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La sophistique, une manière de vivre?

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Texte intégral

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Problèmes, Renaissances, Usages

 

8 | 2008

Les anciens sophistes

La sophistique, une manière de vivre?

Michel Narcy

Édition électronique

URL : https://journals.openedition.org/philosant/4579 DOI : 10.4000/philosant.4579

ISSN : 2648-2789 Éditeur

Éditions Vrin Édition imprimée

Date de publication : 3 décembre 2008 Pagination : 115-155

ISBN : 978-2-7574-0076-0 ISSN : 1634-4561 Référence électronique

Michel Narcy, « La sophistique, une manière de vivre? », Philosophie antique [En ligne], 8 | 2008, mis en ligne le 01 juillet 2021, consulté le 01 juillet 2021. URL : http://journals.openedition.org/philosant/4579 ; DOI : https://doi.org/10.4000/philosant.4579

La revue Philosophie antique est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.

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Philosophie antique, n° 8 (2008), 115-135

LA SOPHISTIQUE, UNE MANIÈRE DE VIVRE ? Michel NARCY

Centre Jean Pépin, CNRS, Villejuif

RÉSUMÉ. Le point de départ de cet article est la question de savoir quel con- tenu donner à la prohairesis tou biou qui distingue, selon Aristote (Metaph. G, 2, 1004b24-25), la philosophie de la sophistique. Après avoir montré qu’il s’agit du stéréotype conjuguant la définition platonicienne du sophiste comme fabricant de simulacres et la pratique censée être propre aux sophistes, de faire payer leurs leçons, on se demande si, pourquoi et à quelles conditions la pratique et l’ensei- gnement de la philosophie par Socrate et ses successeurs échappaient à cette double caractérisation.

SUMMARY. In Metaph. G, 2, 1004b24-25, Aristotle states that the difference between philosophy and sophistics is their prohairesis tou biou : what does really mean this state- ment ? I hold that it refers to nothing else than the stereotype which combines the Platonic definition of the Sophist as a semblance-maker with the practice of teaching for pay that was supposed to be specific to the Sophists. Thus I question whether, why and under which condi- tions Socrates and his followers succeeded in philosophizing and teaching philosophy without being characterized in the same way.

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Philosophie antique, n° 8 (2008), 115-135 I

Dans un passage fameux de la Métaphysique (G, 2, 1004b24-25), Aris- tote écrit que la philosophie se distingue de la sophistique par la pro- hairesis tou biou, le choix du mode de vie. Formule bien faite pour confor- ter ceux qui, à la suite de Pierre Hadot, tiennent que « la philosophie antique est avant tout une manière de vivre »1. En quoi consiste, cepen- dant, cette manière de vivre et en quoi s’en distingue celle dont la sophis- tique fait le choix, Aristote ne le dit pas, du moins en cet endroit et, à vrai dire, on doit même se demander quelle est l’incidence, sur la ques- tion débattue en cet endroit, d’une différence de choix de vie entre philo- sophie et sophistique. L’objectif du passage n’est en effet pas du tout de démontrer, comme par exemple au livre X de l’Éthique à Nicomaque, l’excellence d’une vie consacrée à la theoria, mais d’attester que la science de l’être en tant qu’être appartient bien en propre à la philosophie. De façon assez paradoxale, ce sont les dialecticiens et les sophistes qui se voient appelés à en témoigner, et c’est dans ce contexte qu’est invoquée de façon quelque peu inopinée une différence de choix de vie entre philosophie et sophistique :

Tw'/ o[nti h|/ o]n e[sti tina; i[dia, kai; tau't ejsti; peri; w|n tou' filo- sovfou ejpiskevyasqai to; ajlhqev". Shmei'on dev: oiJ ga;r dialektikoi;

kai; sofistai; to; aujto; me;n uJpoduvontai sch'ma tw'/ filosovfw/: hJ ga;r sofistikh; fainomevnh movnon sofiva ejstiv, kai; oiJ dialektikoi; dia- levgontai peri; aJpavntwn, koino;n de; pa'si to; o[n ejstin: dialevgontai de; peri; touvtwn dh'lon o{ti dia; to; th'" filosofiva" ei\nai aujta; oij- kei'a. Peri; me;n ga;r to; aujto; gevno" strevfetai hJ sofistikh; kai; hJ dialektikh; th/' filosofiva/, ajlla; diafevrei th'" me;n tw'/ trovpw/ th'"

dunavmew", th'" de; tou' bivou th'/ proairevsei: e[sti de; hJ dialektikh;

peirastikh; peri; w|n hJ filosofiva gnwristikhv, hJ de; sofistikh; fai- nomevnh, ou\sa d ou[.

1. Hadot 2002, p. 296. La phrase est extraite de « La philosophie comme manière de vivre », publié pour la première fois dans l’Annuaire du Collège de France, 1984-1985, p. 477- 487.

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À l’être en tant qu’être appartiennent certaines propriétés, et c’est à leur sujet qu’il appartient au philosophe d’examiner le vrai. Il y en a une preuve : dialecticiens et sophistes, en effet, d’une part revêtent la même forme que le philosophe : la sophistique, en effet, est une sagesse appa- rente seulement, et les dialecticiens débattent de tout sans exception, or ce qui est commun à toutes choses, c’est l’être ; d’autre part, s’ils débat- tent de ces propriétés, c’est évidemment parce qu’elles sont propres à la philosophie. La sophistique et la dialectique, en effet, tournent autour du même genre que la philosophie, mais <celle-ci> diffère de l’une par l’o- rientation de sa capacité, et de l’autre par le choix du mode de vie ; et la dialectique met à l’épreuve à propos des objets que la philosophie fait connaître, tandis que la sophistique paraît, mais n’est pas. (Aristote, Metaph. G, 2, 1004b15-262.)

La preuve, donc, que c’est au philosophe qu’il appartient de recher- cher la vérité de l’être en tant qu’être est apparemment la suivante : puis- que l’être est l’objet auquel s’attachent ces imitations de philosophie que sont sophistique et dialectique, c’est donc aussi l’objet auquel s’attache leur modèle, à savoir la philosophie. Mais l’enchaînement des idées n’est pas très clair : si dialecticiens et sophistes ont en commun de se déguiser en philosophes, on ne comprend pas pourquoi seule la sophistique est qualifiée de sagesse apparente ; on ne comprend pas non plus pourquoi seuls, semble-t-il, les dialecticiens sont dits débattre de tout, alors que c’était chez Platon la spécialité déclarée des sophistes3. Il est vrai que, si l’on adopte, comme ci-dessus, la ponctuation de Bonitz (un point en haut après to; o[n ejstin, 1004b20), on comprend qu’à to; aujto; me;n uJpoduvontai sch'ma (1004b18) répond, par delà l’incise ainsi délimitée (hJ ga;r sofistikh;to; o[n ejstin), dialevgontai de; (1004b21) et que les deux verbes ont donc en commun pour sujets oiJ dialektikoi; kai;

sofistai;4;. Mais si les sophistes sont, de pair avec les dialecticiens, ceux qui débattent des propriétés de l’être en tant qu’être, on comprend d’autant moins pourquoi, dans l’incise, la remarque que c’est l’être qui est commun à toutes choses (1004b20) paraît ne viser que les dialecticiens.

