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Étude par lixiviation de l’impact environnemental des sols urbains pour une valorisation en techniques routières

Traité à 1% de chauxSol

4 Chapitre : Utilisation dans le domaine routier

4.2. Étude par lixiviation de l’impact environnemental des sols urbains pour une valorisation en techniques routières

Afin de procéder à une caractérisation environnementale des sols urbains étudiés, les fractions granulométriques des sols d’Ivry et de Boulogne de même que les composantes issues du tri et les fractions totales ont subi des tests de lixiviation suivant la norme NF EN 12457-2 (Caractérisation des déchets - Lixiviation - Essai de conformité pour lixiviation des déchets fragmentés et des boues) puis des essais de percolation. Ces essais sur des éprouvettes de la matrice totale du sol non traité, traité à 5% de ciment ou traité à 1% de chaux, ont permis de mesurer les perméabilités des éprouvettes et les éléments lixiviés lors de la circulation d’eau. Enfin, un essai d’immersion a été mis en place et testé sur le même type d’éprouvette que l’essai de percolation.

4.2.1. Essai de lixiviation suivant la norme NF EN 12457-2 (2009)

Le but de l’essai est de mesurer la quantité de polluants relargables contenus dans un matériau en le mettant en contact avec un lixiviant (eau déminéralisée avec un pH neutre) et en imposant un rapport liquide sur solide L/S de 10 L/kg. Les éluats ont été récupérés après 24h d’agitation.

Pour réaliser ces mesures, les matériaux ont été broyés pour avoir un diamètre maximal de 4 mm imposé par la norme. Notez que d’autres normes imposent des diamètres différents (notamment d = 1,25 mm) ce qui peut entraîner une variabilité des résultats de lixiviation. La norme ISO/TS 21268-1:2007 (Qualité du sol -- Modes opératoires de lixiviation en vue d'essais chimiques et éco-toxicologiques ultérieurs des sols et matériaux du sol -- Partie 1: Essai en bâchée) impose quant à elle un L/S = 2 L/kg avec D < 4 mm.

Les tamisages pour préparer les fractions granulométriques testées en lixiviation ont été réalisés à sec avec brossage des tamis (au lieu de la méthode par lavage habituellement appliquée). Pour réaliser les lixiviations sur les composantes du sol, la fraction > 4 mm issue du tri précédant les lixiviations a été brossée soigneusement et non lavée comme cela été fait pour les matériaux étudiés par DRX, ATD/ATG, XRF et ICP/OES.

Les teneurs en éléments chimiques dans les éluats sont présentées, puis les rapports des concentrations lixiviées sur le contenu total des échantillons testés sont discutés pour apporter des informations sur la mobilité des éléments chimiques.

Lixiviation sur les fractions totales des sols

Les résultats des analyses chimiques des lixiviats sur les matrices totales des deux sols testés sont présentés dans le Tableau 40.

La répétabilité des mesures montre que le coefficient de variation CV sur les mesures reste inférieur à 10% pour de nombreux éléments (notamment les majeurs) mais CV peut atteindre 65% pour Sb (dont la teneur dépasse le seuil des déchets inertes) et 42-62% pour Mo. Pour Ni, Pb, Cr, Zn et Cu, le coefficient CV reste largement supérieur à 10%. Cette variabilité montre une certaine inhomogénéité dans les sous-échantillons testés, voire que les éléments se trouvent dans des phases potentiellement massives et isolées et non pas répartis de manière uniforme sur toutes les surfaces des matériaux comme un contaminant diffus.

Le pH des solutions éluées restent basiques avec des pH de 9,5 pour le sol SBB et de 8,3 pour SI. Cela s’explique par la présence de phases carbonatées et cimentaires dans les sols. Il faut noter que les conductivités des éluats sont très proches pour les deux sols. Malgré leurs différentes origines, les deux sols présentent une similitude de comportement en lixiviation.

