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Prostate et char

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Vol 54:  february • fÉVrier 2008 Canadian Family PhysicianLe Médecin de famille canadien

165

Prostate et char

Roger Ladouceur

MD MSc CCMF FCMF, RÉDACTEUR ADJOINT

I

l y a quelques années, alors que j’allais pour l’entretien  de  mon  auto,  le  garagiste  m’a  proposé  de  vérifier  la  transmission.  Comme  mon  automobile  allait  très  bien,  je lui ai demandé si c’était vraiment nécessaire. «C’est pré- férable  et  c’est  recommandé  par  le  constructeur»  m’a-t-il  répondu. Mais comme j’allais accepter, il a ajouté: «Je dois  toutefois  vous  aviser  que  la  transmission  de  votre  auto- mobile est particulièrement compliquée; si nous devons la  réparer,  il  est  probable  que  d’autres  problèmes  s’en  suiv- ront.  Et  je  tiens  à  vous  avertir  que  nous  ne  garantissons  pas les résultats!» Devant un tableau si sombre, j’ai remer- cié  le  garagiste  pour  son  honnêteté,  et  j’ai  choisi  de  ne  pas  procéder  à  cette  vérification.  Heureusement,  puisque  lorsque ma vieille Volvo a fini par rendre l’âme, plusieurs  années plus tard, elle tombait littéralement en ruine, mais  la transmission fonctionnait toujours à merveille. 

Cette  histoire  m’amène  au  dépistage  du  cancer  de  la  prostate. Le cancer de la prostate est indéniablement une  maladie  fréquente  et  grave.  Chaque  année,  au  Canada,  approximativement  20 000  hommes  apprennent  qu’ils  en  sont  atteints  et  quelques  4000  en  meurent.  Pourtant,  malgré  son  importance  et  sa  gravité,  nous  demeurons  toujours  aussi  dépourvus  face  à  cette  maladie:  aucune  prévention  n’a  fait  ses  preuves  et  les  traitements  don- nent  des  résultats  plutôt  modestes,  si  l’on  considère  le  ratio mortalité-incidence (4000:20 000). En réalité, le seul  espoir  que  nous  ayons  est  de  découvrir  le  cancer  à  un  stade  précoce  en  postulant  que  les  traitements  soient  alors plus efficaces qu’à un stade avancé et en souhaitant  que  le  pronostic  et  la  survie  soient  meilleurs.  D’où  les  recommandations émises par plusieurs sociétés savantes  et groupes d’experts qui favorisent le dépistage systéma- tique. Ce qui se traduit par le message largement diffusé: 

«Faites vérifier votre prostate».

Toutefois, ces recommandations ne font pas l’unanimité. 

Certains  opposants  soulignent  avec  justesse  que  le  dépistage n’est pas sans conséquence. Il génère beaucoup  d’anxiété et amène des investigations qui, a posteriori, se  révèlent souvent inutiles. Mais le pire reproche que l’on fait  au dépistage systématique est certainement que l’on n’ait  jamais réussi à démontrer de façon rigoureuse l’efficacité  de  cette  mesure.  Aucune  étude  populationnelle  compara- tive ne prouve que cette mesure prolonge de façon signifi- cative la survie de ceux qui y ont adhéré comparativement  à ceux n’ayant pas été dépistés. Sans compter que les con- séquences  du  dépistage  et  des  traitements  qui  en  décou- lent ne sont pas négligeables: un bon nombre d’hommes  opérés demeurent impuissants et incontinents et plusieurs  développent  des  complications  chirurgicales  ou  radio 

thérapeutiques,  à  plus  ou  moins  long  terme.  En  d’autres  mots, on ne sait pas si le dépistage systématique du cancer  de la prostate prolonge vraiment la survie mais en contre- partie, on sait qu’il engendre une morbidité significative et  compromet sérieusement la qualité de la vie.

Cet  imbroglio  met  les  médecins  de  famille  dans  une  position délicate coincés qu’ils sont entre les recomman- dations  favorables  de  plusieurs  lignes  directrices  et  les  avis  controversés  qui  questionnent  sa  valeur.  Et  le  pire  est  certainement  d’être  confronté  à  un  patient  chez  qui  le diagnostic de cancer de la prostate métastatique vient  juste  d’être  posé  et  qui  vous  dit:  «Docteur,  je  ne  com- prends pas. Je vous ai consulté régulièrement. Comment  cela se fait-il que vous n’ayez pas découvert ma maladie  plus tôt? N’auriez-vous pas pu me faire passer des tests  qui m’auraient permis de découvrir la maladie avant qu’il  ne soit trop tard?» 

Pour  éviter  de  telles  situations,  certains  prétendent  qu’il  faut  en  parler  avec  le  patient  en  lui  exposant  les  alternatives et en lui laissant le choix. Mais sommes-nous  si  certains  qu’il  s’agit  là  d’une  option  valable?  Même  pleinement  informé  des  avantages  et  inconvénients,  il  demeure  difficile  de  prendre  une  décision  en  pleine  connaissance de cause lorsque tant d’impondérables et  d’incertitudes se côtoient. Est-il préférable d’accepter le  dépistage  et  encourir  inutilement  toutes  ces  complica- tions  inhérentes  ou  le  refuser  en  se  culpabilisant  si  la  maladie surgit. Peu importe le choix qu’il fait, l’Homme  perd  à  coup  sûr.  La  plupart  de  mes  patients  à  qui  j’explique les enjeux finissent par me dire: «Vous docteur, qu’est-ce que vous en pensez? Que feriez-vous à ma place?

Ou pire encore «Je vous fais confiance»!

Mais  à  bien  y  penser,  cet  imbroglio  résulte  des  avis  hâtifs  des  groupes  d’experts.  Pourquoi  n’ont-ils  pas  attendu  d’avoir  la  certitude  que  le  dépistage  systéma- tique prolongeait effectivement la survie et améliorait la  qualité de vie? Faudra-t-il dorénavant obliger les experts  à  suivre  des  cours  de  mécanique  automobile?  Car,  si  l’on offrait à quiconque une inspection (dépistage) d’une  pièce  (prostate)  qui  en  apparence  fonctionne  bien  en  précisant que cette manœuvre risquerait d’endommager  le système (impuissance, incontinence et complications  thérapeutiques)  et  qu’en  plus  on  ne  garantissait  pas  la  réussite, rare sont ceux qui accepteraient!       

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