• Aucun résultat trouvé

L’action armée de l’Angola, de la Namibie et du Zimbabwe sous l’égide de la SADC en République démocratique du Congo

Paragraphe I : Les dispositions normatives de la SADC et de la CEEAC en matière de recours à la force

B- L’action armée de l’Angola, de la Namibie et du Zimbabwe sous l’égide de la SADC en République démocratique du Congo

Ces trois pays membres de la SADC ont mené une action militaire en République démocratique du Congo à la suite du conflit qui a éclaté dans ce pays en août 1998.557 Laurent Kabila avait accédé au pouvoir en République Démocratique du Congo (RDC) en 1996, grâce à une rébellion qu’il avait lancée contre le président Mobuto Sese Seko qui lui avait permis de conquérir le pouvoir grâce au soutien de pays alliés dont le Rwanda et l’Ouganda. Mais quinze mois à peine après sa prise du pouvoir, Laurent Kabila se retrouve à son tour confronté à des mouvements rebelles soutenus par ses alliés d’hier.558 Ainsi, face à une fulgurante avancée de ces armées rebelles qui avaient remporté certaines villes559, Kabila sollicita l’assistance de la SADC pour l’aider à les

555 Il s’avère difficile de parler d’impartialité lorsqu’une intervention vise à aider un gouvernement à mater un soulèvement populaire. Sans compter que dans le cas d’espèce, l’Afrique du Sud était soupçonné d’être intervenue pour préserver ses propres intérêts constitués d’un immense projet hydraulique dénommée Lesotho Highlands Water Project, voir Rodriguo TAVARES, « The participation of SADC and ECOWAS in Military Operations : The Weight of National Interest in Decision-Making », African Studies Review, vol. 54, no2, 2011, pp. 159-160 ; Fako J. LIKOTI,

« The 1998 Military Intervention in Lesotho : SADC Peace Mission or Resource War ?», op.cit., pp. 257-260 ; Siyabonga P. HADEBE, « South Africa’s Military intervention in Lesotho in 1998 – A critical overview », op. cit., pp. 24-25.

556 L’intervention au Lesotho est décrite comme un usage sévère de la force ayant causé la mort de plusieurs personnes (66 selon le chiffre rapporté par la presse) accompagnés d’incendies et de pillages incontrôlés, voir Keesing’s, september 1998, p. 42476. Voir également Theo NEETHLING, « Military Intervention in Lesotho: Perspectives on Operation Boleas and Beyond », op. cit., pp. 2-4; Fako J. LIKOTI, « The 1998 Military Intervention in Lesotho : SADC Peace Mission or Resource War ?», op.cit., p. 257.

557 Ce conflit fut l’un des plus devastateurs en Afrique au point d’être qualifié de « première guerre mondiale africaine

», voir Naison NGOMA, « Hawks, Doves or Penguins ? A critical review of the SADC military intervention in the DRC », Institute for Security Studies, Pretoria, ISS Paper 88, April 2004, p. 3. Voir sur le déclenchement du conflit, Keesing’s, August 1998, p. 42426.

558 Le principal mouvement rebelle qui a déclenché les hostilités contre le pouvoir de Laurent Kabila dès le 2 août est le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD) soutenu par le Rwanda et l’Ouganda. D’autres factions rebelles se sont joints au mouvement, voir Keesing’s, August 1998, p. 42426.

559 En quelques jours, le RCD avait réussi à prendre Goma, la ville la plus peuplée, et en deux semaines, il parvient à se saisir du barrage hydro-électrique Inga à partir duquel est produit l’électricité de la capitale et s’avançait dangereusement à la périphérie de Kinshasa, voir Keesing’s, August 1998, p. 42426.

149 contrer.560 Quelques jours après le déclenchement de la rébellion, le président du Zimbabwe, Robert Mugabe en sa qualité de président de l’Organe de la SADC entreprit de convoquer un Sommet pour discuter de la crise en R.D.C. Cette première rencontre régionale des chefs d’Etat et de gouvernement tenue les 7 et 8 août 1998 à Victoria Falls au Zimbabwe a vu la participation de six Etats membres de la SADC en plus du Rwanda et de l’Ouganda.561 Un comité spécial fut mis en place par le Sommet pour déterminer la nature du conflit se déroulant en R.D.C. afin de recommander la voie à suivre en fonction des conclusions. Le Comité spécial concluait à une invasion du pays par les forces étrangères du Rwanda et de l’Ouganda et l’analyse de ses recommandations fera l’objet d’une réunion du Comité interétatique de Défense et de Sécurité tenue le 18 août 1998 à Harare au Zimbabwe.562 A l’issue de cette rencontre, Mugabe déclarait que la SADC avait décidé à l’unanimité de répondre à l’appel d’assistance de Laurent Kabila. Mais cette unanimité a diversement été appréciée par certains Etats membres de l’Organisation régionale.563 En réalité, seulement trois pays membres dont le Zimbabwe, l’Angola et la Namibie ont engagé leurs troupes en RDC en exécution de la décision d’intervention prise à la réunion du Comité interétatique de Défense et de Sécurité du 18 août 1998. L’Afrique du Sud ralliés par le Mozambique, la Tanzanie et le Botswana optaient pour la poursuite des solutions diplomatiques dans le cadre du règlement de la crise. Le président Mandela convoquait à son tour un sommet de

