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ITINÉRAIRES SOCIO-HISTORIQUES DES DOCTRINES ET DES ENJEUX DU RADICALISME ISLAMIQUE EN AFRIQUE DE L’OUEST pp. 127-141.

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Référence de cet article : Navigué Félicien Coulibaly, Côte d’Ivoire. Itinéraires socio-historiques des doctrines et des enjeux du radicalisme islamique en Afrique de l’Ouest.

Rev iv hist 2018 ; 31 : 126-141.

ITINÉRAIRES SOCIO-HISTORIQUES DES DOCTRINES ET DES ENJEUX DU RADICALISME ISLAMIQUE EN AFRIQUE DE

L’OUEST

Navigué Félicien Coulibaly Université Félix Houphouët-Boigny

Abidjan, Côte d’Ivoire.

feliciennavigue.coulibaly@gmail.com

RÉSUMÉ

Depuis plus d’un demi-siècle, on assiste sur l’échiquier religieux africain, à l’émergence d’idéologies contestataires de l’islam traditionnel d’obédience sunnite. Ces idéologies véhiculées à travers des courants religieux radicaux prônent « un retour aux sources » et une purification des mœurs tels que vécus par les « ancêtres musulmans ». Ces courants dénommés « wahha- bisme » ou encore « salafisme », visent un idéal religieux à travers un ordre politique nouveau dont l’ultime but est de créer un « califat » c’est-à-dire un Etat islamique régi par la loi islamique.

A travers l’étude de ces mouvements, cet article décrit leur trajectoire idéologique comme voie de radicalisation islamique. Dans cette veine, l’étude évoque des enjeux socioéconomiques et politiques, facteurs sous-jacents du radicalisme religieux sous toutes ses formes.

Mots clés : Radicalisme; intégrisme; fondamentalisme; doctrines; islam; wahhabisme; salafisme

ABSTRACT

In West Africa, for more than half a century, religious ideology has emerged, with the emer- gence of protesting ideologies of traditional Sunni Islam. These ideologies conveyed through radical religious currents preach “a return to the sources” and a purification of customs as lived by the “Muslim ancestors”. These currents called “Wahhabism” or “Salafism”, aim at a religious ideal through a new political order whose ultimate goal is to create a “caliphate” that is to say an Islamic state governed by Islamic law. Through the study of these movements, this article describes their ideological trajectory as a path of Islamic radicalization. In this vein, our study evokes socio-economic and political issues, factors underlying religious radicalism in all its forms.

Keywords: Radicalism; intégrism; fondamentalism; doctrines; islam; wahhabisme; salafism

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INTRODUCTION

La problématique de la radicalisation en islam est l’une des préoccupations majeures que les Etats d’Afrique de l’Ouest intègrent au nombre des facteurs d’insé- curité de leur région. Cette radicalisation se présente en termes historiques comme une longue tradition pratiquée dans le monde musulman et ne représente nullement une nouveauté sur l’échiquier socioreligieux africain1. En termes sociologiques, elle constitue l’aboutissement des facteurs liés à une sorte de condescendance culturelle et de convictions religieuses inscrite dans une vision politique que l’on veut imposer à la société civile en employant la contrainte.

Les dynamiques observées hier et aujourd’hui, dans la pratique religieuse musul- mane dénotent de la volonté manifeste de certains musulmans africains de donner une orientation à la pratique de l’islam sur leur continent. De la tendance dite modérée (pratiquée par une forte majorité sunnite) que le colonisateur a réussi à imposer sur le continent à travers une « politique musulmane »2 bien définie, l’on en arrive, un demi-siècle durant, à une tendance plus rigoriste pratiquée par des minorités voulant régir et contrôler la société musulmane. Ces derniers se fondant sur une interprétation limitée de la loi islamique s’engouffrent dans la pratique d’un « islam radical » pour imposer leurs vues. En tant que doctrine, l’islam radical est avant tout un courant militant et politique fondé sur des bases religieuses. Il est vu comme une idéologie réformiste qui propulse sur la scène religieuse musulmane de nouveaux acteurs et mouvements contestataires de l’islam traditionnel pratiqué en Afrique noire en général.

1 Au XVIIIe siècle, à la différence du moyen âge où l’islam était élitiste, l’idéal religieux à atteindre fut l’affaire des confréries musulmanes redynamisées au sein de certaines communautés ethniques telles les peuls fulb’e disséminés à travers toute l’Afrique. Ces peuls y impulsèrent une véritable révolution islamique. Dans les foyers confrériques peuls répandus à travers l’Afrique de l’Ouest, une ébullition enclenchée par les maîtres spirituels des confréries eut pour conséquence l’entame d’un « processus de renversements des pouvoirs » des chefs dits « païens » comme ce fut le cas au Fouta Djallon en Guinée actuelle, au Fouta-Toro au Sénégal, au Nord-Nigeria au Sokoto et au Macina au Mali. Ils attribuèrent à cette révolution le nom de Djihad, « guerre sainte » tant elle avait pour but ultime de conquérir des Etats païens et y instaurer un ordre islamique fondé sur les principes du coran et la loi islamique. Dans ces contrées d’Afrique, le mouvement du djihad était la manifestation originelle de l’action citoyenne et culturelle musulmane caractérisée par la violence, apparue comme un moyen d’imposition des idéaux politiques de l’islam dans ces contrées. Le spirituel qui se mêlant au temporel parvint à prendre le dessus sur lui grâce à l’action militaire d’un groupuscule d’acteurs de l’islam militant. En tout état de cause, le djihad au XVIIIe siècle a fait surgir de nouveaux Etats en Afrique de l’Ouest (Etats théocratiques) tout aussi autonomes dans leur gestion et étroitement lié au nom du Prophète. Ousmane Dan Fodio ou Seku Ahmadu encore moins El Hadj Omar Tall étaient des révolutionnaires islamiques désireux de jeter les bases d’un islam le situant par rapport aux réalités sociales et politiques du moment.

2 En Afrique Occidentale Française (AOF), les colons français, tout en encourageant l’islam toléraient sa pratique au début de leur arrivée pour leur mission civilisatrice en Côte d’Ivoire. En effet, pour consolider l’empire colonial dans ce vaste ensemble territorial, le gouvernement général de l’administration coloniale basé à Dakar créa en 1906 une structure dénommée « Service des affaires musulmanes » signe de l’intérêt qu’il portait à l’islam. Cette structure avait pour rôle essentiel de « mener des réflexions profondes sur les questions musulmanes dans les colonies de l’AOF et de dégager des stratégies adéquates afin de canaliser les populations indigènes et maintenir la domination française ». Cela, parce que l’islam s’était imposé comme une force constituée qu’il fallait surveiller et encadrer. En AOF, le Service des affaires musulmanes fut plus conciliant avec l’islam en favorisant le développement des activités des agents musulmans qui implantèrent des confréries dans toute la colonie.

