FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
-AJKTISrÉE: 1897-98 NO 108
LES
CALCULS VESICAUX
CHEZ LA PETITE FILLE
THÈSE POUR LE DOCTORAT EN MÉDECINE
présentée et soutenue publiquement le 27 Juillet 1898
Pierre-Jules-Maurice MÉTAYER
Né àMontgivray(Indre), le 9 août1873.
MM. PIÉCHAUD, professeur... Président.
• , ..a,,.) LANELONGUE, professeur...
talMIUltR ét laTint
J
viLLAH. agrégé 1 Juges.BINAUD,
Le Candidatrépondra aux questions qui lui serontfaites sur les
diverses
parties de l'Enseignement médical.
BORDEAUX
IMPRIMERIE Y.
CADORET
17 HUE MONTMÈJAN 17 1898
FACULTÉ DE MÉDECINE ET DE PHARMACIE DE BORDEAUX
M. de NABIAS Doyen. | M. PITRES.
PROFESSEURS :
Doyenhonoraire.
MM. MICE AZAM DUPUY MOUSSOUS.
Professeurs honoraires.
Cliniqueinterne.
Cliniqueexterne Patholog ieetthérapeu¬
tique générales Thérapeutique
Médecineopératoire...
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LAGRANGE.
N.
LeSecrétairede laFaculté: LËMAIRE.
Pardélibérationdu 5 août 1879,la Facultéaarrêté que les opinions émisesdans les hèses qui lui sont présentées doivent être considéréescomme propres à leursauteurs, et qu'elle nenten' leur donner ni approbation ni improbation.
A Monsieur et Madame
A. DOUSSOT
.4 mon ami,
Monsieur le Docteur
Alexandre GOLLEMAIN
Ancieninternedeshôpitaux
(Médaille d'orl,
Ancienaide d'analomie,
Ancienprosecteurde
la Faculté de Médecine de Paris,
Chirurgien des
hôpitaux.
A mon Présidentde
Thèse
Monsieur le Docteur
T. PIÉCHAUD
Professeurdeclinique
chirurgicale infantile,
Officierdel'Instruction
publique,
Chirurgien desHôpitaux.
Arrivé au terme
de
notrevie d'étudiant, nous considérons
commeun
devoir de remercier
nosmaîtres, qui, durant toutes
nos études, se
sont intéressés à
nous.Nos
premiers remerciments iront à notre ami M. le D1' Guille-
main, chirurgien des hôpitaux de Paris, qui a le premier guidé
nos pas
dans la carrière médicale et nous a toujours prodigué
ses conseils.
Nous n'oublierons pas
les docteurs Blum, Tillaux, Croisier,
chez
qui
nous avonscommencé notre stage hospitalier.
Quant
à nosmaîtres de Bordeaux, nous ne savons comment
les remercier et leur
témoigner notre reconnaissance pour la
bienveillance
qu'ils
nousont toujours montrée durant les deux
années
trop courtes passées
aumilieu d'eux. C'est avec un vif
plaisir
que nous nousrappellerons le stage que nous avons fait
dans les services de M. le D1'
Pitres, professeur de clinique des
maladiesnerveuses;
M. le D'Badal, professeur de clinique ophtal¬
mologique; M. le Dr Piéchaud, professeur de clinique chirurgi¬
cale infantileet
qui
abien voulu nous faire l'honneur de présider
notre thèse.
M. le
professeur agrégé Braquehaye a droit à toute notre
reconnaissance. Nous avons eu
largement recours à sa science
pour
la composition de notre thèse.
LES
CALCULS VËSICAUX
CHEZ LA
PETITE FILLE
INTRODUCTION
M. le
professeur agrégé Bracjuehaye ayant pratiqué tout der¬
nièrement la taille
hypogastrique pour calcul de la vessie chez
une
petite fille,
nous aproposé, comme sujet de thèse inaugurale,
l'étude des calculs de la
vessie chez les petites fdles.
Nous nous sommes
attaché
àfaire ressortir les points parti¬
culiers que
présente cette affection dont il n'existe point d'étude
d'ensemble. Les observations
publiées sont d'ailleurs peu nom¬
breuses. Dans les cas
rapportés
parles auteurs, se trouvent
signalés certains caractères qui sont dus au sexe et à l'âge.
Limitantnotre travail à
l'étude des calculs chez les petites filles,
nous insisterons surtout sur ces
derniers. Nous avons ainsi
divisénotre travail.
I.
Historique.
IL
Etiologie et pathogénie.
III.
Symptômes.
IV.
Diagnostic.
V. Traitement.
Avantnos
conclusions,
nousrapporterons les observations que
nous avons pu
recueillir.
HISTORIQUE
L'étude des calculs de la vessie chez la
petite fdle est
encore entourée de bien des obscurités et il n'existe sur cettequestion
aucun travail
d'ensemble; les traités classiques sont à
peuprès
muets et les documents que nous avons pu
réunir bien
peu nom¬breux.
Pour montrer la difficulté que
comporte
unpareil sujet,
nous allons brièvementénumérer dans un courtexposé historique les
travaux où nous avons
puisé quelques indications. Jusqu'à la
thèse
d'Hybord qui
consacrequelques
pagesà cette étude,
on ne trouve quedes faits isolés
; onpeut néanmoins relever dans les
travaux antérieurs consacrés aux calculs vésicaux chez la femme
quelques observations et des indications thérapeutiques.
Les calculs vésicaux ont été
signalés chez la femme
parCelse, Aétius, Rhazès. Le premier, Albucasis, recommande l'explora¬
tion par
le rectum chez les filles. Franco, Laurent, Collot, Rous-
set,Jacques Rellays ont apporté
avecdes observations nouvelles
divers modes de traitement.
Auxvme
siècle,
onvoit signaler
parles différents auteurs tan¬
tôt la
dilatation,
tantôtla taille vésico-vaginale. Frère Côme
invente un lithotome
qu'il abandonne bientôt
pourrecourir à la
taille
hypogastrique. Il pratique ensuite systématiquement cette opération chez la femme et aussi chez les petites filles. M. le professeur Gross, dans
untableau des opérations de cystotomie, sus-pubienne, cite treize
casde taille hypogastrique pratiqués
par
Frère Côme
pourcalculs vésicaux chez la petite fille. L'âge
de ses malades varie de deuxansàneufet dix ans. Surses treize
opérées,
oncômpte dix guérisons
pourdeux morts; dans
un cas le résultat n'est pasindiqué.
