• Aucun résultat trouvé

2.2 Comportement mécanique du cerveau

2.2.2 Études basées sur des images médicales

Après avoir abordé les travaux basés sur des expérimentations rhéologiques, nous allons désormais nous intéresser aux études visant à déterminer la rigidité des tissus cérébraux à partir d’images médicales et en particulier à partir d’acquisitions ERM. La méthode d’estimation du module de cisaillement proposée par [Mut+95] repose sur l’étude de la vitesse de propagation dans les tissus d’ondes harmonique de cisaillements destinées à exciter des derniers. Cette technique étant non-invasive, de telles études sont la plupart de temps réalisées sur patients pour mesurer la raideur des matières blanche et grise. Les résultats obtenus sont reportés avec les publications correspondantes dans le Tableau 2.1. En plus des modules de cisaillement µ, les modules de Young équivalentsE sont calculés pourν = 0.45.

Comparées aux valeurs obtenues par expérimentations rhéologiques, les va-leurs reportées dans ce tableau paraissent significativement supérieures. Cependant, le module de cisaillement mesuré par élastographie (et donc le module de Young équivalent calculé) diminue avec la fréquence d’excitation des particules (se reporter à [Cha+10] pour plus de détails). Ainsi, la valeur estimée correspond alors à un module de cisaillement plus élevé en état excité et non à sa valeurstatique(i.e.qui serait estimée à une fréquence d’excitation nulle). C’est par ailleurs cette grandeur statique qui est évaluée au moyen des expérimentations rhéologiques et requise pour les simulations.

Pour finir, basée sur des acquisitions IRM classiques (i.e.sans ondes d’excitation spécifiques), une méthode non-invasive permettant d’évaluerEetνest présentée par [Soz+04]. Pour cela, des images IRM pré- et per-opératoires sont tout d’abord recalées de manière élastique au moyen d’un modèle biomécanique de cerveau. E et ν sont ensuite estimés en se basant sur l’information mutuelle des images recalées. Cette expérience est présentée pour des modèles biomécaniques de basse

(9952 éléments) et haute (123496 éléments) résolutions donnant respectivement les résultats suivants :Eb= 8.863kPa,νb= 0.452,Eh= 8.196kPa etνh = 0.461.

2.2.3 Synthèse

Les travaux cités dans les paragraphes précédents sont synthétisés dans le Tableau 2.2. De cette vue d’ensemble, les principales caractéristiques des tissus mous cérébraux semblent être les suivantes :

— le comportement mécanique du cerveau est hautement non-linéaire

— les tissus sont quasiment incompressibles (i.e.ν ≥0.45) et leur raideur est très faible (i.e. pour les petites déformations, le module de Young est d’environ quelques kPa)

— des différences de rigidité existent entre matières blanche et grise

Cependant, comme montré dans le Tableau 2.2, d’importantes différences sont aussi mises en lumière et aucun consensus n’est universellement accepté.

Ces différences peuvent tout d’abord être expliquées par la diversité des protocoles d’estimation (i.e.études rhéologiques ou basées images) et conditions expérimentales (i.e.étudesin vivo,in vitroouex vivomenées sur des tissus cérébraux animal ou humain). Une étude se focalisant sur l’influence des méthodes de caracté-risation des tissus cérébraux est ainsi présentée par [Hra+08]. De plus, tandis que les protocoles expérimentauxin vivoetin vitro sont examinés puis comparés par [Cha+10], seules les méthodes d’estimation des paramètres basées sur des images médicales sont considérées par [Bay+12].

D’autre part, la dispersion des valeurs reportées dans la littérature peut égale-ment être expliquée par les différences inter-personnelles. Une étude incluant 55 volontaires (dont 23 femmes) âgés de 18 à 88 ans est ainsi présentée par [Sac+09]. Pour chacun des volontaires, les paramètres de raideur des tissus sont estimés à partir d’examens ERM. Les résultats montrent alors des différences significatives sur la rigidité du cerveau en fonction du sexe et de l’âge. Tandis que le cerveau des femmes est en moyenne 9% plus raide que celui des hommes, uneliquéfactionde l’organe semble apparaître avec l’âge résultant en une diminution du module de cisaillement de 0.8% par année. Similairement, [Cha+12] a montré qu’un cerveau adulte est en moyenne 3 à 4 fois plus rigide que celui d’un jeune enfant (âgé de 5 à 22 mois).

Pour finir, toutes les valeurs reportées dans les paragraphes précédents traitent de tissus sains. Cependant, si l’on considère des patients souffrant de troubles céré-braux, le comportement mécanique des tissus peut varier au regard de la pathologie et du traitement entrepris. Par exemple, des différences de raideurs entre tissus sains

Tab. 2.2.:Résumé des lois constitutives et de leurs paramètres proposés pour le cerveau. Toutes les constantes de rigidités (E,µ,Ketci) sont données en kPa. Pour les modèles hyperélastiques et les études élastographiques, les modules de Young équivalents en petites déformations sont calculés pour comparaison. Lorsqueν n’est pas indiqué explicitement,ν = 0.45est choisi pour les calculs.

Références Lois constitutives Paramètres Contexte

[Pau+99] [Mig+00]

Modèle biphasique

poroé-lasique E= 2.1,ν= 0.45

Études rhéologiques [MC02]

Loi de Ogden combinée à une relaxation du module de cisaillement via des sé-ries de Prony

α = −4.7, µ0 = 0.842

(E = 2.442 pour ν = 0.45 dans la configura-tion non déformée) [Sch+09] Loi de Mooney-Rivlin à deux termes c10 = 0.24, c30 = 3.42, ν= 0.45(E = 1.44) [Lak+12] Lois de Mooney-Rivlin et de Ogden à deux et trois termes (resp. pour les éner-giesWisoetWvol)

c10 =−1.34,

c01 = 1.83,c11 = 0.29,

α= 100,K= 46et

ν= 0.49

[Kas+11]

Lois de Yeoh, de Ogden, Polynomiale et de Arruda-Boyce En moyenne,Eblanche = 1.787±0.186etEgrise = 1.195±0.157 [Bud+15] - Eblanche = 1.895±0.592, Egrise = 1.389±0.289 [Ham+07] - µ= 3.5(E= 10.15) Estimation à partir d’acquisi-tions ERM [Kru+99] [Uff+04] [McC+05] [Gre+06] [Kru+08] blanche [2.1; 15.2] (Eblanche [6; 44]), µgrise [2.8; 12.9] (Egrise [8; 38]), se reporter au Tableau 2.1 [Soz+04] Modèle poroélastique

linéaire [Sho00] E∈[8.2; 8.85], ν∈[0.4552; 0.461] Étude basée sur le reca-lage d’IRM

et tumoraux sont mis en avant par [Xu+07] à partir d’acquisitions ERM. De plus, des tissus plus rigides sont souvent reportés par les neurochirurgiens lorsque les patients sont préalablement traités par radiothérapie. Ainsi, une étude complète traitant de la biomécanique du cerveau est proposée par [Gor+15], soulignant les challenges relatifs au neuro-développement et à divers troubles cérébraux.