• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE IV : ETUDE DU LIANT NiAl 2 O 4

II. REACTIVITE DU LIANT (1)

II.1. Analyse des résultats de la série de tests I-2

La réactivité de l'aluminate de nickel vis-à-vis de l’oxydation du CO étant avérée, il est nécessaire d'étudier les performances de ce liant afin de pouvoir estimer sa contribution au sein du transporteur d'oxygène (NiO/NiAl2O4) et ce, dans différentes conditions de fonctionnement. Un plan d'expériences (plan composite centré) a donc été mis en place pour réaliser des mesures de la capacité du liant avec un minimum de cycles d'oxydation-réduction (à différentes températures et à différentes concentrations de CO) permettant d’accéder à un maximum d’informations (série de tests I-2).

Les plans composites centrés sont des plans d’expériences permettant d'obtenir des informations sur l'influence des paramètres opératoires sur un processus donné, à travers une description quadratique. Ils ont été utilisés et appliqués dans de nombreux domaines202, 203. Dans ce cas précis, l'influence de deux paramètres opératoires (température et concentration de CO injecté) sur la capacité totale de réduction du liant (1) a été étudiée. Les conditions opératoires ont été fixées suivant une plage de température allant de 700 °C à 900 °C (domaine de température de fonctionnement des transporteurs d’oxygène) et de concentration de CO allant de 0,1 à 1% volumique (limitation à 1% volumique en CO, du fait de la gamme de l’analyseur de gaz utilisé).

Le choix des niveaux des paramètres de chaque test expérimental est déterminé de manière à optimiser le nombre et la pertinence des essais. Pour pouvoir comparer les effets et interactions des différents paramètres entre eux, les paramètres sont normés (-1 niveau minimal, +1 niveau maximal) dans le domaine d’étude.

Ce plan est constitué de trois parties:

- Le point au centre du domaine expérimental, noté par 0 et répété plusieurs fois (n0) pour estimer la variance de répétabilité. Les valeurs de chaque facteur de ce point

- 154 -

correspondent à la valeur moyenne du domaine étudié (voir Figure IV.3, point rouge). - Un plan factoriel orthogonal, qui combine des facteurs à 2 niveaux usuellement notés +1 et -1 (points verts sur la Figure IV.3).

- Un ensemble de points dits "en étoile", identiques au point central excepté pour un paramètre qui prend une valeur en dehors du domaine d'étude, ils sont usuellement notés +α et -α (points violets sur la Figure IV.3).

La valeur de α est estimée à partir de l'expression suivante : α= (2nombre de facteurs) 0,25, dans ce cas le nombre de paramètres est égale à deux, donc 2.

Figure IV.3 : Plan composite centré à 2 variables pour l'étude de la réactivité du liant (1).

Le plan d'expériences utilisé détermine 9 points d'étude (pour 2 facteurs étudiés), au cours desquels les paramètres varient et les différentes réponses sont obtenues. Le modèle recherché pour cette étude est le suivant :

𝑅é𝑝𝑜𝑛𝑠𝑒 = 𝑎0+ 𝑎1𝑇 + 𝑎2[𝐶𝑂] + 𝑏1𝑇[𝐶𝑂] + +𝑏2𝑇2+ 𝑏3[𝐶𝑂]2 (éq. IV.I)

Le plan composite centré permet l'estimation des 6 coefficients (a0, a1, a2, b1, b2, b3), moyennant une approximation polynomiale qui est réalisée par minimisation des écarts quadratiques entre les réponses expérimentale et la réponse polynomiale. De cette manière, une équation est obtenue à partir de laquelle la réponse (capacité totale de réduction, par exemple) peut être estimée à partir des facteurs étudiés (T et [CO]).

(800, 0,55) (871, 0,87) (900, 0,55) (871, 0,23) (800, 1,00) (800, 0,10) (729, 0,87) (700, 0,55) (729, 0,23)

- 155 -

Les conditions opératoires utilisées pour chaque point d'étude sont prédéfinies par le plan composite centré décrit précédemment. Le réacteur utilisé pour ces essais est celui de diamètre 6 mm, une masse de 0,20 g de liant (1) (hauteur du lit 5 mm) est introduite dans le réacteur et l'oxydation se réalise en montée de température (de Tamb à Tfonctionnement, rampe de 10 °C min-1). Il a été décidé de réaliser les essais avec une épaisseur de lit constante afin de minimiser l'influence de la dynamique entre les différents essais. Tous les essais ont été réalisés sur le même échantillon (différent de celui de la série I-1), du fait de la très petite quantité d’aluminate disponible qui nous a empêchés de changer d’échantillon pour chaque condition de test. De plus, il a été choisi de commencer les essais par ceux aux plus basses températures, pour éviter les possibles modifications de performances du liant dues au fonctionnement à haute température. Chaque point a été expérimentalement doublé, afin de s'assurer de la répétabilité de chaque essai.

Le Tableau IV.3 présente les résultats obtenus au cours de ces essais : la capacité totale de réduction du liant correspondant au nombre de moles de CO2 produites (ou de moles de CO oxydées) au cours de la réduction par gramme de liant introduit. Elle est obtenue à partir de l’intégration des deux courbes de percée (concentrations en CO et CO2 au cours du temps). Le temps de croisement correspond au temps auquel la concentration de CO est la moitié de celle introduite (elle correspond également à l'intersection des courbes de percée de CO et de CO2).

