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Chapitre I : Les alarmines

7. Alarmines en physiopathologie

La libération d’alarmines a été observée dans un bon nombre de maladies, tant aiguës et chroniques, suscitant de ce fait un intérêt particulier pour ces signaux de danger, leur implication ainsi que pour l’identification des mécanismes moléculaires sous-jacents à leur libération au cours de ces maladies.

Pour exemple, citons les protéines S100 auxquelles il a été attribué un rôle dans l'arthrite, le psoriasis, des maladies cardiaques, le cancer, la calcification de l’os et du cartilage ou encore l’athérosclérose (Donato et al., 2013). Les protéines HSP70 et HSP90 seraient impliquées dans des maladies neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer (Lu et al., 2014) (Ou et al.,

2014), des maladies infectieuses, des cancers solides ou encore dans des maladies auto-immunes comme l’arthrite rhumatoïde (Kaul et Thippeswamy, β011).

La protéine HMGB1 a été décrite pour son implication dans diverses maladies en situation aiguë mais aussi chronique. Ainsi HMGB1 contribue aux maladies du foie d’origine virale (comme les hépatite B et C), toxiques et ischémiques (Chen et al., 2013) (Yu et al., 2015) (Laursen et al.,

2016), au rejet aigu après transplantation cardiaque (Huang et al., 2007), à différentes tumeurs bénignes comme le cholestéatome (Szczepanski et al., 2015), aux maladies auto-immunes comme l’arthrite, l’athérosclérose, le lupus érythémateux systémique (Bianchi, β007) ou encore le psoriasis (Zhang et al., 2017). De plus, HMGB1 est impliquée dans différents cancers (Taguchi et al., 2000). Dans un modèle expérimental d’hépatocarcinome cellulaire, HMGB1 participe à la progression de la tumeur en induisant la surexpression de miR-β1 et l’induction des métalloprotéases vial’axe de signalisation IL-6/STAT-3 (Chen et al., 2015).

7.2. Alarmines en physiopathologie rénale

L’implication des alarmines dans différentes pathologies humaines a été proposée sur la base d’observations cliniques jointes à des démonstrations apportées par la modélisation animale et cellulaire. Toutefois, s’agissant en particulier des pathogénies rénales, l’implication des alarmines demeure un domaine d’exploration relativement récent et peu documenté.

Les données cliniques et expérimentales disponibles s’accordent sur l’implication de l’IL-1-α (Tripathi et al., 2015) (Anders, 2016). Cette alarmine libérée par les cellules en nécrose, en agissant sur son récepteur IL-1R exprimé par les cellules rénales, entraîne une réponse inflammatoire. A cet égard, chez le patient IRT, une augmentation significative des taux sériques d’IL-1-α a été observée.

49 On attribue à l’alarmine HMGB1 un rôle dans le développement de l’insuffisance rénale aiguë (Zakiyanov et al., β01γ), de l’insuffisance rénale chronique (Leelahavanichkul et al., 2011) (Bruchfeld et al., 2008), des néphropathies diabétiques (Kim et al., 2011), des carcinomes du rein à cellules claires (Takeuchi et al., 2013) mais également dans le développement des néphrites lupique (Zickert et al., 2012) (Li et al., 2015) et glomérulaire (Oyama et al., 2010).

7.2.1. HMGB1 en IR rénale

Des travaux réalisés en modélisation chez la souris ont permis de montrer l’implication de l’axe HMGB1-TLR4 dans l’initiation des lésions d’IR rénale.

