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Chapitre 1 Introduction

1.5 Les altérations des JNMs dans la SLA

Il a été discuté précédemment de l’altération de différents types cellulaires et de leur implication dans le développement ainsi que dans la progression de la SLA. Dans les modèles animaux, une altération de la JNM est observée bien avant l’apparition des premiers symptômes moteurs et avant la mort d’un motoneurone dans la moelle épinière (Fischer, Culver et al. 2004, Pun, Santos et al. 2006, Vinsant, Mansfield et al. 2013, Tallon, Russell et al. 2016). Ces altérations incluent une morphologie de la JNM anormale, des altérations synaptiques ainsi qu’un phénomène de dénervation.

1.5.1 Les réorganisations synaptiques

Une réorganisation de la JNM est observée avant l’apparition des symptômes et dont certaines UMs sont plus vulnérables et présentent davantage de signes de réorganisation synaptique. Une dénervation de la plaque motrice ainsi qu’une perte de protéines synaptiques sont observées dans un premier temps chez les fibres unités motrices rapides et fatigables (Pun, Santos et al. 2006), montrant ainsi une plus grande vulnérabilité à la dénervation, suivis par les fibres rapides et résistantes à la fatigue (FR) et les fibres lentes (S) (Frey, Schneider et al. 2000, Pun, Santos et al. 2006, Hegedus, Putman et al. 2007, Hegedus, Putman et al. 2008). Au niveau des UMs touchées, on observe la présence anormale de récepteurs ectopiques, soit des regroupements distincts de récepteurs nicotiniques sur une même fibre motrice ainsi qu’une diminution du marquage des récepteurs postsynaptiques (Tremblay, Martineau et al. 2017). Une dénervation partielle et parfois complète de la plaque motrice peut être observée. Un mécanisme compensatoire de réinnervation se produit et sera discuté dans la section suivante (section 1.5.3).

1.5.2 Les altérations synaptiques

Non seulement il est possible d’observer des altérations de la morphologie des JNMs, mais des altérations dans les propriétés synaptiques intrinsèques à la JNM et au niveau des motoneurones ont été observées. Ces altérations synaptiques ont été reportées dans les modèles SOD1, TDP43 et FUS. Cependant, il faut noter que plusieurs recherches ont mené à des résultats contradictoires. De

courant synaptique sont observées (Shahidullah, Le Marchand et al. 2013, Machamer, Collins et al. 2014). Dans le muscle du diaphragme chez le modèle murin SOD1G93A des résultats

contradictoires ont été reportés : durant le stade présymptomatique, une diminution de la probabilité de relâche a été observée (Souayah, Coakley et al. 2012) tandis que, dans un groupe spécifique de JNM, une augmentation a été observée (Rocha, Pousinha et al. 2013). Cette distinction observée par Rocha et al fut abolie lors de la phase symptomatique de la SLA, puisque ces deux groupes distincts de JNMs dans le diaphragme avaient des altérations synaptiques (Rocha, Pousinha et al. 2013). Appuyant ainsi l’hypothèse au sujet de l’atteinte différentielle des NMs, des JNMs et des UMs.

Une étude effectuée au sein du laboratoire du Dr Robitaille a permis de clarifier ces contradictions en démontrant l’importance du type d’UM dans les altérations synaptiques en fonction du stade de la SLA (Tremblay, Martineau et al. 2017). Brièvement, des changements synaptiques sont observés à des stades présymptomatiques et lors du déclenchement de la maladie spécifiquement aux UMs plus vulnérables (FF). De manière intéressante, une augmentation du contenu quantique est reportée spécifiquement au niveau des UMs plus résistants (S) au stade asymptomatique. Sachant que les UMs ont une activité synaptique plus basse que les FF, certains postulent que ces changements synaptiques observés seraient des mécanismes compensatoires qui pourraient être, au final, protecteur. En effet, l’augmentation de l’excitabilité des MNs a eu un effet neuroprotecteur : ceci a permis de renverser le mauvais repliement de SOD1 tandis qu’une diminution a accéléré la progression de la maladie (Saxena, Roselli et al. 2013). Ainsi, des changements synaptiques sont observés à des stades symptomatiques et qui dépendent du type d’UM.

1.5.3 La dénervation : un processus dynamique

Un autre phénomène observé dans les JNMs dénervées est la présence de mécanisme de réinnervation compensatoire suggérant un processus dynamique avec plusieurs tentatives de réparations. En effet, dans les UMs FF dénervées, la présence d’axone de plus petits calibres

terminaison axonale partant de la plaque motrice (Figure 1.8F : bourgeonnement axonal) ainsi qu’une polyinnervation, soit plusieurs terminaisons axonales innervant la plaque motrice (Arbour, Tremblay et al. 2015, Tremblay, Martineau et al. 2017) : des phénomènes reportés lors des tentatives de réparation à la JNM (section 1.4.5.2). Des altérations au niveau de la cellule gliale sont également observées et seront discutées dans la section subséquente.

