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L’ACTION HUMAINE, LA VERTU ET LE BONHEUR

Dans le document La justice humaine chez Thomas d’Aquin (Page 118-133)

Une fois établi qu’il y a un bien humain, auquel correspond la fin suprême de l’homme dans cette vie, Thomas peut introduire une première définition du bonheur. Le bonheur consiste dans la perfection humaine, étant ainsi toujours cherché pour lui-même et jamais pour rien d’extérieur à lui. Son investigation concerne donc l’éthique. Or, l’Éthique à

Nicomaque cherche à identifier la nature spécifique du bonheur. De même, dans son Commentaire, l’Aquinate part de l’opinion communément acceptée sur lui :

(…) tous admettent que le bonheur est ce qu’il y a de meilleur, et il convient que le bonheur soit la fin ultime et le bien parfait qui se suffit par soi. Mais il faut parler de manière encore

270 CEN, I, 2, §19.

Quicumque finis est talis quod alia volumus propter illum et ipsum volumus propter se ipsum et non aliquid aliud, iste finis non solum est bonus, sed etiam est optimus, et hoc apparet ex hoc quod semper finis cuius gratia alii fines quaeruntur est principalior, ut ex supra dictis patet; sed necesse est esse aliquem talem finem. Ergo in rebus humanis est aliquis finis bonus et optimus.

271 CEN, I, 9, §107.

« (…) Il pose deux conditions de la fin ultime. La première, bien sûr, qu’elle soit parfaite. La seconde, qu’elle soit suffisante en elle-même ».

[Deinde cum dicit: hoc autem adhuc magis explanare etc., ponit duas condiciones ultimi finis: primo quidem

quod sit perfectum; secundo quod sit per se sufficiens, ibi, videtur autem et ex per se sufficientia et cetera.

272 CEN, I, 9, §111.

« Ainsi, est parfait de manière absolue ce qui est toujours en soi-même digne de choix et ne l’est jamais pour autre chose. Tel est manifestement le bonheur (la félicité). Jamais nous ne le choisissons pour autre chose, mais toujours pour lui-même ».

Et ita simpliciter perfectum est, quod est semper secundum se eligibile et nunquam propter aliud. Talis autem videtur esse felicitas, quam numquam eligimus propter aliud, sed semper propter seipsam.

CEN, I, 9, 116.

« C’est de cette manière que le bonheur (la félicité) dont on parle maintenant a suffisance de soi, parce qu’il contient en lui tout ce qui est nécessaire en soi, mais pas tout ce qui peut advenir à l’homme ».

Et sic felicitas de qua nunc loquitur habet per se sufficientiam, quia scilicet in se continet omne illud quod est homini necessarium, non autem omne illud quod potest homini advenire.

plus manifeste du bonheur, de manière à savoir ce qu’il est spécifiquement273.

Le thème du bonheur engendre une certaine tension, étant donnée la nécessité de distinguer deux plans dans sa réalisation. Thomas l’examine en partant de la constatation que l’homme possède une fin naturelle, car il appartient à la nature. L’opération conforme à cette fin lui est propre et constitue son plus grand bien. Thomas argue que la nature spécifique du bonheur humain doit être cherchée dans la réalisation de ce que l’homme garde de plus important. Or, le bonheur humain est reconnu comme la meilleure des choses. Les êtres naturels se distinguent les uns des autres par leur fonction dans l’ordre de la nature, où chacun possède une opération propre ordonnée. À partir de cette opération on l’identifie. Le Docteur de l’Église reproduit à ce sujet la pensée d’Aristote :

Il dit donc en premier que ce qu’est le bonheur pourra devenir manifeste si l’on prend l’opération de l’homme. Car pour toute chose qui a une opération propre, c’est elle qui est son bien, et pour elle être bien consiste en son opération. Ainsi, pour le joueur de flûte, le bien consiste en son opération274.