2. On rapproche volontiers de ce texte le passage de la Rhétorique (I, 1, 1355b17-18) où il est dit que « la sophistique n’est pas dans la capacité (dynamis) mais dans la prohairesis (traduit ici généralement par “intention”) ». Mais cette intention est généralement com- prise comme celle de mal user de la capacité (rhétorique ou dialectique), non comme un

« choix de vie ». Il en va de même des Réfutations sophistiques, 1, 165a30-31 (voir Dorion 1995, n. 13 p. 212).

3. Cf. Platon, Hipp. maj. 285c-286a, Hipp. min. 363c7-d4, Gorg. 456a7-c7, Soph. 232e2- 4.

4. Accessoirement, cette ponctuation a également l’avantage de donner à touvtwn (1004b21) et à aujta; (1004b22) leur seul antécédent logiquement possible, à savoir tina;

i[dia (1024b15-16).

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Sensible à la difficulté, Bonitz estime que l’auteur n’a pas mis les phrases dans le bon ordre : après hJ ga;r sofistikh; fainomevnh movnon sofiva ejstiv (« car la sophistique est une sagesse apparente seulement », 1004b18-19), il aurait dû ajouter kai; hJ dialektikh; peirastikhv (« et la dialectique, une mise à l’épreuve ») ; après avoir déclaré que « les dialecti- ciens débattent de tout sans exception » (oiJ dialektikoi; dialevgontai peri; aJpavntwn, 1004b19-20), il aurait dû en dire autant des sophistes5. C’est probablement ce qui a incité Christ6 à proposer la suppression des mots hJ ga;r sofistikh; fainomevnh movnon sofiva ejstiv, kai; oiJ dia- lektikoi (1004b18-19) et à ajouter un de; après le premier dialevgontai (1004b20), lisant ainsi :

oiJ ga;r dialektikoi; kai; sofistai; to; aujto; me;n uJpoduvontai sch'ma tw'/ filosovfw/, dialevgontai de; peri; aJpavntwn.

Dialecticiens et sophistes revêtent la même forme que le philosophe et débattent de tout sans exception.

Cette correction, que n’ont retenue ni Ross ni Jaeger, avait, comme l’exégèse de Bonitz, l’avantage d’opposer ensemble à leur modèle ces imitatrices de la philosophie que sont dialectique et sophistique, et d’évi- ter de les distinguer prématurément selon un critère apparemment sans rapport avec celui qu’Aristote fait intervenir dans la suite. On objectera que, de toute façon, la sophistique est qualifiée d’apparente, mais non réelle, à la fin du passage (1004b26). Mais précisément le sens de cette dernière proposition n’est pas clair : la sophistique paraît, mais n’est pas… quoi ? Philosophie, ou dialectique7 ?

Alexandre d’Aphrodise8 s’est posé la question, puisque, de cette proposition, il présente deux interprétations possibles :

5. Bonitz 1849, p. 182.

6. Christ 1886.

7. Quatre solutions s’offrent à qui veut expliciter le sens de la proposition : donner pour attribut à fainomevnh, ou\sa d ou[ (1) sofiva, qui figure dans le parallèle offert par 1004b18-19, « la sophistique est une sagesse apparente seulement (fainomevnh movnon sofiva) » (Bonitz 1890, Calvo Martínez 1994) ; (2) filosofiva, repris de l’opposition qui précède immédiatement entre la dialectique qui met à l’épreuve et la philosophie qui fait connaître (Ross 1908 [1984], Tricot 1962) ; (3) gnwristikhv, épithète de filosofiva dans ladite opposition (Viano 1974, Duminil-Jaulin 2008) ; (4) peirastikh;, épithète de dialektikhv dans la même opposition : Hecquet-Devienne 2008 est à ma connaissance la seule à retenir cette hypothèse, mais conjointement avec la précédente : « la sophistique

<met à l’épreuve et fait connaître> en apparence, pas en réalité ».

8. Qui ne commente d’ailleurs pas les mots hJ ga;r sofistikh; fainomevnh movnon sofiva ejstiv (1004b18-19) : les lisait-il ?

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th;n de; sofistikh;n fainomevnhn fhsivn, ou\san de; ou[, h[toi dialekti- kh;n fainomevnhn, o{ti ejk fainomevnwn ejndovxwn, h] fainomevnhn sofivan, ou\san d ou[, ei[ g ejsti;n ajpo; fainomevnh" sofiva" crhmatistikhv.

Il (scil. Aristote) dit que la sophistique est une apparence sans réalité : soit une apparence de dialectique, parce que les endoxa d’où elle part sont apparents, soit une apparence de sagesse sans réalité, puisqu’en fait elle gagne de l’argent à partir d’une apparence de sagesse. (Alex. Aphrod. In Metaph. 260, 26-29 Hayduck.)

L’idée que la sophistique est une fausse dialectique vient en premier, peut-être parce que c’est celle qu’Alexandre trouve la plus intéressante9 ; c’est d’ailleurs la seule que retiendra Syrianus10. Cette idée s’appuie, chez Alexandre, sur une raison technique : le vice d’un sophisme réside dans ses prémisses, qui ne sont pas d’authentiques endoxa ; mais l’autre pos- sibilité, à savoir que la sophistique soit une pseudo-philosophie, est d’autant moins exclue qu’elle peut s’autoriser des Réfutations sophistiques, qu’Alexandre se contente tout simplement ici de citer :

e[sti ga;r hJ sofistikh; fainomevnh sofiva ou\sa d ou[, kai; oJ sofis- th;" crhmatisth;" ajpo; fainomevnh" sofiva" ajll oujk ou[sh".

Car la sophistique est une apparence de sagesse sans réalité, et le sophiste quelqu’un qui tire de l’argent d’une apparence de sagesse sans réalité.

(Arist. SE 1, 165a21-23.)

Peut-être la première hypothèse a-t-elle la préférence d’Alexandre, mais seule la seconde permet de donner un contenu à la différence allé- guée par Aristote entre philosophie et sophistique, à savoir le choix du genre de vie11. L’accusation lancée contre le sophiste de n’avoir de sa- gesse qu’apparente, en effet, n’implique pas par elle-même le choix d’un

9. Cf. Humbert 1954, § 722, Remarque (p. 410) : « En renforçant un premier h] au moyen de toi, l’attique a trouvé le moyen, non seulement de donner plus de vigueur à l’expression, mais aussi d’insister sur le plus intéressant des deux termes de l’alternative. »

10. Cf. Syrianus, In Metaph. 63, 28-32 Kroll.

11. Aussi bien Syrianus, qui ne retient que la première hypothèse formulée par Alexandre (la sophistique est une pseudo-dialectique), ne parle-t-il plus d’une différence entre sophistique et philosophie, et encore moins d’une différence de choix de vie : « la dialectique a une meilleure intention (proaivresi") que la sophistique », à savoir celle de procurer aux élèves un entraînement (tw'n sunovntwn peirastikov" ejstin oJ dialek- tikov"), alors que la sophistique, « incapable d’en faire autant (oujd aujto; tou'to dunavmeno"

poiei'n) », doit se contenter de l’imiter : la perspective est celle de Rhet. I, 1 ou des der- nières lignes de SE 1 (cf. supra n. 2) plutôt que de Metaph. G, 2. On peut noter également que, le dialecticien se distinguant du philosophe par sa méthode (peirastikov"... ouj didaskalikov", w{sper oJ filovsofo") et non par le contenu (hJ dialektikh;... filovsofon e[cei th;n gnw'sin), le critère technique retenu par Alexandre pour distinguer dialectique et sophistique, à savoir le caractère endoxal ou non des prémisses, disparaît également.