560 Il ressort de la lettre adressée au président du Conseil de sécurité par le représentant du Zimbabwe à l’ONU à propos de la crise en RDC que la requête du président Laurent Kabila a été faite à la SADC lors de la réunion du Comité Interétatique de Défense et de Sécurité tenue à Harare au Zimbabwe le 18 août 1998, voir UN Document S/1998/891, Annex, Letter from the Permanent Representative of the Republic of Zimbabwe to the United Nations addressed to the President of the Security Council regarding the crisis in the Democratic Republic of Congo, 25 september 1998, par. 7. Voir également Keesing’s, August 1998, p. 42426 ; Keesing’s, September 1998, p. 42479.

561 La rencontre a connu la participation de sept pays de la SADC dont l’Angola, la République démocratique du Congo, la Namibie, la Zambie, la Tanzanie, ainsi que le Zimbabwe, voir UN Document S/1998/891, Annex, op. cit., par. 3. L’Afrique du Sud qui assurait la présidence de l’organisation régionale n’a cependant pas été invité au Sommet du fait des tensions qui prévalaient entre Robert Mugabe et Nelson Mandela, voir Laurie NATHAN, Community of insecurity : SADC’s struggle for peace and security in southern Africa, Ashgate Publishing Limited, Farnham, Surrey, 2012, p. 86.

562 Voir UN Document S/1998/891, Annex, op. cit., par. 5, 6 et 7.

563 Mandela qui assurait la présidence de la SADC n’a pas manqué de relever la prétention du président Mugabe d’agir au compte de la SADC, voir « The last days of Laurent Kabila ?», Electronic Mail & Guardian, 21 August 1998, disponible sur http://mg.co.za/article/1998-08-21-the-last-days-of-laurent-kabila, consulté le 29 avril 2016.

150 la SADC qui s’est tenu le 23 août 1998 à Pretoria en Afrique du Sud afin d’échanger sur les actions prises par l’Organe sous la direction de Mugabe. Cette rencontre qui marquait les divergences au sein de l’Organisation sous-régionale, a été l’occasion pour les chefs d’Etat présents de lancer un appel au cessez-le-feu et de réaffirmer leur attachement à l’option du règlement pacifique et au dialogue politique pour le règlement de la crise en RDC.564 Mais à la fin, les Etats membres parviennent à atténuer leurs contradictions en apportant une caution à l’intervention des trois pays membres en R.D.C. Ils procèdent ainsi à son endossement au 18e Sommet de l’Organisation tenu les 13 et 14 septembre 1998 en Mauritanie.565

Outre les divergences sur la prise de décision sus exposées, la légalité de l’intervention n’a pas non plus fait l’unanimité. En effet, au moment de l’intervention, la SADC ne disposait pas de compétences internes en matière de maintien de la paix et de la sécurité lui permettant de fonder un recours à la force armée. Les pays intervenants alléguaient que leur action a été autorisée par l’Organe ainsi que par le Comité inter-Etatique de Défense et de Sécurité. Pourtant, bien que l’Organe fût créé depuis juin 1998, il n’était pas encore opérant. Mugabe avait été désigné lors du Sommet qui avait décidé de la création de l’Organe comme son président, mais sans plus. Les attributions et compétences de l’Organe n’avaient pas encore été définies.

En ce qui concerne le recours à la force, le Communiqué indique clairement que l’Organe peut recommander des mesures punitives au Sommet des chefs d’Etat, ce qui implique que la décision d’entreprendre des mesures coercitives armées doit être prise par le Sommet des chefs d’Etat et de

564 SADC, Communiqué of the Summit Meeting of the SADC on the Democratic Republic of the Congo, Pretoria, 23 August 1998.

