NOTE
INFLUENCE DE LA NATURE
ET DU TAUX DES PROTÉINES ALIMENTAIRES SUR LA COMPOSITION EN ACIDES AMINÉS
DU CONTENU DU CÆCUM DU RAT AXÉNIQUE
Étiennette
COMBE R. PIONE. SACQUET
d’Élisabeth DEBRAS
Françoise
GIOVANNI,G. BAYLE, Catherine
MATHIS M.LACHKAR
Station
d’Étude
desMétabolismes,
Centre de Recherches de
Clermont-Ferrand,
63 -Saint-Genès-Champanelle
Institut national de la Recherche
agronomique
*
Service des Animaux sans
Germes,
Centre de Selection d2s Animaux de
Laboratoire.,
78 -Gif-sur-Yvette
Centre national de la Recherche
scientifique
La richesse en azote du
régime
modifie considérablement les sécrétionsdigestives (TwoMBLY
et
M EYER , 19 6 1 )
du rat de laboratoire élevé dans des conditionstraditionnelles,
enagissant tant
sur la
synthèse
des enzymes que sur leur sécrétion ou leur vitesse d’inactivation(Two MB LY- S
NOOK
, 19 6 5 ).
Deplus, d’après
CREMIER( 19 6 7 ),
la vitesse de renouvellement des cellulesépithé-
liales intestinales est diminuée en cas de diète totale
(S TEVENS -H OOPER , BLAIR, 195 8)
ou de mal-nutrition
protéique (D EO
etR AMALINGASWAMI , 19 6 5 )
et lesquantités
d’azoteendogène
sécrétéesdans le tube
digestif
s’en trouvent modifiées.Ces
phénomènes
doivent se traduire chez le rataxénique
dont le contenudigestif
est à l’abri desattaques
bactériennes par une modificationqualitative
etquantitative
des matières azotées du contenudigestif ;
c’est ce que nous avons voulu vérifier enanalysant
le contenu des caecumsde rats
axéniques ayant
reçu des aliments différents par leur teneur en matière azotée(tabl. 1 )
et la nature de leurs
protéines (tabl. 2 ),
et encomparant
certaines de leurscaractéristiques
à cellesde rats témoins «
holoxéniques
»(R AIBAUD
etal., 19 66) ayant
reçu les mêmesrégimes (tabl. 1 ).
Tous les
régimes
ont été stérilisés à l’autoclave à i2ooCpendant
20minutes et distribués auxanimaux
pendant
au moins 8jours.
Laquantité
moyenne de matière sècheingérée
par animalpendant
les 5jours précédant
lesprélèvements
atteint environ 20g/j
pourchaque
lot d’animaux.Le
poids
moyen des rats(de
race Wistav CF deGif)
de chacun des lots au moment desprélève-
ments variait entre 240et 300g
(tabl. i).
Les contenus de caecums des rats d’un même lot ont étéprélevés, mélangés
et traités à froid comme nous l’avons décritprécédemment (COMBE
etPION, 19
66).
Ils ont ainsi été divisés en 3 fractions : Icomposés
solubles dans l’éthanol 80 p. 100.II :
composés
insolubles dans l’éthanol 80 p. 100mais solubles dans l’acidetrichloracétique
10 p. 100
(ATC).
III :
composés
insolubles dans l’éthanol et l’ATC 10p. 100.Les teneurs en azote de différentes fractions ont été déterminées par la méthode de
Kjeldahl.
Les acides aminés ont été dosés dans les fractions II et III
après hydrolyse
acide par chromato-graphie
sur colonne(MooRE,
SPACKMANNetS TEIN , 195 8)
surappareil automatique.
Les
quantités
d’azote renfermées danschaque
fraction des contenus de caecums des animauxayant
reçu les différentsrégimes
sont sur lafigure
i.Quel
que soit lerégime,
les caecums desrats
axéniques
renfermentplus
d’azote que ceux des rats oholoxéniques
» ; cette différence est due à uneaugmentation
del’importance
des matières azotées contenues dans les fractions I etII, qui
contraste avec une diminution de celle des matières azotées de la fraction III liée certainement à l’absence de corps microbiens etpeut-être
à la diminution de la vitesse dedesquamation
del’épithélium
intestinal. Chez les animauxaxéniques,
lesplus grandes
différences de teneurs en azote liées aurégime
sont observées dans le cas de la fraction I et lesplus
faibles dans le cas de la fraction III.De plus
les fractions II et III des contenus de caecums des ratsqui
ont reçu lerégime
B(
7
p. 100M.A, riz)
renfermentrespectivement
autant etplus
d’azote que les fractions correspon- dantesprovenant
des animauxqui
ont consommé lerégime
a1( 22
p. 100MA, caséine).
