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Analyse des propriétés physiques et spectrales

Les spectres obtenus après réduction et calibration sont analysés au moyen de routines incluses dans la procédure SPLOT de IRAF. Le redshift est déterminé ici, avec naturellement plus de précision que celui de GALEX, par l’analyse de plusieurs signatures spectrales avec un bon rapport S/N. Les mesures des quantités spectrales qui suivent sont effectués sur les spectres ramenés à la longueur d’onde au repos. Le flux et la largeur équivalente sont mesurés pour les raies, lorsqu’elles sont observées, [Oii] 3727Å, [Oiii] 4959, 5007 Å, Hδ, Hγ, Hα, Hβ, [Nii] 6548, 6584 Å et [Sii] 6717, 6731 Å. Pour la plupart des spectres, la raie Hα (6563 Å) se mélange avec les raies [Nii] (6548 et 6584 Å), même pour le mode spectroscopique. Dans ce cas une procédure d’ajustement est employée dans SPLOT pour mesurer les flux séparément dans chaque raie avec la meilleure résolution. Le rapport [Nii]/Hα obtenu est ensuite utilisé pour corriger le flux Hα dans les observations utilisant une fente de 5′′. Parfois, il arrive également que des raies faibles ne soient détectées que dans le mode de plus haute résolution. Dans ce cas la photométrie de ces raies est déduite du rapport avec les raies plus fortes comme Hα.

Notre dernière préoccupation concerne l’absorption stellaire sous-jacente qui af-fecte les raies de recombinaison Balmer. Afin d’estimer cette contribution, nous avons ajusté la distribution d’énergie spectrale des galaxies par les modèles de synthèse spectrale Starburst 99 (Leitherer et al. 1999). Les spectres sont échantillonnés à intervalle régulier de longueur d’onde (35 Å) en prenant soin de masquer les raies d’émission (on rappelle qu’on essaie de modéliser ici la lumière des étoiles). Le mo-dèle donnant le meilleur ajustement est utilisé pour déterminer la largeur équivalente de l’absorption stellaire Hα et Hβ avec un profil de Voigt. Le flux correspondant (né-gatif pour l’absorption) est obtenu simplement en multipliant EW par le continu déterminé dans nos spectres. On en déduit les flux absolus (corrigés) Hα et Hβ en ajoutant ce flux confisqué par les étoiles au flux observé.

S’agissant des incertitudes, la procédure de mesure donne systématiquement l’er-reur à 1σ. La méthode est la suivante : l’erl’er-reur à 1σ est déterminé pour chaque pixel à partir du bruit observé dans les spectres2. Un modèle de bruit est alors construit suivant une statistique de Poisson, supposant que les sigma des pixels sont indé-pendants. Lors des mesures portant sur les raies d’émission, le simple ajustement ou bien la procédure de séparation des raies mélangées, constituent un modèle idéal (sans bruit). Mais à partir du modèle de bruit défini précédemment (bruit observé) nous allons pouvoir déduire les incertitudes sur l’ajustement. On effectue 1000 si-mulations Monte Carlo qui reproduisent le modèle d’ajustement idéal mais auquel on ajoute à chaque tirage un bruit aléatoire (distribution Gaussienne) basé sur le bruit observé. On obtient ainsi 1000 ajustements de la raie, et la déviation standard dans cet ensemble nous donne l’incertitude.

Finalement les incertitudes Monte Carlo déterminées dépendent essentiellement du rapport S/N des spectres. Suivant une propagation des erreurs déterminée dans

2Lors de la réduction et la calibration des données, à chaque spectre de galaxie est associé un spectre de bruit basé sur les erreurs de calibration, le fond de ciel etc.

cette section, toutes les quantités que nous allons calculer par la suite seront accom-pagnées de leurs incertitudes respectives.

