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Chapitre 3 – Entre villes et campagnes, les bourgs et les villages

A. Une quasi absence de villes

Afin de mieux comprendre dans quel contexte évoluent les villages et les bourgs ruraux à la fin du Moyen Âge, il paraît indispensable de déterminer quelles sont les agglomérations gersoises de premier rang à cette période.

À la recherche de critères pertinents

La question de la définition de la ville au Moyen Âge et de la différenciation entre ville et village n’est pas nouvelle236. Cécile Gloriès237, puis Cécile Rivals238, en ont dressé un

bilan historiographique général. Il en ressort l’existence d’une multiplicité d’indicateurs conduisant à définir le degré d’urbanité d’une agglomération. Ces critères d’urbanité sont constitués d’éléments qui, s’ils sont présents dans une agglomération, permettent de la qualifier de ville.

235 CATALO, Jean, GINOUVEZ, Olivier, GUYONNET, François et CARRU, Dominique, « Les faubourgs

médiévaux… », op. cit., 2009, p. 27.

236 Voir notamment : LE GOFF, Jacques (dir.), La ville en France…, op. cit., 1998 (1e édition sous la direction de

Georges Duby, 1980), p. 7-25 ; ou GALINIÉ, Henri, Ville, espace urbain et archéologie, Maison des sciences de la ville, de l’urbanisme et des paysages, Université François Rabelais, Tours, 2000, p. 20.

237 GLORIÈS, Cécile, Le réseau des villes du Quercy du XIe au XVe siècle, mémoire de DEA sous la direction de Maurice Berthe, UTM, Toulouse, 1997, p. 31-36.

Un essai d’application de critères d’urbanité aux agglomérations gasconnes

Pour la Gascogne gersoise, la question de la définition de la ville a été soulevée par Françoise Bériac dans un article au titre évocateur : « Petites villes ou bourgs ? Le cas du Gers239 ». L’auteur tente d’appliquer les critères d’urbanité habituellement admis par les historiens (présence de couvent mendiants, nombre de feux, centres administratifs, etc.) aux agglomérations gasconnes et conclut que ceux-ci sont peu opérants. L’application de ces critères aboutit à la réalisation de plusieurs listes de villes qui contiennent toutes des manques importants. Le tableau ci-dessous recense les principaux critères retenus par Françoise Bériac et les villes concernées par chacun (tab. 3-2). N’y ont pas été intégrés deux critères qui paraissent à l’auteur inapplicables à cette zone d’étude : la convocation aux assemblées royales du début du XIVe siècle et la taxe royale de 1538, en raison notamment

de la faible présence du pouvoir royal dans la région à ces périodes.

Couvents mendiants (1300-1330) Feux fiscaux (2e moitié XVe siècle) Centre administratif (XVe siècle) Influence des notaires (XVe siècle) Artisanat de luxe (XVe siècle) Auch 1 > 200 X > 10 km X Barcelonne 0 > 200 Barran Interdits 100 Condom 3 Eauze 0 100 Fleurance Interdits Gimont Interdits Gondrin 0 100 < 10 km L’Isle-Jourdain 1 X X Lectoure 3 100 à 200 X Marciac 1 Mirande 1 > 10 km X Nogaro 1 X X Pavie 1 Plaisance 0 X Riscle 0 > 200 > 10 km Samatan 1 Vic-Fezensac 1 200 X > 10 km X

Tab. 3-2 : Récapitulatif des principaux critères d’urbanité retenus par Françoise Bériac (BERIAC, Françoise, « Petites villes ou bourgs ? ... », op. cit., 1987, p. 29-39).

Les cases vides signalent l’absence de donnée.

Ce tableau propose une liste de 18 villes pour la fin du Moyen Âge, liste qui est à nuancer à plusieurs égards. Tout d’abord, concernant les données, toutes n’ont pas le même sens et ne sont pas à considérer sur un plan d’égalité. Les cases vides ne signalent que l’absence d’information. Si la présence de couvents mendiants dans plusieurs

