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La majorité des travaux de la littérature portent sur la manipulation de micro-objets génériques tels que des micro-sphères ou des composants prismatiques. A l’inverse, quelques équipes ont développé des concepts de microsystèmes complexes à assembler. Cette alternative est intéressante pour plusieurs raisons. Elle permet par exemple, de proposer des microsystèmes réellement fonctionnels et innovants, et elle offre un cadre applicatif permettant l’étude de tâches complexes de micro-assemblage. Elle démontre le potentiel du micro-assemblage et nécessite de considérer simultanément plusieurs problématiques complexes. Et, finalement, elle permet de démontrer la maîtrise des différents outils et approches proposées.

Par ailleurs, nous avons analysé les différents domaines applicatifs potentiellement intéressés par la micromanipulation et le micro-assemblage et nous avons recensé plusieurs familles d’ap-plications [Tolfree and Jackson, 2006]. Nous avons notamment souhaité nous orienter vers le domaine des MOEMS, notamment en proposant un concept de micro-banc-optique, détaillé dans la section suivante, pour les différentes raisons suivantes :

– ce domaine applicatif est très dynamique et produit de nombreuses applications innovantes tant pour de grandes séries de produits que des marchés de niche ;

– les MOEMS sont au cœur des problématiques de microfabrication en salle blanche, ce sont par essence des produits fortement hétérogènes, multifonctionnels et souvent tridimension-nels pour lesquels de nombreux compromis de microfabrication doivent être effectués li-mitant considérablement les performances des produits finaux. Leur assemblage ouvre de nombreuses possibilités ;

– la finalité optique des MOEMS requiert bien souvent des niveaux de précision de posi-tionnement relatif ou d’assemblage de composants élevés, typiquement bien inférieurs au micromètre pour garantir les performances du produit final.

Les composants élémentaires à intégrer dans un MOEMS sont très divers tout comme les fonc-tionnalités optiques réalisables via la combinaison de plusieurs de ces composants, le domaine des MOEMS est donc source d’une grande richesse et diversité de composants et d’applications.

(a) (b) (c)

Figure 3.5 – Exemples de MOEMS assemblés ou dépliés manuellement (a) Microscan-ner XY [Baranski, 2015] (b) tête d’endoscope OCT (Tomographie par Cohérence Optique) [Weber et al., 2012a] (c) Micro-lentille de Fresnel sur structure XYZ [Wu et al., 2000].

3.2.1/ Concept du Micro-Banc-Optique

La littérature regorge de nouveaux MOEMS : plusieurs études font explicitement état d’assem-blage, par l’assemblage d’une bille servant de lentille sur un scanner MEMS (Figure 3.5(a)), ou par la réalisation de structures 3D hors plan (par assemblage manuel (Figure 3.5(b)) ou par le dépliage une structure souple (Figure 3.5(c))). Ces travaux sont réalisés manuel-lement malgré les risques, que cela comporte, tant en termes de fragilité des structures qu’en termes de qualité et de précision des tâches réalisées. Ils illustrent donc bien le réel besoin de réaliser des structures MOEMS hétérogènes et tridimensionnelles. D’autres travaux, ini-tiés par l’équipe de Descour au début des années 2000, ont permis de réaliser une première "micro-table optique" résultant de l’assemblage de plusieurs composants élémentaires per-pendiculairement à un substrat [Descour et al., 2002]. Les liaisons composants élémentaires-substrat sont dédiées et le collage des composants sur le élémentaires-substrat est nécessaire avant leur dépôt par le préhenseur. Ces deux points ont été choisis pour faciliter l’assemblage, mais s’avèrent être aussi des limites fortes : les liaisons dédiées induisent un seul type de produit et le collage du composant, avant de le déposer, ne permet pas une maîtrise suffisante de la précision d’assemblage avoisinant pourtant déjà 4 μm. Plusieurs autres travaux ont suivi

[Wu et al., 2000, Manzardo, 2002, Wolffenbuttel, 2005, Das et al., 2008b], exploitant toujours un principe d’assemblage non réversible et très souvent des liaisons mécaniques composant-substrat dédiées.