565 Il est rapporté que le président Mandela a admis lors d’une réunion imprévue des chefs d’Etat des pays membres de la SADC tenue le 2 septembre à Durban en marge du Sommet du Mouvement des Non-alignés que l’organisation régionale apportait un soutien unanime à l’action militaire des trois pays membres, G. BERMAN and Katie E. SAMS, Peacekeeping in Africa : Capabilities and Culpabilities, op. cit., pp. 178- 179. Voir sur l’endossement la déclaration selon laquelle le Sommet « welcomed initiatives by SADC and its Member States intended to assist in restoration of peace, security and stability in DRC, in particular the Victoria Falls and Pretoria initiatives ». Les dirigeants de la SADC ont également félicité les gouvernements de l’Angola, de la Namibie et du Zimbabwe pour avoir fourni en temps utile des troupes pour assister le peuple Congolais, voir SADC, Final Communiqué of the 1998 SADC Summit of Heads of State and Government, Mauritius, 15 septembre 1998, par. 20. Voir également UN Document S/1998/915, Annex I, Final Communiqué of the 1998 Summit of the Heads of State or Government of the Southern African Development Community, 5 October 1998, par. 21.

151 gouvernement et non par l’Organe.566 La décision d’intervenir ne peut encore moins être prise au niveau du Comité Inter-Etatique qui a été finalement intégré comme un organe de l’Organe par le Sommet.567

L’action des trois pays membres de la SADC n’a pas non plus été autorisée par le Conseil de sécurité. Néanmoins, il faut le rappeler, l’action coercitive menée par une Organisation sous-régionale sans une telle autorisation n’est pas systématiquement une action unilatérale. A défaut d’être autorisée par le Conseil de sécurité, elle pourrait se fonder sur l’exception de légitime défense, la seconde exception à l’interdiction du recours à la force prévue par la Charte. Il s’agit en l’espèce de vérifier si l’assistance militaire apportée par ces pays membres à la R.D.C.

correspondait à l’exercice d’un droit de légitime défense collective. Les pays intervenants ont invoqué deux principaux arguments au soutien de leur action.

Premièrement, il a été soutenu que l’intervention était conforme à une résolution de l’OUA approuvée lors de son Sommet à Harare en 1997 qui condamnait les changements anticonstitutionnels de gouvernements, notamment par des moyens militaires.568 Ce principe de condamnation de changements anticonstitutionnels qui était en émergence au niveau de l’OUA avait été précédé par une résolution de la SADC, adoptée en 1995 lors d’une réunion du Comité interétatique de Défense et de Sécurité tenue à Cape Town en Afrique du Sud. Cependant, comme nous l’avions déjà mentionné dans notre analyse de l’action armée de la CEDEAO en Sierra Leone, l’intervention militaire fondée sur des motifs démocratiques n’est pas une exception à l’interdiction du recours à la force prévue par la Charte. A l’instar de l’intervention humanitaire, l’action militaire armée pour défendre des valeurs démocratiques reste encore très controversée en droit international. Elle ne saurait donc en l’espèce être retenue comme un fondement valable à l’utilisation de la force armée par les trois pays membres de la SADC.

566 Voir Extraordinary SADC Heads of State and Government Summit Communique, op. cit., par. 6 (g).

567 Ibid, par. 9.

568 Voir UN Document S/1998/891, Annex, op. cit., par. 8.

152 Le second moyen invoqué par ces trois pays membres de la SADC pour fonder leur action en R.D.C. est la légitime défense collective.569 En effet, comme le mentionne expressément l’article 51 de la Charte, la légitime défense peut être aussi bien individuelle que collective. L’Etat qui fait l’objet d’une agression peut demander l’aide d’Etats tiers afin de riposter contre l’Etat ou les Etats agresseurs.570 L’invocation du droit de la légitime défense, qu’elle soit individuelle ou collective implique toutefois la réunion de plusieurs conditions d’application. Comme l’a relevé la CIJ dans au moins deux de ses arrêts, c’est à l’Etat qui se prévaut du droit de légitime défense d’en établir l’existence, en fonction des circonstances en ce cas.571 Ainsi, dans le cas de la légitime défense collective, en plus de faire la preuve de l’existence d’une agression armée préalable contre l’Etat requérant, les Etats intervenants doivent justifier d’une demande expresse formulée par l’Etat agressé.572

En l’espèce, les conditions de l’exercice du droit de légitime défense collective semblaient bien réunies. D’abord, sur la condition de l’existence d’une agression armée préalable, les Etats intervenants ont soutenu dans la lettre adressée au Conseil de sécurité que leur action était destinée à aider le gouvernement congolais à riposter contre l’invasion étrangère. Le Rwanda et l’Ouganda sont nommément cités dans la lettre comme les deux pays qui soutenaient activement les mouvements rebelles opérant en RDC.573 Mais comme le note la CIJ dans son arrêt sur les activités militaires,

569 Voir UN Doc. S/1998/891, Annex, op. cit., par. 8.

570 Voir C.I.J., Affaire des activités armées sur le territoire du Congo, Recueil 2005, par.128. La Cour déclare également dans l’Affaire des activités militaires au Nicaragua que : « la Charte elle-même atteste l’existence du droit de légitime défense collective en droit international coutumier », C.I.J., Affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Recueil 1986, par. 193.

