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---Acte IV, scène 3

Notes

- Vers 1150 : «en effet» : «réellement», par opposition à «fausse espérance» du vers précédent.

- Vers 1151 : «yeux, à la fin désarmés» : Vocabulaire précieux, mais qui correspond bien à la réalité dans ce cas précis.

- Vers 1153-1154 : On remarque la construction antithétique : «serments»-«parjures»,

«fuite»-«retour», «respects»-«injures».

- Vers 1158 : «encore un coup» : «Encore une fois». L’expression n’était pas familIère au XVIIe siècle.

- Vers 1160 : Hermione sera enlevée à Pyrrhus par les Grecs, comme jadis Hélène fut reprise aux Troyens ; comme jadis Agamemnon, Oreste prendra le commandement des Grecs.

- Vers 1161 : Rappel des vers 230 et 285-286.

- Vers 1165 : «couronnant» : «mettant le comble à».

- Vers 1171 : «retardements» : «retards».

- Vers 1176 : «à vous à» : «à vous de» ; pour Littré, il n’y avait pas de différence fodamentale entre les deux tournures.

- Vers 1177 : «vos bontés» : «les bontés que vous avez eues pour lui».

- Vers 1180 : La confrontation des deux mots «ennemis» et «assassins» met en valeur la révolte de la conscience.

- Vers 1181 : Il faut comprendre : «Causons sa perte en lui faisant une guerre légitime».

- Vers 1183 : «le soin de tout l’État» : en sa qualité d’ambassadeur, représentant toute la Grèce.

- Vers 1185 : Le verbe «s’explique» s’oppose au nom «assassinat» : la discussion est préférable au meurtre.

- Vers 1188 : «ai condamné» : L’indicatif, aujourd’hui incorrect, marque qu’il s’agit d’un fait réel.

- Vers 1191 : «le prix d’un tyran opprimé» : C’est une construction latine qui subsistait au XVIIe siècle (on employait la tournure nom+adjectif là où nous transformons celui-ci en substantif suivi d’un complément) : il faut comprendre «le prix de l’oppression [= la suppression] d’un tyran».

- Vers 1192 : «je l’aimai» : Le passé simple marque une action complètement achevée.

- Vers 1194 : La construction «soit que […] ou» était courante au XVIIe siècle (elle l’est encore au Québec).

- Vers 1201 : «le perdre» : «le tuer».

«prévenir sa grâce» : «Agir avant qu’il ne rentre en grâce auprès d’Hermione».

- Vers 1208 : Il faut noter la double gradation, descendante en ce qui concerne les délais accordés, et ascendante du point de vue psychologique.

- Vers 1209 : «opprime» : Le sens est le même que «perdre» au vers 1201.

- Vers 1214 : «cependant» : «pendant ce temps».

«ce jour» : S’oppose à «cette nuit» du vers 1213, et souligne le respect de l’unité de temps.

- Vers 1218 : «Sans gardes» : Il a laissé sa garde à Astyanax (vers 1061). Le dénouement se précise.

- Vers 1224 : Il faut noter le jeu des oppositions ; pronom à pronom («me», «vous») ; verbe à verbe («trahit», «trompé») ; avec, pour terminer, la nuance de mépris qui s’applique à «tous», sans exception.

- Vers 1229 : «Conduisez ou suivez» : En effet, Oreste ne fera que suivre cette fureur : il ne frappera pas Pyrrhus.

- Vers 1235 : «Oreste content» : Le rapprochement de ces deux mots forme une sorte de contre-sens voulu.

- Vers1239 : «courage» : Ce mot avait le sens de «cœur», et inversement.

- Vers 1241 : «hymen» : «mariage».

- Vers 1244 : On peut comparer tout ce passage avec ‘’Cinna’’ de Corneille :

«Je saurai bien venger mon pays et mon père […]

Puisque ta lâcheté n’ose me mériter.

Viens me voir, dans son sang et dans le mien baignée, De ma seule vertu mourir accompagnée,

Et te dire en mourant d’un esprit satisfait :

‘’N’accuse point mon sort, c’est toi qui l’as fait.’’» (III, 4).

- Vers 1248 : Cela rappelle les célèbres imprécations de Camille, dans ‘’Horace’’.

- Vers 1251 : «Vos ennemis» : Oreste souligne de la sorte l’importance du sacrifice qu’il fait à Hermione.

- La tirade des vers 1249-1252 avait d’abord été :

«Mais que dis-je? Ah! plutôt permettez que j’espère.

Excusez un amant que trouble sa misère, Qui tout prêt d’être heureux envie encor le sort D’un ingrat, condamné par vous-même à la mort.»

- Vers 1252 : «vous reconnaîtrez mes soins» : «vous reconnaîtrez, vous récompenserez mes services».

- Vers 1253 : «la conduite» : «la direction» (sens étymologique).