L’opération propre à l’homme lui permet d’atteindre à sa forme plus parfaite. Thomas fait appel à la distinction entre l’homme tel qu’il doit être et l’homme tel qu’il peut être et indique un chemin qui relie l’un à l’autre. Inséré dans un tout ordonné vers une fin et doté de la faculté de se mouvoir, l’homme – qui est libre – décide d’entreprendre l’opération qui justifie son insertion dans l’ordre ou pas. La forme de l’homme n’est pas dès le principe finie. Il peut la perfectionner, œuvrant selon son opération spécifique. Dans ce sens, sa forme est une perfection première et son opération une perfection seconde, laquelle permet la recherche de son bien, un bien dit final – sa perfection ultime. Si quelque chose d’extérieur est appelé une fin, il l’est seulement en raison de l’opération par laquelle l’homme rejoint son essence. Par conséquent, l’homme ayant une activité caractéristique, son bien final ou bonheur se trouve dans son exercice.

273 Nous modifions la traduction de Y. Pelletier. CEN, I, 10, §118.

Dicit ergo primo, quod omnes confitentur felicitatem esse aliquid optimum ad quod pertinet quod felicitas sit ultimus finis et perfectum bonum et per se sufficiens.

274 CEN, I, 10, §119.

Dicit ergo primo, quod quid sit felicitas poterit manifestum esse si sumatur operatio hominis. Cuiuslibet enim rei habentis propriam operationem, bonum suum et hoc quod bene est ei consistit in eius operatione. Sicut tibicinis bonum consistit in eius operatione.

La raison en est que le bien final de n’importe quelle chose est sa perfection ultime. Or sa forme est une première perfection et son opération est une perfection seconde. Si toutefois c’est une chose extérieure qu’on dit sa fin, ce ne sera pas sans le biais d’une opération par laquelle on atteigne à cette chose, soit en la faisant, comme le constructeur [fait] la maison, soit qu’on en use ou en jouisse. Aussi reste-t-il que le bien final de n’importe quelle chose est à rechercher dans son opération. Si donc il existe pour l’homme une opération propre, nécessairement c’est dans son opération propre que consiste son bien final même, qui est le bonheur. Et ainsi le bonheur est l’opération propre de l’homme275.

Or, un tel raisonnement peut conduire le lecteur à conclure que le bonheur de l’homme demeure dans la vie contemplative. En effet, l’Aquinate soutient que l’opération propre à chaque chose est donnée par sa forme. Chez l’homme, la forme est rationnelle et lui attribue sa nature spécifique. Il se distingue et s’élève dans l’univers conçu naturellement par la maîtrise de la faculté rationnelle. C’est donc à partir de son exercice qu’on doit chercher la formulation d’une définition plus précise du bonheur. Grosso modo, la faculté rationnelle peut être exercée de deux manières : l’une seulement par participation, vu qu’à la base l’activité est irrationnelle, propre à l’appétit, mais obéissante à la raison et ainsi régulée ; l’autre par nature, lorsque la raison par soi n’opère que le raisonnement et la compréhension, soit dans le but de l’action, soit dans le but de la spéculation pure. Selon le Saint Docteur, la forme humaine est donnée, de manière plus exacte, par l’opération proprement rationnelle et, plus encore, lorsque cette opération est tournée plutôt vers la vie de la pensée que vers la vie active.

En effet, l’homme tire justement sa nature de ce qu’il est rationnel. Mais il y a deux sortes de rationnel. L’un, certes, l’est par participation, à savoir pour autant qu’il est persuadé et réglé par la raison. Tandis que l’autre est rationnel par essence : il a de lui-même [l’aptitude à] raisonner et intelliger. C’est celle-ci, bien sûr, qui se dit plus principalement partie rationnelle. Car ce qui est par soi est toujours principal en regard de ce qui est par le biais d’autre chose. Parce que donc le bonheur est le bien principalissime de l’homme, il s’ensuit qu’il consiste davantage en ce qui est rationnel par essence qu’en ce qui est rationnel par