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genre de vie plutôt que d’un autre. Ce qui permet de passer d’une sagesse réduite à l’apparence à l’idée d’un genre de vie propre au sophiste, c’est l’affirmation – ou le constat, puisqu’en effet les sophistes faisaient payer leurs leçons – que, de cette sagesse tenue pour uniquement apparente, le sophiste « tire de l’argent ».

Bien entendu, on a là l’écho de la définition du sophiste commune à Platon12 (Soph. 231d3 : « chasseur appointé de jeunes gens riches, nevwn kai; plousivwn e[mmisqo" qhreuthv") » et à Xénophon (L’art de la chasse, XIII, 9 : « les sophistes font la chasse aux riches et aux jeunes gens, plousivou" kai; nevou" qhrw'ntai) ». Cette définition, chez Platon, n’est pas propre au Sophiste : on la trouve déjà dans le Théétète, où Socrate évoque les embarras où serait jeté Théétète s’il avait affaire à un peltas- tiko;" ajnh;r misqofovro" ejn lovgoi", « un homme qui prend salaire dans les discours comme un soldat de métier » (165d6).

Sous une forme plus proche du Sophiste, mais cette fois pratiquement en forme d’accusation, on la trouve aussi dans le Protagoras. Certes, Socrate est, dans ce dialogue, moins injurieux que dans les Mémorables de Xénophon, où il traite les sophistes de prostitués13. Il n’en explique pas moins au jeune Hippocrate qu’un sophiste, c’est avant tout un commer- çant, qui fait l’article pour sa marchandise, non pas dans l’idée qu’elle sera salutaire à ceux qui l’achèteront, mais parce que, comme tout com- merçant, son objectif est de faire aller son commerce, donc de vendre14 : il rentre bien sous l’appellation de crhmatisth;" que nous avons trouvée chez Aristote. Mais Socrate, lui, au lieu d’employer ce terme, désigne le sophiste sous le nom de négociant (e[mporo") ou de détaillant (kavph- lo")15. Ce sont les termes que nous retrouverons dans les deuxième et

12. Dorion 1995 (p. 210, n. 10 ad 165a23) émet là-dessus des réserves, arguant qu’Aristote, sous le nom de sophistes, vise « probablement les Mégariques » alors qu’il n’emploie jamais ce terme pour désigner les sophistes de la première génération, sur lesquels son jugement est plus nuancé que celui de Platon. Mais on ne voit pas bien comment Aristote pourrait faire passer les mégariques pour des money-makers. Les témoi- gnages invoqués par Dorion à ce sujet (ibid. p. 51 n. 2) ou bien ne sont pas pertinents (si Alexinos [cf. fr. 75 Döring] faisait payer ses leçons, la chronologie empêche de croire que ce soit à lui que pense Aristote), ou bien ne donnent qu’une base textuellement fragile à son hypothèse (voir le fr. 57 Döring, avec le commentaire de Muller 1985, p. 112). L’ar- gument selon lequel, si Euthydème et Dionysodore sont des mégariques, l’Euthydème de Platon confirme que les mégariques dispensaient un enseignement rétribué (Dorion 1995, p. 51 n. 2) n’est pas probant : à supposer que les deux frères soient effectivement des mégariques, le fait, pour Platon, de les traiter de sophistes entraînait ipso facto (puisque c’était la caractéristique commune des sophistes) de leur attribuer la pratique de l’ensei- gnement rétribué (cf. Muller 1985 p. 175, à propos du fr. 206 Döring concernant Bryson).

13. Xen. Mem. I, 6, 13.

14. Plat. Prot. 313c4-314b4.

15. Ibid. 313c5, d1, d6, 314a4.

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troisième divisions du Sophiste : la deuxième partage l’art du commerce (metablhtikhv) en vente au détail (kaphlikhv) et grand négoce (ejm- porikhv)16, la troisième, en kaphlikovn et aujtopolikovn, revente par un intermédiaire ou vente en direct du producteur17. Le « chasseur appointé de jeunes gens riches », rappelons-le, c’était l’aboutissement de la pre- mière division. Dans toutes ces divisions, il est donc bien question d’argent et, de celui qui fait l’objet de la troisième, l’Étranger dit bien explicitement qu’« il s’est promis d’en vivre (scil. de son commerce) », ejk touvtou to; zh'n proutavxato18. S’il n’est pas formellement question d’une prohairesis tou biou, ce qui est mis en avant est bien l’intention (pro- taxis) de vivre d’un commerce. Rien d’étonnant par conséquent à ce que la division suivante – la quatrième – débouche sur la définition aristotéli- cienne de la sophistique comme chrématistique (226a1, to; crhmatisti- ko;n gevno").

Ne nous étonnons donc pas, mais soyons attentifs à la façon dont cette définition-là est produite. Il ne s’agit plus de commerce, mais de lutte ; une lutte où s’échangent non pas des coups, mais des paroles : la dispute. De division en division, on parvient au genre éristique, et c’est en le divisant encore en deux qu’on va découvrir une fois de plus le sophiste. Quelqu’un qui pratique ce type de discussion qui a reçu le nom d’éristique – de quoi il s’agit, je vais y revenir – sera sophiste ou non suivant qu’il y gagne ou qu’il y perd de l’argent : le sophiste, concluent l’Étranger et Théétète, c’est « celui qui gagne de l’argent à partir des disputes privées (ajpo; tw'n ijdiwtikw'n ejrivdwn crhmatizovmenon) »19.