Intérêt de l’action La scène se déroule ainsi :

1. La méprise d’Oreste (vers 1147-1172).

2. Les arguments d’Hermione (vers 1173-1232).

3. Sa suprême menace, et la détermination d’Oreste (vers 1233-1254).

Dans cette scène dramatique, Hermione reprend I'initiative, et, dans sa colère, alléguant sa «gloire offensée» (vers 1189) exige d’Oreste le meurtre de I'amant infidèle. Son âme apparaît comme n’étant plus possédée que par la soif de vengeance. Mais cette détermination nous est révélée graduellement et avec d’autant plus de force que nous voyons d’abord un Oreste qui se méprend totalement sur la signification de cette entrevue, et entre en badinant. La brusque réponse d’Hermione, au vers 1151, a pour effet de le surprendre, de le combler soudainement, mais aussi de l’inquiéter. Il s’imagine qu’elle pense encore à leur premier projet d’enlèvement.

Mais elle veut une vengeance immédiate (vers 1170-1172, 1208), qui est la vengeance d’un orgueil blessé (vers 1165). On peut comparer ce qu’elle demande à Oreste avec ce qu’Émilie demande à Cinna, dans la pièce de Corneille ; mais Émilie promet sa main à Cinna s’il tue Auguste, tandis qu’Hermione ne se sert d’Oreste que comme d’un instrument, et ne l’estime pas assez pour seulement lui promettre de l’épouser.

Certaines expressions devraient éclairer Oreste sur les véritables sentiments d’Hermione, et donc sur le dénouement (vers 1174, 1198, 1200). Face à cette vengeance, il résiste et tergiverse. Son attitude ne s’accorde pas avec sa déclaration du vers 772 : «Mon innocence enfin commence à me peser.»

Mais, à cette déclaration gratuite, s’oppose maintenant un crime plus odieux qu’un enlèvement, puisqu’il s’agit de tuer un homme qui ne vous a rien fait que d’être aimé tandis qu’on ne l’est pas.

Si la mise en scène est d’une sobriété toute classique, les évocations les plus sanglantes ne nous sont pas plus épargnées par Racine (vers 1230, 1244, 1245 et, plus haut, 930, 996, 1002) que par Corneille.

Hermione vient à bout de ses résistances en développant toute une série d’arguments gradués : elle rejette le bon droit de Pyrrhus à agir comme il l’entend ; elle fait craindre à Oreste un revirement de sa part si le roi continue de vivre ; elle lui montre les conditions favorables à l’attentat ; elle le menace d’agir elle-même et de se suicider ensuite. Cette gradation est, elle aussi, éminemment dramatique.

On ne sera pas surpris quand, à la fin, Hermione se suicidera. Mais, pour le moment, nous ne pouvons voir, dans l’évocation du suicide, qu’un moyen brutal d’agir sur Oreste (vers 1248).

Intérêt littéraire

La rhétorique d’Oreste, dans ses déclarations enflammées à Hermione, dans ses compliments, est désuète, déplacée, poussée à I'excès et parfois au ridicule, les vers 1153-1154 étant d’ailleurs une accumulation de termes contradictoires. On peut opposer I'emphase des vers 1147-1156 à la brièveté d'Hermione, à la nudité presque prosaïque de son amertume ou de sa violence (vers 1157).

Intérêt psychologique

Oreste continue à aller de méprise en déconvenue. Il survient, parle, rêve d'héroïsme toujours à contretemps, ce qui relève plus du vaudeville que de la tragédie. Il demeure longtemps irrésolu (vers 1202), connaît bien son impuissance (vers 1252), car il est né sous le signe de l’échec. La menace

«craignez que je ne vous rappelle» (vers 1174) le touche : il sait qu’Hermione est prête à revenir vers Pyrrhus, malgré sa trahison. Il commettra bien un crime, mais non pas celui qu’il croyait et qu’il voulait, seulement celui que veut Hermione, à laquelle il obéira puisqu’il ne sait qu’obéir.

Hermione est toujours caractérisée par un orgueil naïf (vers 1190). Elle ne supporte pas qu’on s’oppose à sa volonté. Elle montre la frénésie d’une enfant rageuse, qui brise le jouet qu’elle ne peut avoir, manifeste une jalousie (vers 1214-1216) de jeune fille humiliée (vers 1224) qui voit une esclave

prendre sa place. Elle exerce sur l’homme qui lui est asservi la tyrannie toute-puissante d’une femme sûre de son pouvoir. Elle se montre cinglante avec lui, qui l’aime et qu’elle n’aime pas, ce qui fait qu’elle connaît bien sa faiblesse (vers 1234-1236). Elle méprise son attitude dolente de «loser»

fataliste et masochiste : «Il veut toujours se plaindre et ne mériter rien», dit-elle (vers 1236). En proie à un désir intense, elle est folle d’une jalousie qui l’aveugle, la rend impitoyable pour sa rivale comme pour l’être aimé qui, étant infidèle, doit être immolé. Le raffinement suprême consiste à faire souffrir ou à perdre l’un par l’autre l’être aimé et la rivale. Elle veut faire souffrir autant qu’elle a souffert.

Comme Oreste hésite, elle se complaît dans l’idée de frapper elle-même Pyrrhus (vers 1243).

Surtout, elle est bien ici l’incarnation de l’amour-passion qui, contrarié, se venge furieusement. Mais, encore lucide, elle sait que sa passion a deux faces : l’amour et la haine, et qu’elle ne peut masquer l’une ou l’autre à son gré