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Les stations thermales et climatériques de tuberculeux · BabordNum

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(1)

FACULTÉ

DE

MÉDECINE

ET DE

PHARMACIE

DE

BORDEAUX

ANNÉE 1897-1898

V 4*

LES

DE TUBERCULEUX

»Il faut quelaphilanthropiecrée des asiles, là où laspéculationn'établirait quedes hôtels.

(Monin,La luttepourla santé.)

THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE

présentée et soutenue publiquement le 24 Décembre 1897

PAR

Jean-Marie-Louis

MIET

."VAQUE

à Beaulieu (Corrèze), le 21 juillet 1873.

Élève du Service de Santé de la Marine

!MM. PICOT professeur....

Pr0feSSeUr'

Président.

'•(

Jun,<

MESNARD agrege Juges.

BARTHE agrégé ]

Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses parties de l'Enseignement médical.

BORDEAUX

IMPRIMERIE DU MIDI PAUL CASSIGNOL

91 RUE PORTE-DIJEAUX 91

1897

(2)

Facilité de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux

M. PITRES

Doyen.

i» seofkssbsurs

MM. M1GE...

AZAM . .

DUPUY.

Professeurs honoraires.

Clinique interne Clinique externe Pathologie interne...

Pathologie et théra¬

peutique

générales.

Thérapeutique

Médecine opératoire.

Clinique

d'accouche¬

ments

Anatomie pathologi¬

que

MM.

PICOT.

PITRES.

DEMONS.

LANEIjONGUE.

N.

VERGELY.

ARNOZAN.

MASSE.

MOUSSOUS.

COYNE.

Anatomie

BOUCHARD.

Anatomie générale et

histologie

VIAUUT.

AGBIB3GBÎS l<:A

SECTION DE MÉDECINE(Pat/ioloy

MM. MESNARD. | CASSAET.

AUCHxiu

Physiologie Hygiène Médecine légale Physique Chimie

Histoire naturelle ...

Pharmacie

Matièremédicale....

Médecine expérime.:-#

taie

Clinique ophtalmolo¬

gique

Cliniquedesmaladies chirurgicales des en¬

fants

Clinique gynécologiqu»

KXÈIlêlCE : ieinterneet Médecinel<

MM. SABRAZÈS.

LE DANTEG.

MM.

JOLYET.

LAYET.

MORACIIE.

BEIIGONIÉ.

BLAREZ.

GUILLAUD.

FIGUIER.

DE NABIAS.

FERRÉ.

BADAL.

P1ECIIAUD.

BOURSIER.

'■ynie.)

SECTIONDECIlllIUUGIK ET ACCOUCHEMENTS (MM. VILLAR.

Pathologie

externe] BINAUD.

/ BRAQUEHAYE

Accouchements...

\MM.

RIVIÈRE.

/

CHAMBRELENT

Anatomie

SECTIONDESSCIENCES ANATOM1QUES ETPHYSIOLOGIQUES

JMM.

PRINCETEAU | Physiologie MM. PAGHON

" *CANN1EU. Histoire

naturelle BE1LLE.

SECTION DESSCIENCESPHYSIQUES

Physique

MM. S1GALAS. j Pharmacie M. BARTI1E.

Chimie etToxicologie

DEN1GÈS. |

COillN CO.HPIilCHBOvr.t I II

HS

:

Clinique internedes

enfants MM. MOUSSOUS.

Clinique des

maladies cutanées et syphilitiques DUBREU1LH.

Clinique des

maladies des voies urinaires POUSSON.

Maladies dularynx,des

oreilles

et

du

nez

MOURE.

Maladiesmentales

REGIS.

,

Pathologie externe

DENUGE.

Accouchements

RIVIERE.

Chimie

DEN1GES

LeSecrétaire dela Faculté:

LEMAIRE.

Pardélibération du 5 août1879, la

Faculté

a

arrêté

que

les opinions émises dans le»

Thesesquilui sont

présentées doivent être considérées comme propres à leurs auteurs, et

qu'elle n'entend leurdonner

ni approbation ni improbation.

(3)

A MONPÈREET A MA MÈRE

A MON FRÈRE

(4)
(5)
(6)
(7)

INTRODUCTION

En choisissant le sujet de notre travailnous n'avons pas

eul'intention de critiquer l'emploi des eaux minérales ni de jugerleuraction

thérapeutique

sur les différentes diathèses.

Nous sommes loin d'avoir la compétence nécessaire pour

nous permettre de telles hardiesses et nous respectons trop,

surce point, les avis des savants maîtres de la médecine.

Nous avons voulu simplement essayer demontrer que les

stations médicales de tuberculeux sont bien souvent des lieux de plaisirs et de fêtes continuelles, où, parfois, la

sommedes fatigues occasionnées parles distractionsmon¬

daines est telle qu'elle détruittous les bons effets du traite¬

ment. Nous croyonsaussi que cesstations sont des lieuxem¬

poisonnés par l'affiuence des malades et le manque absolu

deprécautions antiseptiquesélémentaires. Parsuite, elles de¬

viennent des foyers d'infection.

On.y envoie indistinctement les malades arrivés à la der¬

nière période de lamaladie etceuxqui nesontencore quelé¬

gèrement atteints, et enfin ceuxqui ne sontqu'épuisés, les

êtresqui marchentsur la ligne de

frontière

delàsanté etde la

maladie.

Les premiers peuvent être

dirigés

sansscrupule surtoutes les destinations. Ils constituentun danger pour tous et n'ont rien à craindre de personne. Or, ce sont

les

derniers, ceux qui ont une

première

atteinte etceux

qui

sonten

danger

de

la recevoir qu'il fautsoigner et guérir.