Pourquoi des disputes privées ? Remontons un peu en arrière : ayant isolé, comme forme de lutte, la dispute (ajmfisbhthtikovn), l’Étranger en a distingué deux formes : l’une, qui oppose en public discours à discours sur des questions de justice et d’injustice, c’est la dispute judiciaire (dika- nikovn) ; l’autre, qui se déroule en privé, et qui procède par questions et réponses, c’est l’antilogique (ajntilogikovn). L’antilogique à son tour prend deux formes, l’une « qui a pour objet les contrats, mais procède au hasard et sans technicité (eijkh'/ de; kai; ajtevcnw") » et à laquelle on ne donne pas de nom, l’autre « qui dispute de façon générale, dans les règles de l’art, du juste et de l’injuste eux-mêmes, etc. (to; dev ge e[ntecnon, kai;

peri; dikaivwn aujtw'n kai; ajdivkwn kai; peri; tw'n a[llwn o{lw" ajmfis- bhtou'n) » : c’est l’éristique20. Or ce n’est qu’au sein de ce dernier eidos, l’éristique, que va s’opérer, je l’ai dit, la division entre sophiste et non-

16. Plat. Soph. 223d6-11.

17. Ibid. 224d4-e4.

18. Ibid. 224d4-5.

19. Ibid. 225e1-2.

20. Plat. Soph. 225b13-c9.

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sophiste (l’Étranger et Théétète ne lui trouvent d’autre nom que bavard), le sophiste étant celui qui gagne de l’argent à partir de disputes privées, et le non-sophiste, celui qui, pratiquant des disputes du même genre sur les mêmes sujets, y perd au contraire de l’argent.

Qu’ils y gagnent ou y perdent de l’argent, le sophiste et le bavard, donc, ont en commun de pratiquer l’éristique, cette forme de discussion privée qui se fait selon des règles et qui, au lieu de porter sur des contrats (respectés ou non, peut-on supposer, ou à conclure), porte sur le juste et l’injuste eux-mêmes. Sophiste et bavard ne se distinguent pas par le type de questions qu’ils agitent, mais par le profit qu’ils en tirent ou non.

Or cette distinction, entre des discussions à propos de contrats et des discussions à propos du juste et de l’injuste en général, ne peut pas ne pas évoquer la distinction faite par Socrate au centre du Théétète entre celui qui dispute de torts subis ou commis, de la question de savoir si le roi, ou celui qui possède beaucoup d’or, est heureux, et celui qui discute de la justice et de l’injustice en soi (aujth'" dikaiosuvnh" te kai; ajdi- kiva"), de la royauté ou du bonheur et du malheur humains en général, de la façon dont l’homme doit posséder l’un, échapper à l’autre21. On a donc la même distinction dans le Théétète et dans le Sophiste, dans la bouche de Socrate et dans celle de l’Étranger. La différence, à première vue déroutante, c’est que celui que l’Étranger nomme éristique, Socrate, dans le Théétète, le nomme philosophe (o}n dh; filovsofon kalei'", 175 e1). C’est donc au sein de ce que Socrate appelle philosophie que l’Étran- ger pratique sa division entre sophiste et non-sophiste : tous deux pour- suivent le même genre de discussions sur les mêmes sujets ; en d’autres termes, à s’en tenir à la description qu’en donne l’Étranger, ils ne corres- pondent pas moins l’un que l’autre à celle que donne, dans le Théétète, Socrate d’un philosophe : se livrant au même genre d’occupation, tout ce qui les sépare, au terme de la quatrième division, c’est d’y gagner ou d’y perdre de l’argent. Le sophiste n’est donc rien d’autre, aux yeux de l’Étranger, que l’une des deux espèces de ce que Socrate appelle philo- sophe, et il paraît ne se distinguer, toujours aux yeux de l’Étranger, par aucun autre trait que le fait de gagner de l’argent22. Concluons sur ce point : le sophiste, tel que Platon le définit, par la bouche de l’Étranger, dans le dialogue consacré à cette tâche, c’est un philosophe qui gagne de l’argent ; si nous voulons retrouver la distinction aristotélicienne, non pas entre deux philosophes, mais entre philosophe et sophiste, nous dirons qu’à l’inverse un philosophe – le bavard de l’Étranger –, c’est un sophiste qui n’en gagne pas – ou pire, selon l’Étranger : qui en perd.

21. Cf. Plat. Theaet. 175b8-c8.

22. Cf. Narcy 2007, p. 200-201.

(11)

Un premier résultat de cette analyse, c’est de mettre en évidence, dans le milieu socratico-platonicien – auquel, dans le cas présent, se rattache de toute évidence Aristote – l’existence d’une doctrine constante selon laquelle ce qui opposait philosophes et sophistes, c’était en premier lieu leur rapport à l’argent.

II

Aristote aussi bien que Platon, objectera-t-on, ne se contentaient pas de reprocher aux sophistes de tirer profit de leur savoir ; c’était pour eux une doctrine non moins constante que les sophistes ne faisaient étalage, en fait de savoir ou de sagesse (sophia), que de faux-semblants : illusion- nistes aux yeux de l’Étranger du Sophiste23, se targuant d’une sagesse apparente mais non réelle (fainomevnh, ou\sa d ou[), selon la formule récurrente d’Aristote24.

Abstraction faite de la difficulté où l’affirmation que ce que produit le sophiste « paraît mais n’est pas » jette immédiatement l’Étranger25 – dif- ficulté métaphysique, certes, mais qui dresse un obstacle de taille devant l’allégation que le sophiste n’est qu’un illusionniste –, je répondrai que, chez l’Athénien aussi bien que chez le Stagirite, ce n’est que dans un second temps que le sophiste est qualifié d’illusionniste : du Protagoras aux Réfutations sophistiques, le premier trait par lequel est caractérisé le sophiste, c’est qu’il est un crhmatisthv", un money-maker ; et ensuite seulement, un artiste de la fantastikhv, un illusionniste. Allons plus loin : la qualité d’illusionniste du sophiste est une conséquence qu’Aristote, et Platon avant lui, tirent de l’aspect mercantile de sa profession ; c’est parce que le sophiste fait de son savoir sa source de revenus (ou de profits) que son savoir est illusoire. Inutile de revenir sur la conversation préliminaire de Socrate avec Hippocrate dans le Protagoras, où Socrate, décrivant le so- phiste comme un commerçant, motive sa propre intervention auprès de Protagoras par la nécessité de s’assurer de la qualité de la marchandise, ce qui revient à présupposer que là où il y a commerce, plane par le fait même le soupçon de tromperie sur la marchandise. Avec plus de

23. Cf. Plat. Soph. 236c3-4 : « L’art qui produit une illusion (favntasma) au lieu d’une copie, n’est-ce pas “illusionisme” (fantastikhv) que nous l’appellerions le plus exac- tement ? »

24. Aux passages déjà cités (Metaph. G, 2, 1004b26 ; SE 1, 165a21-23), on peut joindre SE 11, 171b27-29.

25. « Cette expression, “paraître et sembler mais n’être pas” (to; ga;r faivnesqai tou'to kai; dokei'n, ei\nai de; mhv)… tout cela est plein de difficulté. » (Plat. Soph. 236e1- 3.) Comme le montre son emploi récurrent de la même formule pour qualifier le

« savoir » des sophistes, Aristote, lui, ne semble y voir aucune difficulté. Voir là-dessus les remarques de Narcy 1991, p. 420-428.

(12)

concision, le passage des Réfutations sophistiques cité par Alexandre (Arist.