275 CEN, I, 10, §119.

Et huius ratio est, quia bonum finale cuiuslibet rei est ultima eius perfectio. Forma autem est perfectio prima, sed operatio est perfectio secunda. Si autem aliqua res exterior dicatur esse finis, hoc non erit nisi mediante operatione, per quam scilicet homo ad rem illam attingit vel faciendo, sicut aedificator domum, aut utitur seu fruitur ea. Et sic relinquitur quod finale bonum cuiuslibet rei in eius operatione sit requirendum. Si igitur hominis est aliqua operatio propria, necesse est, quod in eius operatione propria consistat finale bonum ipsius, quod est felicitas, et ita genus felicitatis est propria operatio hominis.

participation. De là on peut convenir que le bonheur consiste plus principalement en la vie contemplative qu’en l’active ; et [davantage] dans l’acte de la raison ou de l’intelligence qu’en l’acte de l’appétit réglé par la raison276.

Mais le fait que l’activité contemplative soit plus noble ne signifie pas que l’homme doive se consacrer exclusivement à la contemplation. Thomas atteste que, parmi les différentes activités nécessaires à la perfection humaine, celle qui est plus proche de la raison est la plus haute, quoiqu’elle ne remplace pas les autres. Il attire l’attention sur la liaison qui s’établit entre le bonheur et la vertu.

Dans un premier temps, le Docteur commun soutient que l’opération qui détient le privilège de rendre l’homme heureux est l’opération rationnelle et qu’opérer rationnellement équivaut à bien opérer, ce qui est propre à la vertu. L’homme le plus heureux est celui qui le fait le mieux. Si bien opérer admet certaines gradations – admettant que les différents biens sont différentes valeurs du bien – on admet aussi que des différentes vertus ont une évaluation variable. Dans ce sens, le bonheur que l’homme peut convoiter est celui qui correspond à la plus grande des vertus. Il enseigne :

Si donc l’œuvre de l’homme consiste en une certaine vie, à savoir celle où l’homme opère selon la raison, il s’ensuit qu’il appartient au bien de l’homme de bien opérer selon la raison, et [qu’il appartient] à l’homme le meilleur, à savoir heureux, qu’il le fasse de la meilleure façon. Or il appartient à la définition de la vertu que tout ce qui a une vertu opère bien grâce à elle, comme la vertu du cheval est ce grâce à quoi il court bien. Si donc l’opération du meilleur homme, à savoir de [l’homme] heureux, est d’opérer bien et de la meilleure façon selon la raison, il s’ensuit que le bien humain, à savoir le bonheur, soit d’opérer selon sa vertu : de sorte que, s’il existe une seule vertu de l’homme, l’opération qui se fait selon cette vertu sera le bonheur ; mais que s’il existe plusieurs vertus de l’homme, le bonheur sera l’opération qui sera la meilleure d’entre elles. Car le bonheur non

276 CEN, I, 10, §126.

Post vitam autem nutritivam et sensitivam non relinquitur nisi vita quae est operativa secundum rationem. Quae quidem vita propria est homini. Nam homo speciem sortitur ex hoc quod est rationalis. Sed rationale est duplex. Unum quidem participative, inquantum scilicet persuadetur et regulatur a ratione. Aliud vero est rationale essentialiter, quod scilicet habet ex seipso ratiocinari et intelligere. Et haec quidem pars principalius rationalis dicitur, nam illud quod dicitur per se, semper est principalius eo quod est per aliud. Quia igitur felicitas est principalissimum bonum hominis, consequens est, ut magis consistat in eo quod pertinet ad id quod est rationale per essentiam quam in eo quod pertinet ad id quod est rationale per participationem. Ex quo potest accipi, quod felicitas principalius consistit in vita contemplativa quam in activa; et in actu rationis vel intellectus, quam in actu appetitus ratione regulati.

seulement est le bien de l’homme, mais [son bien] le meilleur277.

