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Repenser l'offre de soins en rhumatologie ? La solution : le centre de soins ostéoarticulaires ambulatoires

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8 | La Lettre du Rhumatologue • N° 419-420 - février-mars 2016

Repenser l’offre de soins en rhumatologie ?

La solution : le centre de soins ostéoarticulaires ambulatoires

C. Hudry

Rhumatologue, Paris.

Attaché de l’hôpital Cochin, Paris.

Pourquoi repenser l’off re de soins ?

Premièrement, la croissance des dépenses de santé a toujours été supérieure à celle du produit intérieur brut, nécessitant d’incessantes réformes et ajustements pour arriver à l’équilibre des comptes. Mais le contexte économique a changé : ni le recours à la dette ni l’augmentation des prélèvements obligatoires ne sont plus envisageables ; c’est donc vers une réforme structurelle que s’orientent les décideurs institutionnels.

La structure des dépenses de santé est établie sur 3 enveloppes différentes (l’hospitalisation, la ville et le secteur médicosocial).

Le nombre d’établissements hospitaliers est, en France, particulièrement élevé.

La croissance mécanique des dépenses de ce secteur est essentiellement liée à l’augmentation de la masse salariale, par le jeu même de la progression de carrière via des échelons. Cette augmentation est mécaniquement au-dessus de 2 % par an, c’est-à-dire au-dessus de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) fixé par le Parlement (1,75 %).

Les hôpitaux sont actuellement contraints d’accroître leur productivité en augmentant leurs activités d’un côté et en diminuant leurs dépenses de fonctionnement de l’autre.

La finalité est d’arriver à un volume d’actes au minimum constant et avec moins de moyens (moins de lits, moins de personnel, etc.). La difficulté est que l’hôpital est le premier employeur dans les communes où il est implanté et qu’il constitue un élément important de l’aménagement du territoire.

L’adaptation ne peut être que lente, et la dernière loi de santé prévoyant le regroupement hospitalier de territoires procède de la même logique

que ce qui s’est fait avec la réforme territoriale concernant les régions, c’est-à-dire un effet de concentration et de mutualisation de moyens permettant une économie des coûts de gestion.

Concernant les lits de rhumatologie, l’arrivée des biothérapies sous-cutanées va induire une prise en charge ambulatoire plus importante, avec moins

d’hospitalisations et une baisse en volume des journées d’hospitalisation.

On peut s’attendre à l’intégration du coût de ces biothérapies dans les groupements homogènes de malades (GHM) et à une diminution du nombre de lits,

voire à leur intégration dans des pôles de médecine multidisciplinaire.

En ville, la démographie des rhumatologues libéraux est à la baisse (cf. le Livre blanc de la rhumatologie française 2015 téléchargeable sur le site de la Société française de rhumatologie et sur celui du Syndicat national des médecins rhumatologues ), et la codification des actes selon la Classification commune des actes médicaux (CCAM) n’est pas adaptée à la prise en charge des rhumatismes inflammatoires ou des pathologies mécaniques complexes, au vu des référentiels de prise en charge de nos sociétés savantes.

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La Lettre du Rhumatologue • N° 419-420 - février-mars 2016 | 9 Il y a donc un chaînon manquant entre l’offre de soins hospitalière et les soins

dit externes.

Deuxièmement, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2014 a prévu plusieurs dispositions relatives au parcours de soins.

Pour la première fois, le fonds d’intervention régional (FIR) a été désigné comme l’une des composantes de l’ONDAM. Doté de 3,1 milliards d’euros délégués aux agences régionales de santé (ARS), il a été individualisé.

Toutefois, dans sa construction même, il assure la fongibilité des 3 enveloppes, ce qui est très nouveau dans notre système de santé.

Vous avez dit “fongibilité” ?

Daniel Laurent, dans le blog “Des idées pour demain” de l’institut Montaigne du 11 octobre 2013, explique :

“L’absence de fongibilité résulte de la séparation au niveau de l’ONDAM, soumis au vote du Parlement, de 3 enveloppes distinctes : médecine de ville, hospitalière et médicosociale.

