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2.4.1 Présentation du modèle MERLIN-Expo implémenté sous Ecolego Le modèle de sol développé pendant ma thèse est issu d’un travail effectué au sein du LNHE dans le cadre du projet européen 2-FUN (Full-chain and UNcertainty approaches for assessing health risks in FUture eNvironmental scenarios), devenu 4FUN. Son objectif est de proposer une librairie de modèles multi-milieux (MERLIN-Expo) afin d’évaluer les risques sanitaires suite à l’exposition d’une population humaine à divers polluants, en suivant l’évolution de ces substances depuis leur émission jusqu’à leur absorption (par ingestion, inhalation ou contact cutané). Pour cela, des modèles multi-milieux (incluant entre autres l’atmosphère, le sol, la végétation, l’eau, les animaux) décrivant les différents modes de transport des polluants dans l’environnement sont couplés avec des modèles PBPK (physiologically-based pharmacokinetic) qui évaluent l’ab- sorption, la distribution, le métabolisme et l’excrétion des polluants chez l’homme à partir de la physiologie et de la biochimie de l’organisme ainsi que des propriétés physico-chimiques des polluants.

Le logiciel Ecolego (ecolego.facilia.se), développé par une entreprise suédoise (Facilia) et uti- lisé pour créer des modèles dynamiques et réaliser des simulations déterministes et probabilistes, a été choisi pour réaliser les simulations numériques de notre modèle. Pour simplifier la visibilité de modèles parfois complexes, Ecolego se propose de les représenter par une matrice décrivant les interactions entre les différents sous-systèmes : sur la diagonale de cette matrice se trouvent les différents compartiments du modèle, et on dispose les interactions entre ces compartiments sur les autres éléments de la matrice (voir figure 2.8). La figure 2.9 représente la matrice correspon- dant au modèle de sol explicité à la section 2.3. Ecolego offre une grande variété de solveurs pour résoudre les équations présentes dans les modèles (Runge-Kutta, Adams-Bashforth-Moulton, Rosenbrock, ...). Il permet en outre de réaliser des analyses de sensibilité (méthodes locales et globales) pour évaluer l’influence des paramètres du modèle sur l’estimation de certaines proprié- tés. Nous avons utilisé cet outil dans le chapitre suivant (chapitre 3) afin d’identifier les processus clés impliqués dans la détermination des réémissions du sol vers l’atmosphère.

2.4. ÉVALUATION DU MODÈLE 61

Figure 2.8 – Représentation des échanges entre différents sous-systèmes par une matrice au sein du logiciel Ecolego.

2.4.2 Présentation des Mesures expérimentales Les sites

Afin d’éprouver la capacité de notre modèle à représenter les processus ayant lieu dans les sols, nous avons décidé de comparer les résultats obtenus avec des mesures expérimentales. Nous avons choisi pour cela des données issues d’un article de Cousins et al. (1999b) concernant des HAPs et des PCBs. Des carottes ont été prélevées à partir de quatre sites en Angleterre, deux dans le Sud-Est du pays, à la station expérimentale Rothamsted (Park Grass et Broadbalk), deux autres en Ecosse, près d’Aberdeen (Hartwood) et de Motherwell (Glensaugh). Les échantillons considérés sont issus de sols variés, que ce soit en terme de composition (matière organique, structure du sol), de couvert végétal (prairie, bois, lande) et d’exposition aux contaminations via les dépôts (voir Cousins et al. (1999b)).

Nous avons réalisé des simulations sur une durée suffisamment longue pour atteindre un équi- libre. Ceci a permis de comparer nos résultats aux données expérimentales. Hollander et al. (2007) donnent trois critères qu’un sol doit vérifier pour être considéré comme en état d’équilibre : (i) l’absence d’activités anthropiques, spécialement l’agriculture ;

(ii) des dépôts et des émissions à peu près constantes ;

(iii) l’homogénéité du sol en termes de texture et de matière organique.

Selon eux, les sites de Park Grass et Broadbalk sont conformes à ces trois critères alors que ceux de Glensaugh et Hartwood ne respectent pas le troisième.

Les polluants

Des échantillons prélevés dans le sol ont été extraits des fractions de PCB et de HAP, fractions qui ont été analysées par chromatographie gazeuse (GC) pour les PCBs et liquide (HPLC) pour les HAPs. 53 congénères des PCBs et 14 HAPs ont été quantifiés et une concentration totale de HAPs et de PCBs à différentes profondeurs entre 0 et 20 cm en a été déduite. Le lecteur pourra se référer à l’article de Cousins et al. (1999b) s’il désire plus de détails concernant les méthodes d’extraction des HAPs et des PCBs.

2.4.3 Données d’entrée utilisées pour la simulation

Notre objectif n’est pas de calibrer nos paramètres pour chaque simulation, c’est-à-dire de les ajuster pour obtenir des résultats numériques aussi proches que possible des données expérimen- tales. Au contraire, nous voulons construire un modèle le plus général possible, qui pourra ensuite être utilisé dans de nombreux cas d’étude et notamment couplé à un modèle atmosphérique à des échelles continentales.