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L’arrivée de ceux-ci a suivi une trajectoire ou un itinéraire religieux qu’il convient d’analyser dans cet article. Mais avant, il est important de souligner que notre étude ne consistera pas à épiloguer sur des mouvements de djihad en Afrique de l’Ouest encore moins sur leur folie meurtrière dans cette partie du continent noir. Il ne s’agit non plus, pour nous, de contribuer à cerner les contours théoriques ou étymologiques de certaines notions controversées et nuancées en vogue dans l’actualité contempo- raine telles l’islamisme, fondamentalisme, intégrisme et djihadisme.

Notre propos, justement, a pour but de s’appuyer sur certains faits sociohistoriques étayant la thèse selon laquelle le radicalisme islamique observé dans certains pays ouest africains a suivi un parcours à travers des doctrines et idéologies véhiculées en Afrique de l’Ouest. Mais de quelles doctrines et idéologies s’agit-il ? Comment se sont-elles introduites dans la sphère religieuse musulmane en Afrique de l’Ouest ? Comment se manifestent-elles dans ce vaste ensemble régional ? Quels sont les enjeux de la radicalisation islamique en Afrique de l’Ouest?

L’objet de cet article est de décrire l’itinéraire que la radicalisation islamique dans l’espace régional ouest africain a suivi sur le long terme. Pour nous, la trajectoire de la radicalisation est idéologique et contextuelle avec pour centre de gravité la violence militante qui la caractérise. Cela parce que, de la révolution islamique aux premières réformes dans le monde musulman ouest africain dès les XVIIè et XVIIIè siècles, jusqu’à l’arrivée sur l’échiquier religieux des courants contestataires et radicaux, le parcours est jalonné de doctrines et d’enjeux aussi divers que variés.

Pour arriver à étudier la question du radicalisme en Afrique, nous avons recouru à bien d’ouvrages en bibliothèque mais aussi consulté des périodiques et visiter de nombreux sites internet. Nous avons dans un premier temps cerné la notion « radi- calisme » et ses corollaires tels « islamisme », « fondamentalisme », « djihadisme ».

Pour ce faire, nous nous sommes référé à l’ouvrage de Olivier Roy (2001), Généalogie de l’islamisme qui diffusent d’énormes connaissances sur le radicalisme dans l’histoire de l’islam. Il évoque dans son ouvrage, le fondamentalisme traditionaliste sunnite, le chi’isme, le hanbalisme, le wahhabime avant de traiter des mouvements islamistes contemporains. Cet ouvrage nous renseigne également sur la doctrine du radicalisme.

Outre l’ouvrage d’Olivier Roy, nous avons consulté celui de Jacques Locquin (1997), L’intégrisme islamique : mythe ou réalité publié aux éditions L’Harmattan en 1997.

Cet ouvrage inscrit dans la même veine que le précèdent, a renforcé nos connais- sances sur le monde musulman. L’auteur traite de l’islamisme intégriste, puis définit les différents types de terrorismes dans le monde musulman avant d’évoquer des motivations majeures de sa pratique. Si ces deux ouvrages nous ont été utiles, ils ne traitent, cependant, que de l’idéologie militante et politique de l’islam au Moyen-Orient.

En plus des ouvrages, nous avons eu recours à des périodiques tant physiques qu’électroniques. Les premiers sont des revues. Celles qui nous ont été utiles pour cette étude évoquent dans une large mesure l’histoire des mouvements islamistes tels Boko Haram. Sur le site électronique de l’hebdomadaire africain Jeune Afrique, nous avons pu consulter moult articles sur les organisations islamistes au Nigeria, dans le Nord-Mali et au Niger. Ce périodique nous a également renseigné sur la mise en œuvre de la loi islamique (charia) dans ces Etats.

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Internet grande bibliothèque virtuele nous a également été d’une grande utilité en matière de connaissances sur notre sujet. Des reflexions aussi pertinentes que réalistes des analystes tels Vincent Hiribarren, Terje Ostebo et Laurence Aida Ammour nous ont permis d’approfondir nos connaissances sur le salafisme, le militantisme politique et le wahhabisme, trois thématiques clés largement évoqués dans le présent article.

Cette étude s’efforcera, dans un premier temps, de faire une analyse globale, des sources idéologiques de l’extrémisme musulman en Afrique de l’Ouest. Pour ce faire, nous nous sommes appesanti dans notre première partie, sur le wahabisme, puis évoquer dans la deuxième partie de notre article le salafisme-djihadiste comme idéologie majeure de l’endoctrinement des mouvements islamistes radicaux. Après avoir retracé les itinéraires du radicalisme en Afrique de l’ouest, nous avons traité, dans la dernière partie, des enjeux politique et socioéconomique de ce phénomène.

I- L’IDÉOLOGIE WAHHBABITE, TERREAU DE LA RADICALISATION ISLAMIQUE EN AFRIQUE DE L’OUEST

Selon Ravane Mbaye, en Afrique noire, on distingue dans la pratique islamique trois tendances principales : une tendance sectaire, une tendance traditionniste et une tendance moderniste. Cependant, l’islam en Afrique noire est aujourd’hui dominé par la présence de marabouts et de confréries mystiques dont les plus répandues sont la Qâdiriya et la Tijânîya. Sa modernisation au cours du XXè siècle axée sur l’organisation de ses adeptes en associations culturelles islamiques ou en unions nationales ou en fédérations lui a permis une solide assise dans nombre de pays à forte majorité musulmane tels que le Niger, le Nigeria, la Guinée, le Mali, le Sénégal, la Gambie, et même dans d’autres pays tels que la Côte d’Ivoire, le Libéria, le Ghana où l’islam partage avec le christianisme l’espace social et religieux.

L’une des caractéristiques majeures de l’islam en Afrique occidentale est qu’il est encore tributaire de l’influence idéologique arabe à travers des mouvements religieux islamiques venus d’Arabie saoudite ou des pays magrébins. L’islam emprunte toujours les sentiers tracés par ses « étrangers » arabes notamment et se situent souvent dans le sillage des doctrines religieuses importées tel le wahhabisme qui intègre en sa doctrine un certain extrémisme tant dans la pratique religieuse que dans l’attitude.

