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2.3 Evaluation de la qualit´e des assemblages ´

2.3.3 Adh´esion et type de liaisons mis en jeu

Ce qui diff´erencie notre ´etude des r´esultats d´ej`a publi´es sur le collage de couches minces m´etalliques `

a RT [11, 12], c’est le fait d’exposer nos surfaces `a l’atmosph`ere ambiante entre la sortie du bˆati de pulv´erisation PVD et la mise en contact. Pendant ce temps, les propri´et´es des surfaces m´etalliques vont ´evoluer suite aux possibles interactions avec les esp`eces pr´esentes dans l’atmosph`ere de stockage. De nombreuses ´etudes ont ´et´e men´ees sur l’oxydation des surfaces m´etalliques `a basse temp´erature notamment pour des temp´eratures inf´erieures ou ´egales `a 30˚C [45–48]. Il a ainsi ´et´e montr´e que la probabilit´e d’adsorption d’une mol´ecule frappant la surface du m´etal est proche de l’unit´e [49]. De plus, l’utilisation de bˆatis UHV coupl´ee `a des analyses de diffraction d’´electrons lents (Low Energy Electron Diffraction – LEED – en termes anglophones) a permis de d´eterminer le nombre de monocouches d’oxyde m´etallique cr´e´ees spontan´ement sur plusieurs m´etaux dans les premiers instants d’une exposi- tion `a l’air [45]. Des donn´ees thermodynamiques telles que les enthalpies standard de formation ∆fH0

de diff´erentes phases d’oxyde ont ´egalement ´et´e rapport´ees [48]. La table 2.4 pr´esente ces diff´erentes grandeurs issues de la litt´erature pour les quatre m´etaux consid´er´es dans ce chapitre ainsi que pour l’Al et le Si `a titre de comparaison.

M´etal Phase

oxyd´ee

Nombre de monocouches d’oxyde form´ees spontan´ement Enthalpies standard de formation ∆fH0 Au Au2O3 Traces [50] - 13 kJ.mol-1 [51] Cu Cu2O 4 `a 6 [45] - 169 kJ.mol-1 [52] Pt PtO2 12 [45] - 80 kJ.mol-1 [53] W WO3 12 [45] - 843 kJ.mol-1 [54] Al Al2O3 2 `a 3 [45] - 1676 kJ.mol-1 [52] Si SiO2 12 [45] - 911 kJ.mol-1 [52]

Tab. 2.4 – Donn´ees morphologiques et thermodynamiques issues de la litt´erature : Nombres de couches form´ees spontan´ement en surfaces de m´etaux lors de l’exposition `a l’air ambiant et enthalpies de formations de diff´erentes phases m´etalliques oxyd´ees

Ces donn´ees sont tr`es int´eressantes `a comparer avec les travaux d’adh´esion mesur´es lors de la mise en contact de nos surfaces m´etalliques. Nous pouvons noter que quatre `a six couches se cr´eent spontan´ement lors de l’exposition des surfaces de Cu `a l’air ambiant (comportement similaire `a celui de l’Al). Aucune couche d’oxyde continue n’est obtenue pour aucun des trois autres m´etaux. Tous les oxydes m´etalliques n’ont pas la mˆeme « facilit´e thermodynamique » `a se former. En effet, plus la valeur absolue de ∆fH0 est ´elev´ee, plus il est facile de former le compos´e consid´er´e. Ceci est

particuli`erement bien illustr´e pour le cas de l’Al qui est un m´etal connu pour s’oxyder extrˆeme- ment facilement. Nous pouvons ainsi distinguer parmi nos m´etaux d’´etude l’Au et le Pt ne s’oxydant pas facilement et pouvant ˆetre consid´er´e comme des m´etaux « nobles » (derni`ere colonne de la table 2.4). Si nous consid´erons maintenant la litt´erature relative `a l’obtention de l’adh´esion des surfaces lors

du proc´ed´e de collage direct, il a ´et´e montr´e que, dans le cas de surfaces de Si, ce ph´enom`ene est la cons´equence de l’´equilibre de deux types de forces [55, 56] :

— Les forces attractives. Ce sont des forces de courte port´ee de type inter-mol´eculaires dans la configuration consid´er´ee [57]. Dans le cadre du collage de surfaces de Si, un distinguo est habi- tuellement fait entre le collage de surfaces hydrophiles et hydrophobes [35]. De fa¸con pratique, ces variantes sont obtenues par des ´etapes de nettoyage diff´erentes qui ne laissent pas le mˆeme type de terminaisons chimiques en surface des substrats. Seules les forces de van der Waals agissent dans le cas hydrophobe, alors que des liaisons typ´ees « ponts hydrog`ene » s’ajoutent pour la variante hydrophile [25].