Les résultats de l’étude des
composés
azotés solubles dans l’éthanol ont étépubliés précé-
demment
(CoM B E
et al.,19 6 5 ;
ComtsEetS ACQUET , 19 66) ;
les acides aminés libres sontprésents
en
grandes quantités :
5,2et 3,7mg/g
de contenus fraisrespectivement
pour lesrégimes
à 22p. 100 età
p. 100 deprotéines,
dans le cas des ratsaxéniques,
alors que leur concentration est très faible dans le cas des «holoxéniques » :
o,5 et 0,2mg/g respectivement
pour les deuxrégimes.
Deplus,
leurrépartition
n’est pas la même pour les deuxtypes
d’animaux. C’est ainsi que les propor- tions de sérine et de thréonine sont 2 et q foisplus élevées,
et laproportion
d’alanine 2foisplus
faible chez bs animaux
axéniques
que chez les témoins. En outre, les caecums des animaux axé-niques
contiennent de l’urée en concentrationégale
à celle duplasma sanguin,
alorsqu’il n’y en
aaucune trace dans le cas des
holoxéniques.
La
composition
en acides aminés de la fraction II du contenu de caecum de rataxénique
estdonnée dans le tableau 3.
Les
caractéristiques principales
de cescomposés
ontdéjà
étésoulignées
dans le cas durégime
à 22p. 100 de
protéines (CoMBE
et PION19 66) :
les teneurs en thréonine et en sérine sontsupé- rieures,
et les teneurs englycine,
leucine,tyrosine, phénylalanine
et méthionine inférieures à celles trouvéesgénéralement
pour ces acides aminés dans lesprotéines
animales(muscle,
tissuintestinal)
mais ellesrappellent
celles desmucoprotéines
et de certaines enzymespancréatiques.
La détermination de la
composition
en acides aminés de la fraction II des contenus de caecumsde rats
axéniques
soumis aux autresrégimes
faitapparaître
descaractéristiques
similaires. Toute-fois,
l’influence durégime
alimentaire est notable : les teneurs en sérine,valine, isoleucine, leucine
sont nettement
plus
élevées dans le cas des rats recevant lerégime
A(caséine)
que dans celui des autres animaux. Les teneurs en acideaspartique,
acideglutamique, lysine
et histidine diminuentavec le taux
protéique
de la ration. Il est difficile de dire si ces différencescorrespondent
à desproportions
différentes desprotéines d’origine
alimentaire dans les contenus ou à des variations dans lesproportions
des matières azotéesd’origine endogène.
En revanche, la netteaugmentation
de la teneur en thréonine observée
lorsque
le tauxprotéique
de la ration diminuepermet
de sup- poser que laproportion
des matières azotéesd’origine endogène
dans les matières azotées totales varie en sens inverse del’apport
azoté alimentaire. Deplus,
lapart
des acides aminés dans les matières azotées totales de la fraction II est nettementplus importante
dans le cas durégime
à22p. 100de
protéines (6 4
p. 100de l’azotetotal)
que de celuià
p. 100( 52
p. 100de l’azotetotal)
et des autres
régimes ( 40
et 4! p. ioo de l’azotetotal).
Il est vraisemblable que cetteaugmenta-
tion est liée à une diminution de laproportion
de sucres aminéscaractéristiques
d’unepartie
desmatières azotées
endogènes.
_.._!...,.-...
Les concentrations en acides aminés
indispensables
sontgénéralement plus
faibles dans lecas du
régime
C( 4
p. 100,oeuf)
que dans celui durégime
D( 0 ,8
p. 100 :protéiprive). Toutefois,
comme
l’importance
de cette fraction estplus grande
chez les animauxayant
consommé la ration à base deprotéines d’!uf,
lesquantités
de laplupart
de ces acides aminésprésentes
dans les frac- tions II des caecums sont du même ordre degrandeur
pour les deuxrégimes.
Lalysine
et l’his-tidine se trouvent en
quantités plus importantes
dans les cxcums des ratsayant
reçu lerégime
C(
4
p. 100,œuf),
Les
proportions
des différents acides aminés de la fraction III varient relativement peu avec lerégime,
et ne diffèrent pasbeaucoup
de celles des alimentsingérés,
ni de celles desprotéines,
extraites de
l’épithélium
intestinal(tabl. 3 ).
Les variations observées ne reflètent que faiblement celles de lacomposition
des aliments : la teneur en acideglutamique
desprotéines
de la fraction III des contenus de cxcums varie nettement moins que la teneurcorrespondante
desprotéines
alimen-taires.
Les teneurs en
lysine
desprotéines
des contenus sont nettementplus
faibles que celles desprotéines épithéliales
et desprotéines alimentaires,
même dans le cas du riz. Elles diminuentquand
la teneur en
protéine
de l’alimentaugmente.
Ces faibles teneurs sontprobablement
dues à la libé- rationpréférentielle
delysine
par des enzymesprotéolytiques d’origine pancréatique,
ou prove- nant de la muqueuse intestinale. Eneffet, R EDD Y,
PLEASANTS et WosTNtnhn( 19 6 9 )
ont trouvéque les enzymes
pancréatiques
et enparticulier
latrypsine
avaient une activité très élevée dans le caecum de ratsaxéniques.