Le Wahhabisme3 est arrivé en Afrique de l’Ouest autour des années 30 et s’est implanté plus massivement dans les années 50. Fondamentaliste, rigoriste et inté- griste, ce fut la forme la plus manifeste de l’extrémisme musulman tout au long du XXè siècle et sera le terreau idéologique du terrorisme au début du XXIè siècle.

Le wahhabisme, mouvement politico-religieux salafiste est un islam sunnite réformé venu de la péninsule Arabique (Arabie Saoudite) ou d’Égypte et qui jugea hérétique

3 Le wahhabisme a été fondé dans la péninsule Arabique, au XVIIIe siècle, par Muhammad ibn Abd al- Wahhab. Il représente un courant traditionnel qui se distingue par une lecture littérale de l’islam et par son aspect rigoriste et puritain. Il condamne en particulier toute innovation par rapport à l’enseignement originel de l’islam et considère que l’Etat doit fonctionner exclusivement selon la loi religieuse. Le pacte entre Ibn Abd al-Wahhab et Ibn Séoud, le fondateur de l’Arabie saoudite, fera de ce pays, le berceau du wahhabisme. (Source: Dictionnaire mondial de l’islamisme, Plon.)

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l’islam confrérique soufi4 pratiqué dans nombre de contrées africaines. Ce sont des étudiants africains pèlerins qui de retour du Caire, de Médine ou de la Mecque, qui introduisirent la doctrine de la Wahabia en Afrique de l’ouest. Ces jeunes étudiants

« contestent l’authenticité de la pratique traditionnelle de l’islam qu’ils jugent être une exploitation de la crédulité des fidèles par les marabouts » explique Laurence-Aïda Ammour (2017). Ceux-ci souhaitent donc le « retour aux sources, bannissent l’utilisa- tion du chapelet, critiquent les pratiques maraboutiques qu’ils qualifient de charlata- nisme et d’associationnisme et l’affiliation aux chefs spirituels» ajoute Laurence-Aïda Ammour (2017). Par ailleurs, Laurence Aida Ammour précise que l’introduction du wahhabisme est également l’œuvre des grands commerçants. En effet, selon elle, l’émergence de ce mouvement « correspond aussi à une période de migration et d’urbanisation d’après-guerre qui conduit de riches entrepreneurs à embrasser son idéologie hostile aux pratiques maraboutiques pour s’émanciper des contraintes sociales traditionnelles ». En tout état de cause, à travers le wahhabisme, il s’agissait pour ses adeptes de contester l’islam traditionnel modéré africain.

De par son dynamisme, le wahhabisme réalise une percée en Afrique de l’ouest notamment au Mali, au Sénégal, en Mauritanie ou au Niger, au Tchad, pays majori- tairement musulmans, mais aussi au Burkina ou en Côte d’Ivoire.

A partir des années 70-80, de nouveaux adeptes du wahhabisme venus d’Arabie Saoudite ou d’Egypte opposeront une concurrence farouche à l’ordre religieux ancien pour ainsi semer, dans le champ religieux africain, de nouvelles graines des préceptes religieux appris dans les universités de la péninsule arabique ou d’Egypte. Le tissu social africain subsaharien fut dès lors imprégné de ce « conservatisme islamique » et les mœurs furent influencées par les enseignements wahhabites par le canal des écoles coraniques et d’associations inspirées de celles en vigueur en Arabie saoudite.

Au cours des années 80, l’on assista à une offensive religieuse et diplomatique de l’Arabie saoudite en Afrique de l’Ouest. Son activisme religieux aura permis l’instal- lation d’ONG, de centres de santé, d’écoles dans le but affiché de faire la promotion du wahhabisme dans nombre de pays d’Afrique de l’Ouest. Les élites musulmanes acquises à la cause wahhabite « vont diffuser des normes, réviser des pratiques culturelles et s’imposer des valeurs morales et sociales sur des bases islamiques : imposition d’une façon de prier (bras croisés contre bras le long du corps), choix des horaires de prières et remise en cause de la fête traditionnelle du Maoulid célébrant la naissance du Prophète. Parallèlement, les signes extérieurs de cette religiosité standardisée de plus en plus ostentatoire vont alimenter une surenchère vestimentaire5 à la mode islamique contre l’habit traditionnel » (Laurence-Aïda Ammour, Art.cit).

Dans ce registre, le wahhabisme entend mettre fin au pouvoir spirituel du mara- bout, pilier central du système religieux dans l’ordre soufi et organise la vie sociale individuelle et communautaire du musulman dans les mosquées où les besoins de tous ordres des fidèles pourraient être satisfaits. Dès lors que la mosquée devint le

« centre de vie sociale », les wahhabites s’employèrent à financer la construction de

4 Soufisme : courant mystique et ascétique de l’islam.

5 Il s’agit du port de la barbe pour les hommes, la robe noire et le voile intégral pour les femmes.

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nouvelles mosquées6, à la rénovation d’anciennes, à la « prise en charge des frais de fonctionnement d’une multitude de petites mosquées ou de mosquées monu- mentales et de complexes religieux dans de nombreuses villes d’Afrique : Khartoum, Yaoundé, N’Djamena, Lagos, Abuja, Bamako, Nouakchott ( où la mosquée centrale s’appelle d’ailleurs mosquée saoudienne), Conakry, Accra et Kampala » (Laurence- Aïda Ammour, Art.cit.).

Considérée comme une terre de mission, « terre de dawa («prédication») la plus importante après l’Asie du Sud-Est » selon l’islamologue Mathieu Guidère que citent Laurent De Saint Perier et Rémi Carayol (2013) : « L’Afrique comptait entre 2001 et 2011, près de 20 % des musulmans adeptes du wahhabisme » 7. L’islamo- logue français explique cette poussée démographique de la population wahhabite :

« L’immense fortune des monarchies pétrolières assure aux mosquées wahhabites d’Afrique de l’Ouest et à leurs imams (souvent formés en Arabie) la bienveillance des pouvoirs locaux et la reconnaissance des populations que leurs organisations caritatives assistent, pour mieux les gagner à leur cause ». Mais, la méthode utilisée consiste à s’intéresser avant tout aux chefs traditionnels susceptibles de convertir l’ensemble de leur clientèle : «Iyad Ag Ghaly, le chef touareg d’Ansar Eddine converti au wahhabisme pendant un séjour en Arabie, a convaincu la moitié des Ifoghas (tribu touareg maraboutique essentiellement nomade installée au Mali, en Algérie et au Niger) de suivre son exemple à son retour dans le Sahel » poursuit-il ( Laurent De Saint Perier et Rémi Carayol, Art.Cit.).