SE 1, 165a21-23), si on le replace dans son contexte, montre comment la qualité de faux savant est inférée de la pratique consistant à enseigner contre rétribution :

jEpei; d ejstiv tisi ma'llon pro; e[rgou to; dokei'n ei\nai sofoi'" h] to;

ei\nai kai; mh; dokei'n (e[sti ga;r hJ sofistikh; fainomevnh sofiva ou\sa d ou[, kai; oJ sofisth;" crhmatisth;" ajpo; fainomevnh" sofiva" ajll oujk ou[sh"), dh'lon o{ti ajnagkai'on touvtoi" kai; tou' sofou' e[rgon dokei'n poiei'n, ma'llon h] poiei'n kai; mh; dokei'n.

Puisqu’il est pour certains plus profitable de paraître être savants que de l’être sans le paraître (car la sophistique est une apparence de sagesse sans réalité, et le sophiste quelqu’un qui tire de l’argent d’une apparence de sagesse sans réalité), il leur est évidemment nécessaire de paraître aussi faire œuvre de savant plutôt que de le faire sans le paraître. (Arist. SE 1, 165a19-24.)

Si l’on ne tient pas compte de la parenthèse, il semble ne s’agir que d’une observation de sens commun. En l’absence, en effet, d’institutions publiques d’enseignement, un enseignement payant suppose l’existence d’un public disposé à payer pour le recevoir ; Aristote a donc raison d’écrire que « pour certains (tisi) » – ceux, peut-on penser, qui offrent un tel enseignement – il est « plus profitable » (ma'llon pro; e[rgou) de paraître savants plutôt que de l’être sans le paraître : à qui veut tirer profit de son savoir, rien ne sert d’être savant si cela ne se voit ou ne se sait pas, autrement dit, si ce savoir ne connaît aucune publicité. C’est donc à bon droit qu’Aristote observe qu’à ceux-là il est nécessaire, lorsqu’ils font

« œuvre de savants », qu’on voie qu’ils le font, autrement dit, de « paraître le faire plutôt que de le faire sans le paraître », sans que cela se voie. Mais, dans ce raisonnement qui n’est après tout que réaliste, Aristote insère une parenthèse qui en modifie considérablement la teneur. Non seule- ment il y précise que ceux dont il parle sont en réalité les sophistes – ce qui se laissait deviner du fait que ce sont des gens qui tirent profit et ont besoin de paraître savants et non de l’être seulement –, mais il ajoute que ce dont les sophistes tirent profit, ce n’est pas seulement de paraître savants, de donner publicité à leur savoir, mais de paraître savants sans l’être – implication absente de la phrase principale26. Autrement dit, de l’idée que la publicité est nécessaire à qui veut « tirer de l’argent » ou,

26. L’implication suppose une alternative exclusive entre paraître savant sans l’être et l’être sans le paraître, alternative aussi forcée que celle du livre II de la République (360d8- 362c8) entre le juste et l’injuste parfaits : à aucun moment n’est envisagée l’hypothèse que le sophiste soit quelqu’un qui à la fois paraît et est sophos, et qui par conséquent tire profit de son apparence sans que celle-ci soit pour autant mensongère.

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comme dit Platon, faire commerce de son savoir, on passe à celle que, si c’est la publicité qui est nécessaire et non pas le savoir, alors il n’est pas nécessaire d’être savant pour gagner sa vie à « paraître faire œuvre de savant », et que ceux qui en font profession (au double sens de l’expres- sion : en faire métier et le déclarer publiquement) n’en ont donc que l’apparence. Pour le dire plus simplement, étant donné que c’est l’appa- rence qui est source de profit (pro; e[rgou), non l’être, le sophiste est présenté comme quelqu’un qui, pour cette raison, privilégie l’apparence par rapport à l’être au point de ne retenir que la première.

Le sophiste n’est donc pas quelqu’un qui, d’une part, fait payer ses leçons et, d’autre part, ne procure pas à ses élèves le savoir annoncé, comme si ces deux traits étaient indépendants l’un de l’autre, mais comme quelqu’un qui, parce que sa préoccupation est de gagner de l’argent, parce qu’il est un crhmatisth;", un money-maker, n’est pas un véri- table savant. En faisant appel à ce passage des Réfutations sophistiques pour commenter Metaph. 1004b26, Alexandre confirme que c’est bien dans l’activité chrématistique des sophistes qu’il faut chercher la raison pour laquelle leur science est tenue pour « apparente mais non réelle » ; que c’est bien cette activité, par conséquent, qui est perçue comme, de leur part, un choix de vie différent de celui du philosophe27.

III

La publicité que se faisait Socrate, c’est bien connu, était toute con- traire à celle à laquelle devaient recourir les sophistes : elle consistait à (a) faire profession de ne pas savoir et (b) afficher la gratuité de ce qu’il faut bien pourtant appeler un enseignement. Il est clair, dans ces condi- tions, que, passant le plus clair de son temps dans l’agora et autres lieux publics au lieu d’exercer une activité lucrative, Socrate ne pouvait guère que perdre de l’argent : celui qui se fait traiter de bavard par l’Étranger, c’est évidemment lui.

D’où une question récurrente : comment vivait Socrate, matériel- lement parlant ? On connaît la réponse de Xénophon : Socrate avait si peu de besoins que quiconque se mettrait au même régime n’aurait aucune difficulté à en assurer la dépense.

27. C’est aussi l’interprétation implicitement retenue par P. Hadot lorsque, de manière incidente, il cite Metaph. 1004b25 à titre de témoignage de l’esprit de « recherche désintéressée » qui régnait à l’Académie, par opposition au « mercantilisme sophistique » (Hadot 1995, p. 106 et n. 2). « C’est déjà là un choix de vie », ajoute-t-il, signifiant sans doute par là que cette indifférence au gain n’est qu’un aspect relativement accessoire du genre de vie philosophique.

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Diaivth/ de; thvn te yuch;n ejpaivdeuse kai; to; sw'ma h/| crwvmeno" a[n ti", eij mhv ti daimovnion ei[h, qarralevw" kai; ajsfalw'" diavgoi kai;

oujk a]n ajporhvseie tosauvth" dapavnh". Ou{tw ga;r eujtelh;" h\n, w{st oujk oi\d ei[ ti" ou{tw" a]n ojlivga ejrgavzoito w{ste mh; lambavnein ta;

Swkravtei ajrkou'nta.

Il avait plié son âme et son corps à un régime tel que quiconque l’adop- terait vivrait, sauf extraordinaire, en confiance et en sécurité, et que la dépense correspondante ne le mettrait jamais en difficulté. Il était si fru- gal que je ne sais si l’on pourrait travailler assez peu pour ne pas gagner ce qui suffisait à Socrate. (Xenoph. Mem. I, 3, 5.)