571 Voir C.I.J., Affaire des Plates-formes pétrolières, Recueil 2003, par. 57 et 61. Voir également Affaire des activités armées sur le territoire du Congo, Recueil 2005, par. 106-147.

572 Voir C.I.J., Affaire des activités militaires, op. cit., pp. 104-105, par. 196-199 ; C.I.J., Affaire des Plates-formes pétrolières, Recueil 2003, p. 27, par. 51. Voir également Olivier CORTEN, Le droit contre la guerre, op. cit., p. 659.

573 UN Doc. S/1998/891, Annex, op. cit., par. 12.

153

« [il] est clair que c’est l’Etat victime d’une agression armée qui doit en faire la constatation. Il n’existe, en droit international coutumier aucune règle qui permettrait à un autre Etat d’user du droit de légitime défense collective contre le prétendu agresseur en s’en remettant à sa propre appréciation de la situation »574.

La question se pose donc de savoir si la RDC avait été victime d’une agression armée préalable de ces deux pays de sorte à justifier la mise en œuvre du droit de légitime défense individuelle. En principe, en matière de légitime défense, l’Etat victime dispose d’un pouvoir d’auto qualification de la situation qui fonde sa réaction.575 Il reste pertinent qu’une telle qualification soit accompagnée d’une déclaration d’agression. La CIJ déclare à ce propos dans son arrêt sur les activités militaires qu’« en cas d’invocation de la légitime défense collective, il faut s’attendre à ce que l’Etat au profit duquel ce droit va jouer se déclare victime d’une agression armée ».576 C’est la nécessité de s’assurer de la conformité au droit international des mesures prises par l’Etat qui se prévaut de la légitime défense énoncée par l’article 51 de la Charte qui fait obligation à celui-ci de les porter immédiatement à la connaissance du Conseil de sécurité. Pour satisfaire cette condition de déclaration d’agression, la RDC a expressément accusé l’Ouganda et le Rwanda d’avoir envahi son territoire lors du Sommet de la SADC tenue les 7 et 8 août à Victoria Falls au Zimbabwe. Les pays membres ont ainsi « condamné sans équivoque l’agression dont elle (la République Démocratique du Congo) était victime et l’occupation de certaines parties de son territoire ».577 Mieux, la RDC introduisait le 23 juin 1999, des instances auprès de la CIJ contre l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi pour des actes d’agression armée.578 Dans son arrêt relatif à l’Affaire des activités armées en RDC, la Cour conclut que :

« l’Ouganda a violé la souveraineté ainsi que l’intégrité territoriale de la R.D.C. Les actes de l’Ouganda ont également constitué une ingérence dans les affaires intérieures de la R.D.C. et dans la guerre civile qui y

574 Voir C.I.J., Affaire des activités militaires, op. cit., pp. 103-104, par. 195.

575 Linos-Alexandre SICILIANOS, « Le contrôle par le Conseil de sécurité des actes de légitime défense », dans Societé française de droit international, Le chapitre VII de la Charte des Nations Unies – 50e anniversaire des Nations Unies. Colloque de Rennes, Paris, A. Pedone, 1995, p. 62.

576 Voir C.I.J., Affaire des activités militaires, op.cit., pp. 103-104, par. 195.

577 Voir C.I.J., Affaire des activités armées en RDC, op. cit., p. 193, par. 33. Nos italiques.

578 Seule l’instance contre l’Ouganda a abouti à une décision de la Cour, les deux autres affaires ont été rayé du rôle de la Cour en date du 01 février 2001 à la demande de la République démocratique du Congo, voir http://www.icj-cij.org/docket/index.php?p1=3&p2=3&k=85&case=117&code=cr&p3=6, consulté le 10 mai 2016.

154

faisait rage. L’intervention militaire illicite de l’Ouganda a été d’une ampleur et d’une durée telles que la Cour la considère comme une violation grave de l’interdiction de l’emploi de la force énoncée au paragraphe 4 de l’article 2 de la Charte des Nations Unies ».579

L’on aurait noté que la Cour ne fait pas mention dans sa conclusion de la notion d’agression.