Au Mali, après 2001, on a assisté à un dynamisme certain de la tendance wahha- bite impulsé par des adeptes dont la plupart sont de riches commerçants et ou de prospères hommes d’affaires. Cette dynamique religieuse wahhabite est visible et tangible dans l’espace social et vital avec la construction de dizaines de mosquées qualifiées de « mosquées wahhabites » par la population dans de nouveaux quartiers de Bamako construits par les Wahhabites pour contrebalancer les mosquées tradi- tionnelles implantées dans la capitale. La forte croissance démographique observée à Bamako (la population de Bamako est passée du simple au double entre 1998 et 2011 soit d’un million d’habitants à deux millions) aura eu pour conséquence directe l’augmentation vertigineuse du nombre de mosquées wahhabites dans la capitale malienne (de plusieurs centaines, elles ont triplé depuis les années 2000) (Laurent De Saint Perier et Rémi Carayol, Art.Cit.).

6 Les sommes investies dans le financement des mosquées en Afrique de l’Ouest par Riyad, selon Laurence Aïda Ammour, « sont colossales : les mosquées du Roi Fayçal à Conakry et au Tchad res- pectivement 21.3 millions et 16 millions de Dollars, la mosquée de Bamako 6.7 millions de dollars ».

Source : Laurence Aïda Ammour, Art.cit.

7 « Marginal jusqu’au début des années 1980, le phénomène du Wahhabisme en Afrique de l’Ouest a pris de l’ampleur plus particulièrement après la révolution iranienne de 1979 et l’envoi par Téhéran de prédicateurs dans l’ouest africain où une forte communauté libanaise chiite constituait un relais idéal.

Pour contrer l’influence iranienne en Afrique de l’Ouest, l’Arabie saoudite et le Pakistan ont développé une stratégie missionnaire d’État et leurs prêcheurs, en s’alliant aux mouvements anti-Occidentaux, ont été particulièrement suivis après le 11 septembre 2001 » analyse Mathieu Guidère, Art.Cit.

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Outre les mosquées au Mali, des ONG financées8 par les Wahhabites des pays du Golfe arborent leur ultra-conservatisme et leur extrémisme dans la pratique reli- gieuse musulmane. Ce fut le cas de l’ONG Alpharouk dont le siège abrite la mosquée wahhabite du nom d’Al- Muntada al-Islami, dirigée par l’imam Ousmane Traoré qui déclarait laconique : « Celui qui n’est pas musulman n’est pas mon frère, même si nous sommes frères de lait » (Laurent De Saint Perier et Rémi Carayol, Art.Cit.).

Au fait, il s’agissait pour l’imam Traoré de purifier l’islam de toute trace culturelle étrangère. Pour ce faire, les édifices dits mondains ou autres endroits jugés sata- niques tels les boîtes de nuit et les bars ont été la cible des extrémistes wahhabites.

La déprédation de plusieurs bâtiments dans des quartiers wahhabites de Bamako ont été légions. Que ce soit à Kalaban Coura, à Yirimadjo ou de Lafiabougou pour ne citer que ces quartiers, la tendance rigoriste s’inscrit très largement dans une vision culturaliste et essentialiste dans la pratique de l’islam.

Avec l’avènement du groupe Ansar-Dine en 2012 dans le Nord Mali, plusieurs mausolées de Tombouctou ont été détruits9. Les islamistes se sont conformés « aux enseignements du fondateur du wahhabisme, Ibn’Abad Al Wahhab, pour qui ni les monuments, ni les hommes ne doivent être vénérés». Pour les Wahhabites, la purifi- cation de la société musulmane est une exigence fondée sur des préceptes islamiques selon lesquels aucune créature humaine ne doit être divinisée. C’est pourquoi, selon eux, la vénération des tombes, sanctuaires, bibliothèques, sont des formes dégui- sées de polythéisme. Ces pratiques calquées sur celles du monde occidental ne pouvaient qu’être bannies. Fondamentalement antioccidental, le wahhabisme rejette toutes pratiques négatives que l’Occident aurait introduit dans le monde musulman telles l’alcoolisme, la prostitution et la corruption. Le rejet de l’Occident eut un fort écho retentissant dans le milieu religieux wahhabite. L’influence occidentale fut donc considérée comme étant la source naturelle de la tare de la société musulmane.

Les adeptes du wahhabisme ne détruisent pas que des monuments ou rejette l’Occident sous toutes ses formes mais s’en prennent également à la « pluralité des musulmans jugés mécréants » à en croire Laurence Aida Ammour (2013): « depuis plusieurs décennies, Riyad a entrepris de diffuser son modèle de croyance selon le principe du prosélytisme et de la diffusion de la foi pour contrecarrer les obédiences musulmanes et les pratiques populaires de l’islam présentes sur le continent : sou- fisme, idadisme, culte des saints etc. »

L’islam radical bien que très minoritaire en Afrique de l’Ouest et rejeté par une grande partie de la population musulmane de la région a, cependant, réussi à infiltrer le tissu social dans des pays tel le Niger. La stratégie d’infiltration dans ce pays a consisté à l’assistance financière et donc à une aide sociale d’associations musul- manes qataries ou saoudiennes envers l’État nigérien Justine Spiegel, Madjiasra Nako et Rémi Carayol dans un article commun publié dans Jeune Afrique, analyse l’origine de la diffusion d’un nouveau modèle de l’islam au Niger au début des années 90 : «

8 Selon une étude de 2002, en 1980, 1854 ONG présentes sur le continent africain 7.4% étaient islamiques.

Ce chiffre est passé à 5896 en 2000 soit une augmentation de 310% dont 15.10 % d’ONG islamiques.

Source : Laurence-Aïda Ammour, Art.cit.

9 Ses destructions font référence à la conquête de la Mecque qui fut en 1803 le théâtre où des sites historiques, des mosquées et des tombeaux saints dont la « maison du prophète » furent détruits.

