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La structure différentielle de l’anneau des formes quasi-modulaires pour SL_2(Z )
Federico Pellarin
To cite this version:
Federico Pellarin. La structure différentielle de l’anneau des formes quasi-modulaires pour SL_2(Z).
Journal de Théorie des Nombres de Bordeaux, Société Arithmétique de Bordeaux, 2006, 18 (1), pp.241-
264. �hal-00005554�
ccsd-00005554, version 1 - 23 Jun 2005
La structure diff´erentielle de l’anneau des formes quasi-modulaires pour SL 2 ( Z ).
Federico Pellarin
R´ esum´ e. Dans ce texte, nous d´eterminons explicitement les id´eaux premiers dif- f´erentiellement stables dans l’anneau des formes quasi-modulaires pour SL
2(Z).
Les techniques introduites permettent de raffiner et g´en´eraliser des r´esultats de Nesterenko dans [5] et [6].
1 Introduction
Soient E
2(z), E
4(z), E
6(z) les d´eveloppements en s´eries de Fourier complexes des s´eries d’Eisenstein classiques de poids 2, 4, 6, convergentes pour | z | < 1 :
E
2(z) = 1 − 24
∞
X
n=1
σ
1(n)z
n, E
4(z) = 1 + 240
∞
X
n=1
σ
3(n)z
n, (1) E
6(z) = 1 − 504
∞
X
n=1
σ
5(n)z
n.
Nesterenko a demontr´e que pour tout nombre complexe q tel que 0 <
| q | < 1, le corps Q (q, E
2(q), E
4(q), E
6(q)) a degr´e de transcendance au moins 3 (voir [4], [5] et [6]). L’ingredient cl´ef de sa preuve est l’estimation de multiplicit´e qui suit (th´eor`eme 2.3 p. 33 de [5]).
Th´ eor` eme 1.1 (Nesterenko). Il existe une constante c
1> 0 avec la propri´et´e suivante. Soit M un polynˆ ome non nul de C [X
1, X
2, X
3, X
4], de degr´e total au plus N. Alors, la fonction F (z) = M(z, E
2(z), E
4(z), E
6(z)) s’annule en z = 0 avec une multiplicit´e au plus c
1N
4.
Le th´eor`eme 1.1 s’obtient en utilisant en profondeur certaines propri´et´es diff´erentielles de l’anneau
R
1= C [z, E
2(z), E
4(z), E
6(z)],
d’interˆet ind´ependant : d´ecrivons ci-apr`es ces propri´et´es. On voit facilement
que R
1, muni de la d´erivation z(d/dz), est un anneau diff´erentiel. On a d’une
part z(d/dz)z = z, et d’autre part, les s´eries E
2(z), E
4(z), E
6(z) satisfont au syst`eme diff´erentiel non lin´eaire (cf. th´eor`eme 5.3 de [2]) :
z d
dz E
2= 1
12 (E
22− E
4), z d
dz E
4= 1
3 (E
2E
4− E
6), (2)
z d
dz E
6= 1
2 (E
2E
6− E
42).
Un id´eal P d’un anneau diff´erentiel ( A , D) est dit D-stable si pour tout x ∈ P on a Dx ∈ P . Nesterenko d´emontre le r´esultat qui suit (cf. proposition 5.1 p. 161 de [6]), indispensable dans la preuve du th´eor`eme 1.1.
Proposition 1.1. Soit P un id´eal premier non nul et z d
dz -stable de R
1, tel que pour tout F ∈ P on ait F (0) = 0. Alors z∆ ∈ P , o` u ∆ = E
43− E
62.
Nesterenko a d´ej`a d´emontr´e des r´esultats de mˆeme nature, tout ` a fait g´en´eraux, mais valides seulement en pr´esence d’un syst`eme diff´erentiel lin´e- aire (cf. th´eor`eme 3 de [3]). Le syst`eme diff´erentiel (2) n’etant pas lin´eaire, la th´eorie de [3] ne s’applique pas ; Nesterenko donne alors une d´emonstration ad hoc de la proposition 1.1 qui est ´el´ementaire, mais difficile ` a adapter ` a d’autres situations int´eressantes du point de vue arithm´etique.
La m´ethode de Nesterenko est, en citant l’auteur (p. 162 de [6]) “une g´en´eralisation d’une id´ee utilis´ee par Siegel vis´ee ` a classifier les solutions alg´ebriques des ´equations diff´erentielles de Riccati” (cf. paragraphe 1 pp.
214-222 de [10], voir aussi le lemme 3 p. 211 of [9]).
