LA LUTTE CONTRE LES CHAMPIGNONS
SUITE A LA FRAIE ARTIFICIELLE DES TRUITES ARC-EN-CIEL (Salmo gairdneri)
Alain Fortin
Technicien de la faune
MINISTERE DU LOISIR, DE LA CHASSE ET DE LA PECHE Direction régionale de l'Estrie
Service de l'Aménagement et de l'Exploitation de la Faune
Pisciculture de Baldwin
Août 1986
PERSONNEL AYANT PARTICIPE A CETTE EXPERIENCE:
SLation piscicole de Baldwin:
CHABOT, Marcel, pisciculteur HOULE, Alphonse, pisciculLeur LACROIX, Michel, agent de bureau
LETOURNEAU, Pierre, aide-pisciculteur LEVESQUE, Eugène, chef de la station THIBAULT, Roméo, pisciculteur
Service Aménagement, et Exploitation de la faune FORTIN, Alain, technicien de ia faune
Amuarecherche LLée
CANT1N, Marie-Claude, biologiste
INTRODUCTION
Connaissant les problèmes occasionnés chez les truites arc- en-ciel (Salmo gairdneri) ayant la facheuse habitude de frayer le printemps venu, un changement technique s'imposait pour lutter contre un ennemi annuel: les champignons (lu type Saprolegnia, sp.
Sans entrer dans une dissertation sur ces champignons, on peut énumérer ici les principaux facteurs contribuant à au- gmenter les risques de contamination chez ces reproducteurs:
Manipulation des poissons: le poisson livrant un combat avec le manipulateur cherchant à lui extraire de force ces produits sexuels, ce qui provoque une perte importante de mucus; ceci rend alors la peau du poisson idéale à la culture et au développement de ces parasites extérieurs.
La présence de l'élément pathogène: la présence dans l'eau d'alimentation provenant du lac Lyster, de spores n'attendant qu'un hote favorable pour croî-
tre et se développer.
Une température idéale: contrairement à l'automne, le réchauffement de l'eau au printemps favorise gran- dement le développement des spores, présents dans le bassin.
A vrai dire, la possession d'un bassin désinfecté recevant une eau stérile dans lequel on pourrait après une désinfec- tion, y déposer nos reproducteurs après l'extraction de leur produit sexuel serait l'idéal, mais!... Peut-être l'avenir le dira
1
MATERIEL ET METHODE
Dans un premier temps, nous avons cherché à réduire chez nos sujets, le stress ainsi que diminuer et/ou remplacer la perte du mucus par l'emploi d'un anesthésique rapide, et par l'utilisation d'un produit anti-stress (Stress Coat, annexe I).
C'est le 11 avril 1986, profitant d'une journée de ponte in- tensive, que nous avons pris au hasard 15 reproducteurs com- posés de 8 femelles et 7 mâles, âgés de 5 ans (lot B-D-82-78) pour démarrer notre expérience.
Ces poissons furent déposés dans un bassin contenant 1 200 litres d'eau, alimentation fermée, dans lequel nous avions déposé, faute de produit, seulement la moitié de la dose re- commandée de "Stress Coat" (2,5 millilitres / 38 litres d'eau); cette solution fut ajoutée dans le bassin pour con- trer les risques pouvant être occasionnés par l'épuisette lors de la récolte et le transport des reproducteurs au mani- pulateur. De son côté, le manipulateur devait saturer de
"Stress Coat" pur, tout ce qui devait entrer en contact avec la peau du poisson (mitaine, mains, imperméable, etc.).
A leur sortie du vivier d'attente, les poissons étaient im- médiatement amortis par l'application d'une solution pulvé-
risée directement sur les branchies. Solution composée d'alcool éthylique 40% et de Tricaine methanesulfonate (M.S.- -222) à une concentration de 80 mg/l. L'effet de ce produit étant instantanné, le - pisciculteur pouvait dès lors extraire en toute facilité les oeufs ainsi que la laitance. Le pois- son anesthésié était par la suite étiqueté avec une étiquette de type "Carlin Dangler"; étiquette servant à différencier dans les .jours à venir, les spécimens soumis à cette expé-
rience des autres poissons du même lot ayant subi une ponte uomentionnelle et placés dans un môme bassin extérieur.
Après toutes ces manipulations, les truites étaient déposées pour' une période de 30 minutes dans une cuve de réveil de 230 litres d'eau, alimentation fermée, contenant une solution de
"Stress Coat" à la concentration recommandée, c'est-à-dire 5 millilitre de solution/38 litres d'eau. Ce bassin était oxy- géné par diffusion d'oxygène pur.