Les sulfates apparaissent comme le principal contaminant dans les lixiviats. Ces résultats confirment les premiers diagnostics environnementaux fournis par les entreprises qui nous ont fournis les deux sols testés. La quantité de sulfates relargués au cours de l’essai de lixiviation est d’environ 13000 mg/kg pour le sol de Boulogne et de 11000 mg/kg pour le sol d’Ivry. Ces valeurs donnent aux matériaux le statut de déchets non dangereux puisque ces valeurs dépassent les seuils pour un stockage en installation de déchets inertes. Dans les deux cas, les valeurs dépassent également la limite fixée en lixiviation par le guide de l’acceptabilité des matériaux alternatifs en technique routière (SETRA, 2011) pour un usage sans distinction. Ces matériaux nécessiteraient l’application du niveau 2 des tests, c’est-à-dire des essais de percolation pour décider du type d’usage possible soit le type 1 (en sous-couche de chaussée ou accotement revêtu) ou de type 2 (remblai technique ou accotement recouvert).

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Tableau 40. Composition chimique élémentaire des éluats après lixiviation des deux sols testés (n.m. non mesuré, VL : valeur limite ; ISDI : installation de stockage de déchets inertes ; ISDND : installation de stockage de déchets non dangereux). Valeur moyenne sur 9 tests de lixiviation avec calcul des écarts type et des coefficients de variation C.V.

Eléments

Eluât sur le sol SBB Eluât sur le sol SI

VL ISDI*** VL ISDND*** VL1* VL2** Moyenne * mg/kg  C.V. % Moyenne * mg/kg  C.V. % Si 78,1 3,7 4,7 41,4 3 7,3 -- -- -- -- Al < (0,1) -- -- < (0,1) -- -- -- -- -- -- Ca 6266,5 140,9 2,2 6660 109,2 1,6 -- -- -- -- K 116 5,9 5,1 132 3,6 2,7 -- -- -- -- Na 60,2 4,4 7,3 117,7 3,4 2,9 -- -- -- -- Fe < (0,005) -- -- < (0,005) -- -- -- -- -- -- Mg 24,2 1,8 7,6 90,2 9,9 11 -- -- -- -- Ti < (0,002) -- -- < (0,002) -- -- -- -- -- -- P < (0,1) -- -- < (0,1) -- -- -- -- -- -- Mn < (0,001) -- -- 0,25 0,18 69,6 -- -- -- -- Zn 0,0134 0,007 58,6 0,026 0,006 25,3 4 50 12 50 Cr 0,029 0,0035 12,2 0,0058 0,00066 11,2 0,5 10 1,5 10 Sr 19,4 1,5 7,9 34,9 3,2 9,1 -- -- -- -- Ba 0,28 0,01 6 0,37 0,.02 5,4 20 100 60 100 Cu 0,198 0,044 22,3 0,145 0,015 10,9 2 50 6 50 Pb 0,0031 0,0012 38 0,0028 0,0013 48,5 0,5 10 1,5 10 Ni 0,12 0,025 20,1 <(0,1) -- -- 0,4 10 1,2 10 V 0,10 0,006 5,8 0,022 0,0028 12,7 -- -- -- -- Mo 0,11 0,.046 42,4 0,28 0,17 62,7 0,5 10 1,5 10 As 0,066 0,0049 7,4 0,043 0,0026 6 0,5 2 1,5 2 Co <(0,002) -- -- <(0,002) -- -- -- -- -- -- Cd <(0,1) -- -- <(0,1) -- -- 0,04 1 0,12 1 Sb 0,32 0,20 64,9 0,60 0,41 69 0,06 0,7 0,18 0,7 Se < <(0,002) -- -- 0,16 0,13 81 0,1 0,5 0,3 0,5 Sulfates 12916,4 1316 10,2 10657,6 2245 21 1000 20000 3000 20000 Fluorures 1,72 0,45 26,1 16,26 12,12 74,5 10 150 30 150 Chlorure 138,8 126,8 91,4 74,4 24,7 33,2 800 15000 2400 15000 Corg % sol (COTmètre) 92 600 // // 33 800 // // 30000 50 000 60 000 60 000 Corg % éluat

(COTmètre) Non réalisé // // Non réalisé // // 500 800 -- --

pH 9,56 (percolation pH =7.5) 0,2 2 8,31 (percolation pH =7,5) 0,13 1,6 Conductivité (µS/cm) 2164 39 1,8 2262,.9 6,6 0,3

*VL visée par le guide SETRA (2011) pour une réutilisation des matériaux alternatifs pour tout usage routier envisagé (Type 1 à 3).

