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Typage de S. aureus par spa-typing

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4. G ENOTYPAGE AU SEIN DU GENRE S TAPHYLOCOCCUS

4.3. Le génotypage basé sur l’étude des Variable Number Tandem Repeats

4.3.2. Typage de S. aureus par spa-typing

Une méthode de typage basée sur le séquençage du gène spa, nommée spa-typing, est très utilisée chez S. aureus. C’est en 1996 que Frénay et al.233 proposent le séquençage du VNTR localisé dans le gène spa, codant la protéine A, pour le typage d’isolats de S. aureus résistants à la méticilline.

Le gène spa, de taille variable, n’est présent que chez S. aureus. La protéine A de S. aureus est une MSCRAMM qui se lie aux immunoglobulines pour échapper à la phagocytose. Le gène spa se compose d’une région codant un domaine de liaison au fragment constant de la chaine lourde de l’immunoglobuline G, suivi de la région X constituée de motifs répétés en nombre variable et enfin un motif d’ancrage à la paroi (Figure 57)234. Le séquençage de la région X a révélé la présence de motifs répétés hautement polymorphes dont la grande majorité font une taille de 24 pb. La diversité de cette région est le produit de duplications et de délétions de ces motifs répétés, de recombinaison intra-génique, mais aussi de SNP234.

Malgré cette diversité, la région X semble suffisamment stable dans le temps pour être utilisée comme un marqueur épidémiologique. En effet, le séquençage de la région X a montré que des souches cultivées in vitro pendant dix jours consécutifs sur gélose au sang de mouton conservaient la même séquence et le même nombre de répétitions. Par ailleurs, des résultats identiques ont été observés à partir de plusieurs isolements, sur une période de cinq ans, d’une souche de SARM persistant chez un patient233.

Pour réaliser une amplification par PCR et un séquençage Sanger de ce VNTR, des amorces positionnées au niveau des régions flanquantes conservées de la région X ont été utilisées. Le séquençage permet de déterminer le nombre de motifs répétés mais aussi de déterminer la séquence de chacun de ces motifs de 24 pb. Pour chaque séquence unique d’un motif, un numéro est assigné (01, 02, 03 ...). Ainsi, à chaque combinaison unique de motifs répétés (26-23-17-34-17-20-17-12-17-16) est attribué un numéro de génotype appelé spa-type (t002)235. Une fois le séquençage effectué, il est possible de déterminer le spa-type d’un isolat, mais également le CC de MLST correspondant, à partir de la base de données ‘’Ridom StaphType‘’ (http://www.ridom.de/staphtype). Cette base de données regroupe à ce jour 762 motifs de répétitions différents et 17897 spa-types. De plus, cette méthode standardisée produit des résultats reproductibles facilement interprétables, non-ambigus et exportables.

Cette méthode permet de prédire le CC voire le ST auquel un isolat appartient car il existe une excellente congruence avec la méthode de MLST236. Il a été calculé un pourcentage de congruence de 72,9 à 96,8% entre les génotypes identifiés selon les études236,237. Bien que le spa-typing se base sur le polymorphisme d’un unique locus, il permet tout de même d’obtenir un excellent pouvoir discriminant par rapport aux méthodes utilisant plusieurs loci238. Le spa-typing permet d’obtenir un pouvoir discriminant (DI = 0,913) supérieur à celui de la méthode de MLST (DI = 0,887)239. Ce qui fait du spa-typing un outil de première ligne pour la surveillance mondiale des infections à S. aureus mais aussi pour les études micro-épidémiologiques194,236,240.

L’inconvénient de cette méthode est qu’elle puisse entrainer une classification erronée des isolats du fait de phénomènes de recombinaison et/ou de l’homoplasie, c’est-à-dire la similitude pour un caractère donné entre deux isolats, indépendante d’un ancêtre commun241. Les allèles définis par l’étude de micro-satellites se réfèrent à des fragments d’ADN de taille différente entre les isolats. Des isolats qui ont une taille identique pour un locus ne sont pas nécessairement liés phylogénétiquement. Cet état identique peut être le résultat de mutations convergentes au niveau d’ancêtres communs ; il s’agit de l’homoplasie de taille241. Ainsi, des isolats présentant une taille identique pour le gène spa pourraient présenter le même nombre de motifs répétés sans avoir de lien phylogénétique. Cependant, l’analyse des polymorphismes nucléotidiques des motifs répétés tend à surpasser cette problématique, les SNP étant moins sujets à l’homoplasie241.

