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CHAPITRE 1 : REVUE DE LA LITTÉRATURE

1.9 ÉTUDES DU MINISTÈRE DU TRAVAIL ET ÉTUDES DE CAS

1.9.1 ÉTUDES DU MINISTÈRE

Les deux études, qui ont été réalisées par le ministère du Travail au cours des vingt-cinq dernières années, se rapportent à la médiation préventive. La première date de 1991. Elle est réalisée par Favreau et L’Écuyer sous forme d’un rapport d’enquête et se concentre exclusivement sur la médiation préventive (Favreau et L’Écuyer, 1992, p. 6-8 et 67-70). La seconde étude du ministère du Travail est celle de 2003 et porte sur une série de documents concernant les pratiques innovatrices dans les relations patronales-syndicales. Parmi ceux-ci, deux documents, dont l’un rédigé par Maschino et Turcot et l’autre par Maschino, font état de l’intervention préventive ainsi que du rôle du médiateur (ou médiatrice) (Maschino et Turcot, 2003, dans Boivin et coll., p. 5-7; Maschino, 2003a, dans Boivin et coll., p. 8-11).

a)

Études sur les pratiques innovatrices dans les relations patronales-

syndicales

Dans le cadre d’études produites en 2003 par la Direction des innovations en milieu de travail et rendues publiques par le ministère du Travail, un rapport d’enquête ainsi qu’une série de documents ont été développés. Ceux-ci, de nature objective, descriptive et informative ont porté sur des pratiques innovatrices dans les relations patronales-syndicales. Le rapport d’enquête intitulé « La dynamique de la concertation patronale-syndicale au Québec » correspond à

l’élément central de l’étude (Bettache, 2003, p.1-70). Celui-ci relate l’évolution des relations du travail de même que les différents services offerts par le ministère du Travail. Il présente aussi la méthode employée ainsi que les résultats de l’enquête. Parmi ces résultats, plusieurs facteurs favorisant le dialogue patronal-syndical ont été dénotés tels que « l’implantation d’un comité de relations patronales-syndicales », « le développement des moyens de communication » et « les méthodes de résolution de problèmes » (Bettache, 2003, p. 41).

D’autres documents ont été réalisés dans le même ordre d’idées. Il y a le document portant le titre de « Quelques précisions sur la concertation patronale-syndicale » (Maschino, 2003b, p. 1-25). Celui-ci comporte des éléments qui sont étroitement ou en partie liés à l’intervention de médiation préventive. C’est le cas d’une brève présentation des différents « services offerts par le ministère du Travail pour faciliter les démarches concertées en entreprise ». Parmi ceux-ci, on retrouve le séminaire en relations du travail, le comité de relations du travail, le diagnostic par consensus ou par entrevue, la négociation basée sur les intérêts et la médiation pré-arbitrale de griefs (Maschino, 2003b, p. 15 et 16). Ce même document énumère « les avantages de la concertation patronale-syndicale » tels qu’un « meilleur climat de confiance », « des négociations plus faciles », « une plus forte adhésion des employés aux changements » et « un meilleur accès à de l’information » (Maschino, 2003b, p. 9 et 10). Des contraintes de cette concertation sont à prévoir avec l’accroissement « initial de la charge de travail des responsables patronaux et syndicaux », « le départ prématuré de responsables de la direction ou du syndicat », « la coexistence d’intérêts convergents et de divergences entre les parties » (Maschino, 2003b, p. 11 et 12)... Maschino présente aussi « les facteurs qui facilitent une démarche concertée » (Maschino, 2003b, p. 13). Les premiers facteurs se rapportent aux mesures internes de l’entreprise avec l’engagement des deux parties, « l’implantation d’un comité conjoint », « l’établissement d’un réseau interne de communications », la participation des membres du personnel (Maschino, 2003b, p. 13)... Le rôle des tiers intervenants est aussi un des facteurs. Celui-ci facilite, entre autres, le déroulement des réunions de concertation, aide les parties dans la démarche de changement et offre de la formation (Maschino, 2003b, p. 14).

Dans la même série de documents sur des pratiques innovatrices dans les relations patronales-syndicales, Maschino a participé à un document sur les « Expériences vécues en matière de concertation patronale-syndicale ». Il a réalisé une entrevue avec Turcot concernant l’Hôtel Wyndham et une autre seule par rapport à l’entreprise Lavo inc. (Maschino et Turcot, 2003, dans Boivin et coll., p. 5-7; Maschino, 2003a, dans Boivin et coll., p. 8-11). Ces entrevues

traitent du rôle d’un médiateur externe et du démarrage de deux démarches de concertation tout en relatant une amélioration évidente des relations du travail au sein des organisations.

Dans le cas de l’Hôtel Wyndham, l’amélioration des relations du travail s’est effectuée par l’utilisation du séminaire en relations du travail et par l’élaboration d’un plan de travail puis de son bilan. Elle s’est aussi réalisée par l’intérêt pour les parties à se réunir plus régulièrement par l’entremise du comité de relations du travail et de rencontres hebdomadaires ainsi que pour veiller à la diffusion de l’information. L’amélioration a de plus eu lieu par la mise au point d’un plan d’action et par l’élaboration d’un bilan semi-annuel pour évaluer la situation (Maschino et Turcot, 2003, dans Boivin et coll., p. 5 et 6).

