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État de la question et choix bibliographiques : de nombreuses lectures diversifiées pour saisir

PARTIE I Quelques éléments de contexte et de matériaux d’enquête dans une tradition

Chapitre 2 : Pour une thèse alliant continuité et découvertes

A) État de la question et choix bibliographiques : de nombreuses lectures diversifiées pour saisir

À ce jour, de plus en plus de travaux sociologiques abordent la question de la rénovation énergétique. Mais peu d’entre eux concernent le propriétaire occupant en maison individuelle. De même, les liens entre des dispositifs régionaux et leur public cible, pris eux- mêmes dans d’autres relations humaines (partenariats, exécutants…) et non-humaines (objets techniques…), n’ont pas été étudiés. Même si à travers la première étude, il a été montré

que le processus de rénovation fait intervenir une somme d’acteurs (humains et non- humains), la question reste ouverte sur l’optimisation du processus de la rénovation énergétique par le biais de collectifs. Autrefois, j’ai vu ce processus comme un système

organique où chaque acteur représentait un organe, plus ou moins important. Si l’un était

46 RIDACKER C. Identifier les freins, les motivations et les leviers de la rénovation thermique chez les particuliers de maison individuelle, en Lorraine. Op.cit.

47 DREAL Lorraine. État des lieux de l’efficacité énergétique du bâti résidentiel lorrain. Mai 2014. Lien :

38 défaillant, c’était tout le système qui en pâtissait. Néanmoins, cette vision fonctionnaliste n’a plus sa place dans mes propos. En effet, si précédemment j’ai abordé deux échelles (globales et locales), c’est pour marquer l’importance de la notion de dimension au sein de ma thèse. En effet, le logement peut correspondre à une unité abritant un ménage (maison individuelle) ou plusieurs (immeubles). Il peut être isolé, mitoyen, observé à l’échelle d’un quartier, d’une région… Son utilisation et sa perception seront différentes selon l’acteur et l’échelle d’observation. En effet, selon Desjeux : « en fonction de la focale ou de l’échelle

d’observation choisie, la réalité change »48. Au démarrage de la thèse, c’était bien une vue

d’ensemble et d’interactions collectives entre acteurs humains et non-humains qui était priorisée, notamment en passant par une échelle méso-social et micro-social ; bien que cette réalité ne soit pas unique et que notre sujet soit multidimensionnel. Percevons-les, à travers quelques sociologues spécialisés – ou non – sur l’environnement, l’énergie et le logement. Ces derniers m’ont, en partie, inspirée et guidée dans les orientations de ma thèse, car comme l’exprime Charvolin : « l’expert n’est pas le seul à écrire. À travers sa main, s’exprime

l’ensemble des sources qu’il a consultées. »49

Dominique Desjeux est, dans les années 90, l’un des premiers à pratiquer une anthropologie de la consommation énergétique. Ne portant pas une attention stricto sensu sur l’étude des consommations, il m’a paru néanmoins nécessaire de l’étudier, notamment sur les outils et la construction des relations, représentations et pratiques qu’induit un acteur non- humain – qui est notre étude, le logement et sa rénovation énergétique. Dans la continuité de Desjeux, je me suis intéressée aux travaux de Marie-Christine Zélem et Christophe Beslay. Ils ont pris en compte, dans leurs études sur l’énergie, la réduction de la consommation énergétique, ce qui est en lien avec la rénovation énergétique des logements dans lesquels la baisse de la consommation est induite par la réduction des besoins de chauffe, même si ce n’est pas à travers l’usage au premier abord. Son travail sur le rôle des politiques publiques m’a permis de prendre conscience de la place qu’ils prennent ou s’octroient dans des arènes où se rencontrent d’autres acteurs du processus de la rénovation énergétique, et dont :

« les pratiques sociales de l’énergie s’inscrivent dans des systèmes

sociotechniques qui articulent des dispositions individuelles et collectives, des

48 DESJEUX D. Les sciences sociales. Paris. Collection Que sais-je. Editions des PUF. 2004.

49 CHARVOLIN F. L'invention de l'environnement en France. Chroniques anthropologiques d'une institutionnalisation. Paris. Edition La découverte. 2003 (p.36)

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dispositifs techniques (micro et macro systèmes techniques) et des dynamiques sociales (du domestique au politique) »50.

C’est ainsi que j’ai pris le parti d’étudier la place et le rôle des acteurs, avec un centre d'intérêt renforcé sur les dispositifs étudiés, les propriétaires et les décideurs politiques.