Cependant, la lecture des dispositions de la résolution 3314 des Nations Unies sur la définition de l’agression donne à convaincre qu’il s’agit d’actes d’agression. Ainsi, aux termes de l’article premier de la résolution, « l’agression est l’emploi de la force armée par un Etat contre la souveraineté, l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un autre Etat ou de toute autre manière incompatible avec la Charte des Nations Unies… ».580 L’article 3 précise en plus, au titre des actes susceptibles de revêtir la qualification d’actes d’agression :

« l’invasion ou l’attaque du territoire d’un Etat par les forces armées d’un autre Etat, ou toute occupation militaire, même temporaire résultant d’une telle invasion ou d’une telle attaque ou toute annexion par l’emploi de la force du territoire ou d’une partie du territoire d’un autre Etat ; …».581

Or, c’est exactement l’invasion d’une partie du territoire de la RDC par des forces armées qui est reprochée à l’Ouganda et au Rwanda. La Cour a également reconnu que l’Ouganda a fait un usage de la force armée contre la souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC en violation de l’article 2, par. 4 de la Charte des Nations Unies.

Qui plus est, la situation en RDC a fait l’objet d’une série de résolutions des Nations unies.582 Dans sa résolution du 09 avril 1999, le Conseil de sécurité qualifiait le conflit en République démocratique du Congo de menace pour la paix, la sécurité et la stabilité de la région. Il est vrai que dans ses différentes résolutions, le Conseil de sécurité n’emploie pas la notion d’agression,

579 C.I.J., Affaire des activités armées en RDC, op. cit., par. 165.

580 Résolution 3314 des Nations Unies sur la définition de l’agression, Assemblée générale, A/RES/29/3314, vingt-neuvième session, 14 décembre 1974, Annexe, définition de l’agression, article 1.

581 Ibid, article 3, a).

582Voir S/PRST/1998/26 (1998); S/PRST/1998/36 (1998); S/RES/1234 (1999); S/RES/1258(1999) ; S/RES/1273 (1999); S/RES/1279(1999) ; S/RES/1291(2000) ; S/RES/1304(2000) ; S/RES/1316( 2000);

S/RES/1323 (2000); S/RES/1332(2000) ; S/RES/1341(2001) ; S/RES/1355(2001) ; S/RES/1376 (2001);

S/RES/1399(2002) ; S/RES/1417(2002) ; S/RES/1445 (2002); S/RES/1457(2003) ; S/RES/1468 (2003);

S/RES/1484 (2003); S/RES/1489(2003) ; S/RES/1493(2003) ; S/RES/1499(2003) ; S/RES/1501 (2003);

S/RES/1522(2004) ; S/RES/1533(2004) ; S/RES/1552 (2004); S/RES/1555 (2004); S/RES/1565(2004) ; S/RES/1592(2005) ; S/RES/1596 (2005); S/RES/1616(2005) ; S/RES/1621(2005).

155 mais il n’en demeure pas moins qu’il reconnaît que « des forces d’Etats étrangers demeurent en République Démocratique du Congo dans des conditions incompatibles avec les principes de la Charte ».583 Encore, dans sa résolution du 16 juin 2000, le Conseil de sécurité se déclarait

« indigné par la reprise des combats entre les forces ougandaises et les forces rwandaises à Kisangani (République démocratique du Congo) le 5 juin 2000, ainsi que par le manquement de l’Ouganda et du Rwanda à l’engagement de mettre fin aux hostilités et de se retirer de Kisangani.…».584

Il a également « condamné ces combats en tant que violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo ».585

De tout ce qui precède, l’agression armée contre la RDC est constituée en l’espèce. De plus, la Cour ayant conclu dans cette Affaire des activités armées en RDC que l’Ouganda avait menée une opération militaire illicite contre la RDC à partir du 7 août 1998, estime que celle-ci avait le droit d’employer la force pour repousser les attaques de l’Ouganda. Elle soutient par conséquent qu’aucune action militaire entreprise par la RDC contre l’Ouganda au cours de la période indiquée

De tout ce qui precède, l’agression armée contre la RDC est constituée en l’espèce. De plus, la Cour ayant conclu dans cette Affaire des activités armées en RDC que l’Ouganda avait menée une opération militaire illicite contre la RDC à partir du 7 août 1998, estime que celle-ci avait le droit d’employer la force pour repousser les attaques de l’Ouganda. Elle soutient par conséquent qu’aucune action militaire entreprise par la RDC contre l’Ouganda au cours de la période indiquée