Étant donné que la vertu humaine perfectionne le travail de l’homme réalisé rationnellement, comme son activité se distingue d’après la partie de l’âme qui se trouve à son origine – rationnelle par participation ou rationnelle par nature – les vertus se distinguent d’après l’identification d’une activité comme bonne du premier ou du second rang. Les vertus liées à la partie rationnelle par participation de l’âme, caractérisées par la pratique régulière de ce qui est véritablement bon, sont dites morales278. Les vertus liées à la partie rationnelle par nature, caractérisées par la connaissance de ce qui fonde cette pratique, sont appelés intellectuelles279. McInerny aborde la distinction des vertus en faisant appel à l’origine de l’activité vertueuse :

Vu que les actions humaines procèdent par définition de la raison et de la volonté et sont aussi bien bonnes que mauvaises, pour qu’elles soient bonnes elles doivent procéder de la raison correcte et de la volonté orientée au bien. Les habitudes qui assurent la connaissance correcte du bien et l’orientation constante de l’appétit vers lui sont vertueuses. Il y a, donc, génériquement parlant, deux endroits ou loci de la vertu – raison et appétit. En somme, il y a des vertus intellectuelles et des vertus morales280.

Thomas hiérarchise les vertus analogiquement aux parties de l’âme humaine. C’est-à-dire qu’il accorde aux vertus intellectuelles la même supériorité sur les vertus morales que celle qu’il accorde à la « partie » de l’âme qui est rationnelle par nature (qui porte sur les premières) sur la « partie » qui est appétitive (qui porte sur les secondes). En outre, de la

277 CEN, I, 10, §128.

Si igitur opus hominis consistit in quadam vita, prout scilicet homo operatur secundum rationem, sequitur quod boni hominis sit bene operari secundum rationem, et optimi hominis, scilicet felicis, optime hoc facere. Sed hoc pertinet ad rationem virtutis, quod unusquisque habens virtutem secundum eam bene operetur sicut virtus equi est secundum quam bene currit. Si ergo operatio optimi hominis, scilicet felicis, est ut bene et optime operetur secundum rationem, sequitur quod humanum bonum, scilicet felicitas, sit operatio secundum virtutem: ita scilicet quod si est una tantum virtus hominis, operatio quae est secundum illam virtutem, erit felicitas. Si autem sunt plures virtutes hominis, erit felicitas operatio quae est secundum optimam illarum, quia felicitas non solum est bonum hominis, sed optimum.

278 CEN, II, 1, §247.

279 CEN, II, 1, §246.

280 “Since human actions by definition proceed from reason and will and are either good or bad, in order to be good they must proceed from correct reason and from will that is oriented to the good. The habits that guarantee correct knowledge of the good and steady appetitive orientation to it are virtues. There are, then, generally speaking, two seats or loci of virtue – reason and appetite. In short, there are intellectual virtues and there are moral virtues”. McINERNY, R., Ethica Thomistica : The Moral Philosophy of Thomas Aquinas, p. 95/6.

même manière qu’il distingue le rationnel par nature scientifique de l’estimatif, il distingue les vertus spécifiquement liées au premier – qui sont prioritaires – des vertus liées au second. La logique qui régit une telle hiérarchisation consiste dans la reconnaissance d’une plus grande importance donnée à ce qui se sépare de la matière et du corps et dépend ainsi moins des sensations. Dans ce sens, on accorde la suprématie aux vertus intellectuelles, qui se référent à la connaissance scientifique désintéressée ou à la contemplation de l’image divine pour la réalisation du bonheur. Mais il ne s’agit pas ici du bonheur humain (felicitas) ! Les vertus intellectuelles sont supérieures aux vertus morales si on traite du bonheur divin, appelé aussi béatitude (beatitudo). L’Aquinate déclare :

Quoi qu’il en soit, par ailleurs, il est nécessaire, d’après ce qu’on a dit, que le bonheur parfait soit l’opération d’un meilleur de la sorte, en conformité avec sa vertu propre. En effet, l’opération parfaite requise pour le bonheur ne peut être que celle d’une puissance parfaite par un habitus qui soit sa propre vertu, moyennant laquelle elle rende bonne son opération281.