À l’origine, cette séparation avait une finalité politique : sanctuariser les crédits affectés aux hôpitaux publics et éviter tout transfert financier des hôpitaux vers la médecine de ville par exemple.”

Toutefois, depuis la mise en place des ARS, l’absence de fongibilité n’a fait

que s’accentuer : Selon le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, “l’absence de marge de manœuvre au niveau régional pour orienter à travers les dépenses d’assurance maladie, le recours aux soins et l’activité des professionnels et des structures, paraît en totale contradiction avec l’intention affichée de transversalité”.

Il s’agit là d’un frein considérable à l’évolution du système. Comment envisager de véritables réseaux, associant médecine de ville et hôpitaux avec l’existence de 2 enveloppes distinctes ?

La disposition prévue dans le PLFSS 2014 d’un FIR indépendant des enveloppes traditionnelles constitue une avancée importante. Elle peut permettre

la mise en place de véritables parcours de soins grâce à des réseaux, par exemple.

Cette mesure devrait également souligner la nécessité pour l’assurance-maladie d’avoir une tarification globale pour des actions qui font intervenir la coopération de professionnels de la santé.

Selon l’auteur de cette analyse, il convient d’imaginer les “entités” qui supportent juridiquement et administrativement ces actions (association, société d’exercice, coopérative, etc.). Ce sont des entités financées globalement par les “payeurs”

(assurance-maladie, mutuelles, etc.), sur la base de paramètres directement liés à la nature de l’action (par exemple, capitation pondérée par le degré de la pathologie).

À charge ensuite, pour cette entité, de rémunérer les professionnels de santé concernés.

Ainsi, ce modeste FIR, s’il n’est pas dénaturé par les décrets d’application qui l’encadreront, constituera un levier d’action pour faire évoluer l’ensemble de notre système de santé. À terme, pourquoi ne pas imaginer que le FIR absorbe

les différentes enveloppes et que l’ONDAM soit décliné régionalement et non plus à travers une multiplicité d’enveloppes étanches ?

Concernant les structures à même d’assurer ce nouveau service, il y a une place à prendre pour des établissements privés à but non lucratif participant au service public appelés établissements de santé privés d’intérêt collectif (ESPIC).

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Pourquoi ce type de structures ?

Denise Silber est présidente de PharMBA, l’association des MBA internationaux dans le domaine de la santé. Dans une note de l’institut Montaigne, en 2005, elle met en évidence l’avantage en termes de performance de ces structures, méconnues et non valorisées par les tutelles, et propose une série de propositions pour les valoriser.

En France, le système hospitalier s’organise autour de 3 “modèles” : l’hôpital public et la clinique privée à but lucratif, bien répertoriés, mais aussi, même s’il est encore

peu connu, l’ESPIC. La majorité des ESPIC assurent une mission de service public identique à celle de l’hôpital public. Ils représentent le plus petit des 3 secteurs hospitaliers,

aussi bien en capacité d’accueil (15 % des lits contre 65 % pour l’hôpital public et 20 % pour le secteur lucratif) qu’en nombre d’établissements (868 ESPIC contre 1 136 établissements privés lucratifs et 1 008 hôpitaux publics). Seule l’Alsace constitue une exception à la moyenne nationale.

Au niveau international, en Europe ou aux États-Unis, les États disposent tous d’un secteur public ainsi que d’un secteur privé non lucratif (PNL). En Europe, beaucoup n’ont pas du tout de secteur privé à but lucratif. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, c’est en France que le secteur privé à but lucratif est le plus important, dépassant même celui des États-Unis. Le secteur PNL domine aux Pays-Bas, en Allemagne mais également aux États-Unis, où il bénéficie de certains avantages fiscaux.

Le manque de notoriété des hôpitaux du secteur PNL est surprenant vu leurs

caractéristiques et leurs résultats. Ils ont une activité comparable à celle du secteur public en matière de prise en charge des pathologies lourdes et de poids moyen des cas traités.

