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directeurs et des fonctionnaires locaux dans le tourisme durable

Les compétences centrales et qualifications professionnelles des directeurs et des fonctionnaires locaux28 sont au cœur des enjeux des cinq thèmes principaux pour le

tourisme durable. Comme nous l‘avons vu, de telles priorités existent partout dans les institutions publiques au Cambodge (Hill & Menon, 2013, 2014), plus précisément dans le secteur du tourisme (Carter et al., 2013; Leiper, 1998). Ces enjeux se retrouvent à tout niveau. Au niveau local, en fonction des acteurs publics touristiques locaux, ces enjeux comptent à tout stade hiérarchique depuis les employés de chaque bureau technique au sein des départements provinciaux du tourisme, jusqu‘à l‘équipe de management du département. Au niveau national, il ressort que les fonctionnaires en charge du management et de la politique sont trop nombreux.

Le résultat montre que peu de directeurs du tourisme local ont un diplôme de tourisme d‘un niveau d‘études supérieures, la majorité d'entre eux ont suivi d'autres

28 Ils sont des fonctionnaires titulaires et des flottants du département provincial du tourisme, sous la direction directement de directeur.

formations qui ne concernent pas le tourisme. Pour correspondre au profil de cette discipline, on peut penser à Pline le Jeune (vers 61-114) selon lequel « Il vaut mieux

exceller en une chose que d’être médiocre en plusieurs. » La recherche a également mis à

jour un manque de quantité et de qualité des fonctionnaires locaux, en particulier dans la section du personnel technique tandis que les responsables politiques sont en trop grand nombre, surtout au niveau central. Le gouvernement du Cambodge est considéré comme un gouvernement dont la tête est trop importante par rapport à son corps. Par exemple, dans le quatrième mandat du gouvernement, on comptait jusqu'à huit secrétaires d'État, neuf sous-secrétaires d'État et d‘innombrables conseillers du ministre ou du ministère qui occupaient un rang égal au vice-directeur général, directeur général, sous-secrétaire d'État, secrétaire d'État, etc. Le cinquième mandat englobe jusqu'à cinq secrétaires d'État et neuf sous-secrétaires d'État. Ces nombreux acteurs politiques ne sont pas nécessaires ; ils représentent toutefois un coût non négligeable pour les finances publiques. Dans ces conditions, il serait préférable de créer une nouvelle institution publique à l‘image du Conseil de promotion du tourisme qui existe en France29.

En ce qui concerne l'étude du tourisme, actuellement, au Cambodge, l‘enseignement supérieur n‘est pas assez ciblé et la formation professionnelle n'est pas une réponse adaptée au marché de l'emploi dans l'industrie du tourisme. Ainsi, comme l‘expriment Hoerner et Perrot (2003, p. 305)30, « Le caractère nébuleux des emplois et

métiers du tourisme explique la difficulté à voir clair dans les systèmes de formation mis en place depuis plus d’un siècle. ». Il existe des écarts entres les besoins des employeurs

du secteur touristique et l'offre de personnel qualifié, y compris les centres de formations privées, les écoles professionnelles et les universités. À l'heure actuelle, il n'existe pas de plan national pour les normes de personnel, ni de programme de formation, ni de contrôles des programmes de formation des instructeurs. Selon le ministère du Tourisme, la nécessité de développer le capital humain est le point de départ de tout développement. Rien n'est possible sans des gens formés et qualifiés : « Développer, promouvoir, ou

29 Le Conseil de promotion du tourisme (CPT) a comme mission de proposer une stratégie pour le tourisme français à l‘horizon 2020, dans la dynamique initiée par les assises du tourisme, conclues en juin 2014. Au cours de l‘année écoulée depuis les Assises du tourisme, ce conseil a auditionné un panel de 250 professionnels du secteur du tourisme et représentants des pouvoirs publics, afin d‘établir une stratégie à l‘horizon 2020. Le CPT est un organisme consultatif créé par le décret n° 86-201 du 11 février 1986, qui est placé auprès du ministre et qui est composé d‘environ 300 membres (Chaumet-Riffaud, 2005, p. 55). 30 Jean-Michel Hoerner et Serge Perrot, « Quelles formations pour le tourisme ? », in Jacques Spindler et

animer une région ou un site touristique ou culturel, c’est un métier. Et comme tous les métiers, cela s’apprend, cela évolue. » (Lechien, 2009, p. 130). Par ailleurs, « En matière de prospective des métiers, il est important que le secteur du tourisme communique davantage sur les métiers du tourisme car certains sont mal perçus en raison de leur bas niveau de salaire. » (Leroux & Pupion, 2014, p. 86). Les ressources humaines sont

chargées d‘offrir :

 des conditions d'emploi compétitives et des opportunités de carrière pour assurer le recrutement adéquat de tous les niveaux de personnel ;

 des opportunités d'éducation et de formation pour toutes les professions et les spécialisations au niveau national (MOT, 2012).