La proposition 1.1 suscite la question naturelle de connaˆıtre et cara- ct´eriser compl`etement tous les id´eaux premiers z(d/dz)-stables de R , mais la m´ethode de Nesterenko que nous avons mentionn´e ci-dessus ne semble pas s’y prˆeter.
Dans ce texte nous donnons une r´eponse compl`ete ` a cette question tout en introduisant une approche nouvelle, essentiellement alg´ebrique.
Soit K un corps alg´ebriquement clos contenant Q , soient P, Q, R des ind´etermin´ees ind´ependantes sur K , notons Y
K= K [P, Q, R]. Consid´erons l’anneau diff´erentiel ( Y
K, D), o` u la d´erivation D est d´etermin´ee par les rela- tions
DP = 1
12 (P
2− Q), DQ = 1
3 (P Q − R), (3)
DR = 1
2 (P R − Q
2),
et par l’´egalit´e D( K ) = (0). Nous nous proposons de caract´eriser tous les
id´eaux premiers D-stables de Y
K.
Notons que l’anneau Y
C, diff´erentiellement isomorphe ` a R (et que nous noterons plus simplement Y ), est aussi isomorphe (diff´erentiellement) ` a l’anneau des formes quasi-modulaires pour SL
2( Z ) d´efinies dans [1]. Nos r´esultats en d´eterminent la structure diff´erentielle : ` a travers la classification de tous les id´eaux premiers D-stables de cet anneau, nous caract´erisons en fait (par passage au quotient) tous les anneaux diff´erentiels int`egres ( A , D
′) tels qu’il existe un morphisme diff´erentiel surjectif :
( Y , D) → ( A , D
′).
Avant de pr´esenter nos r´esultats, nous donnons des exemples d’id´eaux pre- miers D-stables de Y
K. Posons Θ := Q
3− R
2; on v´erifie la r´elation :
DΘ = P Θ, (4)
qui implique que l’id´eal principal (Θ) est premier et D-stable.
Notons aussi P
0:= (P
2− Q, P
3− R) et P
∞:= (Q, R). Ce sont deux id´eaux premiers de codimension 2.
On v´erifie sans aucune difficult´e en utilisant (3) que l’id´eal P
0est l’id´eal engendr´e par l’image de l’application D : Y
K→ Y
K; il est donc D-stable.
En ce qui concerne P
∞, on voit facilement que c’est l’id´eal engendr´e par les polynˆomes nuls sur le lieu singulier de la surface affine d’´equation Θ = 0.
En utilisant l’hypoth`ese D(Θ) ⊂ (Θ) et en combinant les th´eor`emes 2, 5 de [8], on v´erifie que P
∞est D-stable (
1).
On v´erifie par un calcul direct que si c ∈ K , alors l’id´eal maximal (P − c, Q − c
2, R − c
3) est D-stable.
Mais les id´eaux ci-dessus ne couvrent pas le “spectre diff´erentiel”, l’en- semble de tous les id´eaux premiers D-stables de Y
K. Pour d 6 = 0, soit P
dl’id´eal engendr´e par Θ et les trois polynˆomes : F
d= P
2Q + Q
2− 2P R + dR, G
d= 2P Q
2− P
2R − QR − dQ
2, H
d= P
4− 2P
2Q + Q
2+ 4dP Q − d
2Q.
Pour tout d 6 = 0 l’id´eal P
dest premier (cf. lemme 3.2 lorsque d 6 = 0), contient strictement Θ et est contenu strictement dans l’id´eal (P, Q, R) ; il a donc codimension 2 (
2). De plus il est D-stable ; en effet, en utilisant les relations (3), on v´erifie les ´egalit´es :
DF
d= P
2 F
d+ 1
2 G
d, (5)
DG
d= − 1 2 Θ + 2
3 QF
d+ 2 3 P G
dDH
d= − 1
3 (2P − d)F
d+ 2
3 G
d+ P 3 H
d.
1
On peut v´erifier ces propri´et´es aussi par un calcul direct.
2
La notation P
dsugg`ere que, lorsque d = 0, un lien existe avec P
0; on v´erifie que
l’id´eal P
davec d = 0, qui n’est pas premier, est P
0-primaire d’exposant 2.
La liste d’id´eaux premiers D-stables de Y
Kest d´ecrite par les diagrammes suivants, param´etr´es par c ∈ K et d ∈ K
×; ceci est le r´esultat principal de cet article.
(P − c, Q − c
2, R − c
3) ← P
0տ P
d← (∆)
ւ ւ
(P, Q, R) ← P
∞Th´ eor` eme 1.2. Soit P un id´eal premier non nul D-stable de ( Y
K, D) ; on a les faits suivants.
• Si P a codimension 3 alors il existe un ´el´ement c ∈ K tel que P = (P − c, Q − c
2, R − c
3).