2
RESULTAT ET OBSERVATIONS
Devant la crainte d'une éventuelle apparition de champignons, des mesures préventives furent appliquées par le personnel de la station au détriment de l'expérience en cours. En effet, des traitements au vert de malachite (I milligramme/4.4 litres) appliqués à des périodes régulières c'est-à-dire 2 fois par semaine) ont complètement annihilé le fongils sur tous nos reproducteurs de truites arc-en-ciel manipulés lors de la fraie du printemps.
Sur les 8 femelles manipulées, nous avons récolté un total de 36 880 oeufs verts. Désirant par la même occasion vérifier l'effet du "Stress Coat" sur les oeufs, nous avons exposé ces derniers en contact direct (4 000 oeufs) et. indirect (32 880 oeufs) avec ce produit.
Contact direct: en faisant pondre directement une
femelle dans un bac collecteur dans lequel nous avions laissé 10 milli]itr•es d'une solution compo- sée de 5 millilitres de "Stress Coat" diluée dans 500 millilitres d'eau, solution 76 fois pluscon- centrée que la dose recommandée.
Contact. indirect: en procédant au nettoyage des oeufs après la ponte avec de l'eau contenant 2,5 millili-
tres/38 litres d'eau.
Les résultats obtenus de ces oeufs exposés au contact direct ou indirect, au produit à la phase embryonnaire fut une mortalité inférieure à 18% comparativement à la mortalité moyenne de 26% chez les oeufs des autres reproducteurs.
:3
CONCLUSION
Nous avons constaté en donnant à quelques reprises des re- producteurs non anesthésiés au pisciculteur faisant la fraie, qu'un poisson amorti donnait ses produits sexuels plus faci- lement, car aucun n'a cherché à lutter ni à se retenir.
La méthode d'anesthésie utilisée étant d'une rapidité sur- prenante, les pisciculteurs ne peuvent plus s'objecter à son utilisation lors de la fraie; il est vrai que la méthode con- ventionnelle du bain anesthésique amplifie le nombre de mani- pulations et de manipulateurs.
Pour la pulvérisation de l'anesthésique, nous recommandons l'utilisation d'appareils sous pression (applicateur d'insec- ticide, contenant variant de 6 à 15 litres, vendu en quin- cailleries); ce qui serait préférable à l'utilisation d'un varorisateur manuel. Les branchies des poissons manipulés non-anesthésiés, n'étant pas toujours placées à la verticale.
Ne pouvant conclure cette année si l'absence de champignons sur nos sujets est due au traitement reçu ou à la méthode utilisée, nous recommandons de répéter cette expérience au printemps 1987. Il va sans dire, que les poissons soumis de nouveau à cette expérience, seront alors isolés avec un nom- bre identique de poissons' témoins dans un même bassin et contrairement, à cette année, ne subiront aucun traitement.
4
ANNEXE I
Aquarecherche Liée Aquaresearch Ltd.
C.P. 208
North Hatley, OC, Canada JOB 2C0 (819) 842-2890
STRESS COAT
En temps normal, le poisson secrète une couche de mucus qui protège le poisson contre les blessures et infections. Durant les manipulations telles le marquage, les mesures, l'extirpation d'ovules ou de laitance et autres, durant le transport ou en
temps de stress la sécrétion de mucus est interrompue rendant le poisson vulnérable aux maladies.
Stress Coat est le produit qui aide à remplacer la couche protectrice de mucus.
— Stress Coat ajoute des électrolytes;
— Stress Coat tamponne le pH;
— Stress Coat détoxifie certains métaux lourds;
— Stress Coat prévient les infections causées par la perte de mucus lorsque le poisson a été manipulé;
— Stress Coat aide à la cicatrisation.
1 gallon de Stress Coat traite 7680 gallons d'eau douce ou salée.
Posologie: ajouter 1 cuil. thé de Stress Coat pour 10 gallons d'eau.
ANNEXE I (suite)
PROTOCOLE D'UTILISATION DU STRESS-COAT
1. Tout instrument (filets, épuisettes, mitaines, etc.) entrant en contact avec les poissons, devrait être préalablement trempé dans une solution concentrée de Stress Coat avant d'être utilisé pour la manipulation des poissons.
2. Ajouter au bain de réveil, une solution de Stress Coat de 1 c. à thé gal. U.S. d'eau (5 ml/38 1.).
N.B. Eviter tout contact direct. du Stress Coat avec les oeufs et/ou la laitance.