Afin d’investiguer le phénomène de dénervation Martineau et al., ont utilisé une lignée de souris dont un faible pourcentage de motoneurones exprimait le marqueur fluorescent YFP. L’utilisation d’imagerie in vivo de manière répétitive a permis d’étudier de manière précise le phénomène de dénervation à travers le décours de la maladie. Martineau et al., ont réussi à démontrer que non seulement la dénervation d’une unité motrice, soit la terminaison axonale avec ces nombreuses fibres musculaires, se fait de manière asynchrone, mais également, que ce phénomène de dénervation semble être un phénomène qui se propage de manière spatiale et temporale, partant de la première JNM dénervée vers les JNMs les plus proches, appartenant ou non à la même unité motrice (Martineau, Di Polo et al. 2018). Ceci illustrant la possibilité d’un facteur extrinsèque, présent au niveau synaptique, qui s’étend de manière spatiale, affectant ainsi les JNMs environnantes.

En ce sens, ces nombreuses altérations fonctionnelles mentionnées précédemment possèdent un dénominateur commun, une cellule qui est responsable non seulement pour le maintien de la morphologie de la JNM, mais également crucial pour l’activité synaptique et assure le bon déroulement des processus de réparations : le troisième élément de la synapse tripartite, la cellule de Schwann périsynaptique.

1.5.4 L’implication des CSPs dans la SLA

Dans la sclérose latérale amyotrophique, il a été discuté précédemment des différentes altérations synaptiques et morphologiques qui surviennent bien avant non seulement l’arrivée des symptômes moteurs, mais avant la mort des motoneurones. Sachant que les CSPs sont essentielles pour le maintien et la stabilité des JNMs, ainsi que pour les différents mécanismes de plasticité synaptique et de réparation, contribuent-elles à l’établissement de ses altérations observées à la JNM? Les CSPs, via l’activation des récepteurs muscariniques, décodent l’activité synaptique et s’adaptent à son environnement afin d’effectuer le rôle opportun. Cette capacité à décoder est-elle affectée et contribue-t-elle à la sensibilité différentielle des unités motrices à la dénervation qui est observée?

Comme démontré récemment par Martineau et al., la dénervation des JNMs est un phénomène qui apparaît avant la mort des MNs et dans lequel des mécanismes de réparation compensatoires, mais inefficaces mènent malgré tout à une dénervation complète (Martineau, Di Polo et al. 2018). Certains groupes ont également observé une déficience des mécanismes de réparation tels qu’un ralentissement de la croissance axonale ou l’accumulation de débris suite à une lésion induite dans les modèles de SLA (Pun, Santos et al. 2006, Carrasco, Bahr et al. 2016). Sachant que les CSPs participent activement à différentes étapes de ce processus, les CSPs sont- elles adéquates ou nuisent-elles à la réinnervation? Il a été possible d’observer des signes de réparations gliales normales. En effet, la présence des extensions gliale chez les patients SLA ainsi que dans des modèles murins a été reportée et ceci pourrait sous-entendre ainsi le maintien des fonctions gliales (Frey, Schneider et al. 2000, Gordon, Hegedus et al. 2004, Gould, Buss et al. 2006, Arbour, Tremblay et al. 2015, Tallon, Russell et al. 2016). Cependant, plusieurs études démontrent malgré tout certaines particularités ne favorisant pas une réinnervation adéquate.

Dans un premier temps, des altérations morphologiques des CSPs ont été observées à des stades présymptomatiques, soit avant le commencement des phénomènes de dénervation (Arbour,

de MAG-2, une lectine essentielle pour la clairance des débris extracellulaire suite à la dénervation des JNMs (Martineau, Arbour et al. in prep). Finalement, l’expression de Semaphorin 3A, une molécule chémorépulsive neuronale, est exprimée dans les CSPs des JNMs des UMs les plus vulnérables (FF). Cette particularité pourrait repousser les axones tentant de réinnerver les JNMs (De Winter, Vo et al. 2006). Ainsi, les CSPs semblent adopter une morphologie inadéquate et favoriser l’instabilité des JNMs tout en empêchant les mécanismes de réinnervation compensatoire.

Ainsi, sachant que les CSPs sont en mesure de s’adapter selon le contexte synaptique, est- ce que les CSPs décodent de manière appropriée leur environnement synaptique afin de s’y adapter? Comme mentionné précédemment, lors du processus de maturation des JNMs (section 1.4.5.1) ainsi que lors des processus de réparations des JNMs (section 1.4.5.2), les CSPs vont s’adapter et décoder la transmission synaptique avec une contribution plus grande des récepteurs purinergiques et plus basses des récepteurs muscariniques (Darabid, Arbour et al. 2013, Darabid, St-Pierre-See et al. 2018, Perez-Gonzalez, Provost et al. in prep). Des travaux du laboratoire ont démontré un décodage inadéquat des CSPs bien avant la dénervation des JNMs (Arbour, Tremblay et al. 2015, Martineau, Arbour et al. in prep). D’une part, une sensibilité aux différends agonistes, l’activation des CSPs et la contribution des récepteurs à cette activation sont altérées dans les muscles vulnérables (Arbour, Tremblay et al. 2015, Martineau, Arbour et al. in prep). En effet, dans les muscles vulnérables, une augmentation de la contribution des récepteurs muscariniques est observée. Ainsi, cette contribution inappropriée des récepteurs muscariniques mènerait à un décodage inadapté, empêchant ainsi les CSPs d’adopter leur phénotype de réparation assurant une réinnervation appropriée de la JNM. Ainsi, est-ce que ce phénomène est observé dans JNMs des muscles résistants tels les muscles extraoculaires?