L’approche de Zélem et de Desjeux sur la sociologie de l’énergie fut complétée par la lecture de la thèse de Gaëtan Brisepierre51. Outre l’approche ethnographique des économies

d’énergie dans l’espace domestique, deux angles ont été appréhendés : la dimension du

chercheur en thèse CIFRE et la seconde section reposant sur l’approche stratégique de la

performance énergétique dans l’habitat collectif existant. Bien que l’échelle et les acteurs de

nos deux recherches soient différents, la dimension collective est présente, tout comme l’organisation d’arènes autour de cet acteur non-humain – le logement. Sa thèse entre en concordance avec mon étude dans laquelle le processus de la rénovation, individuel et collectif, « se poursuit par des étapes préparatoires dans lesquelles le leader établit de

nouvelles relations avec des professionnels et des associations constituant un contre-pouvoir vis-à-vis du syndic, de son expertise et de son réseau. »52 Le concept de leader est repris, que ce soit pour le détecter au sein des dispositifs de rénovation énergétique étudiés, ou sein de l’expérimentation menée. D’ailleurs, d’autres sociologues ont approfondi ce concept de

leader et de processus d’influence dans les groupes, tels que Mucchielli53 et Lapassade54. Ainsi, en observant les interactions lors de réunions – internes et partenariales – je cherchais « la cohésion dans les groupes, les communications, la déviance, le changement et la

résistance au changement, la créativité des groupes, le commandement. »55

Leurs approches – ainsi que d’autres sociologues étudiant l’énergie et l’environnement – sont d’autant plus pertinentes qu’elles s’appuient sur des modèles de la sociologie des organisations56 et de la traduction (acteur-réseau). Ces derniers composent aussi ma méthodologie employée dans cette thèse. En effet, en m’appuyant sur Callon, Lascoumes et

50 BESLAY C., ZELEM M.-C. « Le paradoxe du consommateur moderne, Modérer ses consommations

d’énergie dans une société toujours plus énergivore », in DOBRE M. & JUAN S. Consommer autrement. La

réforme écologique des modes de vie. Paris. L’Harmattan. 2009, pp. 277-296.

51 BRISEPIERRE G. Les conditions sociales et organisationnelles du changement des pratiques de consommation d’énergie dans l’habitat collectif. Thèse de doctorat en Sociologie, soutenue en 2011 à

l’Université de Paris Descartes.

52 Ibid, p.816

53 MUCCHIELLI R. La dynamique des groupes. Processus d'influence et de changement dans la vie affective des groupes. Montrouge. ESF. 2013

54 LAPASSADE G. Groupes, organisations, institutions. Paris. Anthropos. 2006 (5ème édition) 55 Ibid, p.31

56 CROZIER M. et FRIEDBERG E. L’acteur et le système. Les contraintes de l’action collective. Paris. Points.

40 Barthe57, je me suis équipée d’outils pour saisir au mieux les relations entre savoir et pouvoir qui émergent des controverses sociotechniques et pour comprendre les procédures inventées. Entre forums hybrides et effacement des frontières entre savants et profanes, les dispositifs étudiés ont pu être observés sous l’angle des laboratoires, des arènes et des expérimentations.

On peut difficilement comprendre une action collective de rénovation énergétique, sans appréhender les positions individuelles des propriétaires vis-à-vis du logement et de l’énergie. C’est une des raisons pour lesquelles, j’ai interrogé par interviews et questionnaires les représentations et les pratiques des ménages liées à leur logement, aux travaux de rénovation énergétique et d’aménagements, ainsi qu’à leurs relations vis-à-vis des objets techniques (compteur, ventilation …). Selon Alami, Desjeux et Garabuau-Moussaoui, « une

représentation est souvent plus explicative du passage à l’action que du contenu et du résultat de l’action. »58 Ces représentations étaient d’autant plus importantes à percevoir qu’elles

peuvent résulter des pratiques contraintes (ou non) et accroissent la complexité de la rénovation. Elles sont régulièrement relatives à des craintes (méconnaissance, rumeurs …), elles-mêmes alimentées par l’imaginaire, notamment collectif. Nous verrons que, d’un département à un autre, les pratiques énergétiques (notamment de chauffage) sont différentes et attachées à l’environnement proche perçu, aux interactions avec les acteurs du processus de la rénovation énergétique, et aux outils disponibles sur le territoire des propriétaires.

