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Partie I:Le bas de page : Eugène Sue &José de Alencar

4.2. L’Épopée du prolétariat

Les successives défaites socialistes aux urnes n’ont pas découragé Eugène Sue. Au contraire, il se montre encore plus motivé à dégainer sa plume pour la cause. Le 1er décembre 1849, l’écrivain-militant se lance dans un nouveau projet d’éducation et d’édification du peuple.

C’est sûrement son projet d’écriture le plus ambitieux et qui l’occupera jusqu’à la fin de ses jours : raconter l’épopée d’une famille de prolétaires, de l’an 57 avant Jésus- Christ jusqu’à l’échec de la Seconde République née de la Révolution de février 1848.545Les Mystères du peuple – Histoire des prolétaires à travers les âges est une

vaste fresque historique pleine d’aventures où Sue tente de démontrer qu’« il n’est pas une réforme religieuse, politique ou sociale, que nos pères n’aient été forcés de conquérir de siècle en siècle, au prix de leur sang, par l’INSURRECTION », comme il explique déjà à la première page.546

Pour Jean-Louis Bory, « Les Mystères de Paris ne dénonçait que les misères d’une époque, d’une société ; Les Mystères du peuple, élargissant espace et temps entend donner une vision totale de l’Histoire humaine à la lumière de l’idéologie de 1848 ». Ce long roman-feuilleton suit la lutte éternelle des différentes générations des ouvriers de la famille Lebrenn contre les nobles de la famille Ploeurmel. « Immense fresque où vont se mêler l’épopée, le cours d’histoire, le lyrisme déclamatoire, le mélodrame, le catéchisme socialiste et la pédagogie », dit Bory.547

Le texte est publié au fur et à mesure de l’écriture, et aura un total de 400 livraisons par abonnements sous la forme de feuillets de 8 à 12 pages format in-octavo, réunis ultérieurement en 16 volumes. Ils sont édités par l’Administration de la librairie de Maurice Lachâtre entre 1849 et 1857. À chaque volume, Sue publie une liste avec les noms de tous les ouvriers qui ont collaboré à la production de l’œuvre, du fabricant de papier aux imprimeurs et au personnel administratif de la maison d’édition.

Depuis la première livraison, une caractéristique du feuilleton est frappante : la quantité de notes de bas de page ajoutées par l’auteur. Anne-Marie Thiesse a commenté cela : « Pour ne pas être accusé de « faire du roman », l’auteur prend soin

545 C’était son projet initial. Jusqu’à la fin de l’œuvre, qu’il écrit en 1856, il ajoutera des évènements politiques plus récentes.

546 Eugène Sue, Les Mystères du peuple, ou Histoire d’une famille de prolétaires à travers les âges (Tome 1). Paris,

Administration de la librairie, 1849, p.1.

de compléter le récit romanesque par de nombreuses références aux sources reconnues et aux travaux historiques contemporains. Chaque chapitre est ainsi commenté par un impressionnant appareil de notes, digne par son ampleur d’un moderne article historique ! », écrit-elle dans son article « Un roman-manuel d’histoire plébéienne : Les Mystères du Peuple d’Eugène Sue ».548

Ces innombrables références ne passent pas inaperçues aux lecteurs, au point de motiver une réponse de l’auteur. Dans une lettre à ses abonnés, Sue se défend et dit que « la citation historique textuelle, irréfragable » sert de « poinçon, de contrôle à mon récit », sans laquelle « le lecteur pourrait croire que […], entraîné par mon imagination de romancier, j’ai exagéré les faits au delà de la limite du possible ». « Quelle que soit la bienveillance sympathique dont vous m’honoriez, je crois de mon

devoir envers vous de joindre la preuve aux faits, l’autorité historique à la scène que

je représente à vos yeux ».549

Dans cette même lettre à ses lecteurs, il dévoile un objectif de son projet qui nous intéresse du point de vue de l’analyse des transformations du feuilleton et son rapport avec la réalité. Il dit: « Jusqu’ici (sauf quelques uns des éminents et modernes historiens déjà cités dans les notes), l’on avait toujours écrit l’histoire de nos rois, de leurs cours, de leurs amours adultères, de leurs batailles, mais jamais notre histoire à nous autres bourgeois et prolétaires ».550

