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Adjoint d’un op´ erateur

Dans le document Topologie, Analyse Fonctionnelle (Page 97-101)

5.4.1 Cas g´ en´ eral

Dans cette section, X et Y sont des espaces vectoriels norm´es sur le mˆeme corps K=R ou C. Soit T ∈ L(X, Y). Siy ∈Y, alors l’applicationx7→ hy, T(x)iest une forme lin´eaire continue sur X. Comme cette application d´epend dey et deT, il est acceptable de la noter T(y). On obtient ainsi une application T :Y →X, qui est enti`erement d´efinie par les identit´es

hT(y), xi=hy, T(x)i, o`u y ∈Y et x∈X.

Th´eor`eme 5.4.1 Si T ∈ L(X, Y), alors l’application T :Y →X est lin´eaire continue, et on a kTk=kTk. L’op´erateur T ∈ L(Y, X) s’appelle l’adjoint de l’op´erateur T.

Preuve. La lin´earit´e est ´evidente. De plus, on a sup

||y||≤1

||T(y)|| = sup

||y||≤1

sup

||x||≤1

|hT(y), xi|;

= sup

||x||≤1

sup

||y||≤1

|hy, T(x)i|

= sup

||x||≤1

||T(x)||,

o`u la derni`ere ´egalit´e d´ecoule du th´eor`eme de Hahn-Banach (voir 5.3.3). Par cons´equent, T est continue et ||T||=||T||.

Exemple Soit F :L1([0; 2π])→c0(Z) la transformation de Fourier, d´efinie par Ff = (cn(f))n∈Z,

o`u les cn(f) sont les coefficients de Fourier de f. Alors l’op´erateur F : `1(Z) → L([0; 2π]) est donn´e par la formule

Fa(t) =

+∞

X

−∞

aneint.

La preuve du r´esultat suivant est imm´ediate.

Proposition 5.4.2 Si S ∈ L(X, Y) et T ∈ L(Y, Z), alors (T S) =ST.

Le r´esultat suivant est ´egalement tr`es simple, mais souvent utile. Rappelons que siA est une partie d’un espace vectoriel norm´e E, on pose

A ={x ∈X; hx, ai= 0 pour tout a∈A}. Proposition 5.4.3 Si T ∈ L(X, Y), alors Ker(T) = Im(T).

Preuve. Il suffit d’´ecrire que pour y ∈ Y, on a T(y) = 0 si et seulement si hT(y), xi = 0 pour tout x∈X.

Corollaire 5.4.4 Si T ∈ L(X, Y), alorsT est injectif si et seulement si T est `a image dense.

Preuve. Cela d´ecoule de la proposition et du crit`ere dual de densit´e.

Notons que ce r´esultat n’est pas sym´etrique : il n’est pas vrai que T est n´ecessairement `a image dense siT est injectif. Par exemple, siF :L1([0; 2π])→c0(Z) est la transformation de Fourier, alors F est injectif, mais F :`1(Z)→ L([0; 2π]) n’est pas `a image dense, car son image est contenue dans C([0; 2π]), qui n’est pas dense dansL([0; 2π]).

Dans le mˆeme esprit, voici un r´esultat caract´erisant la surjectivit´e en termes d’adjoint. La preuve est instructive, car elle m´elange le th´eor`eme de Hahn-Banach et le th´eor`eme de l’image ouverte.

C’est donc un excellent “r´esum´e” de la fa¸con dont ces r´esultats peuvent ˆetre utilis´es.

Proposition 5.4.5 SoientX et Y deux espaces de Banach r´eels. Pour un op´erateur T ∈ L(X, Y), les propri´et´es suivantes sont ´equivalentes.

(1) T est surjectif.

(2) Il existe une constante c >0 telle que ∀y ∈Y kT(y)k ≥ckyk.

(3) T est injectif et `a image ferm´ee.

Preuve. Si T est surjectif, alors, d’apr`es le th´eor`eme de l’image ouverte, on peut trouver une constante C < ∞ telle que BY ⊆ T(CBX). En ´ecrivant la d´efinition de la norme de T(y), on en d´eduit que (2) est v´erifi´ee avecc= C1 ; les d´etails sont laiss´es en exercice. Par cons´equent, (1) entraˆıne (2). L’´equivalence de (2) et (3) d´ecoule du th´eor`eme d’isomorphisme de Banach et a d´ej`a

´

et´e d´emontr´ee (voir 4.5.5). Il reste donc `a montrer que (2) entraˆıne (1).