Figure 58 : Distribution des spa-types de S. aureus les plus prévalents à travers le monde238.

Tableau VI : Distribution des spa-types les plus prévalents à travers le monde en termes de nombre de souches de S. aureus sensibles (SASM) et résistants

à la méticilline (SARM)238.

Du fait de sa facilité d’exécution et de sa nomenclature standardisée, le spa-typing est devenu un outil de typage très utile et développé pour l’épidémiologie mondiale. L’utilisation de cette méthode par de nombreux laboratoires a permis d’évaluer la prévalence des spa-types des isolats de S. aureus sur chaque continent et de distinguer des clones endémiques (Figure 58). Il a été montré que les types les plus prévalents en Europe étaient les spa-types t032, t008 et t002. En effet, le t032 particulièrement prévalent au Royaume-Uni et en Allemagne, suivi du spa-type t008 qui est particulièrement présent en France et en Italie.

Quant au t002, il est également le second spa-type le plus répandu aux États-Unis, au Canada et au Brésil238.

En parallèle du spa-typing, des études de la prévalence de la cassette SCCmec au sein de la population de S. aureus ont été réalisées (Tableau VI). Ces travaux ont permis d’identifier des spa-types associés à des souches de SARM238. Par exemple, les spa-types les plus représentés dans le monde sont associés à un plus grand nombre de SARM que de SASM. En effet, le t008 (2629 SARM vs 258 SASM), suivi du t002 (9364 SARM vs 189 SASM), du t037 (SARM 1971 vs 51 SASM) et du t044 (590 SARM vs 0 SASM) ont été identifiés dans 12 pays à travers le monde. Par exemple, en Europe, tous les isolats de t032 sont des SARM et les isolats de t037 et t437 en Afrique et en Australie sont également des SARM. Toutefois, ces résultats dépendent des collections d’échantillons utilisées dans la littérature. De nombreuses études cliniques s’attachent à caractériser en priorité des souches de SARM ; une conclusion spécifique à chaque étude doit alors être tirée pour savoir si les isolats de SARM sont associés à des spa-types particuliers et inversement238. La méthode de spa-typing est une méthode de typage qui présente de nombreux avantages lorsqu’on la compare aux autres méthodes de typage en termes de rapidité, de reproductibilité, de simplicité d’application et d’interprétation, mais aussi de standardisation et de comparaison de données. De plus, son haut pouvoir discriminant et sa congruence avec les autres méthodes de typage, font du spa-typing un outil épidémiologique important pour le typage de première intention afin de suivre la diffusion et la répartition mondiale des isolats de S. aureus238.

Tout comme l’automatisation et la démocratisation du séquençage Sanger a permis la mise au point de méthodes de typage, les progrès considérables dans les technologies de séquençage à haut débit ont conduit au développement de nouvelles méthodes de typage exploitant la totalité du génome bactérien. En effet, le séquençage haut débit permet une recherche exhaustive des mutations (SNP, insertion, délétion) au sein des génomes bactériens. Des méthodes de typage sont basées sur la comparaison des SNP sur le génome complet appelées whole genome SNP. En termes de pouvoir discriminant, ces méthodes supplantent toutes les méthodes de typage précédentes194,242. Ainsi, ces applications du séquençage haut débit sont des outils d’une grande pertinence pour les études micro-épidémiologiques194,242,243–245.

T RAVAUX PERSONNELS

1. Analyse génomique comparative de souches pathogènes et de portage de S. lugdunensis

1.1. Objectifs et principaux résultats de l’étude

S. lugdunensis est une espèce commensale appartenant à la flore cutanée de l’Homme. Cependant, il possède un pouvoir pathogène plus proche de celui de S. aureus en termes d’agressivité et d’évolution clinique, que de celui des autres SCN2. En effet, les infections à S. lugdunensis présentent un tel caractère agressif et destructeur qu’il peut être souvent nécessaire de recourir à des procédures de drainage ou de chirurgie, en plus de l’antibiothérapie, pour en limiter la mortalité35. Même si les souches de S. lugdunensis restent sensibles à la quasi-totalité des antibiotiques anti-staphylococciques, il a été observé chez cette espèce, l’émergence de souches résistantes à l’oxacilline26,246 ; antibiotique utilisé en première intention dans le traitement des infections sévères à SCN.