**VL pour une utilisation en technique routière visée par le guide SETRA pour les matériaux alternatifs (au-delà, pas d’usage possible)

***Les valeurs limites (VL) en lixiviation à ne pas dépasser pour un stockage en ISDI ou en ISDND sont issues de la Décision n° 2003/33/CE du 19/12/02 établissant des critères et des procédures d'admission des déchets dans les décharges, conformément à l'article 16 et à l'annexe II de la directive 1999/31/CE. Application du test de lixiviation (NF EN 12457-2) avec L/S = 10 L/kg.

Parmi les éléments qui ne sont pas ou peu lixiviés, nous trouvons le silicium, l’aluminium et le fer, avec également Ti, P, Mn, Co, Cd et Se, ce qui montre que les oxydes, qui pourtant composent en grande partie les scories qui renferment les quantités les plus importantes de polluants (en contenus totaux), sont stables (pas ou peu de dissolution ou de relargage par réaction d’oxydo-réduction). Les argiles et aluminosilicates (feldspaths et dioxyde de silicium) sont également stables avec pas ou peu de dissolution. Pour des pH plus élevés (notamment en présence d’un traitement à la chaux ou aux liants hydrauliques, ces phases pourraient cependant être attaquées (cette dissolution permet sur le long terme aux réactions pouzzolaniques de se développer). Seul le gypse subit une dissolution ainsi que les carbonates de Ca et de Mg, compte tenu de la présence de CO2 dissous dans l’eau (ces phases contribuent ensuite à tamponner le pH de l’eau du sol à pH neutre/basique). Les cations échangeables des argiles de type Ca, K et Na contenus également dans l’eau de pore des sols sont les éléments les plus facilement lixiviés. On observe la présence également d’anions de type chlorure et fluorure (la concentration des fluorures dans SI dépasse le seuil des déchets inertes mais reste inférieure au seuil des déchets non dangereux).

Un élément lixivié en quantité importante (hors éléments majeurs) est le strontium Sr. Cet élément est lié à la dissolution du gypse, comme montré précédemment par les calculs de corrélation en fluorescence X. La présence de (Ca,Sr)SO4, 2H2O est probable, la présence de Célestine SrSO4 ayant été observée dans le sous-sol d’Ile de France). On trouve ensuite avec des quantités supérieures à 0,1 mg/kg, les éléments Ba, Co, Mo et Sb pour les deux sols ainsi que Ni et V pour SBB. L’antimoine Sb, quoique en faible quantité, dépasse pour les deux sols le seuil des déchets inertes et constitue un élément limitant pour la réutilisation des sols.

Pour compléter cette description des éléments lixiviés, nous avons observé la « mobilité » (taux de relargage) des éléments en calculant les rapports entre la concentration des éléments dans l’éluât et leur concentration totale dans le sol (ou contenu total). Les rapports pour les deux sols (fraction totale) sont donnés dans le Tableau 41.

Les éléments qui présentent le taux de relargage le plus élevé après les sulfates sont le calcium (lié aux sulfates), le sodium, le potassium. On trouve également le strontium Sr (5,5 et 9,5 %), lui aussi lié aux sulfates, l’antimoine (autour de 3%) et le molybdène Mo (avec 0,4% dans SBB et 3,14% dans SI, ce qui indiquerait potentiellement des formes différentes entre les deux sols). Avec un taux de relargage compris entre 0,1 et 1%, on trouve le magnésium (la dolomite étant moins soluble que la calcite), l’arsenic As, le baryum Ba dans SI et le vanadium V dans SBB.