Pour Anne-Marie Thiesse, Les Mystères du Peuple « constituent la première tentative d’écriture d’une histoire nationale, relatant au Peuple, dans une perspective didactique et militante, ses tribulations et ses luttes pour l’émancipation. L’originalité de l’ouvrage tient aussi à sa forme : il se veut tout à la fois roman et manuel ».551

Il voulait écrire une « histoire d’un nouveau type », dit Thiesse. « Le mode narratif adopté par Sue était celui de la chronique à la première personne : chacun des membres de la famille Lebrenn rédigeait ses souvenirs avant de transmettre le manuscrit à ses enfants. C’était apparemment épouser le rythme de la mémoire individuelle et concevoir la narration historique sous une perspective radicalement

548 Anne-Marie Thiesse, « Un roman-manuel d’histoire plébéienne : Les Mystères du Peuple d’Eugène Sue », in : Henri

Moniot (org.). Enseigner l’histoire - Des manuels à la mémoire. Travaux du colloque Manuels d’histoire et mémoire collective UER de Didactique des disciplines, Université de Paris 7. Berne, Éditions Peter Lang, 1984, pp.25-41, p.29.

549 Eugène Sue, « L’auteur aux abonnés des Mystères du peuple », Bordes, 20/01/1850, in : Les Mystères du peuple, op. cit.,

p.184.

550 Eugène Sue, « L’auteur aux abonnés des Mystères du Peuple », Bordes, 20/01/1850, in : Les Mystères du peuple, op. cit.,

p.184.

neuve (bien qu’utopique). » Et elle pointe l’innovation apportée par Sue : « Pour concilier le point de vue individuel du personnage et le point de vue large du narrateur, il fallait inventer une écriture absolument nouvelle, dont le modèle ne se trouvait ni dans le discours historique de l’époque, ni dans le roman réaliste.»552

Pour l’auteur, « cette œuvre avait à [ses] yeux l’importance d’un devoir civique », comme dirait-il dans une lettre à ses lecteurs ajoutée au dernier volume de l’œuvre, publié en 1857.

Après le succès mondial des Mystères de Paris et du Juif errant, l’épopée des

Mystères du peuple fera également le tour du monde. Non sans la polémique

traditionnelle.

Lorsqu’en 1850 on avait commencé à publier les Mystères du Peuple au Brésil (dans le même journal où, quatre ans plus tard, José de Alencar débutera ses feuilletons Ao

Correr da Pena), le Correio Mercantil défend Sue des critiques faites au texte par la Revue des Deux Mondes, copiées par Times et reproduites dans le journal carioca

concurrent, le Jornal do Commercio – qui, pourtant, avait publié quelques années auparavant, Les Mystères de Paris.553

« Il y a deux mois, nous avons reçu de Paris la première partie de ce roman », lit-on dans le périodique, qui présente Eugenio Sue comme l’auteur « des lectures qui font les délices de la haute et de la basse société de toutes les nations d’Europe et d’Amérique ». En raison des critiques reçues par le texte, la rédaction explique avoir fait un « examen scrupuleux » de l’original, « dans une réunion d’amis prudents et de goût littéraire ». La conclusion de ce comité brésilien est que « la guerre menée contre le littérateur français est due principalement au fait que ce roman est entremêlé de faits historiques contemporains, peint en direct, avec des observations sur l’état actuel de la France et d’Europe en parallèle avec le passé ». Sur ceux qui déprécient l’œuvre, comme la Revue des Deux Mondes, on les considère « pour la plupart des aristocrates colériques ou des créatures accrochées à la gent du régime qui a gravi les échelons du pouvoir sur les barricades de juillet 1830 ». C’est, donc, avec la « conscience bien tranquille » que la feuille carioca commence à publier OsMistérios

do povo en feuilletons, « non seulement parce que nous l’avons trouvé très intéressant

et d’aucune forme applicable à notre pays, où il n’y a que deux classes distinctes,

552 Anne-Marie Thiesse, « Un roman-manuel d’histoire plébéienne », op. cit., p.30, p.37.

553 « Os mistérios do povo », Correio Mercantil, 13/05/1850, p.2. Le premier numéro du feuilleton d’Eugène Sue est publié

celle des esclaves et celle des maîtres, mais aussi parce que […] nous n’avons pas trouvé de raisons pour cette fureur de ses détracteurs », explique le journal.554