5.2.2 Extinction

Nous nous intéressons dans cette section à l’extinction interne de la galaxie causée par la poussière interstellaire. La contribution de la poussière de notre Galaxie est négligeable car toutes les galaxies se trouvent à une très haute latitude Galactique. On quantifie ici l’extinction dans la phase gazeuse par le coefficient C(Hβ) qui peut être calculé à partir du décrément Balmer :

f (Hα)

f (Hβ) =R × 10−C[S(Hα)−S(Hβ)] (5.1)

f (Hα)

f (Hβ) est le rapport des flux mesurés, et R le rapport intrinsèque. On utilise ici la valeur canonique de R = 2.86 dans le cas B de la recombinaison (Osterbrock 1989). S(Hα) et S(Hβ) sont les valeurs de la courbe d’extinction à la longueur d’onde de Hα et Hβ respectivement. Selon la loi d’extinction de Seaton (1979), on adopte S(Hα) − S(Hβ) = −0.323. Le rougissement E(B − V ) peut être ensuite déduit en utilisant simplement l’équation 5.1 et la relation E(B − V ) = C/1.47. Le paramètre d’extinction traditionnel AV, qui quantifie l’extinction dans la bande V, est donné par le rapport moyen RV= AV/E(B − V ) = 3.2 (Seaton 1979).

5.2.3 Contribution des AGN

Si l’on veut discuter des propriétés des galaxies à travers les divers indicateurs de formation stellaire, il nous faut identifier les régions Hii qui sont excitées, non pas par le rayonnement d’étoiles chaudes, mais par un noyau actif. On procède à cette fin au diagnostic de l’état d’ionisation du gaz à travers les rapports des raies d’émission optiques. L’examen du rapport [Oiii] λ5007/Hβ versus [Nii] λ6584/Hα, connu sous le nom du diagramme BPT (Baldwin et al. 1981), permet de séparer l’ionisation d’un rayonnement stellaire et celle d’un rayonnement plus dur qui peut avoir pour origine un AGN ou un LINER (Low-Ionization Nuclear Emission Line). La physique qui sous-tend cette argumentation est, que le rayonnement provenant d’un AGN induit une excitation plus importante que celui des jeunes étoiles, et favoriser l’émission des raies collisionnelles aux dépends des raies de recombinaison. On va également utiliser un diagramme complémentaire, proposé à l’origine par Veilleux & Osterbrock (1987), pour ce diagnostic qui consiste à comparer [Oiii] λ5007/Hβ versus [Sii] (λ6717 + 6732)/Hα.

La figure 5.2 situe la position de nos galaxies dans ce diagramme, et ce en utilisant les rapports de raies corrigés de l’extinction, même si ces valeurs sont très peu sensibles à la poussière. Les incertitudes déterminées en Sect. 5.2.1 sont également présentées pour ces rapports. Nous avons inclus les starbursts locaux observés par IUE dans ce diagnostic pour comparaison. Comme attendu pour les starbursts, les galaxies se disposent le long d’une région relativement étroite, marquant leur

Fig.5.2: Classification des galaxies à raies d’émission étroites à l’aide du diagramme BPT. Les émetteurs Lyα GALEX sont représentés par les ronds noirs avec les barres d’erreur associées, alors que les losanges bleus sont les galaxies locales de l’échantillon IUE. A gauche : rapports [Oiii] λ5007/Hβ vs [Nii] λ6584/Hα. Les courbes continue et en tirets sont les limites théoriques séparant les starbursts des AGNs et supposent respectivement une formation stellaire continue (Kewley et al. 2001) ou une flambée instantanée (Dopita et al. 2000). La courbe en pointillés est la ligne de Kauffmann et al. (2003). A droite : diagnostic [Oiii] λ5007/Hβ vs [Sii] (λ6717 + 6732)/Hα, avec les mêmes délimitations théoriques que le panneau de gauche. Les courbes rouges montrent les incertitudes typiques des modèles à hauteur de 10%.

séparation des AGNs. Sur les deux figures, nous avons représenté les délimitations théoriques prédites par les modèles de photoionisation, qui placent les régions de formation stellaire dans le coin bas-gauche et les régions de type AGN dans le coin haut-droite. Sur la partie gauche de la figure, la courbe en tirets représente la limite supérieure pour les régions Hii en supposant une flambée instantanée de formation d’étoiles (Dopita et al. 2000), alors que la courbe en trait plein suppose un épisode étendu (plus de 4 − 5 Myr, Kewley et al. 2001). Analysant un large échantillon de galaxies du SDSS, Kauffmann et al. (2003) à revu cette limite à la baisse (courbe en pointillés). La partie droite de la figure présente également les démarcations de Dopita et Kewley pour le second diagnostic. Cependant ces modèles sont sujets à differentes sources d’erreur, à commencer par les hypothèses d’abondance chimique, de fonction de masse initiale (IMF) ou bien les modèles d’atmosphères stellaires. L’incertitude typique sur la limite indiquée avoisine les 10% (Kewley et al. 2001), et est représentée par les courbes rouges pour le diagramme [Oiii] λ5007/Hβ vs [Sii] (λ6717 + 6732)/Hα.