Ce lien, entre acteurs humains et non-humains, est souligné par des socio-anthropologues de l’environnement tels que Poirot-Delpech et Raineau. Pour elles, « les crises

environnementales nous obligent à prendre en compte le fait que le lien social ne se construit pas seulement entre humains, mais avec la nature et ses éléments. »59 Lorsque les plateformes de rénovation énergétique étudiées ont construit collectivement leur expérimentation, leurs membres ont pris en compte l’ancrage dans leur périmètre d’action. Ainsi, je me suis intéressée à saisir les liens que ces derniers créaient entre les ménages et l’environnement dans lequel ils s’insèrent.

Toujours au sein de l’ouvrage collectif de Poirot-Delpech et Raineau, Euzen met en avant l’importance de « faire le lien entre les perceptions individuelles et collectives, les

57 CALLON M., LASCOUMES P. & BARTHE Y. Agir dans un monde incertain – essai sur la démocratie technique. Paris. Seuil. 2001

58 ALAMI S., DESJEUX D., GARABUAU-MOUSSAOUI I. Les méthodes qualitatives. Paris. Collection Que

sais-je. Editions des PUF. 2009

59 POIROT-DELPECH S. & RAINEAU L. Pour une socio-anthropologie de l’environnement. Tome 1 : par-delà le local et le global. Paris. L’Harmattan. Juin 2012 (p.18)

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représentations sociales et les pratiques quotidiennes dans des contextes spécifiques »60, ce qui était primordial au sein de l’expérimentation que j’ai menée avec mon employeur. Mais n’oublions pas les discours rattachés aux représentations et pratiques qui vont entrer en scène et induire des négociations, des jeux de pouvoir et des partenariats. Que ce soit via le bouche- à-oreille ou à travers les médias, « toute communication relève de la persuasion et cherche à

influencer l’autre, que ce soit pour son bien ou pour son mal. »61 Entre représentations et

discours, ces moyens de communication vont influencer directement la confiance ou la méfiance qu’auront les acteurs entre eux et envers les acteurs non-humains (ventilation, énergies renouvelables…). Là aussi, les échelles diffèrent entre l’émission et la réception. Or, la proximité peut réduire la complexité des prises de décision. Je me suis rapprochée du dictionnaire du développement durable de Jacquemont62 afin d’appréhender les concepts et outils dans le champ environnemental. Cela me permettait d’avoir un point de référence vis-à- vis de la traduction – au sens de Latour, Callon et Akrich63 – des acteurs sur tel ou tel terme.

Les deux tomes de la sociologie de l’environnement de Poirot-Delpech et Raineau m’ont beaucoup inspirée au démarrage de la thèse. D’ailleurs, les deux auteures fournissent l’idéal- type du socio-anthropologue de l’environnement auquel je me suis identifiée – dans ma place et rôle au sein de l’expérimentation. Et même si majoritairement, on retrouve des sociologues dans ces deux tomes, ils soulignent la nécessité pluridisciplinaire dans le champ de l’environnement pour rassembler les différents points de vue sur un même problème, car

« Nous subissons tous des conditionnements, structurels et contingents, ce qui

revient à affirmer que chacun de nous est porteur d’une vision du monde particulière, mais jamais de la vision du monde juste et valable partout et toujours. »64

Ainsi, j’ai étudié, entre autres, des auteurs comme Rifkin65 (économie), Fischer66

(psychosociologie) et Moser67 (psychologie environnementale) car « l’interdisciplinarité

entre sciences sociales et sciences de la nature apparaît alors comme une nécessité pour

60 POIROT-DELPECH S. & RAINEAU L. Regards sur la crise écologique. Tome 2 : pour une socio- anthropologie de l’environnement. Paris. L’Harmattan. Juin 2012 (p.98)

61 DESJEUX D. La communication dans le champ de la consommation. Hermès, La Revue, 2014/3 (n° 70), p.

115-119. URL : https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2014-3-page-115.htm

62 JACQUEMONT P. Le dictionnaire du développement durable. Auxerre. Editions Sciences Humaines. 2015 63 AKRICH M., CALLON M., LATOUR B. Sociologie de la traduction : textes fondateurs. Paris. Les Presses

Mines Paris-Tech. 2006.

