• Aucun résultat trouvé

Absorption de la lumière dans le visible par les nanoparticules d’or

Chapitre 1 : Contexte de l’étude

3. Les nanoparticules d’or

3.3. Propriétés optiques des nanoparticules d’or

3.3.1.1. Absorption de la lumière dans le visible par les nanoparticules d’or

Les nanoparticules d’or ont la particularité d’apparaitre colorées. En effet, les solutions de précurseurs d’or (sels d’or) avant synthèse sont de couleur jaune, tandis qu’une fois la

formation de nanoparticules effectuée, les solutions se colorent en rouge rubis intense comme le montre la Figure 1 - 19 [40]. Mais comment s’explique une telle absorption ?

Figure 1 - 19 : Photos montrant l’évolution de la couleur de la solution lors de la synthèse de nanoparticules d’or (on passe du jaune au rouge) [40]

Lorsqu’une particule métallique est soumise à un champ électromagnétique dont la longueur l’onde est beaucoup plus grande que la taille des particules, tous les électrons libres de la bande de conduction oscillent collectivement et en phase comme l’illustre la Figure 1 - 20 [41]. Lorsque la fréquence de l’onde incidente correspond à la fréquence propre de ces oscillations, il se produit un phénomène de résonance, appelé résonance plasmon de surface.

Figure 1 - 20 : Schéma de l’interaction d’un champ magnétique avec une nanoparticule métallique. Formation d’un dipôle induit qui oscille en phase [41]

Cette résonance a lieu dans le domaine du visible pour l’or et l’argent, d’où la coloration particulière de ces nanoparticules due à la bande plasmon qui en résulte. Il est important de noter que pour les nanoparticules d’or la longueur d’onde correspondante est généralement de 520-530 nm (Figure 1 - 21) [44]. La position et l’allure de la bande plasmon dépendent de la nature du métal, de la taille et de la forme des particules, de la distance entre particules ainsi que des propriétés du milieu environnant.

Figure 1 - 21 : Bande plasmon typique de nanoparticules d’or sphériques à environ 520 nm. Une telle solution présente donc une couleur rouge intense.

Mie [15] est le premier qui a proposé une justification théorique de ce phénomène en 1908, suite aux observations de Faraday [30] et Zsigmondy [42]. La théorie de Mie repose sur un traitement d’électromagnétisme de l’interaction des électrons de conduction du métal avec le champ incident. Elle est largement utilisée, dans sa première formulation ou dans ses versions plus raffinées, pour rendre compte des propriétés optiques des nanoparticules. Nous n’en détaillerons pas ici les calculs mais mènerons plutôt une approche qualitative [39]. Les points les plus importants à retenir de cette théorie sont les suivants :

Figure 1 - 22 : Illustrations du déplacement de la bande plasmon de résonance de nanoparticules d’or de 20 nm de diamètre en fonction (A) de la distance entre 2 particules, (B) du nombre de nanoparticules distantes de 0,5

nm dans un modèle en deux dimensions. En pointillés se trouve le spectre d’absorption de nanoparticules isolées.

- La condition de résonance de l’oscillateur, et donc l’existence de la bande plasmon, dépend de la constante diélectrique du métal mais également de celle du milieu. Par conséquent, les nanoparticules d’or sont sensibles à toute perturbation locale de leur environnement. En particulier, à la présence d’autres nanoparticules d’or comme le montre la Figure 1 - 22 [43]. La longueur d’onde correspondant à la résonance plasmon augmente quand la distance inter-particules diminue (cas A) et ce phénomène est amplifié quand le nombre de particules proches augmente (cas B).