C'est le but qu'on se propose en les envoyant dans une sta¬

tion, Nous pensons que

bien souvent c'est

un

but contraire

(8)

- 8 -

qui est atteint, et nous ne

voulons

pas

inférer

que, nous

le

répétons,

le traitement suivi soit médicalement mauvais.

Mais une cause étrangère au traitement vient le détruire et fairepis encore. Lesmalades

contaminés répandent

autour

d'eux le poison, etle poison

dès

lors est partout,

dans le lit

où l'on dort, sur la terreque l'on foule, dans la salle

l'on

va se distraire, dans les rideaux des fenêtres et sur les cou¬

verts aveclesquels on mange. Impuissant contre

les robus¬

tespaysans,

inoffensif

contre

les tempéraments vigoureux, il

trouve uneterre d'élection chez l'épuisé, le malade

qu'on

en¬

voie là sans se défier de l'invisible, de l'infiniment petit, de l'infiniment léger qui

flotte dans l'air,

semence

féconde qui

fleurira en fleurs de mort !

Les hasards de lavie etunévénement douloureux, la mala¬

die d'un des nôtres que nous accompagnâmes

dans de

trop

nombreuses stations thermales ou climatériques, nous don¬

nèrent l'occasion d'exercer notre jeune et certes inexpéri¬

mentée observation d'étudiant. Nousnoussouvînmes, devant les déplorables

dispositions des hôtels, la dangereuse

pro¬

miscuité descasinos, l'intimité des rencontres, des enseigne¬

ments de nos maîtres. Nous prîmes des notes, et ce sont ces notes que nousprésentons

à

nos

juges,

non sans

leurdeman-

derpardon de notre

hardiesse

et

réclamer leur indulgence

pour notreaudace

d'élève.

Avant d'entrer dansle développement de notre

sujet,

nous manquerions à notre devoir en ne

témoignant

pas toute no¬

tre reconnaissance à M. le professeur Picot pour le remar¬

quable enseignement clinique

quenous avons reçu

dans

son service et pour le grand

honneur qu'il

nous

fait

en

acceptant

la présidence de notre

thèse.

(9)

CHAPITRE PREMIER

Considérations générales.

En

présence

d'un malade légèrement atteint ou mieux encore d'un maladesimplement prédisposé à la

tuberculose,

nous hésiterions à lui recommander d'aller dans les stations thermales ou

climatériques

à la mode.

Ceci a l'aird'un paradoxe. C'est seulement l'effet du bon sens, du raisonnementet de l'observation.

Partons de faits connus, de conclusions admises par tous les médecins.

La tuberculose est contagieuse. Dès

l'antiquité

on soup¬

çonnait cette vérité. Villemin, en 1865,

l'annonçait

à l'Acadé¬

mie de médecine. Kocli, en 1882, découvrait le bacille, et cette découverte faisait

disparaître

les derniers doutes.

Or, comment s'opère la transmission de la tuberculose :

a) Par inoculation sous-cutanée : ce mode ne nous occu¬

pera pas.

b)

Par ingestiondans les voies digestivcs.

c)

Par inhalation en fine poussière de matières tubercu¬

leuses.

De cesdeux modes, le plus commun de

beaucoup

est la transmission par inhalation : « Il est un fait qui nous paraît prouver la fréquence de la transmission par inhalation : c'est la localisation habituelle des tubercules au sommet du poumon. 11 y a dans la ventilation pulmonaire une loi qui veut que les poussières inhalées, de quelque nature qu'elles soient, sefixentsurtoutausommet du poumon. La fréquence

(10)

de la localisationdes

tubercules dans cette partie de l'appa¬

reil

respiratoire est donc

une preuve

de la fréquence de la

transmission par

inhalation.

« L'agent

ordinaire de la contagion, c'est le crachat bacilli-

fère. Le

crachat

se

dessèche, il se réduit en poussière qui se

répand

dans l'atmosphère, et c'est sous cette forme qu'il

pénètre dans les voies respiratoires.

» Lebacille répandu

dans l'atmosphère est extrêmement

résistantaux agents

extérieurs. La putréfaction en particu¬

lier le modifiepeu et

lentement. Cadéac et Malet, Schotelius,

Gœrtneront montré que la

matière tuberculeuse enterrée

reste virulente au bout d'un temps

très long, et Lortet et

Despeigne

pensent, d'après leurs expériences, que les vers

de terre peuvent ramener

les bacilles tuberculeux à la sur¬

face du sol, opinion

émise antérieurement par Leloir. Les

mouches d'après

Spillmann et Haushalter, les punaises

d'après Devcèvre, sont aussi des agents de dissémination du

virus tuberculeux. »

Donc les

poussières tuberculeuses sont surtout abondan-,

tes autour des phtisiques.

Et les endroits où les phtisiques

sont pour

ainsi dire entassés, parqués, sont particulière¬

mentdangereux.

Là, tout doit être infecté par le redoutable

bacille. Nous en jugerons par

le fait suivant

que

rapporte

Schnirer: «Me trouvantunjour

occupé, dit-il, à des travaux

bactériologiques au

laboratoire de Weichselbaum, pendant

un repos

je

me

fis apporter du raisin pour me rafraîchir. Ce

raisin avait

séjourné quelque temps dans

un

panier à l'exté¬

rieur ; il était

tellement couvert de poussière, que l'eau dans

laquelle

je le lavai était absolument sale et noirâtre. En exa¬

minantcette eau,je

réfiéchisque la ruevoisineétait fréquen¬

tée parles

très nombreux phtisiques qui serendentàla Clini¬

que etq u eces gens nese

gênaient pas pour cracher à terre.La

poussière, si abondante à Vienne, avait donc des chances de

contenir des bacilles. Pour

m'en rendre compte, j'injectai à

trois cochonsd'Inde 10 cc. de cette eau.