— 17 —
Vers la même
époque,
en1747, Louis, dans ses lettres à Lecat
(1749), parle de deux petites malades âgées de dix ans, opérées
par une
incision bilatérale avec un lithotome caché. Les deux
conservent
de l'incontinence d'urine, et l'une meurt trois mois
après de consomption.
Dans la
période moderne A. Dubois, A. Cooper, Deschamps,
Civiale, Amussat, Leroy d'Etiolles s'occupent également des
calculs chez
la femme, mais
nedisent rien de particulier pour
la
petite tille. Plus tard, J. Rigal père, Clemot (de Rochefort),
Flaubert,
Vacco, Rigal fds perfectionnent la taille vésico-vagi-
nale. Yallet
(d'Orléans) publie en 1855 deux cas de taille vésico-
vaginale
avecsuture immédiate; mais dans les divers travaux
de ces auteursil
s'agit surtout d'opérations chez la femme ou la
tille adulte.
Un an
auparavant,
en1854, dans The Lancet, Thompson fait
chez une enfant
de 10
ansuneséance de lithotritie après dila¬
tationavec une
éponge préparée. Un peu plus tard, en 1867,
Borelli
(Soc. de chir.) enlève un calcul par la dilatation progres¬
sive avec les
pinces et doigt chez une tille de 6 ans. Les années
suivantes, les observations se multiplient. Certains chirurgiens
comme Thomas
Smith font la taille vésico-vaginale ou la taille
uréthrale comme
Marsh et Paulet. D'autres comme (iéranalo
Oppizi (Gazetta medica italiana, Lombardia, 24 janvier 1874)
font la lithotritie. Le
plus grand nombre pratique la taille hypo-
gaslrique. Celle-ci, faite après Frère Corne par Vacca Berlin-
ghieri
en1809, est de nouveau pratiquée très souvent dans la
période moderne. Adam Taylor, Dickson, Higgnison, Samp-
son,
Garngee opèrent des petites tilles de 4 à 6 ans. Balassa.
recourt à la
eystotomie sus-pubienne après deux tentatives de
lithotritie infructueuses.
Dorfwirth, Swain, \ illeneuve, Nicola-
doni font
après Barwell la suture delà vessie.
Comme travaux
d'ensemble
surla question, nous n'avons rien
trouvé dans la littérature
médicale. La Ihèse d'Hybord, déjà
citée, contient cependant quelques considérations.
fin
1877, la thèse de Rogie mentionne quelques observations
et donnecomme
opération de choix la taille uréthrale pratiquée
Métayer
2
— 18 —
par
Paulet (1). Mais le relevé du professeur Gross
contenant 29 cas de calculs chez lespetites fdles vient augmenter considé¬
rablement le nombre des observations. De
Bokay
afait
en1897
une
statistique de 62
cas.Enfin dans
ces dernières années ont paru enFrance les observations de MM. Gross, Ilamaïde
etSéjour-
net,
Loumeau
etRocaz, Braquehaye.
Depuis la thèse d'Hybord, qui
nerelate
quehuit observations
chez les
petites filles, mais qui, il
estvrai
ne mentionnait pas tousles casantérieurs,
onvoitqu'il
enexiste
uncertain nombre de nouveauxauxquels ont été appliquées les diverses interven¬
tions.
(1)ln Analomietopographique.
ETIOLOGIE ET
PATHOGÉNIE
Comme 011 en
peut juger
parle court exposé hislorique qui précède, les calculs de la vessie sont
rareschez la petite fille.
C'est ainsi que sur
1621
casde calculs chez des enfants de moins
de 15 ans,
réunis
parde Bokay,
ontrouve 62 filles, soit 4 0/0 du
nombretotal. Werewkin donne unchiffre
analogue
:11 filles
sur 271 cas. Si on s'enrapporte à la statistique de de Bokay, on voit
que
les calculs vésicaux sont surtout fréquents de 2 à 8 ans :
6 mois 1
1 an 2
2 ans 1
3 ans 8
4 ans 8
5 ans 7
(> ans 8
7 ans 9
8 ans 5
9 ans 3
10 ans '. 2
11 ans o
12ans 1
13 ans 1
14 ans. . . !
Cette-rareté des concrétions vésicales
chez les filles est d'au¬
tant
plus frappante
que,d'une façon générale, les calculs sont
fréquents dans l'enfance. C'est ainsi
que,à envisager les faits
d une
façon absolue,
ontrouve à
peuprès autant de calculs chez
— 20 —
des enfants de moins de 14 ans que
chez le vieillard. En tenant compte de la progression de la mortalité de l'enfance
àla vieillesse,
on trouveévidemment
pourla première
unchiffre
notablement
inférieur, puisque, d'après les tables de mortalité
de
Deparcieux, remaniée
parMathieu,
sur1286 individus
nés dans une même année, unseul
atteintl'âge de 94
ans.Mais la statistique étant ainsi expurgée, les calculs de l'enfance n'en
sont pasmoins très fréquents. C'est ainsi
que sur6,042
casréunis
par
Gross, il
yaurait 2,334 enfants de 1
à10
ans, que sur1,103
cas
rapportés
parProut, 594 fois il s'agissait d'enfants de moins
de 14 ans; que sur
1,827 tailles faites dans les hôpitaux anglais (Thompson), dans la moitié des
casil s'agissait d'enfants de moins
de 12 ans.
Les raisons
anatomiques, souvent invoquées, permettent de comprendre cette rareté des calculs vésicaux
dans le sexe fémi¬nin. Chez la
femme,
eneffet, le diamètre antéro-postérieur de la
vessie est
plus court, à
causede la présence de l'utérus qui
refoule en avant le réservoir urinaire et
n'y permet guère le séjour des concrétions qui s'y sont formées
ouqui viennent du
rein. De
plus, chez la petite fille, l'urèthre
estbeaucoup plus
court et surtout il est
plus dilatable; c'est ainsi
quede Bokay
aîné
rapporte l'observation d'une petite fille de 6
ansqui expulsa
par
l'urèthre
uncalcul du volume
d'une noix.Ajoutons enfin
que,
dans
untravail récent Romniccano, fait jouer
unrôle impor¬
tantau
phimosis congénital dans la production des calculs vési¬
cauxde l'enfance et l'on aura une idée des raisons
anatomiques invoquées
pourexpliquer cette différence vraiment
énormede
96 à 4
0/0 suivant qu'il s'agit de l'un
oude l'autre
sexe.Nous devons maintenant
envisager quelles sont les
causesde
la formation des calculs dans la
vessie,
et ces causes,hâtons-
nous de le dire, sont les mêmes dans l'un et l'autre sexe.