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(…) l’État nigérien, affaibli par les politiques d’ajustement structurel (PAS), facilite la création d’ONG. Il compte sur elles pour combler les carences créées par les coupes budgétaires dans les secteurs sociaux. Arrivent ainsi Qatar Charity, l’Agence des musulmans d’Afrique, Islamic Relief, Muslim Hands etc. Avec l’aide d’organisations locales, elles s’engagent dans la distribution de vivres et de vêtements, dans l’aide à l’achat d’animaux et la création de banques céréalières au lendemain des séche- resses (1993, 2004 et 2005). Elles élargissent ensuite leurs activités en soutenant les Nigériennes qui montent des affaires génératrices de revenus. Entrées par la porte du social, les ONG musulmanes diffusent un nouveau modèle d’islam » (Justine Spiegel, Madjiasra Nako et Rémi Carayol, 2013).

Au début des années 2000, le développement de ces activités financées par les wahhabites du Golfe contribua à l’amélioration des conditions de vie dans le nord du Niger où les populations étaient en proie à des formes extrêmes de pauvreté. Cela permit un afflux d’argent dans la région que l’économie formelle était incapable de fournir (on note la présence de six à sept banques à Agadez alors qu’il n’y en avait que deux auparavant) souligne l’anthropologue Emmanuel Grégoire (2015). Les prédicateurs extrémistes venus d’ailleurs, ont rempli le vide de l’Etat et gagné des cœurs mais aussi des âmes. Il y a une certaine prospérité qui permit une stabilité politique de la région nord du Niger pourtant voisine aux nord-est malien et sud libyen traversées par une crise sociopolitique et religieuse. De l’aide sociale, les wahha- bites arrivèrent à prôner une application stricte du Coran dans la société. La société nigérienne ( pourtant laïque) fut davantage régulée par l’islam avec une présence plus visible de l’influence idéologique wahhabite dans l’espace public notamment au cours des consultations électorales, avec le serment des juges sur le Coran, le voilage croissant des femmes ou la présence de mosquées au sein même de tous les bâtiments publics. « Au tout début des années 2000 (…), plusieurs jeunes filles sont prises à partie à Zinder, dans le centre du pays, et à Niamey, pour avoir porté des tenues jugées indécentes ; des bars sont attaqués et des prostituées agressées (...). » (Justine Spiegel, Madjiasra Nako et Rémi Carayol, Art.Cit.).

L’instauration d’un conformisme intégriste dans les mœurs des musulmans au nom de la pratique d’un islam des origines eut pour conséquence (parmi tant d’autres), l’intégration d’une forme d’extrémisme chez une minorité de musulmans ouest-afri- cains. Cet extrémisme contribuera à créer un environnement favorable à toute forme d’intolérance. La jeune génération de musulmans intégristes sera porteuse de ce radicalisme plus d’un demi-siècle plus tard avec le djihadisme salafi armé.

II-LE DJIHADISME SALAFI OU LA PLÉNITUDE DE L’IDÉOLOGIE RADICALE

La grande majorité des musulmans d’Afrique occidentale appartient à la commu- nauté sunnite. Sur l’échiquier religieux musulman, en Afrique de l’Ouest, on note éga- lement la présence du soufisme, la dimension mystique de l’islam et du salafisme qui appelle à suivre l’exemple des trois premières générations « salaf » « prédécesseur » ou « ancêtre » dans l’Islam. C’est cette dernière doctrine qui nous intéresse. Carac- térisé par des approches puritaines de l’islam, les salafistes « prétendent revenir aux sources de la religion musulmane en se réclamant de l’idéologie des pieux ancêtres,

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seule pratique de l’islam qui soit véritable (…) et prônent ainsi un retour à cet âge d’or, considérant que les croyants de l’époque sont ceux qui ont le mieux compris et le mieux appliqué la religion.» (Andrea Gennai, 2016). Concrètement, le salafisme s’impose au XVIIIe siècle en Arabie saoudite. Cette doctrine « condamne toute forme d’innovation (bid’a) et elle repose sur le principe de l’unité divine (tahwid). Dieu est considéré comme unique et le seul objet d’adoration possible des croyants, n’admet- tant notamment pas d’intermédiaire possible entre lui et eux » (Samir, Amghar, 2018).

Trois courants traversent aujourd’hui le salafisme. Il s’agit des salafismes quiétiste, politique et djihadiste. Pour le sociologue, Samir Amghar, « le premier s’inspire du wahhabisme et prône notamment la réislamisation des sociétés musulmanes par le bas, c’est-à-dire par la société civile ». Cette réislamisation ne pourrait se faire que par le biais de l’éducation islamique dans les sociétés musulmanes. Loin de toute tendance et influence politique, les salafistes quiétistes ont la particularité d’être « pacifistes », ne cherchant aucunement à changer la politique en vigueur dans les terres des missions qu’ils sillonnent dans le cadre de leurs prédications. Quant au salafisme politique, il

« possède la même base idéologique que le salafisme quiétiste mais considère que la pratique religieuse doit être accompagnée d’un activisme politique ».

Contrairement aux deux courants précédents, le salafisme djihadiste (ou encore djihadisme salafi), intègre une idéologie révolutionnaire. Le salafiste djihadiste

« pense que l’action directe est obligatoire pour l’avènement d’un État islamique (…) et prône donc un «djihad»armé contre les impies et les gouvernements musulmans jugés traîtres à l’islam dans le but de créer un État islamique (Andrea Gennai, 2016).

C’est dans cette vision doctrinaire que s’inscrit Mohamed Yusuf fondateur de la secte Boko haram qui de retour au Nigéria après ses études en théologie à Médine en Arabie Saoudite, crée la secte musulmane Boko haram en 2002 à Maiduguri, capitale de l’Etat de Borno dans le Nord-Est du Nigeria. Officiellement cette secte est connue sous l’appellation Groupe sunnite pour la prédication et le djihad. Mais la définition littérale la plus usitée en langue Haoussa est : « l’éducation occidentale est interdite », Boko référant au mot « livre » en anglais (book), au sens large désignant «l’éducation occidentale», et Haram qui signifie « interdit donc un péché «. La faible gouvernance étatique au nord (il existe une frontière idéologique, culturelle et religieuse qui sépare le nord et le sud du Nigéria) et les avatars de l’histoire du pays empreinte de division depuis la guerre civile sanglante du Biafra suivie d’injustices sociales et de margina- lisation des populations du Nord du Nigéria par les gouvernements successifs depuis l’indépendance, ont fait le lit de l’émergence d’une société musulmane marquée par un fondamentalisme entretenu par de nouveaux prêcheurs tel Mohamed Yusuf.