- 156 -

Tableau IV.3 : Valeurs expérimentales de capacité totale de réduction et du temps

d'intersection en fonction des températures de fonctionnement et concentrations de CO injectées. Tests Température (°C) Concentration de CO injecté (% vol.) CO2 produit (mol g-1) Temps d'intersection (s) 1-2 700 0,55 9,85 10-4 55 3-4 729 0,23 1,18 10-3 92 5-6 729 0,87 1,17 10-3 42 7-8 800 0,10 1,78 10-3 430 9-10 800 0,55 1,54 10-3 76 11-12 800 1,00 1,71 10-3 53 13-14 871 0,23 2,01 10-3 168 15-16 871 0,87 1,97 10-3 74 17-18 900 0,55 2,20 10-3 126

Les résultats indiqués sur le Tableau IV.3 montrent que le liant (NiAl2O4) réagit avec le monoxyde de carbone injecté pour former CO2. La quantité de dioxyde de carbone produite au cours des cycles de réduction n'est pas négligeable et augmente (2,2 fois plus important) au cours des cycles (1 au 18) et donc, avec la température. Les traces de NiO observées au cours de la caractérisation des échantillons par DRX, ne peuvent pas expliquer une telle capacité d'oxydation du CO. De plus, cette augmentation de la capacité de réduction devrait certainement se traduire par un changement structural du liant au cours des cycles, qui sera étudié en détail ultérieurement.

La quantité totale d'oxygène présente sur l'aluminate de nickel est approximativement égale à 2,26 10-2 mol g-1. Comme le réseau d'alumine (Al2O3) est stable et inerte à haute température, il a été considéré que seulement un quart de l'oxygène de l'aluminate de nickel NiAl2O4 pouvait réagir avec CO pour probablement former du nickel métallique. En prenant en compte ces considérations, la comparaison de la quantité de CO2 produite par rapport à la quantité d'oxygène potentiellement réactive dans l'aluminate de nickel, montre qu'une forte proportion d'oxygène a réagi avec CO pour former du CO2. Cette proportion d'oxygène qui a

- 157 -

réagi au cours de la réduction, est égale à 17% au cours du premier cycle, et atteint 38% pour les derniers cycles (17 et 18).

La Figure IV.4 représente les courbes de percée de CO et de CO2 au cours de la réduction à trois températures différentes (correspondant aux cycles 1, 9 et 17). Pour les trois cycles la concentration de CO injecté est égale à 0,55% volumique et les températures sont respectivement de 700 °C, 800 °C et 900 °C.

Figure IV.4 : Evolution de la concentration de CO et CO2 enfonction du temps, pour trois cycles réalisés à différentes températures (0,55 % vol. de CO,50 NL h-1).

Les résultats représentés sur la Figure IV.4 montrent que l’allure des courbes est différente en fonction de la température de réduction. Le temps de croisement augmente avec la température (voir aussi Tableau IV.3). De plus, après 500 secondes de réduction à 900 °C, une production significative de CO2 est encore observée, ce qui n'est pas le cas à 700 °C et 800 °C. Donc, à haute température (900 °C) le liant semble être moins stable en présence de CO. Au début du cycle de réduction à 900 °C (pendant les 30 premières secondes), une quantité de CO non négligeable (plusieurs centaines de ppm) ne réagit pas avec le liant et est directement réémise en sortie de réacteur. Ce phénomène n’est pas observé à 700 et 800 °C.

- 158 -

Une limitation thermodynamique pourrait expliquer cette concentration de CO sortante du réacteur sans réagir en tout début de cycle. En effet, lorsque la température est élevée, la concentration en CO2 maximale et celle de CO minimale, la réaction de décomposition de l’aluminate de nickel pour former NiO et Al2O3 est limitée thermodynamiquement.

Deux tests additionnels (cycles 19 et 20) ont été réalisés dans les mêmes conditions de fonctionnement que celles des cycles 1 et 2, afin de vérifier les possibles variations de performances du liant dues au traitement à haute température. Les concentrations de CO et de CO2 au cours des cycles de réduction 1 et 19 sont représentées sur la Figure IV.5.

Figure IV.5 : Profils de concentrations de CO et de CO2 en fonction du temps pour les cycles 1 et 19, réalisés dans les mêmes conditions de fonctionnement (700 °C, 0,5% vol. de CO, 50

NL h-1).

Les courbes de percée de ces deux essais réalisés dans les mêmes conditions sont très différentes ce qui indique que les performances du liant ont été modifiées au cours des cycles d'oxydation et de réduction précédents. En effet, le temps d'intersection a augmenté (voir Tableau IV.4), il est égal à 55 secondes pour le cycle 1, et à 150 secondes pour le cycle 19.

- 159 -

L'intégration des deux courbes de CO2 indique que la capacité de réduction du liant pendant le cycle 19 (2,55 10-3 mol g-1) est 2,6 fois plus élevée que celle du cycle 1 (9,85 10-4 mol g-1). Ces résultats prouvent que les performances du liant évoluent au cours des cycles d'oxydation-réduction.

Tableau IV.4: Valeurs expérimentales de la capacité totale de réduction et du temps

d'intersection pour les cycles 1 et 19 réalisés dans les mêmes conditions.

Test Température de réduction (°C) Concentration de CO injecté (% vol.) CO2 produit (mol g-1) Temps d'intersection (s) 1 700 0,55 9,85 10-4 55 19 700 0,55 2,55 10-3 150

L'ensemble de ces essais montre d'une part que la capacité totale du liant semble évoluer avec la température et ce, visiblement irréversiblement, alors que pour une même température, elle ne semble pas ou peu évoluer. Comme cela a été décrit précédemment, l'utilisation d'un plan composite centré permet d'obtenir une équation quadratique décrivant la réponse étudiée. Les coefficients de cette équation montrent que la capacité augmente nettement avec la température et que l'effet de la concentration en CO est très faible. Toutefois, compte tenu de l'évolution des propriétés du matériau, cette équation n'est pas utilisable pour représenter mathématiquement l'évolution de la capacité totale de réduction du liant en fonction des paramètres de fonctionnement.