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CHAPITRE I- VECTORISATION DE CHELATEURS DU CU(I) VERS LA LECTINE

I.4. a La synthèse peptidique sur support solide

Le peptide linéaire protégé précurseur est tout d’abord obtenu par synthèse sur

support solide selon la stratégie Fmoc/tBu. Ce type de synthèse a été introduit par

Merrifield en 1963 et consiste à greffer de manière covalente le premier acide aminé sur un support appelé résine, composé de petites billes de polymères.275 Puis l’élongation de la chaîne peptidique est réalisée à partir de ce premier acide aminé, par substitution nucléophile d’une amine primaire sur une fonction acide carboxylique activée par un agent de couplage. En fin de synthèse, le peptide linéaire est décroché du support et récupéré dans le filtrat. Cette méthode, simple et automatisable, est devenue une technique de routine en synthèse peptidique.

L’élongation peptidique se fait de l’extrémité C-terminal vers la N-terminale afin qu’il n’y ait pas de perte de stéréochimie, dite épimérisation, par formation d’un oxazolone. Les couplages peptidiques ont donc lieu par réaction entre le COOH libre de l’acide aminé en solution et le NH2 en α (Nα) du peptide accroché au support. Afin de contrôler le greffage, les Nα des acides aminés en solution sont protégées. De ce fait, la synthèse est réalisée de manière itérative, par une suite de déprotections sélective de l’amine terminale du peptide sur le support puis couplage avec un nouvel acide aminé. Ceci nécessite que les chaînes latérales soient protégées de manière orthogonales par rapport au Nα, et que ces groupements protecteurs soient stables en condition de synthèse. Deux stratégies de protections sont classiquement utilisées : la stratégie Boc/Bn et la stratégie Fmoc/tBu. La stratégie Fmoc / tBu, la plus courante, est utilisée ici :276 elle consiste à protéger les Nα par un groupement 9-Fluorenylmethoxycarbonyl (Fmoc), sélectivement hydrolysé en milieu basique. Les chaînes latérales sont quant à elles protégées par des tert-Butyls (tBu) ou autres groupements protecteurs stables en conditions basiques et acide faible, comme Boc ou Alloc ici utilisés (figure 93).

Le couplage peptidique se fait dans le DMF à pH 8 en présence d’un agent de couplage, le benzotriazole-1-yl-oxy-tris-pyrrolidinophosphonium hexafluorophosphate (PyBOP), qui forme un ester activé au C-terminal du peptide. L’avantage de la synthèse supportée est que les réactifs sont utilisés en excès en solution, ce qui augmente la vitesse et les rendements de synthèse, et sont ensuite facilement évacués par filtration de la résine. L’inconvénient est

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la possibilité de formation de peptides tronqués difficiles à séparer du peptide d’intérêt, généralement causée par des gènes stériques ou de repliement des chaînes peptidiques en élongation sur la résine. Pour pallier à cela, un test de Kaiser277 ou un test au TNBS278 (2,4,6-trinitrobenzene-sulphonic acid) est effectué sur quelques billes de résines sacrifiées après chaque couplage afin de s’assurer que toutes les amines libres présentes sur la résines aient réagies.

Figure 93 : Synthèse peptidique sur support solide en stratégie Fmoc/tBu. Utilisation de la résine GlySASRIN® pré- fonctionnalisée avec des glycines avec un taux de chargement de 0,5 mmol/g. 1) Pipéridine (20%), DMF, 20 min, t.a. ; 2) Fmoc-AA(GP)OH (2 eq.), PyBOP (2 eq.), DIPEA (3-4 eq., pH 8-9), 30 min, t.a. Le contrôle du taux de chargement de la résine après chaque déprotection des Nα s’effectue par dosage de la quantité d’adduit dibenzofluvene-pipéridine relâché en solution (mesure d’absorption UV à 299nm).279 Le test TNBS consiste à introduire quelques gouttes d’acide picrylsulfonique sur des billes de résine dans une solution de DIPEA à 10% dans le DMF. En cas de réaction de couplage non totale (test positif), deux solutions sont envisageables : relancer à nouveau la réaction de couplage, ou effectuer un « capping » par acétylation des amines libres pour stopper l’élongation du peptide tronqué (non utilisé ici). En fin de synthèse, le peptide linéaire est décroché de la résine en condition acide douce (TFA 1% dans CH2Cl2). X = Boc ou

Boc-Ser(tBu)OH ; Y = Boc ou Alloc.

Enfin, après couplage et déprotection de l’amine du dernier acide aminé de la séquence, le peptide linéaire est décroché du support avec 1% de TFA. Il est obtenu avec un rendement de 85 à 95%. Comme ce peptide vise à être cyclisé, la résine SASRIN® est utilisée parce qu’elle libère un peptide acide en son extrémité C-terminale et que le décrochage se fait en conditions acides douces, qui ne menacent pas de déprotéger les chaînes latérales dans la stratégie employée. Le premier acide aminé introduit sur la résine est nécessairement une glycine. En effet, c’est le seul acide aminé achiral. De cette manière les problèmes d’épimérisation pouvant survenir lors de la réaction de cyclisation sont ainsi évités.

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I.4.b - Stratégies de synthèse des différentes plateformes

fonctionnalisées par des aldéhydes

Il existe deux façons d’obtenir la plateforme fonctionnalisée (schéma 3) : la synthèse classique et la synthèse utilisant les dipeptides.