- La bande plasmon dépend de la taille des nanoparticules. Une manière de le justifier est de se rappeler que les électrons sont mis en mouvement lors de leur interaction avec le

champ électromagnétique, mouvement amorti par des collisions électron ou électron-phonon par exemple. Mais quand le libre parcours moyen des électrons devient comparable à la taille de la particule, des collisions avec la surface contribuent à freiner ces électrons. D’où la dépendance observée. La longueur d’onde du plasmon augmente avec la taille (Figure 1 - 23)[44]. Intuitivement, quand la particule voit son diamètre augmenter, la distance entre les charges de signe opposé, créées par le déplacement du nuage électronique, augmente. Ainsi, la force de rappel de nature électrostatique diminue et la fréquence de résonance est abaissée. D’autre part, Link et El-Sayed [45] ont montré que pour des particules de moins de 20 nm de diamètre, la largeur de la bande plasmon diminue lorsque la taille des nanoparticules augmente, alors que pour des particules de plus de 20 nm de diamètre, la largeur de bande augmente en même temps que la taille des nanoparticules. Notons que pour des nanoparticules de diamètre inférieur à 10 nm, la bande plasmon est large, peu intense et qu’elle disparaît pour des diamètres inférieurs à 2-3 nm.

Figure 1 - 23 : Spectres d’absorption plasmon (à gauche) et image TEM (à droite) de nanoparticules d’or sphérique de différentes tailles. La longueur d’onde du plasmon dépend de la taille des nanoparticules, elle

- La bande plasmon dépend de la forme des nanoparticules. Par exemple, lorsqu’on passe d’une nanoparticule sphérique à une nanoparticule en bâtonnet, le spectre d’absorption plasmon change également. La Figure 1 - 24 [44] montre un spectre d’absorption typique de nanobâtonnets. Au lieu d’une seule bande (cas des nanosphères comme nous venons de le voir), le spectre d’absorption de nanobâtonnets en possède deux : une bande d’absorption intense aux grandes longueurs d’onde dans le proche infrarouge due à l’oscillation longitudinale des électrons ; et une faible bande d’absorption aux petites longueurs d’onde dans le visible (aux alentours de 520 nm) due à l’oscillation transversale des électrons.

Figure 1 - 24 : Spectre d’absorption typique de nanobâtonnets

Nous pouvons donc obtenir des gammes de couleurs très intéressantes en jouant sur la composition, la taille ou la forme des nanoparticules. La Figure 1 - 25 montre des exemples de solutions colloïdales de couleurs différentes dues à des particules de tailles, de formes et de compositions différentes.

Même si ce sont les phénomènes d’absorption qui ont la plus forte contribution pour les particules de dimensions inférieures à la longueur d’onde, il se produit également un phénomène de diffusion lorsqu’elles sont illuminées par un faisceau de lumière blanche.

Figure 1 - 25 : A gauche : Photos TEM de nanosphères et nanobâtonnets d’or (a, b) et nanoprismes d’argent (c) ; A droite : Photos de dispersions colloïdales de nanoparticules AuAg avec augmentation de la concentration

en Au (d), nanobâtonnets Au avec augmentation du facteur de forme (e), et nanoprismes Ag avec augmentation de la taille du côté (f)

La lumière diffusée par les suspensions de nanoparticules d’or est fortement colorée (Figure 1 - 26) [46].

Figure 1 - 26 : Nanoparticules de différentes tailles irradiées par un faisceau de lumière blanche

Elle est sensible à leurs tailles, leurs formes et leurs compositions. La Figure 1 - 27 montre comment la lumière diffusée par des nanoparticules est différente en fonction de leurs compositions et formes [47] et la Figure 1 - 28 [48] présente des spectres de diffusion de nanobâtonnets avec différents facteurs de forme, résultant de calculs numériques.

Figure 1 - 27 : Lumière diffusée par des nanoprismes d’argent, des nanobâtonnets d’or et des nanosphères d’or

Figure 1 - 28 : Spectres de diffusion calculés pour des nanobâtonnets avec différents facteurs de forme a/b (longueur/largeur) Nanoprismes d’argent Nanobatônnets d’or Nanosphères d’or