Pour ce qui est du cas de l’entreprise Lavo inc., l’amélioration s’est réalisée par l’emploi du séminaire en relations du travail, par un bilan de l’évolution des relations entre les parties et par la participation du médiateur à des réunions du comité de relations du travail. Celle-ci s’est aussi effectuée par la réalisation d’objectifs communs aux parties tels que l’exécution de petits projets, par la formation d’un comité d’interprétation de la convention collective et par la préparation d’un plan de travail (Maschino, 2003a, dans Boivin et coll., p. 8-10).

b)

Rapport d’enquête sur la médiation préventive

Dans le cadre d’une évaluation des programmes du ministère du Travail datant du début des années 90, des chercheurs ont analysé les retombées des interventions de médiation préventive dans certaines organisations. L’objectif était de constater « si ces dernières avaient généré une amélioration significative des relations du travail dans ces entreprises et de mettre en relief les principaux facteurs qui, de l’avis des répondants, ont pu influencer positivement ou négativement les résultats obtenus » (Favreau et L’Écuyer, 1992, p. 6). À cet effet, une enquête en 1991 a été réalisée sur 44 dossiers de médiation préventive de 1984 à 1989 parmi lesquels 25 réponses ont été obtenues. Cette étude a été effectuée grâce à des entretiens semi-structurés avec les représentants des parties et des médiateurs. Même si les participants n’ont pas tous partagé les mêmes opinions, plusieurs conclusions générales ont été constatées. Concernant les effets de l’intervention, il a été question de l’assainissement des relations direction-syndicat avec des négociations ultérieures facilitées, d’une reprise du dialogue et d’une amélioration des rapports de travail durant les six mois suivant l’intervention. Une modification dans les raisonnements et les perceptions des partenaires a été constatée en plus d’une

amélioration des modalités de gestion des opérations et d’une diminution des griefs ainsi que des arrêts de travail (Perron, 1998, p. 112).

Par rapport aux facteurs de succès, l’enquête d’évaluation souligne la neutralité du médiateur et la confiance portée par les parties à son endroit, le fait que la démarche a été conjointe de part et d’autre ainsi que le leadership de la haute direction en donnant des suites à l’intervention. Elle révèle aussi le départ de gestionnaires qui a pu permettre des actions de changement, la nécessité d’avoir l’engagement du syndicat et enfin la perception des contraintes extérieures, mais aussi des risques pour l’emploi facilitant les changements d’attitudes des parties (Perron, 1998, p. 112 et 113; Perron et Savereux, 1995, p. 18). L’enquête ajoute que le nombre de griefs et d’arbitrage a connu une baisse remarquable dans plusieurs organisations qui ont utilisé la démarche en plus d’une amélioration dans les délais de règlement ainsi que les négociations, et ce, même si la situation économique peut expliquer en partie une telle situation (Favreau et L’Écuyer, 1992, p. 68; Morin, 1993, dans Bernier et coll., p. 33). Il est à noter que sur quinze des entreprises participantes au processus ainsi qu’à l’enquête, six d’entre elles ont connu une réduction de 80 % et plus du nombre de griefs et d’arbitrage, cinq autres, une diminution de 70 % et plus et les quatre dernières, 0 % de réduction (Morin, 1993, dans Bernier et coll., p. 33).

L’enquête a permis de faire le constat que la médiation préventive ne joue pas uniquement sur les pratiques opérationnelles de gestion et sur la qualité des relations en plus des communications dans les entreprises. « Plus fondamentalement, c’est à une révision du style de direction qu’elle engage, révision devant permettre l’« implication » des cadres de premier niveau et des employés afin de rehausser la responsabilité des individus au sein de leur milieu de travail » (Favreau et L’Écuyer, 1992, p. 70). De plus, « les commentaires des participants au programme et les résultats obtenus indiquent clairement que les objectifs entretenus par cette intervention ont été atteints. Cette dernière aura favorisé une modification des perceptions respectives des parties » (Favreau et L’Écuyer, 1992, p. 69). L’enquête a finalement permis de faire le constat, dans la majorité des dossiers, d’une transformation évidente dans les rapports patronaux-syndicaux (Favreau et L’Écuyer, 1992, p. 69).

Les auteurs de cette même enquête ont admis par la suite que la démarche de médiation préventive ne comportait toutefois pas de procédure d’évaluation des résultats obtenus (Perron, 1998, p. 113). Selon eux, ils voyaient l’utilité de pouvoir mesurer les progrès accomplis en terme d’amélioration du climat consécutivement à l’intervention. À cet effet, ils ont proposé d’effectuer

un sondage destiné à connaître la perception des employés avant l’intervention puis quelques années après (Perron, 1998, p. 113). De plus, ils ont formulé certaines propositions pour améliorer l’implication de la haute direction et le suivi par le ministère du Travail (Perron, 1998, p. 113). Parmi celles-ci, il y a l’apport « de conseil de la part du médiateur avant la définition du plan d’action », il y a l’« association du syndicat lors de la conception de ce même plan » et la diffusion de l’information économique dans l’entreprise ». Il y a une « meilleure évaluation par la direction des enjeux économiques » ainsi que la « nécessité d’un accompagnement pour aider le dirigeant à modifier son style de direction », mais aussi à maintenir sa capacité d’écoute et d’analyse de la vie au travail » (Perron, 1998, p. 113). Perron mentionne que ces suggestions étaient encore au stade de débat au sein du service gouvernemental en 1998. Selon lui, leur mise en application se heurte aux difficultés d’un changement de posture et de métier pour le médiateur. De plus, cette situation amènerait ce dernier à jouer un rôle de conseil, mais aussi d’expert qui n’est pas dans son mandat et qui est bien au-delà de la mission du ministère du Travail (Perron, 1998, p. 113). Perron suggère aussi, pour le contexte québécois, une articulation de l’action des médiateurs avec celle d’autres intervenants (Perron, 1998, p. 113).