239 BERIAC, Françoise, « Petites villes ou bourgs ? Le cas du Gers », in POUSSOU, Jean-Pierre et LOUPÈS, Philippe

agglomérations est bien attestée, il ne faut pas oublier que dans certains contrats de paréage de bastides des clauses particulières interdisent la création de ces établissements. C’est le cas, notamment, à Barran, Fleurance et Gimont. L’utilisation du critère démographique à la période qui nous intéresse pose problème. Les nombres de feux que l’on retrouve parfois dans les archives ne témoignent pas d’une réalité concrète prenant en compte la totalité des habitants (feux réels) mais seulement la partie imposable de la population (feux fiscaux) et sans qu’il soit possible de déterminer avec certitude combien de personnes composent un feu. Ce critère ne peut donc être utilisé seul, mais toujours en corrélation avec d’autres éléments. D’un point de vue politique et administratif, seules cinq agglomérations se détachent du lot : Auch, L’Isle-Jourdain, Lectoure, Nogaro et Vic-Fezensac. Toutes comptent plusieurs juridictions, juge ordinaire et juge d’appeaux. Les États de la sénéchaussée sont régulièrement réunis à Auch et Vic-Fezensac, parfois à L’Isle-Jourdain. Toutes comptent un nombre important de baillis : trois à Auch, huit à Nogaro, douze à Vic- Fezensac et vingt à L’Isle-Jourdain. Auch abrite en outre un sénéchal et L’Isle-Jourdain est l’une des résidences favorites du comte. Enfin, les critères des deux dernières colonnes sont partiels. Les données concernant l’influence des notaires et la présence d’un artisanat de luxe240 n’existent pas pour toutes les agglomérations, ce qui ne permet pas d’avoir une vue

d’ensemble, même si cela apporte des informations essentielles pour les sites documentés. Ce tableau montre bien qu’il n’y a aucune agglomération, hormis Auch et Vic- Fezensac, pour laquelle tous les types de données peuvent être mobilisés. Ailleurs, il n’est possible de renseigner que deux critères d’urbanité, au mieux trois (Lectoure, Mirande et Nogaro). Dans près de la moitié des cas, seul un critère d’urbanité peut être invoqué, ce qui ne suffit pas toujours à caractériser l’agglomération comme ville.

Les tentatives d’élaboration de grilles d’urbanité

Sous l’impulsion de Maurice Berthe, plusieurs travaux universitaires ont été réalisés dans les années 1990 à l’Université Toulouse 2 – Le Mirail autour de la question de l’urbanité. Cécile Gloriès propose notamment une grille élaborée grâce à la bibliographie antérieure sur le sujet. Les critères retenus dans cette grille sont répartis en sept thèmes :

- critères administratifs (administration royale, seigneurie, communauté…) ; - critères de centralité (origine géographique des habitants, des clients, des

vendeurs ; distance aux autres agglomérations…) ;

- critères démographiques (nombre de feux, population juive…) ; - critères économiques (professions attestées, échanges…) ;

- critères religieux (diocèse, nombre de paroisses dans la juridiction, présence de couvents, hôpitaux, léproseries…) ;

- critères socioculturels (université, collège, école ; milites, bourgeois…) ;

240 Françoise Bériac cite comme métiers artisanaux de luxe : barbier, tailleur, orfèvre, apothicaire et tisserand.

Peut-être plus que le type d’artisanat, c’est la notion de corps constitué en métier de ces artisans qui devrait être ici prise en compte comme critère d’urbanité.

- critères topographiques (origine de l’agglomération, type de plan, fortification, édifices de la vie collective, économique, religieuse…).

À la simple lecture de cette grille, un écueil majeur apparaît : la difficulté à pouvoir la compléter pour l’ensemble des agglomérations d’une zone d’étude. En effet, la documentation conservée est rarement suffisante pour permettre un tel degré de précision. Si les notices obtenues sont en grande partie lacunaires, il n’est plus alors envisageable d’établir des comparaisons et des synthèses pertinentes. C’est un des problèmes soulevés par Cécile Gloriès dans son travail. Une des solutions qu’elle propose est de multiplier le nombre de fiches afin de pallier les lacunes ponctuelles par la production de données en série241. D’autres travaux universitaires toulousains ont par la suite tenté de mettre en application cette grille d’urbanité, comme le DEA de Thibaut de Rouvray pour le Rouergue par exemple242. Faute de résultat concluant, cet axe de recherche a ensuite été abandonné

par les chercheurs toulousains.

De la notion d’urbanité à celle de centralité

Le concept de centralité défini par le géographe Walter Christaller en 1933 a été repris notamment par Charles Higounet en 1987 au sujet des bastides243. Par la suite, et jusqu’à aujourd’hui, bon nombre d’historiens cherchant à hiérarchiser les agglomérations médiévales ont eux aussi fait appel à cette notion de centralité. Citons par exemple Luc Bourgeois244 en Poitou ou Jean-Luc Fray en Lorraine245. Ce concept est aussi utilisé dans le Midi par Nelly Pousthomis, qui retient « les fonctions et services des agglomérations et leur rayonnement246 » comme critère d’urbanité pour les bourgs monastiques. Benoît Cursente

définit quant à lui le seuil entre les villages et les bourgs castraux par « la présence d’une juridiction et l’existence d’un marché247 ». Les différents critères énoncés par ces deux

auteurs recouvrent bien des fonctions centralisatrices de la ville. Cécile Rivals précise par ailleurs que « la notion de centralité recouvre trois domaines principaux : centralité politique et administrative, centralité économique et centralité religieuse et culturelle248 ».