Ils font preuve d’une meilleure “productivité” que les centres hospitaliers publics, avec un meilleur rapport qualité/prix. Le secteur PNL jouit d’un modèle de gouvernance relativement souple, son personnel étant sous contrat de droit privé. Bien qu’il ait une mission de service public, il ne profite pas des mêmes avantages que l’hôpital public : charges sociales plus élevées, absence de facilités financières et comptables comparables à celles des secteurs public et privé lucratif. Ces établissements sont également “invisibles”

sur le plan administratif : ils ne sont pas regroupés sous une catégorie statistique unique et identifiable comme telle. La formule de l’hôpital PNL a montré, aussi bien en Europe qu’aux États-Unis, sa viabilité et sa capacité à concilier mission publique et productivité.

En France, l’hôpital PNL allie qualité des soins, accès des plus démunis à une médecine de qualité et absence de but lucratif, mais souffre d’un manque de visibilité

et d’un environnement réglementaire peu favorable.

Il paraît donc opportun, dans ce contexte, d’utiliser cette réforme de la fongibilité des enveloppes pour financer de petites structures d’offre de soins monothématiques et à forte densité médicale pour accompagner la réduction à venir du nombre de lits d’hospitalisation du secteur public en maintenant une prise en charge de qualité accessible à tous en accord avec les référentiels internationaux.

La solution en rhumatologie :

le centre de soins ostéoarticulaires ambulatoires

Le projet est de créer un centre de soins ostéoarticulaires ambulatoires (CESOA) dans la perspective de coopérer avec un établissement de santé, public ou ESPIC, considérant que, d’ici à 2 à 3 ans, l’offre de soins en rhumatologie telle que nous la connaissons aujourd’hui va subir une profonde restructuration.

0010_LRH 10 19/02/2016 17:14:00

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La Lettre du Rhumatologue • N° 419-420 - février-mars 2016 | 11 Or, les patients souffrant de rhumatisme nécessitent des consultations plus élaborées qu’une simple consultation externe.

Ce projet de centre de soins spécialisés ambitionne de devenir, en quelque sorte, le chaînon manquant entre l’hospitalisation de jour et la consultation externe. L’objectif sera d’accueillir les patients durant 1 h 30 à 2 h 30, en leur offrant un plateau technique de radiologie, d’échographie, d’ostéodensitométrie, permettant de réaliser tous les actes nécessaires au diagnostic à partir d’un planning établi à l’avance, les examens biologiques étant réalisés à l’extérieur au préalable. En pratique, le CESOA facturerait un forfait par passage à chaque patient, étant entendu que le nombre de passages par jour et par équivalent temps plein (ETP) serait plafonné à 12 patients par ETP et par jour (2 places d’urgence en sus par jour par ETP sont prévues).

Le CESOA embaucherait des praticiens libéraux sous contrat de travail

et les rémunérerait selon une grille de praticien hospitalier, sur la base de 10 heures par journée de présence (8 heures de présence, plus 10 minutes de planification par malade, soit 120 minutes, ou 2 heures). Cette rémunération comprendrait une part fixe et une part variable, sous forme de 13e mois, conditionnée par l’atteinte de certains objectifs (obligations quantitatives et qualitatives). L’avantage du salariat réside, selon nous, dans 3 éléments : les congés payés ; les cotisations à une caisse de retraite différente de celles

des professionnels libéraux ; une baisse du chiffre d’affaires de l’activité libérale qui aura pour conséquence mécanique une baisse des cotisations sociales.

Pour garantir la pérennité de son fonctionnement, le CESOA doit maîtriser son matériel et son personnel, lequel ne se limitera pas aux médecins rhumatologues mais comprendra également un ou plusieurs manipulateurs d’électroradiologie médicale, une ou plusieurs secrétaires, et des infirmières spécialisées en rhumatologie, un ergothérapeute,

un kinésithérapeute.