64 CANIGLIA C. & SIGNORELLI A. « Une expérience de didactique interdisciplinaire in progress », in DE

VILLANOVA R. Conjuguer la ville – Architecture, anthropologie, pédagogie. Paris. L’harmattan. 2007 (p.138)

65 RIFKIN J. La 3ème révolution industrielle. Paris. Les liens qui libèrent. 2012

66 FISCHER G-N. Psychologie sociale de l’environnement. Paris. Dunod, 2ème édition, 2011

67 MOSER G. Psychologie environnementale. Les relations homme-environnement. Louvain-la-Neuve. De

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résoudre cette complexité qui nécessite de réintroduire la nature dans la question sociale et la société dans la question de la nature »68. J’ai suivi l’idée selon laquelle, « si les problèmes d’environnement sont autant de conséquences des actions humaines sur l’écosystème, il reviendra à la sociologie de l’environnement d’étudier les conséquences sociales des processus écologiques. »69

En complétant mes connaissances sur la sociologie de l’environnement, je me suis rapprochée des études faites sur les rapports et la genèse entre la société et l’écologie70. En ce qui concerne l’invention de l’environnement en France, Charvolin71 a décrypté des archives pour percevoir les logiques des acteurs dans les années 70. De la création du Ministère de la protection de la nature et de l’environnement à l’homologation par le Conseil international de la langue française de la définition de l’environnement, il montre comment derrière l’apparence de neutralité de l’environnement, se cachent sa dimension humaine et tous les enjeux associés.

Dans la même lignée, l’ouvrage collectif dirigé par Villalba72 portant sur une approche

pluridisciplinaire de l’évaluation des procédures d’appropriation et d’usage du développement durable par différents acteurs entrait en écho avec mon étude. Que ce soit le processus de rénovation énergétique ou un concept de ville en transition, je me suis intéressée comme lui « aux processus de socialisation et d’apprentissage de ce paradigme par les acteurs, et d’en

saisir les impacts sur les formes de négociations entre les acteurs concernés. »73 En approchant la notion de transition (énergétique, écologique), il me paraissait essentiel d’avoir le point de vue d’autres sociologues. Scarwell, Leducq et Groux74 abordent la question de la

transition énergétique et de son appropriation par les territoires et acteurs. Même si cette notion ne fait pas consensus, ces auteurs exposent les actions mises en œuvre et leurs limites en prenant en compte la technologie et les acteurs selon les territoires.

68 BARBIER R., BOUDES P., BOZONNET J-P., CANDAU J., DOBRE M., LEWIS N. et RUDOLF F. Manuel

de sociologie de l’environnement. Québec. Presses de l’Université Laval. 2012 (p.17) 69 Ibid, p.3-4

70 DUCLOS D. Pourquoi tardons-nous tant à devenir écologistes ? Limites de la postmodernité et société écologique. Paris. L’harmattan. Janvier 2007

71 CHARVOLIN F. L'invention de l'environnement en France. Chroniques anthropologiques d'une institutionnalisation. Op.cit.

72 VILLALBA B. Appropriations du développement durable. Emergences, diffusions, traductions. Lille. Presses

Universitaires du Septentrion. 2009

73 Ibid, p.15

74 SCARWELL H.-J., LEDUCQ D. & GROUX A. Réussir la transition énergétique. Lille. Presses

43 Toujours en lien, je me suis appuyée sur Houdayer75 qui explore les dynamiques sociales par une sociologie de l’environnement, au sein desquelles la nature comporte de nombreux symboles, imaginaires et dimensions (santé, modes de production et consommation, etc.). Selon elle, ils influencent les pratiques et valeurs des citoyens, les jeux d’acteurs et le partage d’une conscience collective. Elle exprime, dans son ouvrage, le passage du « naturel » au « culturel » dans le champ de l’environnement :

« La culture reste déterminante dans les manières d’agir, la créativité, la

connaissance critique, la diversité et la beauté. (…) La sélection n’est plus naturelle, elle est culturelle. »76

Ces dimensions, mises en lien avec l’analyse des interactions entre concepteurs, utilisateurs et décideurs, ont permis d’interroger le rôle et la place de ces derniers. Ainsi, les auteurs relevant de la sociologie politique, comme Lascoumes et Le Gales77, ou encore Crozier et Friedberg sur la sociologie des acteurs78, permettent de souligner que la sociologie de l’environnement ne peut faire l’impasse des pouvoirs publics (décideurs) – en tant que détenteurs de la problématique – et de leur relation avec la société civile (utilisateurs) vis-à-vis des instruments (concepteurs) et réglementations qu’ils diffusent en passant par l’information. Pour Singler, étudiant le Nudge marketing, « traditionnellement, il existe trois leviers pour

contrôler, voire modifier, nos habitudes, bonnes ou mauvaises : la loi, les taxes et subventions, l’information. Depuis longtemps, ces trois leviers sont utilisés dans les politiques publiques. »79 Ce qui m’intéressait, ce n’était pas tant d’énumérer les outils créés – non humains –, mais leur processus de création et les relations prenant vie autour d’eux, entre décideurs, concepteurs et utilisateurs. Ainsi, je me suis posée les mêmes questions qu’au sein de l’ouvrage collectif de Deboulet et Nez :