Dès son retour dans l’Etat de Borno, ce dynamique prêcheur salafiste jeta les bases doctrinales de cette secte salafiste radicale, en puisant dans les enseignements de son maître Cheikh Jafar Adam10 pour des prédications enflammées. Appuyé de

10 « Ja’afar Mahmud Adam, né le 12 février 1960 à Daura et mort à Kano le 13 avril 2007, est un prédi- cateur musulman nigérian, appartenant au mouvement Izala (en), un groupe salafiste fondé en 1978. Un des prédicateurs les plus influents du mouvement, il contribue notamment à la formation de Mohamed Yusuf, le fondateur du Groupe sunnite pour la prédication et le djihad (Boko Haram), et reste en relation suivie avec lui jusqu’à ce que Yusuf prenne clairement position en faveur de l’action violente, vers 2003- 2004. Il est assassiné pendant qu’il priait dans une mosquée de Kano en avril 2007, sans doute par Boko Haram ». Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ja%27afar_Mahmud_Adam.

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ses compagnons (des clercs islamiques), Mohamed Yusuf établirent un « complexe religieux » pour ses actions d’enseignements et d’édification de la foi selon sa vison salafiste. Ce qui attira dans ce centre de nombreuses familles musulmanes pauvres et marginalisées du Nigeria et des pays voisins.

L’objectif ultime de Mohamed Yusuf et ses clercs en fondant ce centre islamique était la création d’un califat (sur le modèle de l’Etat théocratique fondé par Ousman Dan Fodio en 1804, du régime taliban en Afghanistan et Al shabab en Somalie) régi par la charia dans tout le pays, y compris au Sud chrétien. La volonté inébranlable de Mohamed Yusuf d’atteindre cette ambition en correspondance avec la doctrine salafiste djihadiste fit changer le mode opératoire du groupe. En effet, de prédications radicales dans les mosquées et autres centres islamiques dans la région nord, la secte sombra dans la violence meurtrière de masse. Elle lança, en effet, le 26 juillet 2009, une série d’attaques simultanées dans quatre États du nord du Nigeria à savoir Bauchi, Borno, Yobe et Kano. L’armée intervint quatre jours après l’attaque djihadiste et neutralise11 les extrémistes fondamentalistes. L’échec de ces attaques n’entamera en rien la volonté de la secte à créer un Etat islamique. Elle se réorganise et reçoit des formations d’agents d’Al-Qaïda pour une utilisation plus efficace des explosifs et ainsi exécuter des attaques de masse. Du militantisme islamique on en arrive au militantisme politique en multipliant des techniques terroristes pour faire face à l’ennemi qui n’est non plus le gouvernement central de Lagos mais l’occident tout entier symbolisé par l’attaque, le 26 août 2011, d’un bâtiment de l’ONU à Abuja ayant causé la mort de 19 personnes. En communion parfaite avec d’autres organisations terroristes internationales tels Daesch, le Mujao et Al-Qaïda, le sentiment anti-occi- dental grandit pour en faire une idéologie majeure.

Les circonstances évoluant, le mode opératoire changera et consistera, dès l’avènement d’Abubakar Shekau à la tête de la secte en 2010, en une guérilla, des attentats suicides et même des prises d’otages des populations civiles (musulmanes et chrétiennes) dans le Nord-Est du Nigéria.

L’islam fondamentaliste qui déferle sur le Nigeria fut promu par l’Arabie saoudite et le Qatar, à coups de financements massifs, de formations de clercs et de propa- gande médiatique. La promotion du salafisme djihadiste devint une gageure aux yeux des Arabes de ces pays du golfe qui multiplieront les foyers salafistes djihadistes en Afrique de l’Ouest. En effet, outre le Nigeria, ceux-ci soutiendront la création de plusieurs groupes armés salafistes au Sahel. En effet, le Qatar fut accusé12 par les Occidentaux d’apporter, par le truchement du Croissant Rouge du Qatar (organi- sation caritative), soutiens financiers et aides matériels au Mali à Ansar Dine ( à ne pas confondre avec son homonyme créé en 1992 et dirigé par le prédicateur Chérif Ousmane Haïdara, vice-président du Haut Conseil islamique du Mali) ainsi qu’AQMI, le MUJAO et le MNLA. Ces groupes islamistes, tout comme Boko haram ont en com- mun leur volonté d’instaurer la charia à l’ensemble du Mali. Ce fait est corroboré par la position défendue par le groupe Ansar Dine dans un communiqué livré à la commu-

11 Le bilan des combats s’élève à plus de 700 morts, dont au moins 300 militants islamistes. Mohamed Yusuf, capturé par l’armée à Maiduguri est abattu par la police fédérale.

12 Ce sont des accusations non fondées ne reposant sur aucune preuve tangible de traçabilité de ce financement.

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nauté internationale le 18 mars 2012 : « À compter de ce jour, nous nous engageons à la lutte armée sans merci pour l’application de la charia, dans un premier temps dans l’Adrar des Ifoghas. Quiconque est d’accord avec cette position est avec nous.

Nous sommes des musulmans du Mali (...) et notre objectif est de convaincre de gré ou de force les autres à appliquer la charia. Nous ne voulons pas une république indépendante à part, mais une république islamique»13.

Si les islamistes radicaux eurent à vouloir imposer la charia dans les régions qu’ils contrôlèrent, c’est parce qu’ils bénéficièrent d’un terrain favorable à la promotion de leur idéologie. C’est par une stratégie servie par un entregent politico-économique avec des soubassements doctrinaires que le djadisme salafi s’est développé dans les zones Nord du Mali, du Nigeria, du Niger. Ces zones vastes en étendue ont pour caractéristiques communes la pauvreté, le manque d’infrastructures et l’impression d’être abandonnées par le gouvernement central de ces pays.

D’après une étude en Afrique de l’Ouest menée par la représentation Afrique de l’Ouest du Programme des nations unies pour le développement (Pnud) et dont les résultats ont été publiés le jeudi 7 septembre 201, la pauvreté et l’exclusion sont des terreaux favorables à l’extrémisme musulman. En effet, le Pnud a interrogé 495 jeunes rescapés des filières djihadistes sur leurs motivations à intégrer les rangs des mouvements djihadistes. Selon le Lamine Mar Dieye responsable du Pnud Afrique de l’Ouest à cette époque : « Bien que 50 % des personnes interrogées aient cité la religion comme principale motivation, 57 % admettent n’avoir qu’une connaissance superficielle de l’islam (…). Les jeunes qui intègrent ces groupes ne croient aucu- nement en l’idéologie islamiste et n’ont quasiment aucune notion de l’islam » (Lucie Sarr, 2017).