D'après Ultzmann, Antal, de Bokay, les conditions climaté- riques
nejouent qu'un rôle des plus obscurs et des moins précis,
aussine nousy
arrêterons-nous
pas.Mais il n'en
estpasde même
de certaines conditions de vie et notamment d'une alimentation défectueuse. L'influence du milieu social est en effet des
plus
marquées
:à l'inverse de ce qui a lieu pour les vieillards, les
enfants pauvres
sont très sujets à la pierre, tandis que les riches
ne sont
qu'exceptionnellement atteints. Dans la presque totalité
des cas,
il s'agit
eneffet d'enfants pauvres. (Thompson, Fergus-
son,
Bokay aîné).
Très
fréquemment aussi, on retrouve dans la même famille,
soit chez les
ascendants, soit chez les collatéraux, d'autres mem¬
bres atteints de
la pierre. Clubbe a observé dans une même
famille le
grand-père, le grand-oncle, la grand'mère, six oncles,
quatre tantes,
uncousin et les trois petits-tils, âgés de deux,
trois et huit ans,
atteints de calculs. La malade de Braquehayc
a eudeux frères
atteints
enbas-âge de calculs vésicaux. H existe
donc dans la
production des calculs une prédisposition familiale
des
plus certaines. On connaît depuis longtemps les liens étroits
qui unissent la goutte à la lithiase urinaire ; les enfants ne pré¬
senteraient-ilsdescalculs
vésicaux
queparcequ'ils seraientissus
de
parents arthritiques?
«Signaler le rôle de la constitution et
du
tempérament, c'est toucher au cœur même du problème étio-
logique de lTirolithiase. L'introduction dans notre organisme
d'une
plus
oumoins grande quantité de matériaux susceptibles
de devenir
l'origine de sables, de gravelle ou de calculs n'est
pas
la
causeprincipale de l'apparition de ces produits de déchets
dans les urines. Ce
qui la commande, c'est la façon dont nous
sommes
capables d'utiliser et de consommer les matériaux ingé¬
rés. Le
tempérament morbide, pour employer l'expression dans
le sensque
lui donne le professeur Ch. Bouchard, la diathèse,
voilà la cause malheureusement
inéluctable de l'affection calcu-
leuse chez une nombreuse
catégorie d'individus
»(Pousson). La
misère
physiologique, due à la décrépitude des ascendants ou
auxconditionsmauvaisesde
nutrition dans lesquelles s'est trouvé
placé l'individu sont donc les causes primaires de la production
des calculs vésicaux et si l'on
rencontre souvent frappés de la
même affection
plusieurs membres d'une même famille, c'est
vraisemblablement parce que
pendant plusieurs générations ils
se sont trouvés
placés
sousl'influence des mêmes conditions
nocives.
22 —
Après avoir ainsi brièvement rappelé les
causes deproduc¬
tion des
calculs,
nous devons voir maintenant comment ellesagissent
pourles produire. La
formation d'un calcul dans la vessiepeut être
consécutive audépôt de
concrétionsautour d'un corpsétranger
oud'un
calculuratique
venudu
rein etayant migré dans l'uretère,
à laprécipitation
et àl'agglomération
des éléments de l'urine dans une vessie enflammée. Or laprésence
de corps
étrangers, les inflammations
vésicales nejouent qu'un
rôle
étiologique
presquenul dans
laproduction des
calculs de l'enfance(de Bokay). La
presquetotalité
des cas de calculs vési-caux de l'enfance reconnaît donc une
origine rénale.
Pour com¬prendre la formation
des concrétions urinaires dans lerein,
il est nécessaire dedonner,
sur lesphénomènes physiologiques qui
sepassent dans
le rein dunouveau-né, quelques explica¬
tions queIl nous
empruntons
àl'article
de deBokay.
est certain que
la lithiase
urina ire chez les enfants se trouveen relation intime avec les infarctus
uriques des
reinsdécouverts
parGless (1841)
etdécrits plus tard
parSchlossberger (1848
et1850),
parVirchow (1856) et
pard'autres
auteurs.La formation
d'infarctus uriques
se trouve en relation intimeavec la
composition chimique particulière
de l'urine du nouveau- né. Pendant lespremiers jours, l'urine
du nouveau-né renferme notamment unequantité
surprenanted'acide urique. A partir
de la deuxième semaine de la
vie, la quantité d'acide urique de
l'urine diminue
déjà notablement,
et, entre la troisième et laquatrième semaine, elle
estdéjà, d'après Ullzmann, réduite
auminimum. Pour
Virchow, l'infarctus urique serait
le résultat del'exagération physiologique des transformations
des matièresqui
se manifestent avecl'établissement
de larespiration, de la digestion, de
laproduction
dechaleur,
etc.L'infarctus urique
restédans
le rein du nouveau-né estdéjà, pendant les premiers jours de
lavie,
enpartie dissous,
enpartie balayé
parl'urine
dont laquantité
augmente tous lesjours.
C'est ainsi que
les choses
se passentordinairement.
Maisquand
la
quantité d'infarctus uriques
est considérable ou quel'urine
nepossède
pas unpouvoir
suffisant dedissolution,
ou encorequand
— 23 —
quelques amas de cristaux s'enclavent dans les canaux urinaires,
ce
qui reste d'infarctus uriques peut devenir un centre de cris¬
tallisation et le
point de départ de la formation d'un calcul
rénal. Ce
qui
prouve que,dans certaines conditions anormales,
lesinfarctus
uriques peuvent,
eneffet, ne disparaître qu'incom¬
plètement des reins, c'est qu'à l'autopsie des enfants de quatre
semaines, voire même de trois et six mois,
onretrouve quelque¬
fois des restes d'infarctus
dans les reins. Disons enfin
quel'obs¬
truction des canaux
urinaires
provoque unestase de l'urine et des
troubles de la circulation
pouvant
amener unealbuminurie pas¬
sagère, et
que,pendant
samigration, l'infarctus peut encore
arracher
l'épithélium rénal.