Mais, dans le Sophiste, l’Étranger ne dit pas que le bavard pratique la gratuité ; ce qu’il dit, c’est qu’il perd de l’argent : l’opposition entre les deux sortes d’éristique étant une opposition entre crhmatofqorikovn et crhmatistikovn28, le point n’est pas que le bavard ne coûte rien à ceux avec qui il s’entretient, mais bien qu’il est pour lui ruineux de bavarder. Ce que confirme le Socrate de l’Apologie platonicienne, quand il fait valoir à ses juges que, ne faisant rien d’autre que d’exhorter ses concitoyens à se soucier de leur âme plutôt que de leur corps ou de leurs affaires (crhv- mata)29, il néglige les siennes au point d’être réduit à la pauvreté30 : ses accusateurs eux-mêmes, insiste-t-il, qui n’ont pourtant pas manqué d’im- pudence dans leurs accusations, n’ont pas eu celle de produire ne fût-ce qu’un seul témoin pour soutenir qu’il ait jamais exigé ou demandé un salaire31.

À s’en tenir d’ailleurs au récit de l’Apologie, où c’est Socrate qui, de sa propre initiative, entreprend ses concitoyens sur ce qu’ils croient savoir pour mettre en évidence la fragilité de ce savoir – ce qui, explique-t-il, ne manque pas de lui faire des ennemis –32, on ne voit pas bien comment il aurait pu demander un salaire à des interlocuteurs qui, eux, n’étaient pas demandeurs. Plusieurs témoignages laissent penser, cependant, que d’autres l’étaient. Socrate lui-même – celui, toujours, de l’Apologie platoni- cienne – évoque « les jeunes gens qui [le] suivent spontanément (oiJ nevoi moi ejpakolouqou'nte"... aujtovmatoi) »33 ; Xénophon, de son côté, se donne comme programme dans les Mémorables d’écrire comment [Socrate] lui paraissait être utile à ses compagnons (sunovnta")34, terme qui revient constamment sous sa plume. Il s’était donc formé un groupe

28. Plat. Soph. 225d1-2.

29. Plat. Ap. 30a7-b2.

30. Ibid. 31b1-c3.

31. Ibid. 31b7-c1.

32. Ibid. 21b9-23a3.

33. Ibid. 23c2-3.

34. Xenoph. Mem. I, 3, 1.

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autour de Socrate, qui le suivait, sans doute au propre, dans ses incur- sions sur l’agora et autres lieux publics, et au figuré, dans les idées qu’il développait. Ce groupe, selon l’Apologie platonicienne, était formé des jeunes gens qui en avaient le plus le loisir, à savoir les fils des hommes les plus riches35. Ce n’était pas le cas de tous, cependant. Sénèque rapporte à ce sujet une anecdote significative :

Socrati cum multa pro suis quisque facultatibus offerrent, Aeschines, pauper auditor :

« Nihil, inquit, dignum te, quod dare tibi possim, invenio, et hoc uno modo pauperem esse me sentio. Itaque dono tibi, quod unum habeo, me ipsum. Hoc munus rogo, qua- lecumque est, boni consulas cogitesque alios, cum multum tibi darent, plus sibi reli- quisse. » Cui Socrates : « Quidni tu, inquit, magnum munus mihi dederis, nisi forte te parvo aestimas ? Habebo itaque curae, ut te meliorem tibi reddam, quam accepi. » Comme on offrait beaucoup de choses à Socrate, chacun à la mesure de ses moyens, Eschine, un de ses auditeurs pauvre, dit : « Je ne trouve rien que je puisse te donner qui soit digne de toi, et c’est par là seulement que je me sens pauvre. C’est pourquoi je te donne la seule chose que je possède, moi-même. Ce présent, tout quelconque qu’il est, je te prie de l’agréer, et de réfléchir que les autres, s’ils t’ont donné beaucoup, ont conservé davantage pour eux-mêmes. » À quoi Socrate répondit : « Pour quelle raison le présent que tu m’as fait ne serait-il pas grand, sinon peut- être parce que tu fais peu de prix de toi-même ? Aussi aurai-je à cœur de te rendre à toi-même meilleur que je ne t’ai reçu. » (Sénèque, De beneficiis, I, 8, 1-236.)

Ce qui confirme à la fois que l’on pouvait être « auditeur » de Socrate, c’est-à-dire sans doute suivre une forme d’enseignement37, et qu’il n’était pas requis de payer pour cela. Mais ce que l’anecdote rapportée par Sénèque a aussi de révélateur, c’est qu’il était d’usage – ou, comme l’écrit plus prudemment David Blank38, que la tradition conservait le souvenir qu’il était d’usage –, parmi les « auditeurs », d’offrir au maître des présents, dont Sénèque ne dit pas que Socrate les refusait. Que la tradi- tion – une tradition, dans le cas de Sénèque, favorable sans ambiguïté à Socrate – ait conservé ce souvenir fait qu’il n’y a aucune raison de tenir pour des « calomnies »39 les allusions à l’usage en question qu’on trouve

35. Voir le passage cité supra n. 32.

36. La même anecdote est rapportée plus sommairement par Diogène Laërce (II, 34 in fine).

37. Cf. Gourinat 2008, p. 141-144.

38. Cf. Blank 1985, p. 7. Cet article de Blank comporte un important appendice (p. 25-49) rassemblant un grand nombre de témoignages sur le rapport à l’argent de quelques « physiciens », des sophistes et enfin de Socrate.

39. Le mot est de Blank 1985, loc. cit.

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déjà dans les Nuées d’Aristophane40 ; d’autant plus que, comme Livio Rossetti en a fait la remarque, Aristophane, tout en indiquant clairement que Socrate recevait des « honoraires » de ses élèves, semble n’y voir aucune matière à critique et même se garder d’insister sur cet aspect41. Mais même si, dans la comédie d’Aristophane, il n’est question de ces honoraires qu’en passant, il est notable que ce n’est en tout cas jamais du fait de Socrate, mais toujours et seulement de Strepsiade. Lorsque, au terme de la « formation » de Phidippidès, Strepsiade remet en paiement, de sa propre initiative, une somme d’argent à Socrate, celui-ci ne prend même pas la peine d’en vérifier le montant. Comme l’écrit encore Rossetti, dans ce Socrate qui laisse à la discrétion de ses sectateurs de déterminer la fréquence et le montant de leurs versements, nous avons déjà le Socrate de l’Apologie platonicienne ou des Mémorables, qui se van- tera de ne pas faire payer sa synousia42.

Socrate, nous l’avons vu, allègue devant ses juges, pour preuve de son dévouement désintéressé à la cité, sa pauvreté. Mais l’accomplissement de ce qu’il leur présente comme une mission divine, exhorter continuel- lement ses concitoyens à la vertu, jusqu’à les importuner, n’est pas la seule façon dont il fit preuve de civisme. Comme il est de tradition de le rappeler dans toutes les Vies de Socrate, il eut à cœur de remplir ses obli- gations de citoyen : en particulier, il servit à trois reprises comme hoplite au cours d’opérations militaires menées par Athènes. Or, on le sait, les hoplites s’armaient à leurs frais. Cela ne permet certes pas de situer So- crate parmi les grandes fortunes d’Athènes43 – il aurait alors servi dans la cavalerie –, mais pas non plus parmi les plus pauvres des citoyens qui, ne pouvant faire les frais du lourd équipement d’hoplite, acccomplissaient leur service comme rameurs sur les trières. On peut en conclure, par conséquent, que Socrate jouissait d’une relative aisance. Par exemple, si les poètes comiques se moquent de son allure de va-nu-pieds, nous savons par le Banquet de Platon que la cause n’en était pas la pauvreté, puisqu’il était en mesure, à l’occasion, de s’habiller avec élégance44.