A l’analyse, Lamine Mar Dieye note que « (…) la pauvreté associée à l’exclusion et à la marginalisation forment un cocktail explosif qui fait que ces jeunes n’ont pas d’espoir et constituent des proies faciles pour les groupes extrémistes ». Développant

« une économie de la radicalisation (…) les recruteurs des filières djihadistes profitent de la vulnérabilité des jeunes qui veulent coûte que coûte sortir de leur situation de grande précarité (…). 71 % d’entre eux affirment qu’ils n’auraient pas intégré les mouvements islamistes s’il y avait eu des programmes gouvernementaux visant à leur assurer une insertion professionnelle » Lucie Sarr (2017).

Il est reproché aux groupes djihadistes de financer leurs activités « par le commerce et d’autres activités lucratives ; par le biais des ONG, des organisations caritatives, et des prélèvements ; par la contrebande d’armes, de biens et de devises par les passeurs de fonds ; et par le trafic de drogue » selon le Rapport Groupe d’Action Financière (Gafi), intitulé « Financement du terrorisme en Afrique de l’Ouest », publié en octobre 2013.

De ce fait, « la religion n’est pas le moteur du jihad » comme le soutient Le juge Trévidic mais un paravent sous le couvert duquel se développent de vastes économies informelles basées sur l’instabilité politique, la violence ethnique et communautaire, la corruption endémique, la pauvreté galopante, le taux élevé du chômage et le

13 Déclaration disponible sur https://www.atlasinfo.fr/Mali-un-mouvement-islamiste-appelle-a-appliquer- la-charia-par-les-armes_a26787.html consulté le 22 février 2018.

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sous-emploi. Encore plus important, des groupes terroristes et leurs financiers tirent des fonds à la fois d’activités licites et illicites et les déplacent à travers des canaux formels et informels pour soutenir leurs activités. Ce sont là également autant de facteurs qui expliquent la radicalisation grandissante de terroristes et extrémistes en Afrique de l’Ouest.

Mais, force est de reconnaitre que les enjeux de la radicalisation islamique se résument en un seul point : rejeter la culture occidentale et promouvoir ainsi la charia comme seule alternative aux retours aux sources.

III-DES ENJEUX DE CIVILISATION

L’idéologie salafiste eut un écho favorable auprès de nombreux jeunes chômeurs, travailleurs informels ou élèves coraniques dans l’espace ouest-africain. De plus en plus en rupture avec les normes sociales et familiales des générations précédentes et largement déscolarisées, endoctrinées, ces populations issues des couches sociales défavorisées et abandonnées nourrissent une haine de l’Occident et de l’Etat démocratique moderne. Cet anti-occidentalisme est soutenu par le prétexte selon lequel ces populations « seraient en train de perdre leur identité musulmane face à l’influence grandissante de l’occident et du christianisme » note Jean-Pierre Olivier de Sardan (2017).

D’une part, Jean-Pierre Olivier de Sardan (2017) note encore que « le sentiment anti-occidental des salafistes djihadistes né des comptes non soldés de la colonisation occidentale dont l’héritage se résume en une dépendance humiliante envers l’Occident et l’exclusion du plus grand nombre des bénéfices du développement » explique le succès de l’idéologie salafiste, et légitime de fait les violences. D’autre part, l’adhé- sion au sentiment anti-occidental s’expliquerait par « le rejet de la classe politique (…) face à la corruption croissante, à l’enrichissement débridé des élites, aux jeux politiciens exaspérants et stériles, à l’importance du chômage, ou à l’échec profond d’un système scolaire en déroute » explique l’anthropologue Jean-Pierre Olivier de Sardan. « Le rejet de l’élite politique s’étend à la nomenklatura musulmane modérée : les associations islamiques officielles ou les confréries sont accusées simultanément de collusion avec l’Etat et de laxisme religieux ».

Au demeurant, les organisations salafistes djihadistes deviennent « le réceptacle de toutes les frustrations ». La « guerre idéologique » qu’elles mènent tire ainsi ses sources de toutes ces frustrations exprimées dans les prêches de prédicateurs et autres propagandistes salafistes mais aussi d’une rhétorique d’exclusion. La bataille des salafistes est une réponse de l’idéologique contre les influences occidentales.

L’idéologie selon laquelle les musulmans sont sous influence occidentale négative raison pour laquelle ils ne constituent pas de bons musulmans, amènerait les salafistes à une quête constante de la pureté originelle pour retrouver la spiritualité primitive perdue en conformité avec la charia.

A l’analyse, appliquer la charia relève plus d’un certain militantisme dans l’islam.

Or qui dit militantisme, dit forcement idéologie. En effet, « l’islam contemporain se caractérisant par une fragmentation doctrinale présente des interprétations extrê- mement sélectives des préceptes religieux et met en avant une idéologie appliquée

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localement mais inscrit dans un contexte «d’islam mondial» ». Le combat contre les éléments locaux culturels et soufis de l’islam relève également de l’idéologique. Tout comme la formation des leaders spirituels dans les pays du golfe, les activités de da’wa, les medersas et les aides de diverses ONG islamiques (allusion faite à Jama’at al-Tabligh : mouvement mondial non violent pour la propagation de la foi islamique) avaient en sourdine l’intention de réduire la société musulmane de l’influence négative de l’occident sur la religiosité des musulmans.

Le dirigeant d’Ansar Dine, Iyad Ag Ghali, a été nourri à la sève des enseignements des prédicateurs du mouvement tabligh au début des années 2000 avant de s’orien- ter progressivement dans une direction plus militante. D’après Baz Lecocq et Paul Schrijver (2007) « son séjour en Arabie saoudite en qualité de membre de la mission diplomatique du Mali l’a probablement mis en contact avec des enseignements sala- fistes militants, ce qui a façonné peu à peu sa pensée jihadiste ».

L’idéologie salafiste a toujours constitué à entretenir une vision de la politique et du pouvoir politique. C’est pourquoi, les salafistes ont toujours eu en ligne de mire la création d’un Etat islamique régi par la loi islamique. Cette intention a été clairement affichée par Muhammad Yusuf dès la création de Boko Haram tout comme les orga- nisations djihadistes du Nord-Mali.