L'un d'eux mourut

en deuxjours

de péritonite

;

quand aux deux autres, ils suc-

(11)

11 -

combèrent au bout de

quarante-cinq

et de

cinquante-huit

jours, présentant des lésions tuberculeuses manifestes, par¬

tant du point de l'injection. J'ajouterai que l'eau du

lavage

avait étéprise, au moment de son emploi, au robinet d'eau de source, que le verre à expériences qui l'avait contenue venaitd'être stérilisé avecsoin,que ni le garçon qui avait acheté les raisins, ni le marchand qui les avait vendus ne sont tuberculeux. Ce fait montre avec évidence quel danger

les crachats tuberculeux lancés au hasard et les poussières qui les contiennent présentent au point de vue de la santé

publique.

»

Ainsi, dans cette rue qui avoisinait cette

Clinique,

toutétait sali de poussières tuberculeuses. Non seulement on était exposé à les respirer, mais encore, répandues sur les végé¬

taux, sur les

fruits,

elles souillaient ce dont l'homme se

nourrit. Si bien qu'on était

exposé

à la contagion par inhala¬

tion et par ingestion tout à la fois.

Ce quise produisait à Vienne, se produit peut-être, dans des conditions plus

favorables,

dans les villes d'eaux où l'on envoie des tuberculeux. Pendant deux mois de l'année, ces

petits endroits voient leur population tripler et quadrupler.

Les nouveauxarrivants ne sont que des malades. C'est sur¬

tout dans les chambres des hôtels et dans les villas qu'ils traînent après eux la souillure ét le poison. Combien igno¬

rent le crachoir portatif à fermeture hermétique etsèment le bacilleenprojetant de tous côtés leur expectoration ! Et ces chambres et ces villas ne sont pas désinfectées, et d'autres maladesarrivent qui respirent cet air empoisonné. Il serait vraiment extraordinaireque la tuberculosene fit pas ainsi

de nouvelles victimes. Des exemples probants montrent le

danger.

En 1889, Cornet (de

Berlin)

a trouvé des bacilles tuberculeuxdans la poussière répandue autour des lits des

phtisiques

crachant par terre. Il a inoculé des échantillons de cettepoussière à un grand nombre d'animaux et les deux tiers d'entre eux sont morts tuberculeux. Sur 62 expé¬

riences faites avec la

poussière

des chambres

occupées

(12)

en ville par des

tuberculeux, 27 déterminèrent la tuber¬

culose. Ces

poussières étaient recueillies tout autour

du lit du malade. Danslachambre

d'une actrice tuberculeuse

soignée dans un

hôtel de Berlin, Cornet trouva des poussiè¬

res tuberculeuses sur le boisdu

lit situé derrière la tête de

la malade et surdeux

portraits placés au-dessus. Les pous¬

sières de crachats desséchés

peuvent aussi souiller les ali¬

ments, si le

phtisique crache dans une chambre où l'on

mange ; les

poussières tombent sur la table, les mets, les

boissons,les gâteaux,

les fruits.

Potain a raconté, en 1885,

l'histoire d'un ménage habitant

la rue de Bourgogne,

dont la femme mourut tuberculeuse en

laissant des enfants. Le mari se

remaria,

sa

deuxième femme

mourut tuberculeuse; son

fils du second lit mourut égale¬

ment tuberculeux; et tous

avaient continué à habiter le

même

appartement.

«

Je connais, dit Daremberg, dans une

belle maison de Paris, une

chambre de domestiques où suc¬

cessivement trois bonnes

ont contracté la tuberculose. Je

connais aussi une fermed'un

petit village de Bretagne où le

père

et les quatre enfants moururent phtisiques; on y re¬

cueillitdeux nièces nées de

parents

non

tuberculeux et qui

devinrent aussi phtisiques.

Les médecins de la marine di¬

sent que

dans

tous

les

pays

sauvages, quand un phtisique

entre dans une case, toute

la famille est atteinte et tous ses

membres succombent

successivement.

»

La contagion par

ingestion est aussi probable. Mais pré¬

senter ce mode de

propagation de la maladie comme un dan¬

ger

permanent paraîtrait peut-être de notre part un peu exa¬

géré. Et

cependant si les raisins de Sclmirer étaient souillés

parce

qu'ils

se

trouvaient dans une rue où passaient de nom¬

breux phtisiques,

comment

ne

pas supposer tout naturelle¬

ment que

l'herbe des pâturages qui environnent toutes ces

stations de l'Auvergne, des

Pyrénées et des Alpes, n'est pas

souillée parles

poussières des crachats. Ces poussières, nous

l'avons dit, gardent

leur virus pendant un temps très long.

Donc,

pendant les quelques mois que dure la saison, les

(13)

13

animaux sont exposés à contracter la maladie. Et les mal¬

heureux qui viennenty passer quelques semaines peuvent boiredu lait contaminé, et par conséquent sont exposés à

une nouvelle cause decontagion.

Mais nous savons qu'il ne suffit pas que le bacille pénètre dans

l'organisme

pour quela maladie se

développe.

En effet, presque tout lé monde succomberait à la phtisie, puisque

des tuberculeux étantpartout, le bacille est partout, surtout dans les villes. Pour que le bacille puisse vivre, se multi¬

plier, donner naissance à des lésions

tuberculeuses,

il faut la connivence de

l'organisme;

il faut que l'économie ait été modifiée d'une certaine

façon,

qu'elleait subi l'action de cer¬

taines causes

prédisposantes.