Supposons (2) v´erifi´ee pour une certaine constante c >0. D’apr`es le th´eor`eme 4.5.8, il suffit, pour

´

etablir la surjectivit´e deT, de montrer qu’il existe une constanteC <∞telle queT(CBX) contient la boule BY. On va “bien sˆur” prendre C = 1c. Posons B =T(1cBX), et supposons qu’il existe un pointy0 ∈BY tel quey0 6∈B. D’apr`es le th´eor`eme de s´eparation des convexes, on peut alors trouver une forme lin´eaire y0 ∈Y telle quehy0, y0i>sup{hy0, y; y∈B}. Comme ky0k ≤1, on a alors

ky0k ≥ hy0, y0i > sup

hy0, T(x)i; x∈ 1cBX

= sup

hT(y0), xi; kxk ≤ 1c

= 1ckT(y0)k,

ce qui contredit (2). On a donc bien montr´e que (2) entraˆıne (1).

Remarque. La proposition pr´ec´edente est en fait valable ´egalement pour des espaces de Banach complexes. Il faut juste adapter la preuve de l’implication “(1) entraˆıne (2)”. Le th´eor`eme de s´eparation des convexes fournit une forme R-lin´eaire Φ : Y → R. Cette forme R-lin´eaire Φ est la partie r´eelle d’une unique forme lin´eaire continue y0, d´efinie par hy0, yi = Φ(y)− iΦ(iy). En utilisanty0, la d´emonstration fonctionne encore si on observe que pour toute forme lin´eairex ∈X (ici x =T(y0)), on a kxk= sup{Rehx, xi; kxk ≤1}.

5.4.2 Cas hilbertien

Dans cette section, les lettres H, K, Ld´esignent des espaces de Hilbert, sur le mˆeme corps K=R ou C. On note syst´ematiquement h , i les produits scalaires, avec la convention habituelle dans le cas complexe : hx, yi est lin´eaire par rapport `a y et antilin´eaire par rapport `a x.

Si T ∈ L(H, K), alors T est par d´efinition un op´erateur lin´eaire de K dans H. Mais comme K s’identifie canoniquement `a K et H `a H, l’op´erateur T s’identifie `a un op´erateur de K dans H, que l’on notera encore T, et qu’on appelle toujours l’adjoint de T. Ainsi T : K → H est d´efini par la propri´et´e suivante :

∀(x, y)∈K×H hT(x), yi=hx, T(y)i.

Il est important de noter que l’application T 7→ T est lin´eaire de L(H, K) dans L(K, H) si les espaces de Hilbert H etK sont r´eels, mais antilin´eaire dans le cas complexe.

n v´erifie imm´ediatement que si T ∈ L(H, K), alors (T) =T .Ainsi, l’application T 7→T est une involution, et est donc en particulier bijective de L(H, K) surL(K, H). Une cons´equence de ce fait est que si un ´enonc´e g´en´eral concernantT etTest vrai, alors l’´enonc´e obtenu en ´echangeant les rˆoles de T et T est ´egalement vrai (et vice versa). Par exemple, on sait qu’un op´erateur T ∈ L(H, K) est `a image dense si et seulement si T est injectif, et on en d´eduit qu’un op´erateur T ∈ L(H, K) est injectif si et seulement si T est `a image dense.

Exemple 1 Si on prend H = Kd muni de sa norme euclidienne usuelle, un op´erateur T ∈ L(Kd) s’identifie `a sa matrice M dans la base canonique de Kd. Alors la matrice M de T est la trans-conjugu´ee deM : si M = (aij), alors M = (aji).

Preuve.Notons (e1, . . . , ed) la base canonique deKd. AlorsT(ej) =P

iaijei, et doncaij =heiT(ej)i pour tout couple (i, j). Par cons´equent, les coefficients de M sont donn´es par aij =hei, T(ej)i = hT(ei), eji=hej, T(ei)i=aji.

Exemple 2 L’exemple pr´ec´edent se g´en´eralise en dimension infinie. Soit H = `2(N), et notons ei le i-`eme vecteur de la “base canonique” de `2(N). SiT ∈ L(H), alors T est enti`erement d´etermin´ee par la “matrice infinie” M = (aij) = (hei, T(ej)i). La matrice associ´ee `a T estM = (aij).

L’exemple suivant g´en´eralise les deux pr´ec´edents.