Compte-tenu du savoir-faire du département AS2M relatif aux matériaux actifs, de leur po-tentiel pour la réalisation d’opérations complexes et précises de micro-assemblage, nous avons proposé un concept de Micro-Banc-Optique. L’originalité du concept repose sur l’utilisation du micro-assemblage par matériaux actifs qui permet de réaliser des Micro-Bancs-Optiques modu-laires et reconfigurables grâce à des liaisons composant-substrat génériques et repositionnables. Ces travaux reposent sur la collaboration, que nous avons pu établir, entre les départements AS2M et MN2S (équipe de Christophe Gorecki experte dans le domaine de l’optique intégrée) de l’institut FEMTO-ST.

Ce concept repose sur une librairie de composants optiques élémentaires, que l’on peut assem-bler le long d’un ou plusieurs axes optiques d’un substrat de référence (voir Figure 3.6(a)). Cette diversité de composants et de combinaisons de positions possibles permet de réaliser de très nombreux types de fonctions optiques élémentaires ou plus complexes comme un interfé-romètre de Michelson.

Figure 3.6 – Concept de Micro-Banc-Optique : (a) Composants élémentaires (substrat pos-sédant un axe optique et trois types de composants optiques élémentaires) (b) détails sur les systèmes de vés (positionnement précis d’un composant sur le substrat) et de ressorts (maintien du composant sur le substrat) (c) étapes principales du processus d’assemblage d’un composant sur son substrat (d) exemple de Micro-Banc-Optique assemblé.

3.2.2/ Fonctions élémentaires et leur réalisation

Chaque composant optique possède deux zones distinctes. Une première comporte un système de vés utiles au positionnement précis du composant le long d’un axe optique du substrat et de ressorts permettant le maintien du composant sur ce substrat une fois l’alignement réalisé (voir Figure 3.6(b)). Cette zone est la même pour tous les composants optiques élémentaires gage de généricité et de reconfigurabilité. Une second zone, spécifique à chaque composant, comporte un composant optique élémentaire (miroir, séparateur, lentille...).

Ces choix de conception sont originaux dans le sens où ils reposent sur une mise en position hyperstatique, choix qui ont été assumés pour des raisons de compromis qualité de réalisation des surfaces grâce aux techniques de microfabrication en salle blanche - besoin de stabilité et de précision. En effet, le substrat est réalisé dans un wafer Silicium de type n avec une orientation cristalline (100) ce qui a permis de réaliser des vés "parfaits" car définis par les plans cristallins du Silicium. La fabrication du substrat a également induit des procédés de microfabrication originaux (alternance de gravures sèches et humides, le procédé est détaillé dans l’article JMM de Sylwek) compte-tenu du double système de vés permettant :

– la mise en position des composants le long du rail (intitulés "V-Groove in baseplate as guiding" dans la figure 3.6(b)) ;

– le maintien de ces composants via les ressorts (intitulés "central rail with two vertical V-grooves" dans la figure 3.6(b))

La fabrication des composants optiques, quant à elle, repose sur un procédé de microfabrication relativement simple (wafer SOI, usinage face avant gravure sèche DRIE) et face arrière par gravure humide. Notons que ces composants optiques restent maintenus au wafer à l’issue de leur fabrication par des liaisons dites sécables. Il s’agit de liaisons fragiles, qui sont cassées lors de la prise des composants par la micropince et utiles au référencement des composants.

3.2.3/ Assemblage d’un démonstrateur

L’assemblage des composants optiques sur le substrat est réalisé par une micropince montée sur un porteur robotique (la plateforme d’assemblage utilisée est présentée en section 3.3.2) et suit le processus d’assemblage suivant :

– un composant est saisi par la micropince par déformation de ses ressorts ;

– le composant saisi est guidé le long de l’axe optique défini par des rails de guidage (système de vés femelles du substrat) et ce, jusqu’à ce que la position désirée soit atteinte ;

– le composant est déposé par ouverture progressive des doigts de pince qui permettent aux ressorts de venir s’accrocher dans le système de vés latéraux du substrat (intitulés vés ver-ticaux dans la Figure).

La figure 3.6(c) détaille les principales étapes de ce processus d’assemblage et la figure 3.6(d) présente un démonstrateur assemblé et constitué de deux composants optiques différents (une lentille de collimation et un miroir) alignés le long d’un axe optique.