Les patients éligibles au CESOA sont les patients adressés pour le bilan diagnostique d’un rhumatisme inflammatoire débutant, un bilan avant l’instauration d’une biothérapie ou le bilan annuel d’un rhumatisme à la phase d’état. Les patients souffrant de pathologies ostéoarticulaires mécaniques sont éligibles dans les cas suivants :

➤patients souffrant depuis plus de 1 mois d’une pathologie articulaire (non abarticulaire) et naïfs d’examen complémentaire ;

➤patients souffrant de pathologies ostéoarticulaires, à la demande du médecin traitant ou du spécialiste, ayant eu un parcours complexe défini par au moins 3 examens complémentaires, avec 2 imageries en coupe et une incertitude diagnostique ;

➤patients en échec d’au moins 3 séquences thérapeutiques ;

➤patients lombalgiques ou lomboradiculaires souffrant depuis plus de 1 mois et moins de 3 mois.

La prise en charge associera le recueil systématique de données selon des procédures standardisées opérationnelles. Ces données seront en relation avec la pathologie, mais également avec les comorbidités potentielles.

Le séjour sera l’occasion de séances d’éducation thérapeutique, avec le médecin, l’infirmière, le kinésithérapeute ou l’ergothérapeute, selon les besoins.

Outre la partie clinique, des examens d’imagerie de base (échographie, radiographie, ostéodensitométrie) et des gestes techniques (infiltrations, test anesthésique) seront réalisés lors du séjour. Ce dernier sera conclu par un compte-rendu, remis au patient le jour même, et destiné au médecin qui a adressé le patient au centre ainsi qu’au médecin traitant.

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Dans le cadre du contrat lié à l’ARS, le CESOA peut se voir attribuer un numéro FINESS, ou pourra utiliser celui de l’ESPIC ou de l’hôpital partenaire.

Pour des raisons de productivité, le CESOA doit totalement maîtriser l’imagerie.

Il doit être propriétaire des machines (appareils d’échographie, d’ostéodensitométrie, de radioscopie et, éventuellement, IRM dédiée) afin qu’elles soient toujours disponibles.

La structure juridique du CESOA peut être une société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA).

L’article 1er de la loi no 2011-940 du 10 août 2011 a créé ce type de sociétés qui se présentent comme des sociétés civiles permettant le développement de nouveaux modes de rémunération et encourageant l’exercice regroupé pour les professionnels de la santé (articles L. 4041-1 à L. 4043-2 du code de la santé publique). Ces sociétés peuvent être constituées entre des personnes physiques exerçant la profession de médecin, d’auxiliaire médical ou de pharmacien. Les professionnels médicaux, auxiliaires médicaux

et pharmaciens associés d’une société civile professionnelle ou d’une société d’exercice libéral peuvent également être associés d’une SISA. Une SISA doit compter parmi

ses associés au moins 2 médecins et 1 auxiliaire médical. Les activités exercées en commun au sein de ces sociétés ne sont pas soumises à la prohibition du partage d’honoraires au sens du code de la santé publique. Une autre option consiste à salarier directement le personnel de la structure. Dans ce cas, le CESOA s’apparente à l’unité fonctionnelle d’un pôle.

Au vu de la masse salariale, des équipements, des frais généraux standard, il apparaît qu’une structure de ce type pourrait facturer le forfait pour un passage à moins de 50 % du prix d’un hôpital de jour. (Ce montant a été établi sous l’égide du Pr Alain Sommer par les élèves du master II en gestion des établissements de santé du Conservatoire national des arts et métiers, chaire de Jean de Kerguiziau de Kervasdoué.) Le financement serait assuré par les FIR et la Caisse primaire d’assurance-maladie.

Ce type de structure doit également prévoir les éléments de sa propre évaluation : sur le plan qualitatif, concernant la réalisation de son cahier des charges (respect

des procédures) et de la pertinence des soins ainsi que sur son efficience au regard du coût du patient équivalent et pris en charge en externe ou à l’hôpital.

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.

0012_LRH 12 19/02/2016 17:51:07

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