Deplus, J ERVI s
et BIGGERS( 19 6 4 )
ont mis en évidence chez la sourisaxénique
laprésence
en concentrationsparticulièrement importantes
dans la muqueuse intesti-nale, d’endo-enzymes qui
doivent être libérées au cours de ladesquamation
de ce tissu.La teneur en sérine
reflète,
dans le cas del’oeuf,
celle de laprotéine ingérée.
Les teneurs encystine
se sontrévélées,
dans les cas où elles ont étédéterminées,
très élevées et notablement différentes de celles des aliments.On observe peu de différence de
composition
entre les contenus des animauxayant
reçu lerégime protéiprive,
et ceuxqui
ont consommé lerégime à
q p. 100deprotéines
d’oeuf. Comme les variations de laquantité
d’azoteprésente
dans la fraction III sont très faibles parrapport
aux différences desquantités
d’azoteingérées,
lesquantités
de chacun des acides aminésprésents
danschaque
contenu varient très peu encomparaison
des différences de teneurs azotées dans les ali- ments. Elles sont toutefois nettementplus
élevées chez les animauxqui
ont reçu lerégime
C(
7
p. ioo,riz)
que chez les autres, enparticulier
en cequi
concerne l’acideglutamique, la phényl- alanine, l’alanine,
latyrosine,
laleucine,
la valine et l’isoleucine(tabl.
2et3 ).
Cette relative accumulation doit être le résultat d’une
indigestibilité
d’unepartie
des matières azotées duriz, peut-être
liée à la stérilisation de l’aliment par la chaleur alors que les faibles quan- tités d’acides aminés trouvées dans les matières azotées insolubles des contenus de caecums des animauxayant
consommé les autresrations,
et enparticulier
lerégime
leplus
riche en azote,permettent
de supposer que ladigestibilité
vraie de leursprotéines
est très élevée.Reçu pour publication
enjuillet
19i0.SUMMARY
EFFECT OF NATURE AND RATE OF DIETARY PROTEINS ON THE AMINO-ACID COMPOSITION
OF THE CECAI, CONTENT OF GERM-FREE RATS
The purpose of this work was to
study nitrogenous
matter in cecal contents ofgermfree
rats under several
dietary
conditions. Germfree(GF)
and Conventional(CV)
adult male LVistar(CF), Gif)
rats were fed ad libitumaccording
to theprocedure
described table Iand 2for 8days.
At the end of the
experiment,
cecal contents from numbutal anesthetized rats of the same groupwere
pooled together.
Fractionation from each batch gave : I = ethanol8o p.
100soluble material;II = TCA 10 p. 100
soluble ;
III = residue insoluble in ethanol and TCA.Nitrogen (micro kjeldahl)
and amino acids(automatic
columnchromatography according
to MooxE and STEIN after acidhydrolysis).
In each fraction were
assayed. Dry
matter intake was 20g/day/animal
beforesampling day.
In these
experimental
conditions the GF cecums hold morenitrogen
than the CV(fig. I ),
and this difference accounts for ethanol and TCA soluble fractions
(I
andII).
GF fractions I and IINitrogen
contents increase with level of crudeprotein
in thediet,
while fracticn III Nitro- gen content is rather constant. B diet leads to ahigher nitrogen
content for fraction III in GF and CVpools.
GF fraction II(table 3 ) is always higher
in threonine(6.: 1 ;
7.35 ;7 .6 5 ; m.6
5 mg/16
g N withrespectively
A, B,C,
Ddiets)
and serine( 9 . 05 ;
5.4 ; 4.45 ;!!8 iug)16
g Nwith A, B,
C,
Ddiets)
and lower inglycine
leucinctyrosine phenylalanine
and methionine than usual for animalproteins. Mucoproteins
andpancreatic
enzymes are known to have similar characteristics. When crudeprotein
of the diet falls from 22p. 100to !,4 and
o.8 p.100 , threonine
concentration in the GF fraction IIpools
increases very much, and total amino acidsnitrogen
accounts for less of the total
nitrogen,
that isaminosugars proportions
becomehigher.
Theseobservations lead to
speculate
thatproportion
ofendogenous proteins
of GF cecalproteins
increases when crude
proteins proportion
decreases in the diet. In fraction III(table 3 )
of GF cecalcontent
pools.
amino acidcomposition
was not found different from amino acidcomposition
ofintestinal
epithelium.
Amino acid levels in fraction III were not modifiedby
crudeproteins
ofthe diet
except
for the diet C where steam sterilizationmight
have been of somedommage
forrice
proteins. Lysine only
was found lower in all fractions III than in animalproteins :
3.7 ; I 3!!5 !4 .6 ; 4 .8 mg/i6
g N with A, B, C, D diets. This fact may be accounted forspecific
action ofpancreatic
enzymes onlysine
boundsproteins
of thegermfree digestive
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