Lacause la
plus importante de la formation des calculs vésicaux
réside donc dans la non
expulsion
parla vessie du calcul rénal.
Nousavons
indiqué plus haut quelles sont les raisons anatomiques
qui favorisent l'expulsion du calcul par l'urèthre chez la petite
fille.
Lorsque,
aucontraire, la concrétion rénale n'a pu pénétrer
dans le conduit excréteur de
l'urine, elle devient le point de départ, le
noyaud'un calcul vésical qui va sans cesse augmen¬
tant de volume par
suite du dépôt à sa périphérie de nouvelles
couches de sédiments urinaires.
Les substances qui
sedéposent
ainsine sont pas
toujours les mêmes; elles varient suivant la
réaction de l'urine
qui les
acharriés. C'est ainsi que les subs¬
tances
lithogènes de l'urine acide sont l'acide urique, l'urate de
soude, l'oxalate de chaux, la cystine. Les substances lithogènes
de l'urine alcaline sont l'urate
d'ammoniaque, le phosphate annnoniaco-magnésien et le phosphate de chaux amorphe; celles
de l'urine neutre sont le carbonate
de chaux et les phosphates
de chaux cristallisés
(de Bokay). En outre de ces substances on
a trouvé des calculs de
cystine et de xanthine; les calculs d'in¬
digo n'ont
pas encoreété observés chez les enfants.
Le mode de formationdes
calculs est
encoreentouré d'obscu¬
rité, malgré les nombreux travaux dont il a fait l'objet. Pour
Chopart, les calculs
seforment par la juxtaposition de cristaux;
pour
lleller,
parl'agglomération des substances de l'urine nor¬
male ou
pathologique. Ultzmann pense qu'il se produit une
cristallisation
en masse au moment où les substanceslithogènes
se
précipitent de l'urine.
Pour d'autresauteurs, les
substancesorganiques de l'urine interviendraient
directement dans la for¬mation des calculs vésicaux
(Meckel, Cantani, Ebstcin).
Fourcroy et Vauquelin
ont montré laprésence de substances organiques dans chaque calcul.
«Une
théorie récenteexplique
à merveille la raison pour
laquelle les matières
endissolution
dans l'urine seprécipitent et s'agglomèrent
en masse;de plus,
elle a le mérite de s'accorder avec les faits de
l'observation
cli¬nique journalière
et d'éclairer leurinterprétation d'une
vive lumière. C'est la théorie des colloïdes édifiée enAngleterre
par W. Ord. Elle repose surles
curieux résultats obtenus antérieu¬rement par un autre savant
anglais, G. Rainey. Cet expérimen¬
tateur, ayant fait précipiter
ausein d'une
solution gommeuse différents sels remarqua queles cristallisations
avaient une tout autre structure queles cristallisations
ordinaires. 11 en conclut quela viscosité
de la gomme,intimement mélangée à la
subs¬tance
saline, détruit
lapolarité du cristal
et laisse les molécules obéir à la loi de mutuelle attraction... Dansl'urine, différentes
substancesjouent vis-à-vis
des matières salinesqui
y sont endissolution le rôle de la gomme
vis-à-vis
des sels mis enexpé¬
riences in vitro. Ces
substances, d'après W. Ord,
ne sont autres queles colloïdes qui
setrouvent
dans l'urinenormale,
comme le mucus(?), la matière
coloranteextractive,
ou dans l'urinepathologique,
commel'albumine, le
sucre,le
sang,le
pus -».(Pousson).
Les substances
organiques de l'urine paraissent donc jouer
un
grand rôle dans
la formation des calculs. Elles entrent entous cas pour une certaine
part dans leur
constitution. Ebstein et Nicolaïer ont constatéqu'elles
ne formaient pas une masseamorphe, mais qu'elles étaient disposées d'une
certainefaçon
dans le calcul de manière à en former
véritablement
le sque¬lette. Ce
squelette
se composede substances protéiniques, qui, d'après Ebstein,
se forment à la suite d'un processus catarrhal des voiesurinaires,
à1a,
suite de lésionsmécaniques de l'épilhé-
lium rénal par
le calcul d'après de Bokay.
SYMPTOMATOLOGIE
La
présence d'une pierre dans la vessie se traduit chez la
petite tille
par unensemble de signes rationnels, qui, sans avoir
l'importance qu'ils acquièrent chez l'adulte, n'en ont pas moins
par
leur association,
unegrande signification. Les troubles fonc¬
tionnelssontd'ailleursles mêmes:
troubles variés de la miction, phénomènes douloureux très intenses présentant des caractères
spéciaux qui leur donnent
unegrande valeur symptomatique ;
altérations
plus
oumoins profondes de l'urine. La constatation
du choc ou du frottementdu
cathéter métallique contre le corps étranger, constitue toujours le signe capital ; mais l'observation
des
symptômes précédents suffit dans la majorité des cas à moti¬
vercette
exploration de contrôle qui vient imposer le diagnostic.
Ason
début, les signes sont insidieux et passent naturellement
inaperçus,
carla fréquence des mictions, qui n'inquiète guère
les
adultes,
nedonne
pasdavantage l'éveil aux parents. Au
contraire, l'enfant qui souffre
aumoment de la miction manifeste
sa douleur par
des cris et des contractions. Les sensations dou¬
loureuses,
surtoutcelles qui suivent la miction, sont dues au
spasme
de la vessie. L'irritabilité des fibres musculaires est sans
cesse tenu en éveil par
l'extrême sensibilité de la muqueuse,
celle du col en
particulier.
Les douleurs sont d'autant
plus intenses que la vessie plus
contractile vient
s'appliquer plus directement sur la pierre et
que
celle-ci
estplus volumineuse et plus irrégulière. Voillemier
et Le Dentu font ressortir
l'importance de ces causes pour
1
expliquer l'intensité des crises chez les enfants; « tandis que
chez les
sujets dont la vessie est frappée d'atonie ou de paraly¬
sie,
lapierre
ne serévèle souvent par aucun indice ».