Ces causes

prédisposantes

existent toujours dans le cas dont nous nous occupons. La

principale

est la débilitation individuelle. L'individu quel'on envoie aux eauxest un malade ou un sujet menacé; c'est un terrain merveilleusementpréparé pour recevoir la semence, qui est le bacille.

L'envoyer

dans une station de

tuberculeux,

sans lui dicter des règles sévères touchant sa conduite et le choix de son

habitation,

c'est justement

l'envoyer

dans lemi¬

lieu le plus favorable au

développement

de la maladie. Il est comme un

champ

bien retourné, bien

labouré,

bien préparé

où l'on jetterait une graine abondanteetqu'on mettrait dans les conditions les plus favorables de climatet de milieu.

En outre, sont causes

prédisposantes

: toutes celles qui préparentou augmentent cette débilitation de l'individu. La vie urbaineen est une. Le surmenage

physique

et moral en est une autre. Or, il sembleau médecin qui envoie ses mala¬

des dans une station de la montagne qu'il les envoie à l'air pur, àla campagne, sur les sommets; oui, cela serait s'il n'y

avait pas de stations, c'est-à-dire de lieux de rendez-vous et d'entassement. Mais, précisément parce que l'endroitesttrès

réputé,

les médecins de partout y envoient leurs malades.

Dès lors, au milieu des solitudes desbois et des sommets,

une petite ville se fonde. Et pendant toute la saison ony ap¬

portera toutes les distractions des villes. Le malade repren-

(14)

14 -

dra ses vieilles habitudes de citadin.

Une tirera

aucun

béné¬

fice de son séjour

à

la campagne.

Il

sera

plus mal installé,

plus

entassé, plus exposé. Et

sous

l'influence des infractions

à

l'hygiène,

que

cette vie le forcera à commettre à tout ins¬

tant,la

débilitation continuera.

Ainsi les stations thermales sont de

dangereux endroits.

En soutenant cela nous ne voulonspas

préjuger,

encoreune fois, ni la

qualité des

eaux,

ni l'extrême salubrité du climat.

Les eaux, analysées avec

soin parles sommités médicales,

ontété reconnuesexcellentes pour

le traitement. Le lieu est

sain, étant

situé hors des agglomérations humaines. Car

c'est surtout

l'agglomération des individus qui rend

un

air

mauvais. «La

respiration de l'air ruminé,

que

Mac Cormack

(de

Belfast) désigne d'un mot énergique « air prérespiré »,

est sans aucun doute une couse

d'affaiblissement

pour

l'or¬

ganisme;

l'air confiné contient plus d'acide carbonique et

moins

d'oxygène, moins d'ozone surtout que l'air des

champs; on

peut

y

trouver de l'oxyde de carbone ou des va¬

peurs

ammoniacales: Brown-Séquard et d'Arsonval en ont

extrait un poison

organique énergique. L'air, cet aliment

de la vie, est donc défectueux comme

qualité et comme quan¬

tité; il

devient impropre à entretenir l'hématose; l'orga¬

nisme s'affaiblit: c'est l'inanition par

les voies respiratoires

que M.

Peter rapproche de l'inanition par les voies diges-

tives.

» A l'influence d'une aération

insuffisante, il faut joindre

d'autres causes,

inséparables de la vie urbaine et dont l'ac¬

tion est indéniable : le surmenage

physique, moral et intel¬

lectuel. »

Mais, lorsque les

médecins

se

sont prononcés, ils se sont

prononcés

sur

l'eau

en

soi, sur le climat en soi et non pas

sur la stationmodifiée par

l'affluence des malades autour de

la source. Des conditions

d'habitation nouvelles ont extrê¬

mement modifié les

premières.

En

raisonnant toujours de la

même façonque

les grands médecins appelés à donner leur

avis, on commetla

même faute de raisonnement que les phi-

(15)

losophes

qui, étudiantla nature de l'homme et raisonnant

sur ce qui lui est

nécessaire,

prennentpour base de leur rai¬

sonnement l'homme a priori, l'homme abstrait, l'homme naturel, en dehors de tout ce que la

civilisation,

de tout ce que les âges, de tout ce que la vie de société est venue lui

ajouter. Ils se trompentdans leurs conclusions parce qu'ils négligent de faire entrer dans leurs prémisses certains élé¬

ments d'information. Quand on raisonne surl'homme actuel et qu'on a la prétention de dire ce qu'il convient à son bon¬

heur, il fautle prendre tel qu'il est avec sa natureprimitive

et sa nature acquise. De même, quand nous examineronssi une station est bonne pour un malade ou non, il fautexami¬

ner cette station, non pas à l'origine et telle qu'elle était avant qu'elle fût

fréquentée

des malades dansses conditions primitives, mais telle qu'elle estaujourd'hui dans l'état ac¬

tuel et lesconditions de salubrité que lui fontune affluence

chaque

année plus grande.

Nous allons essayer de nous rendre compte de ce que sont

ces états. D'abord par uneesquisse générale du traitement, du genre de vie que l'onmène dans ces stations. En traçant

ce tableau nouspenserons aux stations lesplus fréquentées,

etnous ne croyons pas l'avoir chargé, ni l'avoir flatté. Nous nous nous sommes efforcé d'être exact. Ensuite nous n'au¬

rons plus qu'à indiquer rapidement les caractères spéciaux à chaque station. Et de tout cela, nous essaierons de tirer uneconclusion logique et de bon sens.

(16)
(17)

CHAPITRE II

Les stations thermales.