241 Comme explicité dans le chapitre 2, c’est aussi la solution que j’ai proposée dans cette thèse pour pallier les

manques dans la documentation pour l’étude des agglomérations rurales gasconnes.

242 ROUVRAY, Thibaut de, Notion de ville et de réseau urbain en Rouergue à la fin du Moyen Âge (XIIIe siècle -

1560), mémoire de DEA, UTM, 1998.

243 HIGOUNET, Charles, « Centralités, petites villes et bastides dans l'Aquitaine médiévale », in POUSSOU, Jean-

Pierre et LOUPÈS, Philippe (dir.), Les petites villes du Moyen Âge à nos jours, Hommages à Georges Dupeux, Éditions du CNRS, Paris, 1987, p. 41-45.

244 BOURGEOIS, Luc, Les petites villes du Haut-Poitou…, op. cit., t. 1, 2000 ; t. 2, 2005.

245 FRAY, Jean-Luc, « Les villes d'origine castrale dans le maillage urbain de la région Lorraine, Réflexions sur

leur importance relative dans une perspective diachronique (XIIe-XXIe s.) », in CHÉDEVILLE, André et PICHOT,

Daniel (dir.), Des villes à l'ombre des châteaux…, op. cit., 2010, p. 227-234.

246 POUSTHOMIS-DALLE, Nelly, A l'ombre du moustier…, op. cit., 2002, vol. 2, p. 244.

247 CURSENTE, Benoît, « Les bourgs castraux de la Gascogne médiévale », in CHEDEVILLE, André et PICHOT,

Daniel (dir.), Des villes à l’ombre des châteaux…, op. cit., 2010, p. 215-226.

Cette approche ne cherche plus à définir la ville en tant que telle au travers de critères univoques. Elle permet au contraire de replacer l’agglomération dans son contexte et dans les relations qu’elle entretient avec d’autres à plus ou moins longue distance. Il n’est plus question d’urbanité, mais de centralité. Si suffisamment de facteurs de centralité sont réunis, cela peut permettre d’aboutir à la mise en place d’une agglomération de type urbain249. A la suite de ces différents auteurs, ce critère de centralité me semble être le plus

pertinent à retenir, bien qu’il ne soit pas toujours facile à identifier, faute, parfois, de documentation conservée.

Le choix de quelques critères pertinents

Nous avons constaté qu’aucune des agglomérations gersoises ne remplit la totalité des critères d’urbanité ou de centralité évoqués par Françoise Bériac ou Cécile Gloriès. Il n’existe pas de critère absolu pour définir une ville, qui plus est médiévale, mais bien un faisceau d’éléments qu’il convient de mettre en relation les uns avec les autres.

Pour la Gascogne gersoise de la fin du Moyen Âge, j’ai choisi de conserver trois critères pertinents :

- la présence d’un ou plusieurs couvents mendiants – qui est sans doute le seul critère communément admis par la plupart des historiens250 ;

- l’aire d’influence ou la centralité – malgré les difficultés que cela pose ; - et la présence d’un siège d’évêché – qui semble être un facteur

d’influence sur une zone relativement importante, le diocèse.

L’application de ces critères aux agglomérations gasconnes permet de nuancer le tableau dressé par Françoise Bériac en y soustrayant quatre agglomérations et en y ajoutant deux (tab. 3-3). Quatre agglomérations n’ont pas leur place parmi ce que nous appellerons des villes. À Gondrin, le nombre de feux est certes important, mais l’aire d’influence des notaires est limitée à une dizaine de kilomètres, ce qui en fait un bourg et non une ville. Il en est de même pour les bastides de Barcelonne et de Plaisance, dont le nombre de feux élevé pour la première et la présence de tisserands pour la seconde ne constituent pas des critères suffisants en l’absence d’autres indices concordants. Enfin, la bastide de Barran a connu une rétraction importante de sa surface bâtie entre 1303 et les années 1475-1480251. Nous pouvons donc imaginer que cette agglomération n’était pas suffisamment attractive pour favoriser l’implantation d’un couvent mendiant à la fin du Moyen Âge, même si cela avait été autorisé. Le nombre important de feux à la fin du XVe siècle est lui aussi à nuancer. Le territoire de la communauté est alors très vaste et, comme l’a montré Benoît Cursente, de