Un jésuite et l’argent

Le roman historique en tranches séduit également José de Alencar. Il s’y était déjà essayé au moment de construire les bases d’OGuarany, où, comme nous l’avons vu, il retrace le contexte historique de la colonisation et de ses guerres et disputes entre Portugais et indiens. En 1862, il commence à publier, en fascicules, une autre aventure mélangeant faits réels historiques et fiction, dans l’œuvre qu’il présente comme « la continuation d’O Guarany », AsMinas de prata [Les Mines d’argent]. Ce long roman historique, qui aura au total 1 000 pages, sort dans la Bibliotheca

Brasileira [Bibliothèque Brésilienne]. Il s’agit d’une publication périodique, dirigée

par Quintino Bocaiúva, destinée à former une espèce de collection réunissant les œuvres de la naissante littérature brésilienne. Les titres sont lancés par fascicules, imprimés dans la typographie du Diário do Rio de Janeiro. Cette revue mensuelle se veut être « l’organe et le représentant de notre progrès intellectuel », selon son directeur.555

Dans ses mémoires, Alencar raconte que lorsque son ami Bocaiúva l’invite à collaborer à son projet, l’écrivain avait déjà prêts les dix chapitres initiaux d’As

Minas de Prata, un roman qu’il ne pensait pas continuer. « Sans l’insistance de

Quintino Bocaiúva, As Minas de prata n’allait jamais sortir de sa chrysalide », dit l’auteur.556

Et pourtant, ce roman est considéré « son chef d’œuvre » par certains critiques, comme Sônia Brayner. « Il maintien depuis le début de la narrative le contrôle du centre d’intérêt indiqué dans le titre, et manipule une énorme quantité de personnages (quarante-quatre hommes et treize femmes), des sous-intrigues et des situations créées par une imagination sans retenue et un pouvoir créateur », analyse-t-elle557,

554 « Os mistérios do povo », Correio Mercantil, 13/05/1850, p.2.

555 Quintino Bocaiúva, « Apresentação », in : Bibliotheca Brasileira, vol. 2, n. 1, Rio de Janeiro, 01/07/1863.

556 José de Alencar, Como e porque sou romancista, op. cit., p.52.

557 Sônia Brayner, « José de Alencar e o romance histórico », in : Suplemento Literário, n. 869, O Estado de S. Paulo,

qui, d’ailleurs, n’est pas seule . Ce roman restera, pour la critique, comme l’un des plus réussis de l’auteur.

L’histoire d’As Minas de prata se passe aux alentours de 1609, à Bahia et à Rio de Janeiro. Le roman exploite une légende de ces temps coloniaux selon laquelle il existerait une ville perdue au cœur de Bahia où se situeraient de fabuleuses mines d’argent – mythe déjà paru dans O Guarany, motivant les expéditions des aventuriers. Comme un roman-feuilleton, cette aventure en fascicules reprend la dichotomie bien

versus mal, les questions morales ainsi que les péripéties et les rebondissements

dramatiques typiques du genre. Inspirés par de bonnes et de mauvaises raisons, les personnages principaux sont en quête des gisements d’argent. D’un côté le pauvre et courageux Estácio, descendant de celui qui avait signalé l’existence des mines. Il veut trouver les gisements pour réhabiliter la mémoire de son père qui, pour avoir perdu la carte indiquant l’endroit exact des mines, a été accusé de trahison au roi, arrêté et dépossédé de tous ses biens. De l’autre, Gusmão de Molina, l’ambitieux prêtre de la Compagnie de Jésus, qui cherche son enrichissement personnel. Un troisième et curieux personnage s’ajoute à ce groupe : Vaz de Caminha, vu par les critiques comme un alter ego d’Alencar.559 Célibataire, c’était un homme à trois visages. D’un

côté, un homme de « sentiment et effusion », caractéristiques révélées seulement dans l’intimité ; de l’autre, l’avocat « sec et dogmatique », personnalité créée par la nécessité d’assurer sa subsistance qui, « étant la moins véritable, était celle que tout le monde connaissait » ; et comme troisième volet, Vaz de Caminha était aussi le « savant le plus lettré de la ville de Salvador de Bahia », homme de talent, auteur encore inconnu « d’une œuvre conçue et réalisée pendant de longues heures de travail et de longues nuits d’insomnie ».560

Ce qui mérite également notre attention est le commentaire de plusieurs critiques, dont Augusto Meyer, qui voient dans le personnage du jésuite Molina, considéré comme une des plus grandes créations d’Alencar, plusieurs traits du prêtre Rodin,

558 Parmi les auteurs qui partagent cette opinion se trouvent: Wilson Lousada, Graça Aranha, Alencar Araripe, Cavalcanti

Proença.