Schéma 3 : Deux types de synthèse utilisées, avec ou sans assemblage Lysine pré-fonctionnalisées par une Sérine protégée ; (a) Cyclisation : dilution à 0,5 mM dans CH2Cl2/DMF, PyBOP (2 eq.), DIPEA (3-4 eq., pH 8-9), 10h, t.a. ; (b)

TFA/CH2Cl2 (50/50, v/v), 1h, t.a. ; (c) Boc-Ser(tBu)OH (1,2 eq./NH2 Lys), PyBOP (1,2 eq./NH2 Lys), DIPEA (3-4 eq., pH8-9),

DMF, 45 min, t.a. ; (d) Pd(PPh3) (0,2 eq.), PhSiH3 (100 eq.), CH2Cl2/DMF (3/1, v/v), 30 min., t.a. ; (e) TFA/TIS/H2O

(95/2,5/2,5), 1h, t.a. ; (f) TFA/Tis/H2O (95/2,5/2,5), 1h, t.a.

Pour chacune des stratégies, le peptide linéaire est cyclisé en condition de couplage peptidique, à pH8 en présence de PyBOP, et dilué à 0,5 mM pour favoriser les réactions intramoléculaires et éviter tout risque de dimérisation. Cette cyclisation est facilitée par la pré-structuration du peptide en solution avec le coude proline-glycine.

La synthèse classique

La synthèse classique s’effectue en 5 étapes par greffage des Ser sur la face supérieure du châssis après décrochage, cyclisation du peptide et déprotection sélective des Lys à fonctionnaliser.274 C’est la voie de synthèse la plus longue des deux mais aussi plus versatile, et donc utilisables pour différents types de fonctionnalisation. Elle nécessite une protection orthogonale des chaînes latérales des acides aminés des deux faces du cyclodécapetide : les Lys de la face supérieure sont protégées par des groupements Boc, et la Lys de la face

Synthèse avec les assemblages Fmoc-Lys(Boc-Ser(tBu))OH Synthèse classique

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inférieure par un groupement Alloc.280 Un traitement acide permet donc de déprotéger sélectivement les Lys de la face supérieure pour leur fonctionnalisation par des Boc-Ser(tBu) en condition de couplage peptidique. Puis la Lys de la face inférieure est déprotégée à l’aide de palladium au degré d’oxydation zéro, en présence de présence de triphénylphosphine et de phénylsilane.280 Enfin, les Ser peuvent à leur tour être déprotégées en condition acide (schéma 3).

La synthèse utilisant les dipeptides

La synthèse supportée du peptide linéaire utilise le synthon Fmoc-Lys(Boc-Ser(tBu))OH, une Lys pré-fonctionnalisée par une Ser protégée. Ce dipeptide a été préparé en milieu homogène par couplage peptidique de la Fmoc-Lysine-OH avec la Boc-Ser(tBu)-NHS, par Carlo Pifferi au DCM. Cette voie de synthèse est plus rapide, seules 2 étapes sont nécessaires après le décrocage du pepetide linéaire de la résine, et elle ne nécessite pas de protections orthogonales des chaînes latérales. Celles-ci sont donc protégées par des groupements Boc et tBu, puis libérées en une seule étape en milieu acide fort après la cyclisation du peptide (schéma 3). Cette voie de synthèse est cependant moins versatile.

Schéma 4 : Synthèse de la plateforme tétravalente portant 4 fonctions aldéhyde espacées par des chaînes PEG sur une face et une fonction amine sur l’autre face ; (a) TFA/CH2Cl2 (50/50, v/v), 1h, t.a. (b) acide 2- [2- (Boc-

amino)ethoxy]ethoxyacetique (4,4 eq.), PyBOP (4,4 eq.), DIPEA (3-4 eq., pH8-9), DMF, 45 min, t.a. ; (c) TFA/CH2Cl2 (50/50,

v/v), 1h, t.a. ; (d) Boc-Ser(tBu)OH (3,6 eq.), PyBOP (3,6 eq.), DIPEA (3-4 eq., pH8-9), DMF, 45 min, t.a. ; (e) Pd(PPh3) (0,2

eq.), PhSiH3 (100 eq.), CH2Cl2/DMF (3/1, v/v), 30 min., t.a. ; (f) TFA/TIS/H2O (95/2,5/2,5), 1h, t.a.

Lys

Pro Lys Lys Gly

Ala Gly Lys Lys Pro O O NH O Alloc Boc a,b Lys Pro Lys Lys Gly Ala Gly Lys Lys Pro Alloc c,d e,f NH HN HN NH O O NH O Boc O O NH O Boc O O NH O Boc 4 4 4 4 Lys

Pro Lys Lys Gly

Ala Gly Lys Lys Pro O O NH O Alloc Boc Ser(tBu) NH HN HN NH O O NH O Boc Ser(tBu) O O NH O Boc Ser(tBu) O O NH O Boc Ser(tBu) 4 4 4 4 Lys Pro Lys Lys Gly Ala Gly Lys Lys Pro O O NH O Ser NH HN HN NH O O NH O Ser O O NH O Ser O O NH O Ser 4 4 4 4 Boc Boc Boc Boc 19 21 23 24

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Enfin, un dérivé portant quatre bras espaceurs plus long entre la plateforme et les sucres a été synthétisé par Clara Barrau au DCM. Pour cela, une plateforme tétravalente a été obtenue par voie classique, de manière à introduire les bras espaceurs sur les Lys avant leur fonctionnalisation par des Ser (schéma 4). Des chaînes polyéthylène glycol (PEG) acide 2-[2-(Boc-amino)ethoxy]ethoxyacétique portant une extrémité acide carboxylique et une extrémité amine protégée par un Boc sont utilisées. Elles sont introduites sur les amines libres des Lys par lien amide en condition de couplage peptidique. Puis des Boc-Ser(tBu)OH sont couplées sur les extrémités amines après leur déprotection, avant d’être à leur tour déprotégées.

Sur ces différentes plateformes sont ensuite greffés les sucres oxyamines d’une part, et la sonde fluorescente d’autre part.