Ainsi, au cours de l’IR rénale, il a été observé des lésions tubulaires associées à une surexpression des récepteurs TLRβ et TLR4 ainsi qu’à la translocation de HMGB-1 du noyau vers le cytoplasme, activant les voies de signalisation médiées par ERK/NF-kB et aboutissant à l’expression de cytokines pro-inflammatoires (TNF-α, IL-6 et IL-1 ) (Leemans et al., 2005) (Wu

et al., 2010) (Jiong Zhang et al., β016). Le blocage pharmacologique d’HMGB-1 réduit les lésions

tubulaires et la production des cytokines pro-inflammatoires tandis que l’administration d’HMGB1 recombinante exacerbe ces lésions induites par l’IR, ceci via la mise en jeu des TLR2 et TLR4 (Wu et al., 2010) (Li et al., β011). L’injection de dexaméthasone, un glucocorticoïde de

synthèse, protège le rein contre les lésions d’IR en inhibant les acétyltransférases. Cette inhibition s’accompagne d’une diminution de l’acétylation de HMGB1 ce qui empêche sa translocation du noyau vers le cytoplasme. De la même manière, le pré-traitement avec une molécule libérant le monoxyde de carbone, la CORM-2 (pour « CO-releasing molecule-2 »), avant l’IR rénale, diminue l'activité de l'histone acétyltransférase ce qui empêche l'acétylation et la libération d’HMGB1, protégeant ainsi le rein de l’IR (Ruan et al., 2014).

Les TLR 2 et TLR4 sont constitutivement exprimés dans le rein à la surface des cellules épithéliales tubulaires. Le TLR4 est également exprimé à la surface des DC résidentes et des podocytes. Chez la souris, l’IR est documentée pour accroitre l’expression des transcrits TLRβ et 4 au sein du tissu rénal suggérant une modulation de ces récepteurs par l’IR (Leemans et al.,

2005). Cette expression est majorée et survient dans les heures qui suivent la reperfusion avec des cinétiques différentes en fonction du tissu. Ainsi, cette expression survient de manière plus précoce pour l’endothélium que pour l’épithélium (Chen et al., 2011).

7.2.2. HMGB1 en transplantation rénale

En modélisation animale de la transplantation rénale, la contribution des récepteurs PRR a été étudiée. Les reins transplantés chez des souris déficientes en TLR2, TLR4, MyD88 ou TRIF

50 développent moins d’atteintes glomérulaires et moins de fibrose interstitielle que les souris contrôles (Wu et al., 2012) (Wang et al., 2010), démontrant bien par défaut un rôle des TLR ainsi que des molécules impliquées dans la transduction de leurs signaux.

Chez l’homme, le rôle d’HMGB1 dans l’IR rénale associée à la transplantation d’organe a été documenté principalement par deux études indépendantes dont l’analyse de biopsies rénales préimplantatoires issus de donneurs décédés a révélé une expression nucléaire et cytoplasmique d’HMGB1 accompagnée d’une surexpression de TLR4 et/ou de MyD88 par les cellules tubulaires proximales et distales, par rapport aux donneurs vivants (Krüger et al., 2009) (Andrade-Oliveira et al., β01β). De manière intéressante, cette expression d’HMGB1 et de TLR4, n’a été observée que

sur des biopsies issues de donneurs présentant des cellules tubulaires nécrotiques et apoptotiques de façon précoce après l’IR. Enfin, les patients transplantés rénaux porteurs d’une mutation de TLR4 générant un récepteur non-fonctionnel, développent moins de rejet aigu (Ducloux et al.,

2005).

Dans un contexte de transplantation rénale, ces données suggèrent une modulation par l’ischémie de l’expression tubulaire d’HMGB1 et de TLR4. A cet égard, on soulignera aussi les travaux de Thierry et al., menés au sein de notre équipe ont permis de mettre en évidence une libération très précoce d’HMGB1 suite à une transplantation rénale. En effet, la protéine HMGB1 a été détectée dans le sang et dans les urines de manière significative et ce dès 30 minutes après la reperfusion. Cette libération d’HMGB1 s’accompagne d’une surexpression de l’ARNm des récepteurs TLR2 et TLR4 au sein des populations leucocytaires périphériques (Thierry et al., 2014). Cette étude a permis la démonstration princepsen transplantation rénale chez l’homme d’une libération précoce

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