• Aucun résultat trouvé

Étapes du processus de la demande d’asile

Il existe actuellement deux façons de faire une demande d’asile au Canada, soit à un point d’entrée10 ou à un bureau intérieur11. Un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) ou de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) juge de la recevabilité de la demande d’asile et de l’admissibilité du demandeur12 en fonction de conditions de bases et la transfère à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR)13. Si la demande est jugée recevable, elle sera transmise à la Section de la protection des réfugiés (SPR)14 de la CISR pour entamer le processus de demande d’asile (CISR, 2016). L’examen de la recevabilité se fait en trois jours ouvrables, journées pendant lesquelles le requérant peut être placé en détention dans un centre de surveillance de l’immigration (CSI) ou dans un établissement correctionnel provincial ou fédéral (CIC, 2012c; Nakache, 2013).

10 Point d’entrée (PDE) : « Un aéroport, un port maritime ou un poste frontalier entre le Canada et les États-

Unis » (CISR, 2016). Notez qu’en vertu de la Loi sur les tiers pays sûrs, les Mexicains ne peuvent pas demander l’asile s’ils ont transités par voie terrestre au États-Unis. Ils ne peuvent faire une demande qu’au poste frontalier de l’aéroport ou à un bureau intérieur s’ils se trouvent à l’intérieur du pays.

11 Bureau intérieur : « Tout bureau de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) ou de l'Agence des services

frontaliers du Canada (ASFC) » (CISR, 2016).

12 N’est pas admissible à demander l’asile toute personne ayant déjà un statut de réfugié au sens de la Convention

dans un autre pays et pouvant y retourner; toute personne ayant déjà le statut de personne protégée au Canada; toute personne arrivée par la frontière canado-américaine; toute personne interdite de territoire dû à des raisons de sécurité, des activités ou de violation des droits de la personne; toute personne ayant déjà présenté une demande d’asile jugée irrecevable; toute personne ayant déjà présenté une demande d’asile rejetée par la CISR et toute personne ayant déjà présenté une demande d’asile et y ayant désisté ou l’ayant retirée (CIC, 2012f).

13 CISR : « Tribunal administratif indépendant qui prend des décisions relatives à l’immigration et à la protection

des réfugiés. La CISR décide qui est une personne à protéger ou un réfugié au sens de la Convention » (CIC, 2012f).

14 Section de la protection des réfugiés (SPR) : « Section de la Commission de l'immigration et du statut de

réfugié du Canada (CISR) qui examine les demandes d'asile présentées au Canada et détermine si elles doivent être accueillies » (CISR, 2016).

Au moment de la demande, le requérant doit remplir le formulaire « Fondement de la demande d’asile » (FDA) (anciennement le Formulaire de renseignements personnels, plus connus sous l’abréviation PIF) qui le suivra tout au long de son processus. C’est d’ailleurs en fonction de ce document que le commissaire basera une partie de son analyse et établira ses questions pour l’audience. Les demandeurs faisant une demande au point d’entrée ont 15 jours pour remplir le formulaire et l’envoyer à la SPR, alors que ceux ayant fait une demande à un bureau intérieur doivent le remplir sur place et le remettre à l’agent de CIC (CISR, 2016). Ce document doit être rempli en français ou en anglais, ce qui peut être source de confusion et d’erreurs pour les requérants dont la langue d’origine est autre et pour qui le formulaire est rempli par une tierce personne à l’aide d’un traducteur.

Le demandeur sera par la suite convoqué à une audience devant la SPR qui sera tenue aux bureaux de la CISR et jugée par un commissaire15. La plupart du temps, la décision lui sera rendue par la poste. Les délais de traitements des demandes des personnes protégées et réfugiées au sens de la Convention s’estiment à quinze mois pour l’évaluation initiale (étude du cas par un commissaire avant la convocation à l’audience) et à dix mois pour la décision finale (décision rendue après l’audience) (CIC, 2010c).

Si la demande est accueillie, le demandeur obtient l’asile et le statut de réfugié et peut faire une demande de résidence permanente. Dans le cas d’une négative, le demandeur peut faire appel à la décision rendue à la Section d’appel des réfugiés (SAR) dans les 15 jours ouvrables et le délai de traitement d’une décision à la SAR est d’environ 90 jours à partir du moment où l’appel est déposé (CIC, 2012c). Si l’appel est accepté, il y aura octroi d’une deuxième audience à la SPR, laquelle sera tenue par un nouveau commissaire. Si l’appel est refusé, les procédures de renvoi sont entamées.