Exemple 3 Soit (Ω,A, µ) un espace mesur´e (comme toujours σ-fini). Pour K ∈ L2(Ω × Ω), notons TK : L2(Ω) → L2(Ω) l’op´erateur associ´e au noyau K. On a alors (TK) = TK, o`u K(x, y) =K(y, x).

Preuve. Rappelons que l’op´erateurTK est d´efini par TKf(x) =

Z

K(x, y)f(y)dµ(y). Si f ∈L2(Ω), on a formellement

hTKf, giL2 = Z

TKf(x)g(x)dµ(x)

= Z

Ω×Ω

f(y) K(x, y)g(x)dµ(x)dµ(y)

= Z

Ω×Ω

f(y) K(y, x)g(x)dµ(x)dµ(y)

= Z

f(y)TKg(y)dµ(y)

=hf, TKgiL2,

ce qui est le r´esultat souhait´e. La justification de ce calcul repose bien entendu sur le th´eor`eme de Fubini : il suffit de montrer qu’on a R

Ω×Ω|K(x, y)| |f(y)| |g(x)|dµ(x)dµ(y)<∞, ce qui se prouve `a l’aide de l’in´egalit´e de Cauchy-Schwarz. Les d´etails sont laiss´es en exercice.

Exemple 4 Si p est une projection orthogonale, alors p =p.

Preuve. Notons E l’image de p. Six, y ∈H, alors hx, p(y)i =hp(x), p(y)i car p(y)∈E et x−p(x) est orthogonal `a E. De mˆeme, on a hp(x), yi = hp(x), p(y)i car p(x) ∈ E et y−p(y) ∈ E. Par cons´equent, on ahx, p(y)i=hp(x), yi pour tousx, y ∈H, d’o`u le r´esultat.

5.4.3 Norme d’un op´ erateur auto-adjoint

Si T ∈ L(H) est un op´erateur quelconque, alors, par d´efinition de kTk et grˆace `a l’identit´e kuk = sup{|hu, yi|; kyk ≤1}, on a

kTk= sup{|hT(x), yi|; kxk ≤1, kyk ≤1}.

Dans le cas o`u l’op´erateurT estauto-adjoint (T =T), on a le r´esultat suivant, souvent utile.

Proposition 5.4.6 Si T ∈ L(H) est auto-adjoint, alors on a ||T|| = sup{|hT(x), xi|; ||x|| ≤ 1}. En particulier, si T est auto-adjoint et si hT(x), xi= 0 pour tout x∈H, alors T = 0.

Preuve. Posons M = sup{|hT(x), xi|; ||x|| ≤ 1}. D’apr`es l’in´egalit´e de Cauchy-Schwarz, on a

|hT(x), xi| ≤ ||T(x)|| ||x|| ≤ ||T|| pour toutx∈BH, et donc M ≤ ||T||. C’est l’in´egalit´e inverse qui est int´eressante.

Par d´efinition de M, on a

|hT(x), xi| ≤M||x||2

pour tout x∈H. D’autre part, comme T est auto-adjoint, on a par “polarisation” : RehT(x), yi= 1

4(hT(x+y), x+yi − hT(x−y), x−yi)

pour tous x, y ∈H. On en d´eduit RehT(x), yi ≤ M4 (||x+y||2+||x−y||2), autrement dit RehT(x), yi ≤ M

2 ||x||2+||y||2

pour tous x, y ∈ H. Le membre de droite ne change pas si on remplace y par λy, o`u |λ| = 1. En choisissant λ tel que hT(x), λyi=|hT(x), yi|, on obtient donc

|hT(x), yi| ≤ M

2 ||x||2+||y||2

pour tous x, y ∈H. En rempla¸cantx par tx ety par yt, o`u t >0 cela donne

|hT(x), yi| ≤ M 2

t2||x||2+||y||2 t2

,

d’o`u finalement, en optimisant par rapport `at2 :

∀x, y ∈H |hT(x), yi| ≤M||x|| ||y||. On a donc bien ||T|| ≤M, ce qui termine la d´emonstration.

Remarque Si on veut simplement montrer qu’on a M 6= 0 si T 6= 0, alors on peut aller beau-coup plus vite : si M = 0, alors hT(x+y), x+yi = 0 pour tous x, y ∈ H, d’o`u RehT(x), yi = 0 pour tous x, y ∈H (en d´eveloppant le produit scalaire), et donc T = 0. La mˆeme preuve fournit le r´esultat purement alg´ebrique suivant : si E est un K-espace vectoriel et si B :E×E →K est une forme hermitienne v´erifiant B(x, x) = 0 pour tout x∈E, alors B = 0.

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