« Nous interrogerons notamment le projet politique des élus lorsqu’ils font appel

au « savoir d’usage » des habitants, les conflits de légitimité et les enjeux de pouvoir dans les interactions entre différents types d’acteurs, ainsi que les dynamiques d’apprentissage et de politisation des participants. »80

75 HOUDAYER H. L’appel de l’environnement. Sociologie des pratiques écologiques. Presses universitaires de la Méditerranée. Op.cit.

76 Ibid, p.79

77 LASCOUMES P. & LE GALES P. Sociologie de l'action publique : Domaines et approches. Paris. Armand

Colin. 2012 (2ème édition)

78 CROZIER M. et FRIEDBERG E. L’acteur et le système. Les contraintes de l’action collective. Paris. Points.

Février 2000

79 SINGLER E. Nudge marketing : Comment changer efficacement les comportements. Londres. PEARSON

EDUCATION. 2015 (p.XVII)

80 DEBOULET A. & NEZ H. (sous la direction). Savoirs citoyens et démocratie urbaine. Rennes. Presses

44 Au cours de l’expérimentation et des analyses des dispositifs de rénovation énergétique, je me suis attachée à comprendre la mobilisation des savoirs citoyens face à de nouveaux enjeux de démocratie urbaine, environnementaux, de mixité, etc. La compréhension de la participation citoyenne, de leur formation à travers leurs capacités, ressources et apprentissages est au cœur de ce livre, tout comme les actions dans des lieux et scènes de mobilisations face aux politiques publiques. D’ailleurs, selon Marion Carrel :

« Les représentations de la participation chez les élus et techniciens restent

majoritairement marquées, en France, par l’idée que l’habitant n’a pas la capacité de contribuer à l’élaboration des politiques publiques et des projets urbains. »81

Afin de vérifier cette affirmation au sein de mon terrain, j’ai exploré des ouvrages sociologiques et ethnographiques sur la participation, d’autant que « la question de la

participation s’avère indissociable de la question des processus et supports de publicisation de l’action collective »82, nécessaire dans un projet expérimental sous un concept de « ville en

transition ». Ces ouvrages examinent les raisons de la contribution ou non des habitants envers des politiques publiques et de la naissance de formes de contre-pouvoir. Ces dernières peuvent émerger sous forme associatives entrant en résonnance avec la dynamique d’initiatives locales. Étudier les acteurs locaux et les mécanismes institutionnels m’a amené à prendre en considération l’échelle locale comme Arocena : « lorsqu’il se pose le problème du

développement, l’acteur associatif revendique une ouverture du système de décision, tout en s’appuyant sur les instances politiques régionales et locales. »83

Ainsi, se structurer, participer (faiblement ou activement) et s’engager dans un projet environnemental collectif interroge la notion d’adhésion84. J’ai pu compter sur l’ouvrage

d’Orfali qui analyse et propose des pistes sur les mécanismes d’adhésion et de l’engagement total avec ses contraintes et avantages. Elle aborde les degrés de participation à la sphère publique, à l’investissement dans de nouveaux groupes ou idées, dans lesquels l’individu va « s’inscrire dans un groupe, lui-même inséré dans une entité plus générale, sociétale et

sociale, voire politique »85. Il était d’autant plus pertinent de cerner le processus d’adhésion

que l’un des dispositifs se base sur l’intéressement, au sein du quartier dans lequel il s’insère.

81 CARREL M. Faire participer les habitants ? Citoyenneté et pouvoir d’agir dans les quartiers populaires.

Lyon. ENS Editions. 2015 (p.51)

82 Ibid, p.79

83 AROCENA J. Le développement par l’initiative locale : Le cas français. Paris. L’Harmattan. 2004 (p.65) 84 ORFALI B. L’adhésion : militer, s’engager, rêver. Bruxelles. De Boeck Supérieur. 2011

45 Pour renforcer la compréhension de la structuration des dispositifs de rénovation énergétique, je me suis orientée vers Favreau et Levesque86 sur l’entrepreneuriat social et les formes structurelles d’Économie Sociale et Solidaire, dont se revendiquent les dispositifs étudiés. Mais aussi auprès de sociologues qui ont étudié les associations, afin de repérer les différences et ressemblances avec ces nouvelles organisations (SCIC, GEIE) : « dans le cas de