ESQUISSE GÉNÉRALE

Le malade

phtisique

ou menacé de

phtisie,

qu'on envoie dans unestation

thermale,

quittesamaison aux mois les plus chauds de l'année. Les stations recommandées sont le plus

souvent dans des pays de montagnes. Les variations de tem¬

pérature y sont

brusques.

La neige apparaît quelquefois sur

les sommets au mois de juillet. Il faut donc attendre la sai¬

son chaude ces

changements

sont le moins fréquents.

La chaleurest

déjà

une causedéprimante pour

l'organisme

affaibli. Et c'est par des

températures

accablantes que l'on

impose

à des malheureux un

long

voyage de dix ou douze heures,

quelquefois davantage.

Ceux qui y furent

obligés

n'ontcertes pas oublié ces pénibles

journées,

le soleil qui congestionne, la poussière qui provoque les quintesde toux, les regards irrités des voyageurs pleins de santé contre le pauvremalade qui les gêne, les ennuie et peut être un dan¬

ger.

Il arrive

péniblement,

heureux encore quand à la descente du train il ne doit pas remonter dans unelourde voiture ca¬

hotante et bondée, et être traîné encore deuxoutrois heures

sur des routes que l'ombre des sommets couvre de nuit et de fraîcheur. Doux contraste à

l'épuisante

chaleur de lajournée

M.

(18)

- 18

et bien fait pour

surprendre des tempéraments plus ro¬

bustes.

Ilarrive ! Et lemalheureux

n'est

pas au

bout de ses peines.

Il lui faut combattre encore.

Une armée d'ennemis de toutes

sortes l'assaillent à la

sortie de la

gare,

dans la cour des

messageries, une

armée hurlante, turbulente, hardie de gar¬

çons

d'hôtel, de cochers, de servantes, de guides, tous les mé¬

tiers

qu'engendrent les villes d'eaux. Le malade leur appar¬

tient. C'est leurproie,

leur chose. Le plus hardi l'accaparera,

semble-t-il,

puisqu'il

ne

connaît

personne.

Et ce n'est pas la

hardiessequimanque.

Avant qu'il ait eu le temps d'entendre,

il est débarrassé de ses paquets.

Il doit

se

relever et faire un

nouvel effort pour

rattraper les pillards qui se partagent le

butin.

Enfin, il est

dans

sa

chambre d'hôtel. La bonne, bavarde,

obséquieuse,

est partie. Et il regarde la banalité de ses meu¬

bles. Une

impression de mélancolie s'empare de lui. L'imagi¬

nation desmalades est vive,

très facilement impressionnable

et tristement

impressionnable. Il

se

sent seul, loin de tous

sesamis, sans aucun

objet familier autour de lui. Rien qui

rappelle

la tendresse des êtres qui vous aiment, qui vous

soutiennent, sur lesquels on

peut compter. Tous les sourires

sepaient,

toutes les paroles bienveillantes auront leur place

sur la note.

Qui n'a

senti cette impression pénible et d'isolement dans

unevilleétrangère, dans un

long couloir d'hôtel. Derrière ces

portes

numérotées

se

cachent des existences qui nous sont

inconnues. Etau milieu de ces gensque

l'on coudoie et que

l'onne connaît pas, on se

sent plus seul que dans une abso¬

lue solitude.

Mais cequi

n'est

que

mélancolique et très passagère rêve¬

rie dans un esprit

sain, est bien plus durable chez un ma¬

lade. Un découragement

peut s'en suivre. Sans doute ce ne

sera pas ce

découragement qui

sera

la cause d'une mauvaise

cure. Mais il faut notercette

dépression, chez

un

être qui a

besoin de toutson courage, de

toutes

ses

forces pour lutter

contre un terrible ennemi.

(19)

19

Il faut lenoter, car il a ses

conséquences.

Nous cherchons à nous rendre compte de l'état

d'esprit

du malade, état d'es¬

prit extrêmement

important

puisqu'il dirigera sa

conduite;

or, de sa conduite

dépend

sa santé.

Pour

échapper

à cet état de

tristesse,

à cette solitude,

péni¬

ble surtoutau malade qui a besoin de parler desonmal pour

qu'on

l'encourage

etqu'on le relève, il demande avant toute chose les distractions qu'offre le pays. Le garçon les lui ap¬

porte : il attend rarement qu'on

l'interroge;

il propose, il a intérêt à proposer. Il conseille les meilleurs

chevaux,

les meilleurs guides parce qu'il a passé généralement avec

les guides et'avec les cochers un petit traité pour la durée de la saison, et qu'il prélève sur les excursions un petit bénéfice, rémunération de ses sages conseils. -

C'est que, dans une ville d'eaux,

l'appât

du gain domine tout. C'est une industrie où la matièrepremièreest une ma¬

tière humaine. Lemaladeest unemarchandise. Chacun veut en tirer le meilleur parti et chacun spéculesur lui.

Cela donnesa

physionomie

àla ville d'eaux. Le genrede vie qu'on y mène reçoitsa forme de cette volonté. Nous nous en apercevrons aisément.

C'est une vérité banale que les meilleures

spéculations

sontcelles qui ont pour base et point de

départ

les vices des hommesou leurs habitudes de plaisir. Les phtisiques qu'on

envoie auxstations thermales sont généralement riches, du moins aisés. Ils ont souvent habité la ville. Ils sont la plu¬

part du temps jeunes. Comme on veut les retenir ou les engager à revenir dans la station, on cherche à la leurren¬

dreagréable. Etpour la leur rendre agréable, il faut leur procurer des distractions qui conviennent à dejeunes hom¬

mes. C'est à quoi l'on s'efforce. Aussi, toutes ces stations sont-elles dotées d'hôtels fastueux, decafés, et d'un casino, qui est une maison de jeu, une salle de danse et un

théâtre.

