation peut également modifier un peptide capable de se lier aux molécules HLA de classe I, de sorte que ce peptide modifié soit reconnu comme du non-soi par les lymphocytes T cytotoxiques circulants. Les antigènes tumoraux dérivés de gènes de la lignée germinale sont exprimés dans les tumeurs ou les cellules de la lignée germinale à la suite d’une déméthylation du génome (colonne du milieu). Par exemple, les antigènes de la famille MAGE (Melanoma-Associated Antigen) ne sont pas exprimés à la surface des cellules saines ni sur les cellules de la lignée germinale qui n’expriment pas de molécules HLA. Les antigènes de différenciation sont codés par des gènes ayant une expression tissu-spécifique (deuxième colonne à droite). Ils sont donc exprimés par certains types de tumeurs et les tissus sains correspondants. Certains gènes sont surexprimés dans des tumeurs en raison de l'augmentation de la transcription ou de l'amplification de ces gènes. Les peptides résultants sont fortement exprimés par les tumeurs, mais présentent également un faible niveau d'expression dans des tissus sains. D’après Nathalie Vigneron. BioMed Res Int, 948501 (2015)

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Méthodes d’identification des antigènes et des épitopes tumoraux

Les cellules tumorales diffèrent des cellules normales par l'expression d’antigènes

spécifiques de la tumeur ou d’antigènes associés à la tumeur. Ces antigènes sont reconnus par

le système immunitaire du patient et peuvent être la cible de réponses immunitaires humorales

et cellulaires. La plupart de ces antigènes sont exprimés dans le cytosol ou dans des organelles

des cellules, et ne sont donc pas principalement ciblés par des anticorps. Ces protéines

antigéniques sont donc dégradées et présentées via les molécules du CMH-I ou du CMH-II

sous forme de peptides à la surface des cellules tumorales et des CPA, aux LT CD8 et aux LT

CD4. Si le peptide lié à une molécule HLA à la surface d’une cellule tumorale est reconnu

spécifiquement par le TCR d’un LTC activé, une cascade de signaux apoptotiques ainsi que la

sécrétion de diverses cytokines seront initiées, conduisant à la mort de cette cellule tumorale.

De tels antigènes tumoraux représentent donc des cibles potentielles pour le développement

de nouvelles stratégies d’immunothérapie. En effet, la sélection des antigènes tumoraux les

plus immunogènes, impliqués dans la carcinogénèse, spécifiques de la tumeur, exprimés à un

haut niveau par les cellules tumorales et partagés par de nombreux patients est un critère très

important pour le développement de meilleures stratégies d’immunothérapie

308

. Il existe

différentes approches pour identifier ces antigènes cibles d’intérêt thérapeutique, certaines de

ces approches pouvant être complémentaires. Les quatre grandes approches expérimentales

d’identification des antigènes et des épitopes tumoraux communément utilisées sont : (1)

l’approche « génétique », (2) l’approche sérologique, (3) l’approche de l’« immunologie

inverse » et (4) l’approche « directe » ou « cellulaire ».