559 Raimundo Magalhães Junior, José de Alencar e sua época, op. cit., p.178.

560 José de Alencar, As Minas de prata – continuação do Guarany, in : Bibliotheca Brasileira, vol. III, Rio de Janeiro,

duJuif errant d’Eugène Sue, feuilleton que le Diário do Rio de Janeiro avait publié entre 1844 et 1845.561

Entremêlé aux péripéties liées à la recherche des mines, l’histoire des couples et des amours impossibles apporte du romantisme à l’aventure haletante.

Ce n’est pas seulement la reconstitution des villes et des décors du XVIIe siècle qui

compose le panel historique tracé par Alencar. Il mêle à son intrigue des personnages réels (comme d. Diogo de Menezes, gouverneur-général du Brésil, par exemple), des questions de l’époque (comme le rôle de la Compagnie de Jésus à Bahia, en conflit avec les pouvoirs établis sur la question de la servitude des indigènes), les relations et disputes entre les gouverneurs etc. Tout cela est référencé par les œuvres de l’historiographie disponible à l’époque, citées dans les notes de bas de page qui indiquent les sources des affirmations.562

Ce type de récit avait une importance capitale dans le contexte de cette deuxième moitié du XIXe siècle au Brésil. Pour l’historien Pedro Puntoni, à cette époque, « la

littérature brésilienne avait une souveraineté vis-à-vis des autres genres, notamment l’historiographie ». Il continue : « pauvre en matière d’études sur son histoire, la jeune nation avait peu hérité outre les volumes entortillés de chronique coloniale : seules quelques faibles connaissances sur la documentation et juste un livre, en anglais, faute de mieux, écrit selon les règles modernes de la méthode historiographique. Tout était à faire. »563

Si Eugène Sue , avec ses Mystères du peuple, avait voulu écrire l’histoire d’une nouvelle manière, la démarche d’Alencar était plutôt de fictionnaliser les faits du passé pour doter le pays d’un récit historique propre, qui le détachait des versions du Portugal.

Marcelo Peloggio, professeur de littérature de l’Université Fédérale du Ceará, propose la lecture historiographique des œuvres d’Alencar564 et analyse le travail

561 Augusto Meyer, « Nota preliminar », O Guarani, In: José de Alencar, Obras completas, vol. 2, Rio de Janeiro, Editora

José Aguilar, 1958, p.19.

562 Ces « marques de vérité » et les sources utilisées par Alencar sont recensées et commentées dans l’article de Renata Dal

Sasso Freitas, « Ele bebera da fonte da história: os usos do passado em As Minas de Prata (1862-1865) de José de Alencar »,

in : Anais do XXV Simpósio Nacional de História – História e Ética, CD-Rom, Fortaleza, ANPUH, 2009.

563 Pedro Puntoni, « A Confederação dos Tamoyos de Gonçalves de Magalhães - A poética da história e a historiografia do

Império », in : Novos Estudos CEBRAP, São Paulo, vol. 45, 1997, pp.119-130, p.120.

564 Marcelo Peloggio, « José de Alencar : por uma historicidade em mão dupla », in : Revista Investigações, vol. 24, n.1,

minutieux de l’écrivain de rechercher dans les chroniques historiques l’élément basique du passé colonial, à fin que celui-ci puisse servir de décor à la construction de ses romans.566

Le périodique Bibliotheca Brasileira se termine précocement, en 1863, laissant l’aventure en tranches d’Alencar incomplète, avec dix-neuf chapitres publiés en deux volumes.567 L’auteur achèvera l’histoire plus tard.