Cela est surtout pour la soirée. Pourlajournée,on exploite

le pays, c'est-à-dire qu'on y organise des excursions variées,

(20)

- 20

dont le but est plus ou

moins intéressant. Un pan de vieux

mur, qu'on

dénomme ruine historique, un arbre géant, un

pic, un

point de

vue, une

cascade, etc.

Ces excursions sont funestes et

la plupart du temps défen¬

dues

prudemment

par

le médecin.

«

On les leur a pourtant

bien recommandées à ces pauvres

poitrinaires, qui font une première entrée, si mélancolique, dans le cabinet de consul¬

tations, ces

précautions élémentaires. On leur a dit et fait

promettre

de rentrer

au

coucher du soleil, de résister à l'at¬

trait des longues

promenades, d'éviter la fatigue, une fraî¬

cheurtrop vive;

ils ont promis, de bonne foi certes, mais

qu'ils ont

vite oublié ! Bientôt ils éprouvent du mieux : leur

confiance

grandit

avec

le sentiment de leur relèvement, et,

bannissantles

appréhensions qui troublaient leur repos, ils

s'abandonnent

aventureusement à cette insouciance char¬

mante, mois poureux

trop osée, qu'Horace appelait « un bien

douxoreiller ». La déception ne

tarde guère. Que de fois j'ai

appris qu'après

une

promenade à cheval, au Sancy, un excur¬

sionniste indocile avait été

réveillé

par une

quinte de toux

suivie de crachements de sang !

Ou bien c'était le matin que

le voyageur

courbaturé et désenchanté retrouvait dans ses

crachats cettecoloration

ingrate, juste objet de

sa

profonde

antipathie.

» Comment aurais-je été

surpris de

ces

rechutes, moi qui

voyais quelquefois les joyeuses cavalcades revenir trempées

par un

orage? J'accorde qu'il est parfois monotone, si l'on

neveut pas

faire de promenade

en

voiture, de passer sa jour¬

née danslavallée, môme

à l'orée du bois, lorsqu'on sait

qu'une

ascension, de réalisation facile en apparence, vous

fera goûter

les charmes de nouveaux sites et les beautés

d'un panoramaque

chacun vante autour de vous. Et puis,

tout en essayant ses

forces

que

le médecin a sûrement

tort demettreen suspicion onaura

aussi quelque chose à

raconter aux heures attendues

de la causerie quotidienne.

Vousvous trompez,

chers

compagnons,

le mal veille et s'il a

pris

droit de cité chez vous, de longtemps vous ne pourrez

(21)

- 21

ébaucher*un projet, ni bâtirchâteauxenEspagne sans avoir à compter aveclui. Il est: nele tentez pas, une imprudence

vous condamnerait au repentir

.(*)

».

Tout ceci ne vaut rien dansun traitement sérieux. Qu'est-ce qu'un

phtisique

? Le mot le dit dans sa signification

étymo¬

logique. C'est un épuisé. Le traitement rationnel doit donc être d'écarter de sa vie toute cause

d'épuisement.

Il s'im¬

pose, au contraire, qu'il faut le fortifier par tous les moyens.

Or, ce n'est pas le moyen d'économiser les forces que de partir pour ces excursions qui durentquatreoucinq heures, où il faut marcher, ou tout aumoins monter à cheval ou en voiture sous un soleil accablant. Encore est-on générale¬

ment en nombreuse société. Il y a des moins malades ou même des gens bien portants qui entraînent les autres.

Est-ce doncun traitement rationnel etdoit-oncomprendre ainsi l'action vivifiante du grand air *?

Le soir arrive. Pour être malade, on n'a pasrenoncé à tout rapport avec le monde des vivants. Une cure est,par beau¬

coup de côtés, une

villégiature.

On y flirte. Les mères y con¬

duisentdes jeunesfilles dans l'espoirde trouver un mari. Et lesjeunes femmes y sont toujours nombreuses. Le moyen qu'un homme jeuneet seul ne leurprête pasquelque peu de

son attention ! Nouvelle cause de fatigues. Notre malade s'habille pourle dîner, il s'habillepour la soirée. Il parle, il s'efforce d'être brillant. Il va au Casino.

Voici l'endroit leplus dangereux. C'est ici que les causes

d'épuisement

sont innombrables. Est-ce le théâtre? La salle est pleine, la chaleur étouffante : excellentes conditions pour la congestion. « J'ai noté, dit le I)1'Pécholier, l'encombrement dans les salles de spectacles, où les veilles se prolongent.

J'ai admiré enfin de splendidescasinos ruisselant d'or et de

lumière,

où fermentent, au détriment des succès de la cure, les plus malsaines émotions, celles d'œillades savamment

(J) Dr Seney, Journal de thérapeutique, 1880.

(22)

22

provocatrices ». Une

attention soutenue de trois heures ne

manque pas de

produire

une

surexcitation nerveuse. Cette

surexcitation

épuise et entraine l'insomnie, autre cause d'épuisement. Et le pire, c'est l'atmosphère insuffisante et

viciée où s'enferment des malheureux qui

devraient tou¬

jours respirer

de l'air parfaitement

pur.

On sait

que

la rareté

et l'insuffisance del'air sont une descauses qui

engendrent

la phtisie

dans les villes

: «

Donnez-moi

un

marais, plus un

organisme

humain, et je

vous

rendrai

une

fièvre intermit¬

tente. Eh bien !donnez-moi unegrande

ville

avec son

hygiène dépravée

et

je

vous

rendrai

une

population de tuberculeux.