— Les forces r´epulsives. Ce sont des forces m´ecaniques li´ees `a la d´eformation ´elastique des asp´erit´es des surfaces mises en contact [58]. Nous comprenons donc que, plus les asp´erit´es sont hautes, plus le point d’´equilibre sera difficile `a obtenir puisque les forces attractives sont de courte port´ee. Ceci explique la limite de rugosit´e constat´ee dans le cadre de collage de surfaces de SiO2 hydrophiles [32].

Puisque la caract´erisation de la topologie de nos surfaces par AFM a montr´e que les valeurs rugosit´es ´etaient globalement inf´erieures ou ´egales `a 0,5 nm RMS (figure 2.3), les diff´erences de travaux d’adh´esion entre les structures ne peuvent ˆetre attribu´ees qu’aux forces attractives entrant en ligne de compte dans chacun des syst`emes.

Inspir´es par la distinction classiquement faite dans le cadre de collage de surfaces de Si, nous avons mesur´e l’hydrophilie des surfaces par la technique d’angle de goutte (table 2.1). Nous pouvons consid´erer que les structures 2-2, 2-3 et 2-5 et 2-6 contenant des couches de Cu et de W ont un comportement hydrophile. Les travaux d’adh´esion Γa(lame) mesur´es sont du mˆeme ordre de grandeur (table 2.3) ; ce

qui pourrait confirmer que les liaisons agissant dans ces collages sont similaires. Ceci pourrait expliquer le fait qu’une couche d’oxyde se forme pendant le stockage des surfaces avant collage en accord avec les valeurs de ∆fH0 favorable `a leur formation (derni`ere colonne de la table 2.4). Le r´egime de forces

attractives mises en jeu serait alors la somme des contributions des liaisons de van der Waals et des « ponts hydrog`enes ».

Les structures 2-4 et 2-6 ont sp´ecialement ´et´e imagin´ees afin de cr´eer des oxydes surfaciques, respectivement par voie chimique et d´epos´ee, afin de comparer leur comportement avec ceux obtenus nativement. Aucune diff´erence de comportement significative n’est constat´ee dans le cas du W et du WOx (structures 2-5 et 2-6 table 2.3) alors que les deux structures comprenant du Cu ne poss`edent

pas les mˆemes propri´et´es en adh´esion. Des exp´erimentations suppl´ementaires sont n´ecessaires afin de mieux comprendre ces diff´erences. Cependant, nous pouvons formuler des hypoth`eses notamment sur la phase d’oxyde de cuivre cr´e´ee par le brossage qui peut-ˆetre diff´erente de celle cr´e´ee native- ment et poss`eder des propri´et´es adh´esives diff´erentes [59]. L’´etape de brossage d´egrade ´egalement les propri´et´es de plan´eit´e des surfaces avec la pr´esence de trous d’une dizaine de nanom`etres de profondeur dans la couche si l’on se r´ef`ere aux valeurs PV de rugosit´e (figure 2.3(c)). Cette topologie du mˆeme ordre de grandeur que l’´epaisseur de la couche pourrait perturber la propagation du front de collage `a travers l’assemblage et diminuer le travail d’adh´esion lors de la propagation du front de collage. Les valeurs de Γc sont globalement sup´erieures `a celles de Γa(lame) mesur´ees dans toutes les

— Nous avons d´ej`a d´evelopp´e dans la partie 2.1 que la caract´erisation du contact m´etal-m´etal sous UHV pr´esentait une hyst´er`ese suivant le protocole de mesure utilis´e par Pethica, Pashley et Tabor [18, 19]. Ceci est dˆu `a la contribution de la d´eformation plastique possible des m´etaux qui doit ´egalement prise en compte en configuration de films minces [60]. Au niveau atomique, les simulations num´eriques de contacts m´etal/m´etal d´emontrent des effets demouillage et de transferts d’atomes entre les surfaces pouvant ´egalement expliquer cette hyst´er`ese [61].