On peut constater que tous les objets GALEX, hormis un seul cas, se trouvent vers ou en dessous de la limite théorique. Cette tendance est très claire sur le dia-gramme de gauche [Oiii]/Hβ contre [Nii]/Hα, mais s’avère un peu moins limpide

pour le diagnostic [Oiii]/Hβ vs [Sii]/Hα, même si, dans tous les cas, cela reste compatible avec les incertitudes des observations et des modèles. Les incertitudes liées aux observations sont plus importantes dans le diagramme de gauche car les raies [Sii] ainsi que Hα sont décalées vers des longueurs d’onde très affectées par la brillance du fond ciel.

De plus, on a également vérifié la présence potentielle d’émission X significative dans nos objets ce qui impliquerait la présence d’un AGN. Seulement deux objets de notre échantillon possèdent des détections en rayonnement X dans les observations de Chandra. Par conséquent on peut émettre des réserves quant à la nature de la source d’ionisation pour trois objets au maximum. Cela représenterait 12.5 % de notre échantillon, qu’on peut comparer à la fraction typique d’AGN (∼ 0 − 5 % ou plus) trouvée dans les études de LAEs à grand redshift (Wang et al. 2004; Gawiser et al. 2006, 2007; Nilsson et al. 2008; Ouchi et al. 2008b).

5.3 La physique de Lyα selon le redshift

5.3.1 Largeur équivalente Lyα

Dans la section 5.2.2 nous avons calculé l’extinction qui affecte l’émission né-bulaire dans les objets à z ∼ 0.3 mais aussi pour les objets proches du catalogue IUE. Plusieurs études antérieures se sont intéressées à l’effet de la poussière sur l’émission Lyα, en particulier la corrélation entre la largeur équivalente Lyα et l’ex-tinction. Curieusement, différents résultats émergèrent de ces travaux, conduisant à des conclusions contrastées. On peut citer les résultats , à présent familiers, de Gia-valisco et al. (1996) qui notèrent une large dispersion dans la relation entre EWLyα

et l’extinction, pour un ensemble de 22 galaxies starburst locales. Ils conclurent qu’en plus de la diffusion, l’émission Lyα pouvait différer des prédictions à cause de chemins optiques (zones ionisées locales) différents de la moyenne sur la galaxie. Les observations à grand redshift vont cependant aller résolument à l’encontre de ces conclusions. Les quatre sous-groupes de spectres composites de LBGs à z ∼ 3 (Shapley et al. 2003) montrent une anticorrélation entre EWLyα et E(B-V), où le groupe à forte émission Lyα présente un continu stellaire plus pentu (plus bleu). La même tendance à été retrouvée plus récemment par Vanzella et al. (2009) dans un échantillon spectroscopique de LBGs à z ∼ 4. Suivant la méthodologie de Sha-pley et al. (2003), Pentericci et al. (2009) ont séparé leur échantillon de LBGs à z ∼ 4 par tranches d’extinction pour trouver la même anticorrélation entre la valeur moyenne de EWLyα et la pente β du continu. Quoiqu’il puisse être de la fiabilité de cette tendance, il est clair que les barres d’erreur importantes plaident pour une dispersion dans les paramètres de ces galaxies. De plus, il ne faut surtout pas ignorer que l’extinction dans ces galaxies à grand redshift est celle du continu UV qui peut sensiblement différer de l’extinction des raies d’émission, que nous calculons dans le présent travail.