Si l’on en croit d’ailleurs Diogène Laërce ou la source qu’il allègue, Aristoxène de Tarente, Socrate ne devait pas son entretien – et celui, ne

40. Cf. Aristoph. Nub. 98, 245, 876, 1146. Ces passages sont regroupés dans l’Appendice de Blank 1985 sous le numéro 19 T 7.

41. Cf. Rossetti 1974, p. 131-132.

42. Rossetti 1974, p. 133.

43. De l’appartenance de Socrate à la classe des hoplites, on peut conclure, au con- traire, qu’être hoplite n’impliquait pas d’être particulièrement riche. Cf. Németh 2006, chap. 2.

44. Cf. Plat. Symp. 174a3-5 ; D.L. II, 28 in fine.

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l’oublions pas, de sa famille – à la seule générosité ou reconnaissance de ses élèves :

Fhsi; d aujto;n jAristovxeno" oJ Spinqavrou kai; crhmativsasqai:

tiqevnta gou'n to; ballovmenon kevrma ajqroivzein: ei\t ajnalwvsanta pavlin tiqevnai.

Aristoxène, fils de Spintharos, dit que lui aussi (scil. Socrate) faisait de l’argent. Par exemple, il faisait un placement, accumulait la petite somme qu’il en tirait, puis, quand il l’avait dépensée, faisait un nouveau place- ment. (Diog. Laert. II, 20.)

Aristoxène passant pour avoir rassemblé bon nombre d’anecdotes dé- favorables à Socrate, on voit en général en celle-ci l’une d’entre elles – et c’est peut-être le cas, après tout, les mots kai; crhmativsasqai pouvant être une pierre dans le jardin de ceux qui traitaient les sophistes de crhmatistaiv –, et l’on est même allé jusqu’à corriger le texte de manière à lui faire dire que Socrate pratiquait l’usure45. Mais, tel quel, le texte veut tout simplement dire que Socrate disposait d’une rente, ce qui rend com- préhensible qu’il pût non seulement assumer les frais de son équipement militaire, mais ne chercher à tirer, l’exemple d’Eschine en témoigne, aucun bénéfice de son enseignement. Cela ne va pas contre la frugalité dont le crédite Xénophon : rien de commun entre la prudence dont semble faire preuve Socrate, selon Aristoxène, dans ses dépenses – atten- tif à ne manger que le revenu sans entamer le capital – et la richesse accumulée, paraît-il, par un Protagoras, un Gorgias, un Prodicos ou un Hippias46. En particulier, se refusant à se faire payer, Socrate se met dans l’impossibilité d’accumuler. Mais l’information, si c’en est une, transmise par Aristoxène est fidèle à cette idée de bon sens que vivre sans gagner d’argent suppose, à moins de sombrer dans la misère, une assise finan- cière suffisante, même modeste.

Pourquoi Socrate se refusait-il à mettre une quelconque rétribution comme condition à son enseignement ? Là encore, c’est Xénophon qui fournit la réponse, dans le premier des trois entretiens qu’il rapporte entre Socrate et Antiphon le sophiste. À Antiphon qui lui reproche préci- sément sa frugalité et lui représente qu’il vivrait plus agréablement s’il gagnait de l’argent, Socrate répond :

[Iqi ou\n, ejpiskeywvmeqa tiv calepo;n h[/sqhsai tou' ejmou' bivou. Povte- ron o{ti toi'" me;n lambavnousin ajrguvrion ajnagkai'ovn ejstin ajpergav-

45. Adoptant la correction de ajnalwvsanta (« l’ayant dépensée ») en diplwvsanta (« l’ayant doublée »), proposée par Crönert 1906, Wehrli 1967, p. 66, comprend qu’Aris- toxène accusait Socrate de pratiquer l’usure.

46. Cf. Plat. Hipp. maj. 282b4-e8.

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zesqai tou'to ejf w/| a]n misqo;n lavbwsin, ejmoi; de; mh; lambavnonti oujk ajnavgkh dialevgesqai w|/ a]n mh; bouvlwmai…

Eh bien, examinons ce que tu trouves de pénible dans ma manière de vivre. Est-ce parce que ceux qui gagnent de l’argent sont contraints de faire ce pour quoi ils reçoivent un salaire, alors que moi, qui n’en reçois pas, je ne suis pas contraint de discuter avec qui je ne veux pas ? (Xenoph. Mem. I, 6, 4-5.)

Réponse parfaitement explicite : la contrepartie de la gratuité, c’est la liberté de choisir ses auditeurs. Liberté que n’ont pas les sophistes : sous condition de payer le prix demandé, peut suivre leurs leçons qui veut.

Alors que la réponse de Socrate à Antiphon laisse entendre qu’à la fré- quentation de Socrate il y avait d’autres conditions : l’élève devait satis- faire à d’autres critères que d’être en mesure de payer. Platon et Xéno- phon donnent là-dessus des indications convergentes. C’est probable- ment l’Alcibiade du Banquet de Platon qui, dans la péroraison de son célèbre discours, donne la clé du rapport que Socrate instaurait entre ses disciples et lui-même. Ayant raconté comment Socrate avait entre eux deux inversé les rôles d’amant et d’aimé, poussant l’« insolence » (hybris) jusqu’à repousser ses avances alors même que cela aurait dû être à lui, l’homme mûr, de faire des avances au jeune homme,

ce n’est pas seulement avec moi qu’il a agi ainsi, poursuit Alcibiade, mais aussi avec Charmide, le fils de Glaucon, Euthydème, le fils de Dioclès et vraiment beaucoup d’autres qu’il a trompés, faisant l’amant pour ensuite prendre lui-même la place du courtisé au lieu de celle de l’amant.

Oujk ejme; movnon tau'ta pepoivhken, ajlla; kai; Carmivdhn to;n Glauv- kwno" kai; Eujquvdhmon to;n Dioklevou" kai; a[llou" pavnu pollouv", ou}" ou|to" ejxapatw'n wJ" ejrasth;" paidika; ma'llon aujto;" kaqivstatai ajnt ejrastou'. (Plat. Symp. 222b1-4.)

De fait, c’est un scénario analogue qui se joue, quoique sur un mode mineur, à la fin du Charmide. Alors qu’au début du dialogue Socrate peine à dissimuler son attrait pour Charmide, à la fin de l’entretien c’est ce der- nier qui refuse de se laisser congédier et déclare que rien ne l’empêchera de se livrer chaque jour aux incantations de Socrate, jusqu’à ce que celui- ci déclare que cela suffit47 ; et Socrate de minauder en déclarant ne pas vouloir s’opposer à la contrainte qu’exerce sur lui le jeune garçon48. De l’Euthydème auquel fait également allusion Alcibiade, il n’est pas ques-

47. Tov g ejmo;n oujde;n kwluvei ejpa/vdesqai uJpo; sou' o{sai hJmevrai, e{w" a]n fh'/" su;

iJkanw'" e[cein. (Plat. Charm. 176b2-4.) À la fin de l’Alcibiade (135d7-10), c’est Alcibiade lui- même qui pronostique, dans un autre registre, celui de l’enfant et de son pédagogue, le retournement des rôles entre lui-même et Socrate.