Nous avons procédé en deux étapes pour évaluer notre modèle. Nous avons tout d’abord réa- lisé nos simulations avec des valeurs de meilleure estimation, choisies comme décrit dans les paragraphes suivants. Puis nous avons réalisé des simulations probabilistes en faisant varier les paramètres selon une loi décrite également ci-dessous. Le choix des lois est justifié de manière plus précise dans le chapitre 3. Ceci nous permet de prendre en compte les nombreuses incerti- tudes dans la détermination des paramètres.

Propriétés du sol et conditions météorologiques

Le lessivage de la phase solide (érosion) ou liquide (ruissellement) est modélisé par un co- efficient λwash−of f. Le ruissellement dépend de la solubilité du polluant mais par souci de sim-

plification et dans la mesure où ce processus n’apparaît pas a priori comme le plus important, nous avons choisi une valeur constante (3.10−6 d−1). Concernant la bioturbation, une valeur de

2.4. ÉVALUATION DU MODÈLE 63 probabilistes, on a fait varier Ds de manière uniforme entre 5.10−8 et 5.10−6 m2.d−1.

Comme on s’intéresse à un état stationnaire, on considère une température moyenne, donnée pour chaque site dans Cousins et al. (1999b). Le contenu en matière organique a été obtenu en faisant la moyenne pondérée de l’horizon minéral et de l’horizon organique. Ces données sont résumées dans le tableau 2.3.

Table 2.3 – Valeurs choisies pour les conditions météorologiques et les propriétés du sol, confor- mément aux caractéristiques des sites (Cousins et al., 1999b).

Site Park Grass Broadbalk Glensaugh Hartwood

Température moyenne (°C) 9,2 9,2 7,3 7,1

Précipitations annuelles (mm) 717 717 1056 1045

Contenu en carbone organique 3,4% 2,9% 11,1% 12,4%

Masse volumique du sol (kg.m−3) 1350 1350 1350 1350

Caractéristiques des polluants

Dans leur Annexe 2, Hollander et al. (2007) estiment les propriétés des HAPs et des PCBs. Elles sont reprises dans le tableau 2.4 ci-dessous.

Table 2.4 – Paramètres dépendant des polluants considérés.

Paramètre λ Koc M H

(d−1) (sans unité) (g.mol−1) (P a.m3.mol−1)

HAP 9,5.10−4 1,07.105 239 6,77.10−3

PCB 3.10−5 1,63.106 326 12,2

Dépôt

L’évaluation d’un modèle en comparant les concentrations calculées avec des mesures ex- périmentales n’est pas chose aisée. En effet, une mesure témoigne d’une pollution du sol à un instant donné qui n’est pas facilement reproductible. Il n’est pas évident de retrouver l’historique qui a conduit au niveau de contamination d’un sol. L’idéal serait de comparer modèle et expé- rimentation dans des conditions stationnaires. Ceci étant, les polluants organiques persistants sont assez stables dans les sols. De plus, d’après la publication originale (Cousins et al., 1999b), deux des sols (Hartwood et Glensaugh) n’ont pas été perturbés pendant plusieurs années avant la prise d’échantillon. En raison du manque de données disponibles, nous avons testé plusieurs flux de dépôt et nous avons choisi, en utilisant la méthode des moindres carrés, celui qui donnait des concentrations les plus proches des observations. Concernant les simulations probabilistes, on a choisi de faire varier le dépôt de + à -20% autour de la valeur choisie pour la simulation déterministe.

2.4.4 Comparaison Modèle / Mesures

La figure 2.10 montre les mesures expérimentales réalisées par Cousins et al. (1999b) ainsi que les résultats de nos simulations. La courbe jaune correspond à la simulation de meilleure estimation, et les courbes orange et verte donnent respectivement la valeur correspondant au 5e

percentile (i.e. il y a 5% de simulations donnant des valeurs inférieures) et au 95e percentile (i.e.

il y a 5% de simulations donnant des valeurs supérieures). La plupart des points de mesure sont compris entre le 5e et le 95e percentile, et ceux qui n’y sont pas en restent tout de même assez

proches.

En accord avec la forme de l’équation de notre modèle, la concentration diminue avec la pro- fondeur pour toutes nos simulations. Quant aux profils expérimentaux, la concentration diminue

également de façon générale. Cependant, on peut remarquer une augmentation de la concen- tration sur les deux ou trois premiers centimètres (figures a, b, c et e). Ceci s’explique d’après Cousins et al. (1999b) par la corrélation entre le contenu en carbone organique dans le sol, qui croît sur les premiers centimètres avant de décroître assez fortement, et la concentration de HAP

(a) (b)

(c) (d)

(e) (f)

Figure 2.10 – Mesures expérimentales issues de Cousins et al. (1999b) et profils de concentration issus de simulations de meilleure estimation ou de simulations probabilistes.

2.5. PROFONDEUR D’ENFOUISSEMENT 65