Tel refuserait avec horreurde boire de l'eau de Dégoût col¬

lecteur, qui respire sans

sourciller l'air d'une salle de

concert ou de théâtre, véritable égout aérien »

(Peter). Est-ce

la danse? Travail physique

considérable

au

bout duquel

bien souvent se trouve

l'hémoptysie. Est-ce le jeu? Nous

n'avons pas besoin

d'insister

sur

les émotions très pré¬

judiciables à la santé

qu'il engendre.

De touscôtés nous trouvons donc

l'épuisement physique.

Là n'estpourtant pas le

plus grand danger. Le bacille est ici

partout. On le

respire à pleins

poumons.

On

ne

pourrait

guère citer en France de

stations thermales où des précau¬

tions conformes à une

hygiène scientifique et raisonnée

aient été prises. Un

séjour de vingt-quatre heures dans

une

stationde tuberculeux suffit à s'en convaincre. Vous y ren¬

contrereztoujours lestypesde

malades des différents degrés.

A côtéde ceuxqui sont perdus sans

espoir,

ceux

qui sont

légèrement atteints etceux que

le mal terrible menace,/es

terrains bien

préparés. Rien n'est plus funeste

que

cette

promiscuité.

Ces stations gardent une vieille

renommée

que

la tradition

leur a conservée. Sans doute, les

premiers observateurs

eurent raison. Sans doute, les

premières expériences don¬

nèrent de bons résultats. Nous ne disons pas

qu'un vent de

folie souffla sur l'humanité, et que pendant

des années tout

le monde courut à ces endroits privilégiés sans

raison. Bien

(23)

- 23 -

que le

troupeau

humain soit souvent semblable à celui de

Panurge, ce serait par trop invraisemblable.

Mais ce qui donnait de bons résultats, dans telle et telle condition, peut très bien en donner de

contraires,

ces con¬

ditions étant changées. Qui peut nier l'influence du milieu ? Telle médication employée dans telle circonstance est bonne, alors qu'administrée dans tefle autre elle peut être détestable.

Lorsque

les eaux étaient fréquentées par un petit nombre de malades, lorsque quelques auberges ou plutôt

une auberge familialeservait à loger quelques rares voya¬

geurs,

lorsqu'il

n'y avait pas

l'encombrement,

ni toute cette exploitation industrielle qui change totalement la physiono¬

mie du lieu, les choses allaient tout autrement.

« A cette époque, dit le Dr Pécholier, autour des établisse¬

ments thermaux, d'ordinaire assez bien tenus, mais dont l'architecture n'avait pas exigé les dessinsd'un premier prix

de l'Ecole des Beaux-Arts, se groupaient, suivant

l'impor¬

tance de la station, un nombre plus ou moins considérable d'hôtels propres, mais modestes. Tout autour, les monta¬

gnes se montraient resplendissantes de fraîcheur ou ef¬

frayantes de grandeur sauvage. La cure des baigneurs était peu variée; elle ne réclamaitla présence que d'un petit nom¬

bre de médecins dont l'antichambre ne resplendissait point

de l'éclat de superbes laquais, mais qui avaient vieilli autour de leurbuvette, à laquelle ils accordaient une foi réfléchie.

Inutile pour le client de les voir souvent et de les attendre desjournées entières au milieu de salons magnifiques, où le luxen'empêchepas l'ennui. Après vingt ou vingt-cinq jours passés dans ces endroits bénis, la plupart des malades, dont la bourse n'avait pas été saignée à blanc, s'en allaient con¬

solés, réjouis,

soulagés,

parfois même guéris! »

Rien ne détruisait donc le bon effet du traitement, c'était la campagne dans toute sa

simplicité

et toute sa

rusticité.

Et l'habitant des villes passait d'une vie agitée, surmenée, épuisante, à une vie de repos champêtre, de calme. L'exis¬

tence monotone sans agitation, sans secousses de ces

(24)

24

paysans,

le reposait. Il

se

couchait

comme eux

et reprenait

des forces.

Mais aujourd'hui la vie moderne

tend à rendre semblable

le genre de vie des différentes

classes sociales. Pour

voyager jadis, il fallait être riche;

le prix d'un billet de première

classe est inférieuraujourd'hui

à

celui d'une

place de

coupé

dans une mauvaise diligence. Etl'on emploie

à faire

sa cure letemps que l'on eut mis

autrefois à faire le

voyage.

Aussi le

nombre desmalades dans les stations thermales s'est accru dans desproportions inouïes.

Tel village qui comptait, il

y a

un siècle, une vingtaine de maisons est une

petite ville dont

la population est

triplée

ou

quadruplée à la saison. Cette

ag¬

glomération serait

déjà d'une mauvaise hygiène. Mais de

quoi est composée cette

foule? Fait-on

un

choix parmi

ces malades? Y a-t-il un contrôle? Lesdivise-t-on par

catégories?

Fait-on comme dans tous les endroits où de nombreux ani¬

maux sont parqués? Met-on

les plus forts d'un côté et les

plus faibles

de l'autre?

Et

ensemble

ceux

qui sont atteints de

la même maladie et au même degré? Ce serait rationnel.

Mais Tonen a bien garde. Tout

s'y

oppose. Une

station ther¬

male est avant tout une spéculation

commerciale.

Il

faut

donc attirer laclientèle la plus nombreuse.

Aussi, bien loin

de dire : « Il fautnous envoyer tels malades et non tels au¬

tres, les habitants disent : Nos eauxguérissent

de

tousmaux, il n'est besoin que d'y venir. »

Et l'on yvient, on s'expose

à

tous

les dangers. Un seul

pro¬

tecteur resterait: le médecin! Mais il y a les bons et

les

mauvais médecins, les consciencieux et les

charlatans.