La
petite malade
commenceà ressentir de vives douleurs
— 2G -
dans le
bas-ventre.
Dans lescrises, l'enfant
observée parHa-
maïde et
Séjournet poussait
«jusqu'à faire
saillir le méat uri- naire et toute la vulvequ'elle prenait
àpleines
mains comme pour en arracher le mal ». Elle setordait, s'agitait
et criait aupoint de
se faire entendre de tout levillage. De
même la ma¬lade de
Loumeau
«pleure, crie, fait des grimaces,
se tord surles genoux
de
sa mère etporte
ses mainscrispées
àla vulve,
au bas ventre et aux reins ». Le
siège de la
douleur est bienfixe, mais,
comme 011 levoit,
ellepeut s'irradier.
Elle est sur¬tout intense au niveau des organes
génitaux.
Les
douleurs
surviennent parcrises plus
oumoins régulières,
laissant
parfois quelque répit à l'enfant, d'autres
fois elles s'in¬terrompent pendant
uncertaintemps
etreparaissent après quel¬
ques
mois (observation Braquehaye). Dans
certains cas elles accompagnentA côté deschaque miction
et retentissent sur l'étatgénéral.
cas où les
symptômes généraux
s'offrent au clini¬cien et attirent son attention sur la
gravité des accidents, il
en estd'autres
où tous cessymptômes font défaut,
où les douleurs manquent, etquelques troubles légers de
la miction trahissent seule laprésence du
calcul vésical. En cescircontances, le dia¬
gnostic
se trouve leplus
souvent en défaut et c'est seulement parhasard
ourétrospectivement qu'on
a purapporter
àleur
véritable causelestroubles urinaires constatés.Nous retiendrons surtout la
localisation
de la douleuraux organesgénitaux
exter¬nes au moment des crises.
En dehorsdes accès
douloureux,
certaines malades ressentent aussi desdémangeaisons qui, de
même queles irradiations
dou¬loureuses à
l'extrémité
de la vergechez
lepetit
garçon,peuvent
devenir lepoint de départ d'habitudes
de masturbation.Ces attouchements
répétés
amènent de la rougeur etde
la tuméfaction du clitoris et desgrandes lèvres.
Cesymptôme im¬
portant
mérite d'attirersérieusement l'attention
car onleretrouve dans lapresque
totalité
des cas, etlorsque le clinicien
nepeut
led'un calculrattachervésical.à une cause
manifeste, il
doit penser àl'existence
Les efforts quefont les petites malades
au moment des crisespeuvent déterminer clans certaines circonstances un degré plus
ou moins
prononcé de prolapsus de la
muqueuseuréthrale. Dans plusieurs observations,
ontrouve signalé un peu de prolapsus du
rectum. 11 convient
d'ajouter
queles symptômes ci-dessus décrits peuvent disparaître pendant quelques mois pour reparaître
ensuite. Les douleurs, comme
chez l'adulte, font brusquement
leur
apparition
oudeviennent plus vives après la marche ou la
fatigue d'un
voyage.Les douleurs coïncident avec la fin ou avec l'arrêt
de la mic¬
tion
qui présente des troubles variables. La fréquence des besoins
augmente et la malade doit
selever la nuit. Cette pollakiurie est
attribuée par
certains auteurs
audéplacement de la pierre qui
viendrait obturer le
col;
pourd'autres, elle serait causée par la
contraction
brusque du sphincter. Les fréquents besoins ne triom¬
phent
pastoujours de la résistance rencontrée par l'urine, et
l'enfant, malgré
sesépreinfes pénibles,
nepeut vider sa vessie.
Dans l'observation de
Braquehaye, la malade
selevait la nuit
quatre
oucinq fois
poururiner, tantôt quelques gouttes, tantôt
normalement.
A côté de
l'augmentation de fréquence des mictions trouvent
place d'autres symptômes qui
nesont
pasaussi constants. L'arrêt
brusque du jet présente
unegrande valeur symptomatique ; et
avec cette
interruption survient la crise douloureuse qui se mon¬
tre d'habitude
après chaque miction.
11 est rare
qu'une pierre puisse pénétrer dans le col et y res¬
ter
lixôe, aussi la rétention est-elle exceptionnelle. L incontinence
dueà ce que
le calcul dilate l'orifice de l'urèthre sans le fermer
complètement est moins
rare; onla rencontre assez souvent chez
1enfant. Enfin on
peut voir, comme dans le cas de Mikhaïlofï,
l'incontinence alterner avec la
rétention.
L
hématurie, qui est chez l'adulte
undes signeslesplus impor¬
tants,
neprésente
qu unevaleur symptomatique à peu près nulle
chez la
petite fille. On
nela trouve pas signalée dans les obser¬
vations que nous avons
recueillies. La vessie des enfants ne sai¬
gne pas.
Le
plus
souventles urines rendues sont limpides, transparen-
- 28 —
tes
lorsqu'il n'existe
pasde cystite
concomitante. Parfois la ves¬sie
s'enflamme, les
urines se troublent et l'on ypeut
constater laprésence de globules
de pus,de cellules épithéliales
et de divers microbes de lasuppuration.
En
présence des symptômes
que nous venons dementionner,
le
chirurgien peut seulement
soupçonnerla présence d'une pierre dans la vessie;
un certain nombre de manœuvrespour¬
rontlui
permettre
d'enacquérir la
certitude. Le touchervaginal, qui fournit
souvent chez la femme deprécieux renseignements,
ne
peut être ici
d'aucuneutilité,
car laprésence de l'hymen empêche le clinicien
de lepratiquer. Le
toucher rectal seul ouunià la
palpation hypogastrique
pourra êtreessayé
etdonner quelques indications.
Mais lecathétérisme
donnera seul des notionsprécises
sur laprésence, le volume, la
consistance du calcul vésical. Ondevra,
pour cetteexploration,
se servir de sondesmétalliques
oude l'explorateur
deGuyon. La petite
malade sera couchée sur le
dos, le
bassinrelevé par uncoussin.En raison de
l'indocilité
dusujet, il
sera leplus
souvent néces¬saire de
pratiquer l'examen après anesthésie.