• Si P a codimension 2 alors il existe d ∈ K ∪ {∞} tel que P = P
d.
• Si P est principal, alors P = (Θ).
Ce th´eor`eme permet de classifier tous les id´eaux radicaux D-stables de ( Y
K, D) car d’apr`es le th´eor`eme 1 de [8], ils sont tous intersection d’id´eaux premiers D-stables.
L’anneau
R
2:= R
1[log(z)] = C [z, log(z), E
2(z), E
4(z), E
6(z)],
muni de la d´erivation z(d/dz) (et pour un choix quelconque d’une d´etermi- nation de log), est un anneau diff´erentiel, car
z d
dz log(z) = 1
sur un ouvert de C ; de plus les fonctions log(z), z, P (z), Q(z), R(z) sont alg´ebriquement ind´ependantes sur C . On a le r´esultat suivant :
Th´ eor` eme 1.3. Soit P un id´eal premier non nul et z d
dz -stable de R
2. Alors z∆ ∈ P .
On en d´eduit un raffinement de la proposition 1.1.
Th´ eor` eme 1.4. Soit P un id´eal premier non nul et z d
dz -stable de R
1. Alors z∆ ∈ P .
Voici le plan de cet article. Dans les paragraphes 2 et 3 nous d´emontrons
le th´eor`eme 1.2. La structure de la preuve est en gros la suivante. Une
application des propri´et´es des crochets de Rankin permet de d´emontrer que
tout id´eal premier non nul D-stable P de Y
Kcontient Θ.
Consid´erons ensuite le quotient Y
K/(Θ) ; c’est un anneau diff´erentiel d’apr`es la premi`ere formule (5). Le point crucial est que Y
K/(Θ) est es- sentiellement un anneau de fonctions alg´ebriques sur un corps de fonctions rationnelles K (U ). Ceci permet de d´ecrire avec pr´ecision l’image de P dans Y
K/(Θ), et le th´eor`eme 1.2 s’obtient ensuite en “relevant” les informations obtenues. Pour pouvoir utiliser facilement ces propri´et´es, nous allons tra- vailler d’abord dans un sur-anneau diff´erentiel auxiliaire A ⊃ Y
K(´etude d´evelopp´ee au paragraphe 2). La d´emonstration des th´eor`emes 1.3 et 1.4 sera trait´ee dans le paragraphe 4.
Ces deux derniers th´eor`emes peuvent ˆetre utilis´es pour d´emontrer une g´en´eralisation du th´eor`eme 1.1. On peut d´emontrer qu’il existe une con- stante c
2> 0 avec la propri´et´e suivante. Soit log la d´etermination principale du logarithme. Pour tout polynˆome F ∈ R
2non nul, de degr´e au plus N en log(z), z, E
2(z), E
4(z), E
6(z), et pour tout ξ ∈ B \ R
≤0, o` u B d´esigne la boule ouverte complexe de centre 0 et rayon 1, l’ordre d’annulation de F en ξ satisfait :
ord
ξ(F ) ≤ c
2N
5.
Si de plus F ∈ R
1, alors pour tout ξ ∈ B , l’ordre d’annulation de F en ξ satisfait :
ord
ξ(F ) ≤ c
2N
4.
La d´emonstration de cette propri´et´e apparaˆıtra ailleurs. Ce sont exactement la suppression de l’hypoth`ese d’annullation dans la proposition 1.1, et le fait que ∆ ne s’annule pas dans B \{ 0 } , qui impliquent les majorations uniformes de cette estimation de multiplicit´e.
Nous pouvons aussi ´etendre le th´eor`eme 1.1 au cadre de fonctions li´ees
`
a des groupes fuchsiens triangulaires co-compacts ; ce sujet sera d´evelopp´e
dans [7].
2 Etude diff´ erentielle d’un anneau auxiliaire.
Il convient de travailler dans un anneau auxiliaire A un peu plus grand que Y
K. D’apr`es (3) on a les ´egalit´es suivantes :
D R
Q
= − Q 2 + P R
6Q + R
23Q
2= 1
6 R Q
P − R
Q
+ 1 2
R
2Q
2− Q
, DQ = 1
3 (P Q − R)
= 1
3 Q
P − R Q
, D
P − R
Q
= P
212 + 5Q
12 − P R 6Q − R
23Q
2= 1
12
P − R Q
2− 5 12
R
2Q
2− Q
. En d’autres termes, si l’on pose :
X
1= R
Q , X
2= Q, X
3= P − R Q , alors :
DX
1= 1
6 X
1X
3+ 1
2 (X
12− X
2), DX
2= 1
3 X
2X
3, (6)
DX
3= 1
12 X
32− 5
12 (X
12− X
2).