249 CURSENTE, Benoît, « Les bourgs castraux… », art. cit., 2010, p. 216.

250 LE GOFF, Jacques, « Ordres mendiants et urbanisation dans la France médiévale, État de l'enquête »,

Annales ESC, Paris, 25e année, n° 4, 1970, p. 924-946 : « La valeur des Mendiants comme témoins de

l'urbanisation du XIIIe au XVIe siècle peut être d'ores et déjà affirmée » (p. 937).

nombreux habitants résident dans des bordes à la campagne et non dans la bastide. Les agglomérations de Lombez et Mauvezin peuvent être intégrées à la liste : la première étant élevée au rang d’évêché en 1317 et la seconde abritant un couvent mendiant à partir de 1321.

Couvents mendiants (nombre et date d’implantation252)

Évêché ou ancien siège d’évêché

Aire d’influence (notaires, marchés…)

Auch 2 (1255 et 1386) X

Condom 5 (fin XIIIe s.) X (1317)

Eauze X

Fleurance 1 (1272)

Gimont Tentative en 1344253

L’Isle-Jourdain 1 (1288)

Lectoure 4 (fin XIIIe s.)

Lombez X (1317)

Marciac 2 (1320 et fin XIVe s.)

Mauvezin 1 (1321) Mirande 1 (1283 ou 1317) > 10 km Nogaro 1 (1250) Pavie 1 (1308) Riscle > 10 km Samatan 2 (1271 et 1335) Vic-Fezensac 1 (1383) > 10 km

Tab. 3-3 : « Villes » gersoises à la fin du Moyen Âge.

Pour la fin du XVe siècle, seize villes ont ainsi été identifiées comme telles : Auch,

Condom, Eauze, Fleurance, Gimont, L’Isle-Jourdain, Lectoure, Lombez, Marciac, Mauvezin, Mirande, Nogaro, Pavie, Riscle, Samatan et Vic-Fezensac. Si nous considérons le corpus des 212 sites étudiés comme représentant la totalité des agglomérations non urbaines, ces seize villes correspondent à seulement 7 % du total des agglomérations de la Gascogne gersoise médiévale. La part de ces villes dans le paysage est très certainement moindre, puisque le corpus de 212 sites ne comprend pas la totalité de l’habitat aggloméré mais seulement les villages et les bourgs pour lesquels la documentation est suffisante pour traiter le sujet.

252 TEISSEIRE, Hélène, Le rôle des établissements d'ordres mendiants…, op. cit., 1996.

253 AN, JJ 75, n°73, fol. 38 v., Défense aux frères prêcheurs de fonder un couvent à Gimont sans le

Origine et évolution des villes gersoises254

Ces seize villes sont d’origine variée et toutes ne peuvent pas être qualifiées comme telles dès le milieu du XIIIe siècle. Certaines n’existent même pas encore. La situation

présentée dans les paragraphes précédents est celle de la fin du Moyen Âge et témoigne des évolutions intervenues jusqu’à la fin du XVe siècle.

Les villes gersoises avant le milieu du XIIIe siècle

Seules trois de ces villes bénéficient directement d’un héritage antique comme chefs- lieux de cités : Auch, Eauze et Lectoure. Jusqu’au IXe siècle, Eauze a abrité le siège de

l’archevêché métropolitain avant son transfert à Auch. Lectoure était aussi alors le siège d’un évêché.

Les trois villes d’Eauze, Lombez et Nogaro se sont formées autour d’établissements religieux. Le monastère de Lombez est attesté depuis le IXe siècle, alors que la collégiale de

Nogaro n’est fondée que vers 1050. La population s’est regroupée progressivement autour de ces trois monastères, essentiellement à partir du XIe siècle. Ainsi, à Eauze, la population s’agglomère de manière concentrique autour du monastère Saint-Luperc implanté sur une hauteur proche de l’ancienne ville antique d’Elusa. Le développement de Nogaro paraît très rapide avec la constitution du Bourg Vieux près de la collégiale et du Bourg Neuf plus au nord, l’ensemble étant protégé par une enceinte commune dès les premières années du XIIe

siècle. À cette période, l’abbaye de Lombez se place sous la protection du chapitre de Saint- Étienne de Toulouse et adopte la règle de saint Augustin. Bien que ce monastère bénéficie d’un certain renom, Lombez n’est sans doute à cette période qu’un gros village ou un petit bourg.