Le cathéter unefois
introduit, le
bec del'instrument
sera promené avec soin etméthodiquement
sur tous lespoints de la paroi vésicale
;il
seraparfois avantageux d'essayer de
percuterle
calcul enimprimant
au manche du cathéterun mouvement
rapide de
rotation. Lors¬que
le bec de l'instrument
vientàfrôler uneconcrétion
urinaire,
il donne à la main
qui le guide
une sensation très nette, carac¬téristique de frottement, et,
en mêmetemps, il produit
unbruit
de chocperceptible parfois
pourles
assistants. Ce bruitpeut,
dans une certaine mesure,
permettre déjuger de la
consistance de lapierre. Le
calcul d'acideurique et d'urates
donnerait un sonclair; les
calculsphosphatiques
un sonplus
grave(Thomp¬
son). Ces différences,
ces nuancesplutôt,
sont bien difficiles àsaisir;
et dureste,
elles peuvent seulemeut donnerquelques indications
sur lacomposition de
l'écorce ducalcul,
écorcequi peut être
très mince et entourer un noyaud'une composition chimique très différente.
Le
plus souvent, il n'y
achez
l'enfantqu'un seul calcul; lors-
— 29 —
qu'il
y en aplusieurs, le bec de l'explorateur les entrechoquant
les uns
après les autres donnera
unbruit de grelot, de cliquetis
tout
spécial.
L'explorateur métallique donnera également sur le volume
du calcul des indications utiles. « Le calcul reconnu vous per¬
cutez sa surface d'avant en arrière
jusqu'à
ce que vous ayezdépassé
seslimites postérieures,
vous ramenezalors l'instrument
vers
lui,
et au moment mêmeoù
vous percevezle premier
con¬tact, vous
placez l'index de la main gauche
surla tige
auras du
méat. Vous continuez alors la
percussion et votre doigt s'éloigne
du méat au fur et à mesure que
la tige est dégagée de l'urèthre.
Vous continuez ainsi
jusqu'à
ce que vous ayezcessé de sentir le
calcul. L'intervalle
qui sépare votre doigt reste fixe sur la tige,
du
point où elle sort maintenant du méat,
vousindique la lon¬
gueur
du diamètre
que vous avezexploré
»(Guvon).
Ce
procédé
nepeut, évidemment, donner que des résultats approximatifs, et si l'on veut pratiquer
unemensuration plus
précise,
on pourra seservir d'un petit lithotriteur qui permettra
de saisir le
calcul, de
mesurer sonvolume et aussi d'apprécier
sa
consistance,
parla résistance qu'il opposera à la pression.
Toutes ces constatations fourniront autant
d'indications utiles
pour
le choix de l'intervention.
MARCHE, DURÉE, TERMINAISON
Comme chez l'adulte, la
marche de l'alfection est essentiel¬
lement
irrégulière. La pierre peut demeurer longtemps dans
la vessie sans manifester sa présence,
les crises douloureuses
se% 1 .
montrer tout à coup,
puis disparaître pendant des mois pour
faire de nouveau leur
apparition. On comprend de même com¬
bienestvariable la durée de la lithiase
vésicale et aussi combien
il est difficile d'en
préciser les limites.
Très
fréquemment le calcul est expulsé spontanément par l'urèthre;
nous avonsrappelé plus haut les raisons anatomiques
qui expliquent la fréquence de cette terminaison heureuse :
absence de bas fond vésical chez la
petite fille, faible longueur
- ;îo -
et dilatabilité facile de l'urèthre. Cette
expulsion spontanée
est notée non seulement pour
des calculs
de faiblevolume,
concrétions
uratiques qui viennent directement
durein,
mais aussi pourdes pierres volumineuses ayant séjourné
untemps plus
oumoins long dans la
vessie où elles ont pus'accroître
et s'entourer de couches nouvelles de concrétions urinaires. DeBokay cite
un cas oii unepetite fille de
six ansexpulsa
par l'urèthre un calcul du volume d'une noix. Parfoiscependant
l'urèthre se laisse
insuffisamment dilater,
oubien
laconcrétion, grâce
à sesrugosités,
s'attache à sesparois
etl'on
voit survenir de la rétention ou del'incontinence
d'urine. Enfin laparoi vési-
cale ou uréthrale
peut être perforée
etle
calcul être éliminépar levagin (de Bokay).
La
présence d'une pierre dans
le réservoir urinaire et les traumatismesqu'elle
ypeut produire
mettent cet organedans
un état de moindre résistance et facilitent son infection.
Spon¬
tanément ou sous
l'influence
d'un cathétérismemalpropre, les
mictionsaugmentent de fréquence, les
urines setroublent,
deviennentpurulentes,
la fièvre s'allume etl'inflammation peut
se propager
à l'uretère,
au bassin et au rein. 11 est inutile d'in¬sister sur la
gravité de
ces redoutablescomplications.
A côté de ces
complications locales, il
en est d'autres d'ordregénéral.
Audébut, lorsque les
troubles urinaires font leurapparition, la
santé despetits malades
est d'ordinaire peuatteinte; mais,
au bout d'untemps plus
ou moinslong, elles
ne dorment
plus,
mangentmal, dépérissent, et, dans
les cas où lessymptômes locaux
font défautou sontdu moins peuaccusés,
ce sont ces altérations
progressives de
la santégénérale qui déterminent
lesparents
à venir consulter lechirurgien.
Le
pronostic,
onle voit,
est variable etpeut facilement
être déduit desquelques considérations qui précèdent. L'intégrité
de l'état
général
et des voies urinairescomporte
avec elle un élément favorable. 11 est au contrairesingulièrement
assombri parl'existence
d'unecystite
ou decomplications
rénales con¬comitantes. D'une
façon générale
et toutes choseségales, il
est moins grave quechez l'adulte,
maistoujours sérieux,
caril
31
serait illusoire de
compter
surla résorption du calcul
ou sonexpulsion spontanée et le chirugien doit toujours intervenir. Le nombre, le volume, la composition des calculs entrent aussi
pour une
certaine part dans l'appréciation de la gravité de
l'affection,
car cescaractères doivent déterminer le chirurgien
à intervenir de telle ou telle
façon.
DIAGNOSTIC
Le
diagnostic, confirmé
parl'exploration parle cathéter
comme chezl'adulte,
estdifficile
àfaired'après l'ensemble des troubles
fonctionnels. Ceux-ci sont difficiles à
analyser chez l'enfant.