48. Cf. ibid. 176b9-d5.

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tion ailleurs dans Platon49. En revanche, c’est probablement avec lui que s’entretient Socrate dans pas moins de quatre chapitres des Mémorables (IV, 2, 3, 5, 6). Or, de ces quatre chapitres, le premier (IV, 2) se déroule selon un scénario dans lequel il est à nouveau possible de retrouver le schéma-type illustré par le récit d’Alcibiade dans le Banquet et par le Char- mide : sur un mode certes fort différent de la poursuite amoureuse, So- crate cherche de façon insistante à attirer l’attention d’un jeune homme étranger à son cercle et qui paraît ne pas lui prêter autrement attention.

Lorsqu’enfin il parvient à entrer en conversation avec lui, il le soumet à un traitement analogue à celui que connaît Alcibiade dans le dialogue platonicien homonyme, c’est-à-dire à la destruction méthodique de l’estime qu’il peut avoir de lui-même, jusqu’à ce que, ravalé à ses propres yeux au rang d’un esclave50, il ne voie d’autre moyen d’obtenir la considé- ration à laquelle il aspire que de s’attacher à Socrate51.

Alors que Platon présente les choses sous un jour affectif, soulignant l’exigence de Socrate d’être aimé autant qu’il aimait, conditionnant par conséquent la relation maître-disciple à une réciprocité de sentiment, Xénophon met au jour une exigence plus brutale de la part de Socrate : celle que le disciple éprouve et reconnaisse sa dépendance par rapport à lui. Qui renâcle à accepter pareille dépendance reste en dehors du cercle socratique : l’Alcibiade du Banquet, en qui la considération que lui témoigne la foule contrebalance la honte que lui inspire Socrate et le pousse à le fuir52 ; les garçons dont parle Socrate dans le Théétète qui, trop confiants en eux-mêmes, se prennent de dédain pour lui et le quittent avant terme, quitte, à l’en croire, à passer à leurs propres yeux et à ceux d’autrui pour des sots – aussi bien, même s’ils font amende honorable, ne seront-ils pas tous agréés de nouveau53.

On voit par là que, à la différence du contrat que concluait le sophiste avec son élève – tant de leçons pour tant d’argent, au terme de quoi

49. Ce n’est évidemment pas l’aîné des deux frères sophistes de l’Euthydème, ni le fils de Céphale mentionné en Resp. I, 328b5.

50. Katafronhvsa" eJautou' kai; nomivsa" tw'/ o[nti ajndravpodon ei\nai (Xen. Mem. IV, 2, 39).

51. ... uJpevlaben oujk a]n a[llw" ajnh;r ajxiovlogo" gevnesqai, eij mh; o{ti mavlista Swkravtei suneivh (ibid. 40). Pour une analyse détaillée de ce chapitre des Mémorables et de ce qu’il dévoile du modus operandi de Socrate dans la sélection de ses disciples, voir Rossetti 2007.

52. Plat. Symp. 216b3-6. Si l’interprétation de drapeteuvw par Robin 1950 (« tel un esclave en fuite ») devait être retenue, il y aurait là un parallèle avec l’Euthydème des Mémorables qui confirmerait la nature des sentiments qu’éprouvaient ses disciples en pré- sence de Socrate.

53. Id. Theaet. 150e1-151a4. On peut mettre en parallèle, dans cette perspective, les souffrances qu’éprouvent au gré de Socrate ceux qui s’associent (suggignomevnoi) à lui (Theaet. 151a5-b1) et les tourments qu’il inflige à Euthydème chez Xénophon.

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aucun ne devait plus rien à l’autre, libres, le maître, d’aller ailleurs exercer ses talents, l’autre, l’élève, d’aller écouter un autre maître –, à la diffé- rence, donc, d’un tel contrat, comportant des obligations mutuelles, mais limitées, la fréquentation de Socrate impliquait une allégeance à sa per- sonne, un engagement qui allait bien au-delà, en profondeur et en durée, de l’assiduité aux cours d’un sophiste. En ce sens, les rapports qu’établis- sait Socrate avec ses élèves semblent bien avoir préfiguré le type de com- munauté qu’allaient constituer les écoles créées par ses successeurs : non pas des écoles faites pour être quittées à la fin du cursus, mais des groupes où l’on entrait pour la vie. Qu’on pense par exemple à la condition impo- sée par testament par Théophraste à ceux à qui il transmet le Péripatos : qu’ils s’engagent « à y étudier et philosopher ensemble (suscolavzein kai;

sumfilosofei'n) de façon permanente, sans qu’aucun d’entre eux les aliène ni se les approprie, mais comme si c’était un temple qu’ils pos- sédaient en commun, et en se comportant dans leurs relations mutuelles à la façon de parents et d’amis »54.

Cette appartenance à un groupe, dont les indices rassemblés ci-dessus font penser qu’elle caractérisait déjà les socratiques du vivant de Socrate, à peu près certainement de son fait, diffère évidemment notablement des rapports éphémères que pouvaient entretenir les élèves des sophistes avec leurs maîtres itinérants – dont il est notable, dans les dialogues de Platon, que leurs élèves ne les suivaient pas de ville en ville, à de très rares exceptions près, constituées par quelques individus désirant devenir à leur tour sophistes. On peut donc bien parler, comme le fait Aristote, d’une différence de choix de vie. Mais cette différence ne se joue pas sur le rapport à l’argent : tout de même qu’à Socrate, on l’a vu, il fallait bien une assise financière, si modeste soit-elle, les scholarques aussi ont dû prendre en compte les problèmes de financement55. La différence de mode de vie entre les maîtres itinérants qu’étaient les sophistes et les phi- losophes bientôt regroupés en écoles résidait donc, non pas dans le fait de crhmativzein ou non, mais dans le degré d’institutionnalisation du cadre de leur enseignement.

54. D.L. V, 52-53.

55. Ceux qui, à la différence d’un Eschine ou d’un Aristippe (D.L. II, 62, 65), restèrent fidèles à la tradition de ne pas enseigner contre salaire semblent s’être trouvés, quelle que fût la générosité de leurs disciples, dans la nécessité de trouver des sponsors.

C’est ainsi, nous apprend Diogène Laërce, que Platon reçut de Denys « plus de quatre- vingts talents » (III, 9), comme plus tard Straton, de Ptolémée Philadelphe (V, 58), et que les Attalides « procurèrent énormément de choses » à Lycon (V, 67). Et il n’est que de lire, toujours dans Diogène Laërce, les testaments des successeurs d’Aristote pour voir qu’ils étaient loin d’être indifférents aux questions d’argent et que leur souci était de lais- ser après eux une institution en bonne santé financière.

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