— Dans le cas de mat´eriaux non ductiles dans un r´egime ´elastique lors de l’adh´esion des surfaces `a RT, Fournel et al. proposent un m´ecanisme de cr´eation de liaisons covalentes `a RT pouvant expliquer ce saut de valeur [25].

— Dans le cas sp´ecifique de surfaces de Cu hydrophiles coll´ees apr`es activation CMP, Di Cioccio et al. ont montr´e que l’eau pi´eg´ee au niveau de l’interface de collage pouvait r´eagir et oxyder les couches de Cu lors d’un stockage des structures `a RT [62]. La cr´eation de cette couche d’oxyde interfaciale peut ˆetre associ´ee `a la cr´eation de liaisons covalentes et renforce la tenue m´ecanique des assemblages.

Pour les structures hydrophiles 2-2 et 2-3, nous pouvons penser que ce dernier ph´enom`ene est pr´edominant dans le saut de valeur observ´e. Ainsi, les deux structures comprenant des couches de Cu poss`edent des valeurs de Γc semblables apr`es stockage des assemblages `a RT. L’hydrophilie initiale

similaire refl`ete des quantit´es semblables de mol´ecules d’eau adsorb´ees puis pi´eg´ees lors de la mise en contact conduisant, par la suite, `a une oxydation au niveau de l’interface de collage ´equivalente. Le chapitre 3 suivant sera consacr´e sp´ecifiquement `a l’´etude de l’impact de diff´erents param`etres sur ce renforcement par oxydation m´etallique dans le cas du collage de couches de Cu.

Le saut de valeur pour les structures 2-5 et 2-6 concernant les couches de W est plus faible que dans le cas du Cu (table 2.3). Ceci peut ˆetre expliqu´e par la faible ´evolution des premi`eres couches d’oxyde de tungst`ene `a l’ambiante compar´ee `a celle des couches d’oxyde de cuivre [45]. Cependant, le saut reste significatif et du mˆeme ordre de grandeur que la r´ef´erence de Si-Si hydrophile. Un m´ecanisme de renforcement par cr´eation de liaisons covalentes `a RT peut-ˆetre ´egalement envisageable pour ces couches de m´etaux et oxydes r´efractaires.

En ce qui concerne les m´etaux « nobles » Au et Pt (structures 2-1 et 2-4), deux comportements peuvent ˆetre distingu´es. Bien que l’oxydation des surfaces ne puisse ˆetre consid´er´ee dans ces deux cas, nous devons prendre en compte une autre source de d´egradation de l’adh´esion : la contamination organique des surfaces [63, 64]. En effet, le Pt est tr`es couramment utilis´e dans le domaine de la catalyse h´et´erog`ene, notamment du fait de sa tr`es forte r´eactivit´e chimique avec l’hydrog`ene et les compos´es organiques [6, 65]. La saturation de la surface de Pt par ces contaminants peut conduire `

a la faible valeur de Γa(lame) mesur´ee (table 2.3). La mesure d’angle de goutte nous confirmant la

nature hydrophobe de la surface (terminaisons H), seules les forces de van der Waals de faible intensit´e permettent la fermeture [66].

Le cas de l’Au se d´emarque largement des autres m´etaux puisque, dans nos conditions exp´erimen- tales, il ne semble pas comporter d’oxydes surfaciques ou contaminants adsorb´es en surface. Les fortes valeurs de Γa et Γc mesur´ees semblent montrer que d’autres liaisons sont mises en int´eraction dans

forment entre les deux surfaces `a RT. L’intensit´e des forces en jeu est beaucoup plus forte que celle des liaisons inter-mol´eculaires classiquement consid´er´ees `a RT [57].

Afin de confirmer nos diff´erentes hypoth`eses issues de la mesure des travaux d’adh´esion et de s´eparation des diff´erentes configurations coll´ees, la morphologie des interfaces et des couches de collage a ´et´e observ´ee par la technique MET.