En général, cette ambition s’opère dans une sorte de repli ethnique, régionaliste voire nationaliste. Créer un Etat islamique pour protéger l’islam menacé par « des forces de contamination » occidentales est le crédo des militants salafistes djiha- distes. Ceux du Mali sont parvenus à s’assurer un contrôle territorial, si fragile qu’il soit, à cette fin. En établissant « des règles strictes visant à instaurer un environne- ment pieux, ils ont détruit les sanctuaires soufis et réprimé des activités « immorales

» telles que l’usage du tabac, de l’alcool et du khat par l’application de sanctions hudud (restrictions) telles que la peine capitale, l’amputation ou la flagellation. Boko Haram, qui n’est pas parvenu à un tel contrôle territorial, préconise un « programme identique de pureté politisée, devant être imposé à tous les Nigérians quelle que soit leur appartenance religieuse » note Terje Ostebo, (2012).

Que ce soit au Niger, au Cameroun, au Mali ou au Nigéria, les salafistes extré- mistes maîtres des lieux qu’ils contrôlent, imposent une culture arabe inspirée du wahhabisme, courant religieux aux antipodes de la civilisation occidentale. « Des signes extérieurs ostentatoires de cette forme de religiosité alimentent une surenchère vestimentaire à la mode islamique » note Laurence Aida Ammour. Construire un style de vie fondé sur la seule loi islamique, tout en rejetant tous les aspects de l’influence occidentale (philosophie, institutions politiques et valeurs), l’idéologie salafiste promeut l’adhésion à l’islam, avant tout, comme une forme d’allégeance politique. Interconnecté avec des courants idéologiques mondiaux, les extrémistes musulmans de l’Afrique de l’Ouest proposent un programme axé sur la conjoncture du moment fait encore remarquer Terje Ostebo, (2012). En effet, confrontés aux dangers que le monde contemporain « s’achemine vers une universalisation de ces grands principes que sont les droits de l’homme, la condition de la femme et le cantonnement des églises à un rôle séculier , l’Arabie Saoudite, tête de pont de la promotion du wahhabisme, s’emploiera à vouloir endiguer la forte influence occidentale sur le monde » souligne

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Jacques Locquin (1997) . Raison pour laquelle, profitant du contexte sociopolitique nouveau à la fin des années 1980 et début 1990 marqué par la libéralisation éco- nomique, la crise socioéconomique causée par les Programmes d’Ajustements Structurels (PAS) imposés à nombre de pays d’Afrique subsaharien et l’instauration du multipartisme en Afrique, Riyad renforcera son offensive idéologique à travers un activisme social fort déconcertant de ses agents religieux d’obédience wahhabite.

Pour les Saoudiens, « il s’agissait de «ré-initialiser» et de «moraliser» les sociétés africaines sous le prétexte que l’islam empreint de coutumes locales pratiqué par les musulmans du continent n’est pas conforme à l’interprétation stricte et littérale qu’en font les Wahhabites » analyse Laurence-Aïda Ammour. Voulant ainsi « démontrer que l’islam est une alternative à l’échec du modèle occidental de développement », les Wahhabites à travers leur idéologie « restent convaincus que leur conception de la civilisation, née de l’islam représente une autre forme de modernité et qu’elle doit être assumée » analyse Jacques Locquin, (1997).

Les représentations mentales et sociales que se font les adeptes de l’islam « origi- nel » constituent une sorte de catalyseur à l’intégrisme islamique. Vouloir créer un Etat islamique pour la faire régir par la loi islamique, la charia, est l’expression manifeste même du rejet de l’Occident avec ses principes démocratiques. Il s’agit donc, pour les intégristes, selon Olivier Roy (2001) de « rétablir la souveraineté de Dieu sur la société des hommes » qui, selon les adeptes de ce fondamentalisme islamique, tend à se « christianiser » avec le principe de laïcité, principe de conception occidentale.

C’est pourquoi, en proposant le wahhabisme comme alternative à la culture occiden- tale accusée de détruire la culture islamique, il devint le creuset de toute idéologie contestataire de l’ordre politique occidental et de sa civilisation.

CONCLUSION

Il ressort de notre étude que la radicalisation islamique en Afrique de l’Ouest ne suit pas un parcours linéaire. L’extrémisme ne résulte pas de l’explication traditionnelle du processus de radicalisation. Il suit le tracé des doctrines islamiques (wahhabisme et salafisme) véhiculées en Afrique un demi-siècle durant. Il est la conjugaison d’un faisceau de facteurs socioéconomiques et politiques religieux fondés sur l’idéologique religieux dont la promotion vise à créer un ordre religieux et sociopolitique nouveau.

Dans certains cas, nous l’avons vu, le radicalisme islamique pourrait tirer son ori- gine dans la conception de l’islam comme étant à la fois religion et Etat, soumission au Dieu unique et modèle d’organisation de la société. Les leaders religieux que nous avons évoqués poursuivent un idéal religieux qui, selon eux, ne peut se réaliser pleinement qu’à travers l’idéal politique à savoir la «cité musulmane». Des groupes et des mouvements musulmans qui, se fondant sur des préceptes religieux, cherchent à faire appliquer des normes religieuses, sociales, culturelles et politiques. Ce sont des militants islamiques qui animés par le désir ardent de promouvoir une certaine lecture de l’islam utilise la violence comme moyen expressif de leur volonté de créer un microcosme assujettit aux lois islamiques.

Dans cette étude, nous avons mis en relation toute une gamme de questions interdépendantes de l’histoire, la politique, la religion, l’économie et les influences

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extérieures. Comme pour dire que pour cerner au mieux les trajectoires de la radicali- sation islamique en Afrique de l’Ouest, il faille établir une corrélation entre ces enjeux.

Par-dessus-tout, force est de noter que la promotion de la doctrine salafiste dans la société musulmane africaine orchestrée par des pays du Golfe contribua fortement au « succès » des mouvements islamistes sur le continent sous les formes de Boko Haram, d’AQMI et autres. Il s’agit là de la prétention des Arabes à la suprématie dans le monde de l’islam.

Cette promotion continuera-t-elle à prospérer face à un islam confrérique soufi qui constitue un rempart indestructible à la poussée salafiste wahhabiste et qui préserve les musulmans modérés de la tentation extrémiste ?

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Références

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