On montre dans la figure 5.3 l’évolution de la largeur équivalente Lyα en fonc-tion de E(B − V ), pour les LAEs à z ∼ 3 ainsi que notre compilafonc-tion de starbursts proches, incluant l’échantillon spectroscopique IUE (triangles bleus). Aucune

corré-Fig.5.3: Largeur équivalente Lyα en fonction de l’extinction. Les ronds noirs repré-sentent les objets GALEX et les triangles bleus les galaxies IUE avec les incertitudes associées aux deux échantillons. Nous avons également ajouté les galaxies locales étudiées dans le chapitre 2 (Atek et al. 2008). Les lignes horizontales et verticales symbolisent la limite EW de détection des LAEs et l’extinction associée.

lation claire ne semble ressortir de cette figure à la vue de la dispersion des valeurs de EWLyα selon l’extinction, qui va de E(B −V ) = 0 à 0.45 pour les LAEs GALEX. Ce résultat est en accord avec l’imagerie Lyα des starbursts proches du chapitre 2 dont les valeurs sont incluses dans la figure (carrés violets). La dispersion observée est encore une fois symptomatique d’effets qui extirpent l’émission Lyα d’une dépen-dance univoque à la poussière. On confirme ici avec un grand échantillon de galaxies que d’autres paramètres de la galaxie, comme l’expansion du MIS, jouent un rôle essentiel. Cependant, l’effet de super vents galactiques, qui devrait faciliter la sortie des photons Lyα devient insuffisant dans le cas d’une grande extinction, comme on l’a vu dans le chapitre 3 (Verhamme et al. 2008; Schaerer & Verhamme 2008). En ce qui concerne notre étude, on ne trouve aucun émetteur Lyα à des E(B − V ) supé-rieurs à 0.45, tous objets confondus, alors que l’échantillon IUE explore de grandes valeurs d’extinction (jusqu’à E(B − V ) ∼ 0.8). D’autre part, ceci reflète l’hypothèse généralement admise qui stipule que la quantité de poussière diminue avec le red-shift, puisqu’on explore des phases d’évolution galactique de plus en plus jeunes (p. ex. Hathi et al. 2008).

Une autre tendance plusieurs fois reportée par divers auteurs, et attribuée à des effets quelque peu similaires, est la décroissance de EWLyα en fonction du SFRU V, si l’on suppose que ce dernier est un bon indicateur de l’évolution de la galaxie (Ando et al. 2004; Tapken et al. 2007; Verhamme et al. 2008). La figure 5.4 présente ce diagramme pour nos objets. La même figure a également été présentée à la section 3.1, rassemblant une compilation de données sur les LAEs et LBGs à grand z, et qui couvrait une plus large gamme de SFR et de EW . Malgré l’espace restreint couvert par ces paramètres, on voit une tendance similaire sur la figure 5.4, avec des largeurs

Fig. 5.4: Largeur équivalente Lyα en fonction du taux de formation stellaire UV. EWLyα est la valeur observée calculée dans le référentiel au repos. SFRU V est la valeur déterminée à partir de la luminosité UV à 1530 Å et non corrigée de l’extinc-tion. Les barres d’erreur de EWLyα sont de 10%, et celles de SFRU V sont basées sur la photométrie UV de GALEX.

équivalentes plus modestes pour des grandes valeurs de SFRU V. Mais comme nous l’avons mentionné au sujet de la figure 5.3, nos galaxies ne couvrent pas une éten-due suffisante d’extinction pour distinguer clairement entre les différents paramètres d’atténuation de Lyα. De ce fait, il nous est difficile de tirer des conclusions plus avancées qui connecteraient les deux relations EWLyα/E(B − V ) et EWLyα/SFRU V. En clair, les deux figures 5.3 et 5.4 indiquent que la décroissance de EWLyα

aux faibles valeurs de SFRU V est probablement due à des différences d’histoires de formation stellaires plutôt qu’à une augmentation de la quantité de poussière. Les flambées de formation stellaire instantanées, susceptibles de générer les plus grandes valeurs de EWLyα, sont plus probables à un stade très jeune de la galaxie, c’est à dire pour des petits SFRU V, alors que des épisodes de formation stellaire continue, à un âge plus avancé, produisent des largeurs équivalentes nettement plus modestes à l’équilibre. Alternativement, si l’on considère un flux Lyα constant, l’augmenta-tion plausible du continuum UV avec le SFRU V mènera tout naturellement à une décroissance de EWLyα.