L’accès à l’examen des risques avant renvoi (ERAR)16 est octroyé, à la discrétion de l’agent de l’ASFC, aux requérants un an après la dernière décision défavorable rendue par la CISR, et 36 mois après pour les demandeurs en provenance des POD. Dans le cas des

15 Commissaire : Décideur de la (SPR) qui examine la demande d'asile et décide si elle doit être accueillie (CISR,

2016).

16 L’ERAR est un recours permettant au requérant d’ajouter de nouvelles preuves à l’appui de son dossier de

demandeurs originaires des POD, ces délais visent à assurer un renvoi prématuré avant la possible obtention du droit à ce recours. Si la demande d’ERAR est accueillie, le demandeur d’asile est recevable à la résidence permanente. Dans le cas contraire, il peut faire une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale17 (CIC, 2007b). Pendant le cours du processus de contrôle judiciaire, toute mesure de renvoi est arrêtée jusqu’à ce qu’une décision soit rendue. Si la Cour juge en la faveur du demandeur, son cas fera état d’une seconde audience à la SPR. Dans le cas où la Cour confirme la décision rendue par la CISR, le demandeur fera face à une mesure de renvoi et aura 30 jours pour quitter le Canada (CIC, 2007a). Depuis l’imposition de la loi C-31, la CISR n’a plus la possibilité d’ouvrir à nouveau des demandes ou des appels qui ont fait état d’une décision rendue par la SAR ou la Cour fédérale (CIC, 2012c).

Les mesures de renvoi sont mises en branle dès que possible. Elles s’exécutent souvent avant que les demandeurs aient pu avoir accès à tous les recours et il n’est pas rare qu’ils ne soient pas au courant de leur droit à tous les recours qui s’offrent à eux. Or, une demande de sursis automatique au renvoi peut être effectuée pour repousser la date de départ et permettre aux demandeurs d’entamer ou de terminer un recours avant qu’une décision soit prise sur son renvoi. Tous les demandeurs y ont droit exception faite des requérants des POD; ceux dont la demande est manifestement infondée ou n’a pas un minimum de fondement; les demandeurs faisant état d’une dispense à l’Entente sur les tiers pays sûrs présentant leur demande à la frontière terrestre; et les demandeurs dont l’arrivée est désignée comme irrégulière (CIC, 2012c).

Un ultime recours pour les demandeurs d’asile dont la demande a été refusée et qui ont épuisé tous les autres recours est la demande de résidence permanente pour des circonstances d’ordre humanitaire (communément appelée demande humanitaire). Cette dernière est une demande de résidence permanente distincte de la demande d’asile et ne se fonde pas sur des arguments basés sur le risque à la persécution. Une personne peut faire une demande humanitaire si elle est considérée comme un étranger résidant actuellement au Canada, qu’elle

17 Le contrôle judiciaire permet de réviser une décision prise en matière d’immigration. Si elle est acceptée après

la demande d’autorisation, le demandeur pourra comparaître à une audience pour expliquer en quoi il juge la décision prise incorrecte (CIC, 2007b).

a « besoin d’une dispense d’une ou de plusieurs exigences de la Loi sur l’immigration et la

protection des réfugiés (LIPR) ou du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés

afin de pouvoir présenter, au Canada, une demande de résidence permanente » et qu’elle estime qu’elle subirait « des difficultés inhabituelles, injustifiées ou démesurées » si la dispense dont elle a besoin ne lui était pas accordée (CIC, 2002). Une demande humanitaire ne peut être déposée si une demande d’asile est en cours. Le demandeur doit attendre 12 mois après la dernière décision négative rendue par la CISR pour déposer sa demande humanitaire. Des exceptions seront accordées dans l’intérêt supérieur des enfants et s’il y a menace à la vie par un problème médical ou de santé pour lequel le demandeur ne pourrait pas recevoir les soins adéquats dans son pays d’origine. Dans ces deux cas, les demandeurs peuvent déposer une demande humanitaire à tout moment après le dernier refus de la CISR (CIC, 2012c).

L’ensemble de ces modifications législatives démontre non seulement que le Canada n’échappe pas à la tendance globale de sécurisation des frontières et de resserrement des politiques migratoires, mais qu’il y participe pleinement. Ces dernières sous-tendent un processus discriminatoire rendant le parcours migratoire des demandeurs d’asile extrêmement anxiogène et limitatif.