L'influence du repos
et des
voyages surla fréquence des
mictions ne saurait être
appréciée
avecla même rigueur. De plus, le phénomène hématurie fait défaut. En revanche, les phé¬
nomènes douloureux bien observés sont d'un
grand
secours.L'attitude toute
particulière de la petite fille
aumoment des mictions, alors qu'elle
presse sur sonpérinée, les attouchements répétés de la vulve méritent également d'attirer l'attention. La pollakiurie est,
avecla douleur, le signe le plus important. La pyurie, la rétention
etl'incontinence
d'urine sont dessignes infidèles, qui n'ajoutent point de renseignements utiles.
Disons encore que
la vessie ayant des parois molles et dépres- sibles, la recherche de
lapierre dans cette vessie
sansprostate présente des difficultés signalées
partous les
auteurs(Guyon).
Le calcul enchatonné dans la muqueuse, comme
dans le
casde Loumeau,
oufixé dans
undiverticule
del'ouraque pourrait dans
certains cas
échapper à l'exploration. Enfin
uncalcul pourrait,
en raison de son
petit volume, dans
une vessie sans cul-de-sac, fuir devant le bec del'explorateur, et
nerévéler
saprésence
paraucun choc
appréciable.
Un certain nombre d'affections
présentent des troubles fonc¬
tionnels communs avecles calculs
vésicaux,
maispeuvent
cepen¬dant s'en
distinguer
parcertains caractères.
Dans la
cystalgie, la douleur est indépendante des mictions.
L'apparition des crises douloureuses
n'est pasaussi nettement
influencée par
les
mouvements ou lafatigue.
Les
coliques intestinales
nesurviennent
pas aumoment de la miction, s'accompagnent de troubles gastro-intestinaux.
L'incontinence essentielle d'urine se montre surtout la
nuit,
ne
s'accompagne
pasde douleurs.
Les tumeurs de la vessie ne
présentent
pas nonplus,
aumoins
audébut, de
phénomènes douloureux. Les hématuries sont abon¬
dantes, capricieuses, jamais influencées
parle
repos.Chez l'en¬
fant, le
sarcome dela vessie
seprésente
avec unecertaine fré¬
quence
mais n'entraîne point le cortège symptomatique des
calculs.
Nous savons que
le plus souvent les calculs vésicaux sont d'origine rénale chez l'enfant. Le diagnostic devra donc être fait
avecles calculs rénaux
qui peuvent s'accompagner de fréquence
des mictions et de douleurs. Mais la vessie est insensible à l'ex¬
ploration métallique qui
nerencontre point de calcul.
Lorsqu'il existe de la cystite concomitante
onéliminera la pyélo-néphrite dans laquelle les urines sont uniformément trou¬
bles,
mêmeaprès le
repos.Chez les enfants,
onobserve aussi
la tuberculose
vésicale,
etc'est là
uneaffection difficile
àdia¬
gnostiquer. Elle
setraduit
pardes douleurs, de la fréquence des mictions,
mais neprésente
pasl'interruption du jet. Les acci¬
dents de scrofulose
concomitants, la recherche négative du
calcul;
l'examen bactériologique du
puset les inoculations
pour¬ront venir en aide aux méthodes
d'exploration clinique.
Si l'on soupçonne
la présence d'un
corpsétranger, l'endosco¬
pie peut rendre de grands services.
Onaconstaté ainsi la
présence d'épingles à cheveux incrustées
et
phosphatées (Traité de chirurgie). Chez la petite fille, l'intro¬
duction de corps
étrangers est
une cause assez rarede calculs
vésicaux,
mais à unAge
un peuplus avancé
011les rencontre fréquemment
et cette recherchedoit
êtrefaite. Elle rend compte
de leur nature,
de
leurposition, et donne d'utiles indications thérapeutiques.
L'application de la radiographie
audiagnostic chirurgical
trouve
également ici
sonindication. Avec le cathétérisme, l'exa¬
men aux rayons
X renseignera
surle nombre et la position des
Métayer 3
calculs, si ceux-ci
ont un certain volume. Deplus, ainsi qu'il
résulte des
expériences de MM. Sabrazès, Rivière
etGaimard, il renseignera peut-être
surleur
nature. Deux observations dans The Lancet avaientantérieurementpermis de confirmer
undiag¬
nostic de lithiase rénale. Les
expériences faites
sur lecadavre,
par
les expérimentations précédentes,
montrentqu'en donnant
à la vessie une distension moyenne
et
enplaçant le malade
dansune
position horizontale,
pour queles calculs
ne viennentpoint
s'accoler contre la face
postérieure du pubis,
onobtenait
uneimage très
nettedu
corpsétranger. Dans les
conclusions de sathèse, M.
Gaimard dit : « Les calculsd'oxalate, de
carbonate et dephosphate de chaux
sontplus
opaques aux rayonsX. Après
euxviennent les calculs d'acide
urique et les
urates.Ces
données confirment les faitsdéjà avancés
parBuguet et Gascart (Presse médicale, 19
mai1897). La radiographie constitue
parconséquent
un moyen
de contrôle important appelé à rendre de grands
ser¬vices.
Tout
dernièrement,
enjanvier 1898, M. E. Brun
faisait radio¬graphier
parM. Gaston Poupinel,
unpetit malade de cinq
ans etdemi.Après quinze minutes de
pose «le résultat
fut absolu¬ment
remarquable
etle calcul parut
aucentre du bassin
sous la forme d'un œufsymétriquement placé. Soumis
àl'analyse
par M.Lainé, interne
enpharmacie du service,
cecalcul
fut trouvécomposé d'acide urique et de phosphates ammoniaco-magné-
siens
extérieurs, disposés
encouches régulières
;le
noyauétait
formé d'acide
urique
pur.L'épreuve si démonstrative obtenue
dans ce casparait due, si
l'on s'en
rapporte
auxexpériences de MM. Buguet et Gascard et
de MM.Sabrazès, Rivière
etGaimard
au défaut detransparence
du
phosphate ammoniaco-magnésien.
M. Brun insiste aussi sur ce fait: a
Qu'il s'agissait d'un enfant
à
paroi abdominale mince
et à vessieplutôt abdominale
quepelvienne
», cequi est la règle à
cetâge, d'où des
conditions favorables à l'examenradiographique.