Quatre villes s’organisent autour de demeures seigneuriales : L’Isle-Jourdain, Mauvezin, Riscle et Samatan. Dès le IXe siècle, Mauvezin se trouve à la tête de la vicomté de Fezensaguet et la ville se développe progressivement aux siècles suivants autour du château des vicomtes. L’église de Riscle est mentionnée au milieu du XIe siècle. La ville s’est

probablement formée dès cette période aux abords de l’église et du château des comtes d’Armagnac implanté sur la hauteur. La genèse de L’Isle-Jourdain est mieux connue grâce aux fouilles réalisées dans les années 1990 lors des travaux de la RN 124. Au XIe siècle,

l’agglomération est transférée vers le nord à son emplacement actuel auprès du château seigneurial des Jourdain. Sa position est essentielle depuis l’Antiquité, puisqu’elle se trouve à la bifurcation de la route venant de Toulouse à l’est, vers Auch à l’ouest et Lectoure au nord- ouest. La ville de Samatan s’est formée par la réunion du bourg castral, sur la hauteur, et de la ville basse, dans la plaine. C’était l’une des résidences principales des comtes de Comminges vers le XIIe siècle.

254 Les informations présentées ici proviennent, pour l’essentiel, des ouvrages suivants : COURTÈS, Georges

(dir.), Communes du département du Gers, SAHG, Auch, 2003, 2004 et 2005 ; LOUBÈS, Gilbert, « La Gascogne au Moyen Âge… », art. cit., 1977, p. 83-121.

Les trois villes d’Auch, Condom et Vic-Fezensac présentent une genèse double. Vers 1080, l’archevêque d’Auch et le comte de Fezensac fondent une sauveté à Auch. Les populations de villages alentour viennent alors accroître le peuplement de la ville aux abords de la cathédrale et du château comtal, sur le coteau dominant l’ancienne ville antique. L’ensemble est englobé dans une enceinte commune sans doute dès le XIIe siècle. À la même

période, les villes de Condom et de Vic-Fezensac se développent également considérablement autour de deux pôles complémentaires, l’un d’origine ecclésiale et l’autre d’origine castrale.

Nous verrons par la suite que les processus à l’œuvre dans la morphogenèse des villes, qui sont mieux connues et étudiées, se retrouvent fréquemment dans les villages et les bourgs souvent moins documentés.

Fondation et réussite de quelques bastides

Sur la trentaine de bastides fondées entre 1255 et 1322 en Gascogne gersoise, seules cinq peuvent être qualifiées de villes à la fin du Moyen Âge : Fleurance, Gimont, Marciac, Mirande et Pavie. Elles datent toutes de la seconde moitié du XIIIe siècle. Gimont est fondée en 1266 par le comte de Toulouse en paréage avec l’abbaye de Planselve. Le paréage en 1274 entre le sénéchal du roi de France, Eustache de Beaumarchès, et le comte de Gaure permet la fondation de Fleurance qui devient dès lors la capitale du comté. Eustache de Beaumarchès intervient aussi dans la fondation des deux bastides de Mirande et Pavie en 1281, dans le cadre de paréages entre le comte d’Astarac et l’abbaye de Berdoues. La bastide de Pavie est fondée aux portes d’Auch, en Astarac, mais à la frontière des possessions des comtes d’Armagnac. La rivalité entre les deux villes est très importante à la fin du Moyen Âge. La bastide de Marciac est quant à elle fondée en 1298 par paréage entre le comte de Pardiac et l’abbaye de la Case-Dieu, avec l’accord du roi de France représenté par son sénéchal, Guichard de Marciac255.

Ces cinq bastides sont fortifiées dès la fin du XIIIe siècle ou le début du XIVe siècle,

comme en témoignent les vestiges visibles notamment à Gimont et Mirande. Il est intéressant de noter que l’enceinte de Fleurance a été financée par le roi d’Angleterre deux ans seulement après que cette bastide a passé dans ses mains avec l’ensemble du comté de Gaure. En 1351, le roi de France concède aux habitants de Gimont les revenus de l’encan afin d’entretenir les fortifications256. Celles de Pavie auraient été démantelées en 1444 sur ordre de Charles VII.

Dès les premières années du XIVe siècle sont entrepris de grands travaux à Marciac, avec notamment la construction de l’église paroissiale Notre-Dame-de-l’Assomption. La bastide détourne alors le flux de pèlerins et de marchands à son profit, au détriment du