Pourtant, une telle idée de réalisation peut induire à la conclusion que l’homme ne se réalise que s’il atteint ce plan divin – ce qui est faux. D’un côté, la vertu intellectuelle originaire de l’activité rationnelle contemplative est le bien le plus cher auquel l’homme peut atteindre, car elle définit, par excellence, la spécificité et la supériorité humaines. C’est d’après l’intellect que l’homme peut se dissocier de l’animal, échappant à l’aspect qu’ils partagent. D’un autre, néanmoins, l’homme ne peut pas atteindre à ce bien par ses moyens seuls – il peut consacrer sa vie aux sciences, mais il a besoin de l’intervention divine pour arriver à la contemplation de l’image de Dieu. En outre, sans parler des vertus qu’il ne concrétiserait pas sans se préoccuper de la communauté politique, il s’avère impossible qu’il « vive » exclusivement de l’activité intellectuelle – il serait épuisé par la faim et par la fatigue. La béatitude (beatitudo) n’est pas accessible par les moyens humains triviaux ; sa réalisation intéresse notamment une autre vie. M. Villey explique :

Mais pas dans l’« intellect pratique », qui vise une œuvre, et n’est pas arrivé au terme. Le

281 CEN, X, 10, §2085.

Quocumque autem modo se habeat, necesse est secundum praedicta, quod perfecta felicitas sit operatio huius optimi secundum virtutem propriam sibi. Non enim potest esse perfecta operatio, quod requiritur ad felicitatem, nisi potentiae perfectae per habitum qui est virtus ipsius secundum quam reddit operationem bonam.

plus grand bonheur est dans l’acte de « l’intellect spéculatif » (art. 5). Ce thème occupe une place d’honneur dans l’œuvre de saint Thomas – et déjà celle d’Aristote : primat de la spéculation. Il ne signifie pas négation de la valeur de la pratique. Elle a quelque chose de divin, puisqu’en Dieu nous reconnaissons cet autre attribut, la bonté. Œuvrer au service du prochain s’impose à l’homme, en l’état de sa vie présente. Mais l’action elle-même est la

voie, point l’accomplissement de la béatitude. La spéculation touche au but.

Nous faudra-t-il, à la manière de Hegel ou même d’Aristote (art.6), situer le terme du bonheur dans le bios theoretikos, la vie scientifique désintéressée : Utrum beatitudo

consistat in consideratione scientiarum speculativarum ? Là saint Thomas prend ses

distances avec Aristote, montre l’incomplétude de ces sciences (la philosophie y comprise). Les spéculations naturelles aux hommes, qui ont toujours leur point de départ dans la sensation, les rattachent à la matière, les orientent vers le monde des corps. Elles restent impuissantes à combler notre intelligence, qui est spirituelle.

Béatitude sera la vision de l’essence divine (art. 8). L’homme n’y atteint pas sur cette terre.

Il sait ici bas si Dieu est (an est), point « ce qu’il est » (quid sit). Cette contemplation est promise à l’homme dans un autre état, à venir282.

Or, l’idée que l’homme heureux est celui qui concentre toutes ses énergies dans la contemplation de l’absolu, se détachant ainsi du monde et renonçant à son caractère social et politique est fausse. Un tel bonheur intéresse un plan supérieur au plan terrestre – le plan divin – et s’appelle « béatitude » (beatitudo). Celui-ci n’exclut pas la possibilité de réalisation du bonheur humain ici-bas. En tant qu’être humain, l’homme doit réaliser un bien humain et pouvoir envisager une fin également humaine. La négation de la possibilité de l’accomplissement de l’homme en tant qu’homme impliquerait l’affirmation de son inutilité. Pourtant, selon Thomas, l’homme est un être naturel et, en tant que tel, il possède aussi une fin naturelle, qui peut être atteinte naturellement, vu que la nature ne fait rien en vain283. Ainsi, soutenir que la vertu intellectuelle est supérieure à la vertu morale n’implique pas la réalisation de la première au détriment de la seconde, ni l’annulation de la spéculation

Dans le document La justice humaine chez Thomas d’Aquin (Page 118-133)