Malgré la description de quelques facteurs de virulence, aucune donnée moléculaire n’explique à ce jour une telle pathogénicité chez cette espèce. Plusieurs méthodes de typage moléculaire ont été développées comme la MLST208 et la MVLST98 pour rechercher un éventuel lien entre lignées phylogénétiques et virulence. Ces travaux de typage ont permis de décrire le caractère clonal de la population de S. lugdunensis et d’identifier sept CC (http://bigsdb.web.pasteur.fr/staphlugdunensis), mais aucune lignée hypervirulente associée à un contexte clinique sévère. De nouvelles méthodes de typage basées sur l’étude du polymorphisme de motifs répétés en tandem ont confirmé cette absence de lien entre groupements phylogénétiques et les contextes d’isolement des souches (cf partie travaux associés).

Le séquençage de génomes complets est aujourd’hui un outil puissant en microbiologie pour les études épidémiologiques, l’identification de gènes de résistance (résistome), ou d’EGM (mobilome) et la caractérisation de gènes codant des facteurs de virulence (virulome). Néanmoins, seulement 15 génomes complets de S. lugdunensis sont actuellement disponibles sur NCBI et seuls deux études ont consisté à la comparaison de génomes entier chez cette espèce96,141. Ces études ont révélé que (i) le génome de S. lugdunensis est plus proche de celui de S. aureus que de celui des autres SCN, (ii) qu’il peut porter des EGM tels que des prophages et des plasmides et (iii) que cette espèce, à

la différence de S. aureus et S. epidermidis, présente un pan-genome fermé avec plusieurs systèmes limitant les transferts de gènes horizontaux.

Dans ce contexte, le premier volet de nos travaux a consisté à séquencer le génome complet de trois souches pathogènes (SL13, SL29 et SL55) et de trois souches de portage (SL117, SL118 et SL122) pour les comparer aux 15 génomes de S. lugdunensis disponibles sur la base de données du NCBI. La comparaison génomique a été réalisée dans le but de caractériser le pan-genome, le core-genome et le génome accessoire des 21 souches de S. lugdunensis. D’autre part, cette comparaison a été effectuée pour identifier de potentiels déterminants génétiques spécifiques des souches pathogènes ou de portage, ou spécifiques de souches responsables d’un contexte clinique sévère. Cette étude s’est également attachée à rechercher des gènes de résistance et de nouveaux facteurs de virulence, portés ou non par des EGM, afin d’expliquer la virulence particulière de cette espèce. Parallèlement, nous avons évalué le pouvoir pathogène des six souches séquencées dans un modèle d’infection de la larve de Galleria mellonella jusqu’alors non mis en œuvre chez cette espèce bactérienne.

Le séquençage des six souches de S. lugdunensis a été réalisé à l’aide de la technologie Pacific Biosciences. Il a généré pour chaque souche un unique contig correspondant au génome complet et circularisé d’une taille comprise entre 2,53 et 2,61 Mb.

L’annotation des 21 génomes nous a ensuite permis de déterminer le répertoire total de gènes de l’espèce par la caractérisation du pan-genome. A l’aide du logiciel orthologsorter, il a alors été possible de former des groupes de séquences protéiques orthologues afin d’identifier ceux communs ou non à toutes les souches de S. lugdunensis. De cette façon, le nombre total de gènes pour l’espèce s’élève à 3077 gènes dont 2185 composant le core-genome (communs aux 21 souches) et 892 pour le génome accessoire.

A partir de cette analyse, nous avons recherché si, au sein des gènes composant le génome accessoire, certains étaient spécifiques des souches pathogènes ou des souches de portage. Aucun gène spécifique d’un des deux groupes ou d’un contexte clinique donné n’a été identifié (endocardite vs IPTM par exemple). En revanche, l’analyse du génome accessoire a révélé la présence de gènes spécifiques de certains CC définis par MLST, comme la présence de gènes codant pour le système CRISPR/Cas uniquement chez les souches de CC1 ou la présence d’un SRM de type II seulement chez les souches appartenant au CC6.

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