TRAITEMENT
Jl nous reste maintenant à énumérer les
différents modes de
traitements que
l'on peut appliquer
auxcalculs vésicaux de la petite fille. Nous mentionnerons seulement pour mémoire les
différentes méthodes
lithontritiques qui n'ont jamais donné de
résultats
probants. Lorsque le calcul n'est pas expulsé sponta¬
nément, une
intervention chirurgicale peut seule
endébarrasser
la
petite malade. Les diverses interventions qui s'offrent au chi¬
rurgien
pourle traitement des calculs de la femme sont :
La
dilatation,
La
lithotritie,
Les
différentes tailles.
Après avoir passé
en revueleurs indications chez l'adulte,
nous
indiquerons dans quelle
mesureelles nous semblent pou¬
voir être
appliquées à la petite fdle.
DILATATION
D'après Ozenne qui
aétudié le traitement des calculs de la
vessie chezla femme dansun article du
Bulletin Médical (1895), auquel
nousferons de fréquents emprunts, la dilatation n'a été
réellement
pratiquée qu'à partir de 1817 par Astley Gooper.
Deux
procédés peuvent être mis
enœuvre pour obtenir la
dilatationde l'urèthre : dilatation lente par
1 introduction dans
l'urèthre de corps
augmentant lentement de volume. (Je dernier
mode
opératoire
ne noussemble guère devoir être recommandé,
la
présence prolongée dans l'urèthre d'un corps étranger, pré¬
sentant
onle conçoit, de multiples inconvénients. Dans un cas
— 36 —
de
Thompson, cependant, la dilation préalable à Taide
d'uneéponge préparée à été le premier temps d'une lit.hotritie.
La dilatation
rapide est donc préférable,
«le procédé le plus simple consiste
àintroduire
dans l'urèthre despinces à
panse¬ments ou un dilatateur utérin à deux ou trois
branches, puis le petit doigt, l'index, le
médius. On arrive ainsià une dilationsuf¬fisante dans
quelques
cas,la circonférence
d'undoigt indicateur
variant de six à
sept centimètres
en moyenne, et avec certainsinstruments spéciaux,
onpeut agir
avecplus de sécurité, d'au¬
tant
plus
queles expériences de Paul Hybord, de Spregelberg,
de Simon
(de Heidelberg) et de Simonin
deNancy ont
montréquel degré de dilatation pouvait subir
l'urèthre de la femmesans se déchirer. Le
premier de
cesexpérimentateurs
a noté 10 à 14 millimètres dediamètre, chiffre
évidemment inférieur à la réalité. Les trois autrespensent qu'on peut
sansdanger, pendant l'anesthésie, aller jusqu'à 75
et 90 millimètres de circonférence. Ce dernier chiffre nousparaît exagéré
et nous croyonsqu'on
nedoit
pasdépasser 7
à8
centimètres de circon¬férence,
cequi donne
endiamètre
environ 25 millimètres. Cette dilatationpermet d'extraire
despierres d'un
volumedéjà
assez sérieux et depratiquer la fragmentation
si des dimensionsplus
considérables
empêchent la
sortie du corpsétranger
».« Il
importe de savoir
quele
méat résisteetqu'il
estindispen¬
sable de commencer à le débrider en deux on trois
points
par depetites sections
d'un tiers de centimètre. Pour ladilatation,
on
peut
seservir du
dilatateur deDolbeau,
comme l'a fait M.Reliquet, de celui de M. Guyon
ou encore des mandrins encaoutchouc durcis de Simon de
Heidelberg. Ces derniers,
au nombre desix,
sontgradués depuis neuf
millimètresjusqu'à
deux centimètres : ils sontcreux et munis d'un obturateur. Leur seul
avantage est d'obliger l'opérateur
à ne pasopérer trop brutalement.
Il faut en effet consacrerquelques minutes
à cette dilatation souspeine d'occasionner
desdéchirures
»(Voillemier
et Le
Dentu).
Chez
l'enfant, les
conditions sont moins favorables à la dilata¬tion que
chez l'adulte.
Le canal estplus étroit, les
branches— 37 —
ischio-pubiennes présentent un moindre écartement, circons¬
tances défavorables à
la dilatabilité de l'urèthre. Cependant
M. Borelli a
pratiqué chez
unepetite fille de 6 ans une dilata¬
tion avec les
pinces et les doigts. Une hémorragie assez consi¬
dérable s'est
produite
aumoment de l'extraction et la malade a guéri
sansautre complication. Chez une petite fille de 6 ans,
MM. Hamaïde et
Séjournet ont réussi à extraire par les voies
naturelles,
àl'aide d'une pince,
uncalcul qui fut retiré tout
d'une
pièce, lentement, avec précaution et après dilatation pro¬
gressive du canal; mais le calcul s'était en partie écrasé sous
la
pince et
unenouvelle séance opératoire fut nécessaire pour
débarrasser la vessie des
derniers graviers qu'elle contenait
encore. La
guérison fut complète.
Mikhaïlowafacilementextrait un
calcul pliosphatique de cinq
centimètres de
long et six millimètres de circonférence et pesant
douzegrammes
qui s'était enclavé dans l'urèthre. L'incontinence
persista pendant sept jours, puis la miction finit par devenir tout
à fait normale.
La dilatation
peut donc dans quelques cas donner d'excellents
résultats. Elle
peut présenter
commecomplication la rupture de
la muqueuse
qui
cause unehémorragie et l'incontinence d'urine
qui peut résulter d'une lésion du sphincter. Le jeune âge du
sujet, le volume relativement considérable de la pierre consti¬
tuent des contre-indications. La
dilatabilité de l'urèthre et le fai¬
ble volume du calcul sont des
conditions favorables.
LITHOTRITIE
La lithotritie a été dans
plusieurs observations favorisée par
la dilatation
préalable de l'urèthre. Cette opération est chez la
femme d'une exécution très délicate. «
Je
necrains
pasde dire, enseigne Guyon, après expérience faite, que la lithotritie est
plus difficile chez la femme
quechez l'homme. Ce que je dis de
la
lithotritie, je le dis aussi de la recherche de la pierre. Elle
est
plus difficile quand il n'y
a pasde prostate que lorsqu'il y
en a une ». Cette recherche est