Nous

voulons bien croire, pour

l'honneur

de

la corporation,

que les derniers sont rares. Ils existent cependant. Ecoutez

ceci

:

« J'ai vu je ne dirai certes pas

un tout petit

maigrot

confrère, alerte comme un levrier et vraiment doué

du ciel,

nomme Mme Saqui, la

célèbre

danseuse

de corde

qui a émer¬

veillénos pères, et l'acrobate

Blondin: le sourire

constam¬

ment auxlèvres, toujours sautillant, toujours courant; tou¬

jours bondissant, toujours ahuri, faisant au moins

cinq

(25)

25

saluts à la foisdans cinq directions

différentes,

au milieu de la foule des

baigneurs

émerveillés qui remplissaient les vastes

thermes,

où il était venu chercher ses moyens d'exis¬

tence, encombrant

l'espace

desa minuscule personne, « par¬

tout ». ainsi quejadisLouis XIVdans son camp au siège de Lille, attentif au moindre coup de sonnette ou au moindre appel des garçonsde service, il se précipitaitd'unebaignoire

à une

douche,

d'une douche à une buvette, d'une buvette à

une étuve, de l'étuveà une nouvelle

baignoire,

véritable in¬

carnation du «médecin volant » de Molière.Ce n'étaitpas son

bagage scientifique

qui pouvait l'alourdir ! Oh ! non ; mais il faisait recette, fortement recette

(l).

Etle médecin consciencieux

maintenant,

que peut-il faire?

11 est trop souvent un

prisonnier,

prisonnier des habitants,

et. qu'il le veuilleou non, leur complice. 11 ferait beau que l'un d'euxtint à ses malades ce langage : Prenez garde, à

vos relations d'abord. Avant de vous lier, examinez votre voisin de table. Il est peut-être celui qui vous contaminera.

Sachez d'où sortent vos draps etqui a reposé sur le matelas qu'on vousdestine. N'entrez pas dans votre chambre qu'elle n'aitété désinfectée selon les

règles

de l'artetdanssesmoin¬

dres coins. Sortez peu, ou mieux pas du tout. Des

phtisiques

au troisième

degré

errent lamentablement et s'étendent sous les ombrages du parc. Ilscrachent par terre, et la poussière

est souillée. N'allez pas au café, fuyez le casino, fuyez...

Il est probableque le malade aurait déjà repris le train.

Etle docteur serait prudent de lesuivre, s'il nevoulait courir le risque de finir, nouvel Orphée, entre les mains furieuses de Bacchantesdecabaret.

Ne blâmons pas trop le médecin. On lui envoie le malade.

Il le soigne de son mieux et avec toute l'ardeurd'une convic¬

tion sincère. Il ordonne les eaux, parfois

beaucoup

trop d'eau, sous trop de formes. Mais le malade veut qu'on s'oc¬

cupe de lui etqu'on

l'occupe.

Un éminent praticien nousdi- (') Péchoi.ikr, Gcis. des Se. médde Montpellier.

(26)

26

sait unjour, en

sortant d'une visite

: «

Que j'ai

eu

de peine

et quej'ai

mis de temps

pour ne pas

faire d'ordonnance.

Encore Iaissé-je derrière

moi

un

mécontent

».

Le malade est

heureuxet tranquille, en

effet, quand il est occupé à des re¬

mèdes. Un remède, c'estl'espoir

pendant vingt-quatre heu¬

res, l'espoir que

la guérison est

au

bout,

que

la souffrance

passera. Tous ceux

qui souffrent sont disposés à croire au

miracle qui changera

leur vie, et même dans l'imagination

des cultivés le médecin se dresse comme un mage.

Ce fut

sa formeprimitive

d'ailleurs. Le guérisseur était sacré : Hip-

pocrate

fut

un

dieu.

Ainsi tous les maladesveulent des

remèdes.

Le

malade

qui

vient

auxeaux

est bien plus exigeant. On l'oblige à se

déplacer

pendant vingt

ou

vingt-cinq jours. Il faut qu'il en

profite.

Il réclame

un

traitement sérieux, tout désappointé

quand on

le fait boire seulement, ignorant le grand adage

clinique des

anciens hydrologistes

: «

La

cure

minérale doit

être précédée et

surtout suivie d'une suspension de tout re¬

mède. Il faut laisseropérer

les

eaux, ne

point troubler l'évo¬

lution deleurs effetspar une

médication active,

se

contenter

de prescrire

quelques

tasses

de lait

ou

de faire manger quel¬

ques

raisins

».

Le malade est toujours

sur

le point de dire :

« Que

çà, c'était bien la peine

».

Et il jalouse son voisin, qui

passe les

trois quarts de la journée à l'établissement.

L'établissement! sera-ce le lieu de

guérison?

Sera-ce

le

re¬

fuge contre tous

les

maux

qui

nous

menacent? Trouverons-

nous un peu

d'hygiène? Est-ce le

royaume

du médecin?

Hélas! non. C'est l'exploitation

d'une Compagnie à ferme.

Uncommerçant

n'est

pas

obligé d'entrer dans des considé¬

rationshumanitaires, surtout

quand

ce

commerçant est

un êtrecollectif et anonyme, une

Compagnie. On peut bien dire

de lui, sans métaphore,

qu'il n'a

pas

d'entrailles. Il lui reste

toutauplus desyeux pour

lire le

cours

des actions. Quant au

propriétaire,

il est content si l'on

consomme

beaucoup. Nous

ne trouvons guère de termes plus

convenables

que ces

ter¬

mescommerciaux. Ils viennent naturellement aux

lèvres

: et l'on consomme.

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