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3.1.1 La biomasse microbienne

Depuis de nombreuses années, les travaux de l’INRA et particulièrement ceux de l'unité de Microbiologie du Sol de Dijon se sont portés sur la mesure de l'activité biologique du sol (Chaussod, 1996) à travers l’étude de la biomasse microbienne. La notion de biomasse microbienne recouvre l’ensemble des microorganismes du

sol : bactéries, champignons, protozoaires, etc. Ceux-ci participent en effet à de nombreuses biotransformations, à des dégradations dans les sols. Ils sont également responsables des caractéristiques d’agrégation des sols (Chantigny et

al., 1997). Ainsi, la biomasse microbienne change dès que son environnement

change. Donc, dans un sol agricole, chaque changement dans la gestion agronomique des parcelles aura un impact sur la biomasse microbienne. En d'autres termes, mesurer la biomasse microbienne des sols permet de vérifier l'influence des pratiques agricoles sur les caractéristiques des sols.

Des études ont montré des changements dans la biomasse du sol suite :

• à des changements de systèmes culturaux, apports de produits organiques, travail du sol, mise en place d’un couvert végétal (Hoffmann et al., 1997 ; Hu

et al., 1997 ; Ritz et al., 1997 ; Salinas-Garcia et al., 1997),

à des fertilisations (McCarty et Meisinger, 1997 ; Salinas-Garcia et

al., 1997),

à des changements de pH (Baath et Anderson, 2003),

• à des pollutions (métaux lourds, hydrocarbures, produits phytosanitaires par exemple…) (Harden et al., 1993),

à des stress (sécheresse, etc.) (Hoffmann et al., 1997).

Par ailleurs, il existe un lien étroit entre la biomasse microbienne, la fertilité du sol, le taux de décomposition et la minéralisation azotée (Carter et al., 1999; OECD, 2004; Smith et Paul, 1990).

La biomasse microbienne totale apparaît alors comme un paramètre clef de l’écosystème (Epelde et al., 2008), même si ce n’est pas l’indicateur écologique le plus sensible de la qualité du sol (Wedding et al., 2005).

3.1.2 La faune du sol

D’autres indicateurs peuvent être suivis pour apprécier la qualité d’un sol. En effet, le sol abrite un grand nombre d’organismes. La faune du sol ne représente que 0,08 % de sa masse, pourtant on ne compte pas moins de 260 millions d’individus par m² sur un sol de prairie. Il s'agit majoritairement d’invertébrés. Cette pédofaune est extrêmement diversifiée (Deprince, 2003) et classiquement divisée en trois catégories en fonction de la taille des organismes (Bachelier, 1979).

La microfaune est constituée des espèces de diamètre (ou de longueur) inférieur à 0,2 mm : des protozoaires, quelques espèces de rotifères terrestres, des tardigrades et des nématodes. Ces organismes vivent dans l'eau interstitielle du sol ; ils sont résistants à la sécheresse. Les protozoaires dans le sol se comptent en centaines de millions par mètre carré.

La mésofaune rassemble les invertébrés entre 0,2 et 4 mm : il s'agit d'acariens, de collemboles, de pseudoscorpions, de protoures, de diploures, de petits myriapodes (ces groupes se rassemblant sous le terme " micro-arthropodes "), de nématodes de plus grande taille et d'enchytréides.

Enfin, la macrofaune est composée des animaux entre 4 et 80 mm. Ce sont des lombriciens, des larves d'insectes (en majorité des larves de diptères et de coléoptères, mais aussi d'hémiptères et de lépidoptères), des cloportes, des myriapodes chilopodes et diplopodes, des mollusques gastéropodes (limaces et escargots), des chélicérates (araignées et opilions), et des hexapodes divers (hyménoptères formicidés, coléoptères, orthoptères, etc.). Lombriciens exceptés, la macrofaune occupe principalement la litière.

À ces trois catégories, on se doit d'ajouter la mégafaune, réunissant essentiellement les mammifères du sol de plus de 10 cm. Certains sauriens et ophidiens se terrent également parfois sous la litière.

On distingue également les habitants du sol selon la façon dont ils l'occupent : certains n'y vivent que de façon temporaire, soit qu'ils n’y réalisent qu’une partie de leur cycle de développement, comme de nombreuses espèces d'insectes, soit qu'ils s'y abritent de façon journalière ou saisonnière. D'autres animaux ont un mode de vie édaphique permanent : ils ne quittent jamais le sol, mais ils peuvent n'y être actifs que périodiquement.

Toute cette biocénose interagit avec le milieu qu’elle occupe : les animaux creusent, grattent, retournent la terre, mangent, éjectent leurs excréments, se reproduisent... Ces activités ont un impact sur la structure et la composition du sol. Les galeries et les chemins creusés aèrent le sol et augmentent le drainage de l'eau ; ce travail de bioturbation (action mécanique qui remue le sol) favorise également la dispersion des éléments minéraux et organiques dans les différentes couches du sol.

La vigne abrite une pédofaune diversifiée bien que ce ne soit pas la culture la plus riche. Toutefois, c’est une monoculture pérenne : elle constitue donc un terrain idéal pour les habitants du sol et de l’air (notamment pour les insectes ravageurs),

puisqu’elle offre de la nourriture à volonté et peu d’ennemis naturels, au contraire d’un écosystème naturel où beaucoup d’organismes coexistent.

Ainsi, en complément de la biomasse microbienne, l’étude de la macrofaune du sol en viticulture s’inscrit dans une démarche globale de suivi du fonctionnement biologique d’un sol. L’itinéraire technique agronomique (labour, enherbement…) et les épandages de produits phytosanitaires sont autant de facteurs qui peuvent agir sur cette faune du sol et moduler dès lors le fonctionnement biologique du sol.

Ainsi, plusieurs organismes ont été suivis comme espèces bioindicatrices de la qualité des sols, comme le grillon provençal Gryllus bimaculatus (Yoshimura et al., 2005), mais surtout les oligochètes en sols agricoles (Pattison et al., 2008 ; Suthar

et al., 2008) et plus précisément viticoles (Paoletti et al., 1998).

Un bioindicateur est un indicateur constitué par une espèce végétale, fongique ou animale ou par un groupe d'espèces (groupe éco-sociologique) ou groupement végétal dont la présence (ou l'état) renseigne sur certaines caractéristiques écologiques (c'est à dire physico-chimiques, microclimatique, biologiques et fonctionnelle) de l'environnement, ou sur l'incidence de certaines pratiques (Garrec et Van Haluwyn, 2002).

Ainsi, les lombriciens possédant un grand nombre d’activités directement en relation avec l’état écologique d’un sol (Römbke et al., 2005), sont souvent considérés comme de bons bioindicateurs de la pollution des sols.

Par ailleurs, ils remplissent de nombreuses conditions nécessaires à une étude approfondie d’un sol en tant qu’espèces sentinelles (Rivière, 1993) :

- ils sont faciles à « capturer », à élever en terraria, à observer,

- leur densité de population est suffisante, permettant des prélèvements qui ne modifient pas la structure ou l'importance numérique des populations,

- ils ont une aire de dispersion connue,

- ce sont des animaux de taille suffisante, permettant de pratiquer facilement des mesures de concentrations en polluants ou des analyses biochimiques, - leurs voies d'exposition sont connues : nourriture, respiration, tégument,

- il est possible de disposer d'animaux témoins, non contaminés,

- enfin, il existe d'autres études écotoxicologiques et des références sur les mêmes espèces.