Au niveau local, il ne faut pas hésiter à « Former, changer d’état d’esprit, faire

connaître, expliquer, se concerter, discuter, synthétiser les idées générales, profiter de l’apport des connaissances, faire en quelque sorte un examen de conscience général et individuel, se mieux connaître et s’apprécier par la qualité d’un travail, apprendre à gérer en commun, transmettre et concevoir l’information…, en un mot communiquer grâce à un outil de choix : le séminaire. », comme le conseille Dupuy (2005, p. 49).

Au Cambodge, la terrible période des Khmers rouges, de 1975 à 1979, suivie par l'occupation des troupes vietnamiennes jusqu'en 1989, a conduit à une perte quasi-totale du capital financier et intellectuel (Gaughan et al., 2009, p. 213). Si l‘on se réfère à Thach Toan (2014, p. 171), « Une armée vietnamienne forte de 200 000 hommes contrôlait le

pays. », c‘est l‘époque de la vietnamisation du Cambodge (Bui & Fouquoire-Brillet,

1986, p. 149). Même si cette histoire appartient au passé, elle engendre assurément des manques liés aux ressources humaines actuelles. Elles sont pourtant les valeurs de base pour le développement d'un tourisme durable, offrant des avantages à la communauté d'accueil et aux touristes. Ces ressources contribueraient positivement au secteur du tourisme alors que les effets négatifs seraient minimisés ou éliminés (Godfrey, 1998; Tesone, 2004; D. B. Weaver, 2006). De même, l‘Organisation mondiale du tourisme et le Programme des Nations unies pour l'environnement (2005), souligne que les ressources humaines sont des facteurs de base exigeants pour la prévoyance, l'engagement et la

planification afin d‘assurer une gestion adaptée aux besoins du présent sans compromettre les générations futures.

Selon les directeurs, le capital humain, s‘il est pléthorique au niveau politique, est limité autant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif au sein du département du tourisme : environ dix employés seulement dont la plupart exercent uniquement au niveau de la province, mais ils sont rarement présents au niveau du district. En réalité, il y a cinq ou six bureaux techniques dans chaque département du tourisme, mais il n‘y a que deux ou trois fonctionnaires dans chaque bureau et la majorité de ces personnels n‘est pas dotée d‘une qualification ou d‘une compétence professionnelle adéquate. Dans certains bureaux, il n‘y a que le chef et le sous-chef sans autre personnel ! De plus, beaucoup sont trop âgés pour vouloir mettre en œuvre le travail tandis que les nouveaux employés diplômés ont moins d‘expérience.

Or, on sait que les employés de l‘organisation du tourisme sont les acteurs clés de la qualité de ce service (Clergeau et al., 2014, p. 320). Aussi afin de professionnaliser ces acteurs, un capital humain spécialisé est nécessaire dans la planification du tourisme (Devine & Devine, 2011; Edgell et al., 2008; C. M. Hall, 2008) ; actuellement, on se heurte à un manque d'experts compétents pour planifier l‘obtention d‘un soutien financier. Presque tous les acteurs publics touristiques locaux suggèrent la formation sur la planification du tourisme pour eux-mêmes et pour leur personnel subordonné. L'un des répondants a même montré que, paradoxalement, certains départements du tourisme local ont un nombre de fonctionnaires inférieur au nombre de bureaux !

Il faut savoir que le directeur du tourisme local joue également un rôle en tant que décideur pour examiner l'ensemble des tenants et des aboutissants de la politique du tourisme ainsi que leur combinaison, il se doit «… d’organiser l’administration du

tourisme, de développer des campagnes de promotion, de normaliser, de légiférer, d’inciter financièrement et fiscalement […], autant d’actions correspondant à ce que l’on peut appeler les instruments des politiques du tourisme. » (Durand et al., 1994, p. 13). Ce

choix démontre souvent un parti pris idéologique ou politique qui favorise certains types de moyens sur les autres. Idéalement, les décideurs doivent évaluer les points forts et les faiblesses des instruments spécifiques ainsi que l'effet de l'idéologie, les valeurs sociales, l'éthique, la politique et l'économie de ces évaluations (William Theobald FF, 2012, p. 364).

Pour résumer la question des qualifications et des compétences professionnelles des APTL du tourisme dans le tourisme durable, la plupart des répondants ont conclu que la plus grande attention doit être accordée aux directeurs publics.

En conséquence, le directeur du tourisme public joue un rôle primordial pour réfléchir sur les coûts et les avantages associés au sein d‘une destination touristique. Les directeurs touristiques doivent identifier les questions prioritaires en consultant les principaux groupes d'intervenants ; ils doivent faire émerger les indicateurs les plus pertinents pour ces questions, les clarifier et, si possible, mettre en œuvre la disponibilité des données et le coût pour les obtenir (Organisation mondiale du tourisme et Programme des Nations unies pour l'environnement, 2005, p. 178). En plus, sur le plan managérial, les directeurs doivent apprendre à se comporter au sein d‘un groupe de cultures différentes afin d‘en tirer tous les bénéfices et pour assurer une excellente culture d‘équipe – c‘est une source d‘innovation et de connaissances (Leroux & Pupion, 2014).