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Nous avons montré, au cours de notre première étude, que l’exposition des fibres perméabilisées de soleus à une élévation de température de 35°C à 40°C avait altéré l’oxydation des lipides. La chaleur a induit une augmentation de la vitesse de respiration 𝑉̇0 du PCoA en conditions de blocage de la phosphorylation de l’ADP (, sans augmentation de la capacité maximale d’oxydation 𝑉̇max. Cette situation traduit une consommation du gradient de protons accrue à la chaleur non liée à une production d’ATP. Cette diminution d’efficience de la phosphorylation oxydative est reflétée par la diminution du RCR-PCoA. L’effet de la chaleur

sur la 𝑉̇0 a été prévenu par l’ajout de GTP, utilisé pour sa capacité d’inhibition des UCP. Ainsi, l’élévation de la respiration en condition de consommation d’O2 résiduelle peut être rapportée à un découplage de la phosphorylation oxydative pour les acides gras. Cette propriété d’induction du découplage des acides gras est retrouvée dans la littérature. Les acides gras, tels que l’acide linoléique ou le laurate, sont utilisés comme agent découplant naturel dans certaines études (Korshunov, Korkina et al. 1998, Jarmuszkiewicz, Woyda-Ploszczyca et al. 2015).

Prise en compte du rôle détersif des acides gras. L’absence d’augmentation, en regard, de la respiration en conditions phosphorylantes (𝑉̇max) interpelle quant à l’augmentation observée dans d’autres études. Dans une étude sur mitochondries isolées de rat, Ventura & al. mettaient en évidence une altération de la respiration mitochondriale pour l’oxydation du succinate par le PCoA. Dans cette étude, les mesures étaient réalisées avec des concentrations de 0,1% en BSA. L’effet inhibiteur de l’acide gras était probablement en lien avec les propriétés de détersion des acides gras, d’autant plus que des mitochondries ballonnisées étaient également observées. Afin de limiter les interactions des substrats lipidiques utilisés pour la mesure de la respiration mitochondriale avec les membranes phospholipidiques, d’autres équipes travaillent avec des concentrations supérieures en BSA. A la suite de quelques expérimentations de mise au point, nous avons donc opté pour une concentration de BSA à 6% pour les protocoles avec des acides gras. Ainsi, conformément à certaines préconisations, le maintien d’un ratio BSA/AG supérieur à 5 nous a paru pertinent afin de limiter les risques d’altération des membranes aux concentrations de PCoA utilisées. En outre, nous avons également étudié l’effet de l’ajout de PCoA (400mM) sur l’oxydation du pyruvate. Contrairement à l’étude de Ventura, aucune limitation des niveaux d’oxydation du substrat glucidique n’était observée. De même, afin d’éliminer un effet temps de contact, nous avons ajouté du pyruvate en fin de protocole d’oxydation du PCoA. Les niveaux de respiration du pyruvate n’était pas différent des protocoles réalisés en pyruvate seul. Il est peu probable que nos observations avec le PCoA puissent être imputées à un effet détersif de l’acide gras.

Thermosensibilité du découplage des acides gras. Par ailleurs, plusieurs hypothèses peuvent étayer les effets découplants thermo-dépendants des acides gras. Les UCP pourraient jouer un rôle d’efflux des acides gras. Ces protéines permettraient en effet d’extruder les acides gras, sans nécessité d’activation de l’acide gras en acyl-CoA, permettant de limiter l’accumulation mitochondriale des acides gras (Ježek, Engstová et al. 1998, Hoeks, Hesselink et al. 2006). La thermosensibilité de ce processus pourrait procéder de la modification de la fluidité

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thioestérases. En effet, la mitochondrial Thioesterase-1 (MTE-1) favoriserait la disponibilité en Coenzyme A par l’hydrolyse des acyl-CoA. La préservation du pool de CoA permettrait le maintien des processus d’oxydation mitochondriale alors que l’accumulation des acides gras activerait l’extrusion de ces acides gras par UCP. La thermosensibilité du complexe II) de la chaine respiratoire mitochondriale pourrait également participer à la thermo-dépendance du découplage de l’oxydation des acides gras. Le complexe II fonctionne avec des équivalents d’origines différentes. Les FADH2 peuvent provenir de l’activité du cycle de Krebs qui fait intervenir la succinate déshydrogénase localisée dans le complexe II. Le FADH2 peut aussi provenir de la βoxydation. Produit au niveau de l’acyl-CoA déshydrogénase, un transporteur (ETF2) permet d’apporter le proton au FAD+ fixé au complexe II. Enfin, la navette glycerol-3-P (G3glycerol-3-P) fait intervenir le complexe II pour le transfert des protons du NADH cytosolique vers le FADH2. Dans une étude sur les effets de la température sur l’utilisation des acides gras avant et après entrainement, Zoladz et al. (2016) montrent que l’élévation de la température induisait une altération du couplage de la phosphorylation oxydative au niveau du complexe II par la mesure de la vitesse de respiration du G3P. Ainsi, la vulnérabilité particulière du complexe II au stress thermique pourrait participer à l’effet découplant des acides gras avec la chaleur

Autres mécanismes dans le découplage des acides gras à la chaleur. L’utilisation de l’atractyloside couplée au GTP a permis d’isoler un mécanisme de découplage médié par les UCP. En effet, l’ANT1 pourrait être impliquée dans les processus de découplage de l’oxydation des acides gras induits par l’entraînement aérobie. Dans la conception de notre étude, l’utilisation de l’atractyloside permettait d’obtenir des conditions non-phosphorylantes par le blocage de l’ANT-1. Il a également permis de s’affranchir de l’influence d’ANT1 dans l’étude du découplage. Compte tenu de la persistance d’une diminution du RCR à 40°C en présence de GTP, d’autres mécanismes d’altération du couplage doivent être recherchés.

Rôle de l’étape de transport des acides gras. Non explorée dans notre étude, des

expérimentations complémentaires pourraient être réalisées afin de déterminer l’effet d’une élévation de température sur les différentes étapes de l’oxydaiton des acides gras. En comparant les niveaux d’oxydation d’un acide gras à chaine courte (octanoate), et un acide gras à chaine longue nécessitant le recours à la carnitine-palmitoyl transférase, il est possible de faire la part des chose entre une l’étape de transport par CPT-1 et la β-oxydation. La comparaison avec un acide gras à chaine longue couplé à la carnitine (palmitoyl-carnitine) pourrait permettre également de séparer les rôles de CPT-1 et CPT-2 dans le transport mitochondrial des AGLC.

2. Possible altération fonctionnelle de la chaine respiratoire