Entre 1864 et 1865, pendant trois mois, Alencar écrit les six derniers volumes de son roman historique, qui ne paraissent en librairie qu’entre 1865 et 1866.568 « L’impression tardive m’a dérangé pendant un an », raconte l’auteur, qui dénonce le « retard de notre art typographique », capable d’exercer une « mauvaise influence sur sa carrière d’écrivain », dit-il en 1873. « Si j’avais la fortune de trouver des ateliers bien montés avec des réviseurs habiles, mes livres sortiraient plus corrects ; l’attention et le temps par moi dispensés à revoir, et mal, les épreuves tronquées, seraient mieux exploitées à composer une autre œuvre », se plaint-t-il.569

Patriotisme en scène

Un des thèmes exploités par Alencar dans As Minas de prata revient dans son prochain texte : les jésuites de la Compagnie de Jésus – exactement celui considéré inspiré d’Eugène Sue.

Comme part des célébrations de la fête nationale du 7 septembre 1861, l’anniversaire de l’indépendance du pays, le principal acteur de l’époque, João Caetano, demande à Alencar de lui écrire un drame sur un sujet brésilien. Cet acteur, Alencar l’avait déjà considéré « le seul représentant de l’art dramatique du pays », dans un de ses premiers feuilletons d’Ao Correr da pena570.

Pour écrire cette pièce de quatre actes, Alencar fait une « longue incursion dans l’histoire de la patrie en quête d’un sujet », comme il le raconte. « N’ayant pas trouvé de fait qui pourrait m’inspirer le drame national comme je l’imaginais, j’ai décidé de

565 « Chronique » ici dans son acception première : « Recueil de faits historiques regroupés par époques et présentés selon

leur déroulement chronologique », cf. Trésor de la Langue Française Informatisé ; ou : « Emprunté du latin chronica, du

grec ta khronika (biblia), "les annales" », cf. Dictionnaire de l’Académie Française, 9ème édition.

566 Marcelo Peloggio, « José de Alencar: um historiador à sua maneira », in : Alea, vol. 6, n. 1, juin 2004, Rio de Janeiro,

pp.81-95.

567 Les neuf premiers chapitres sortent dans le volume III de la Bibliotheca Brasileira. Les dix suivants, qui composent la

première partie du roman, sont publiés dans le volume V.

568 José de Alencar, As Minas de prata, vol. III. Rio de Janeiro, B. L. Garnier, 1865.

569 José de Alencar, Como e por que sou romancista, op. cit.

l’inventer, tout en le liant à l’histoire et à la tradition, de façon à ne pas les dénaturer ».571 De cette façon, le drame mélange épisodes et personnages historiques

à une trame fictionnelle.

La scène se passe en 1759 et le personnage principal, écrit pour João Caetano, est un prêtre jésuite qui se faisait passer pour un médecin. Au contraire du prêtre Molina, qui profitait de sa présence dans l’ordre ecclésiastique visant son enrichissement personnel, Samuel de la pièce O Jesuíta [Le Jésuite] tramait pour un idéal plus noble : l’indépendance du pays.

João Caetano, cependant, n’accepte pas le texte. Sans donner de raisons claires, ce qui a donné libre cours aux explications et spéculations, l’acteur décide de ne pas mettre en scène dans son théâtre la pièce d’Alencar, qui restera inédite jusqu’à une présentation en 1875, qui se révélera un échec de public et de critique.

Du lecteur à l’électeur

Sortons du cadre des romans historiques et revenons à l’actualité politique. Début 1850, la Haute Cour française se prononce par rapport aux députés républicains qui avaient participé aux manifestations républicaines de juin 1849. Trente et un députés sont condamnés et perdent leurs mandats. Pour les remplacer, on convoque de nouvelles élections parlementaires pour le 10 mars 1850. La gauche reprend vingt-et- un des postes à pourvoir.

Trois députés républicains sont élus à Paris, dont un conquiert également un siège dans le Bas-Rhin. Il choisit celui-ci, laissant un poste vacant. Il faut faire une élection complémentaire, prévue pour le 28 avril. La gauche se mobilise.

En ce moment, aux Bordes, Eugène Sue occupe son temps à écrire non seulement Les

Mystères du peuple comme d’autres feuilletons plus courts, comme Les Enfants de l’amour, qui sort dans Le Siècle presque quotidiennement à partir du 26 mars et

jusqu’au 17 mai. Ou des articles pour des feuilles de sa coloration politique, comme