Notons :
A = K [X
1, X
2, X
3].
D’apr`es les formules (6) c’est un anneau diff´erentiel pour la d´erivation D.
Cet anneau contient Y
K: en effet, R = Q(R/Q), P = P − (R/Q) + (R/Q) ∈ Y
Kd’o` u Y
K⊂ A .
L’anneau ( A , D) poss`ede deux id´eaux principaux premiers non nuls D- stables car :
DX
2= 1 3 X
2X
3, D(X
12− X
2) = 1
3 (3X
1+ X
3)(X
12− X
2).
L’objectif de ce paragraphe est de d´emontrer la proposition suivante.
Proposition 2.1. Soit P un id´eal premier D-stable non nul de A ne con- tenant pas X
2. Alors P est l’un des id´eaux premiers suivants :
(X
12− X
2)
(X
1− c, X
2− c
2, X
3) (X
3, X
12− X
2)
(X
12− X
2, X
32+ dX
1), pour c, d ∈ K
×.
Le lecteur peut v´erifier que tous ces ideaux sont premiers et D-stables en utilisant (6). La proposition 2.1 s’obtient en combinant les propositions 2.2, 2.3 et 2.4 qui suivent, et qui classifient les id´eaux premiers D-stables de codimension respectivement 1, 2, 3.
L’anneau A est gradu´e en assignant ` a X
1, X
3le poids 2 et ` a X
2le poids 4. Un ´el´ement M de A est dit isobare de poids p(M ) ∈ 2 N s’il est homog`ene de degr´e p(M) par rapport ` a cette graduation. Cette graduation provient des poids des formes quasi-modulaires ; les poids de E
2, E
4, E
6sont respectivement 2, 4, 6. Si on assigne ` a P, Q, R les poids 2, 4, 6, alors p(X
1) = p(R) − p(Q) = 2, p(X
2) = p(Q) = 4 et p(X
3) = 2.
Un id´eal I de A est dit isobare s’il admet un syst`eme de g´en´erateurs isobares (de poids non n´ecessairement ´egaux). La d´erivation D est isobare (ou p-homog`ene) de poids 2 ; si X ∈ A est un ´el´ement isobare de poids p(X), alors DX est isobare de poids p(X) + 2.
Sur A il existe une autre graduation q, qui est d´etermin´ee en assignant
`
a X
1, X
2, X
3les degr´es q(X
1) = 2, q(X
2) = 4, q(X
3) = 1 ; la d´erivation D n’est pas q-isobare mais on v´erifie, en utilisant (6), que pour tout ´el´ement q-homog`ene X ∈ A , il existe un unique ´el´ement Y ∈ C [X
1, X
3] qui est q-homog`ene tel que q(Y ) = q(X) + 1, et tel que Y ≡ DX mod (X
12− X
2).
La proposition 2.1 implique que si P est un id´eal premier D-stable de A de codimension 2, alors ou bien il est engendr´e par deux ´el´ements p- homog`enes non nuls, ou bien il est engendr´e par un ´el´ement p-homog`ene non nul et un ´el´ement q-homog`ene non nul, d’o` u l’interˆet d’introduire la graduation q.
2.1 Id´ eaux principaux D -stables.
Ici nous d´emontrons la proposition suivante.
Proposition 2.2. Soit H un polynˆ ome non constant, irr´eductible de A =
K [X
1, X
2, X
3] qui ne soit pas de la forme c(X
12− X
2) avec c ∈ K
×et tel que
DH = V H avec V ∈ K [X
1, X
2, X
3]. Alors V = (1/3)X
3et (H) = (X
2).
Avant de d´emontrer la proposition 2.2, nous introduisons un anneau diff´erentiel quotient de A (de type “parabolique”) muni de deux graduations compatibles avec la structure diff´erentielle, et nous d´emontrons un lemme qui caract`erise le corps des constantes de son corps diff´erentiel de fractions et ses id´eaux principaux diff´erentiellement stables.
On consid`ere l’anneau A /(X
12− X
2) et la projection π : A → A /(X
12− X
2).
Posons
Y
1:= π(X
1), Y
3:= π(X
3), de telle sorte que Y
12= π(X
2) ; alors
A /(X
12− X
2) = K [Y
1, Y
3].
Puisque (X
12− X
2) est D-stable, l’anneau ( K [Y
1, Y
3], δ) est un anneau dif- f´erentiel, avec la d´erivation induite δ = D+(X
12− X
2). De plus, δ ◦ π = π ◦ D et on a les r´elations :
δY
1:= 1
6 Y
1Y
3(7)
δY
3:= 1 12 Y
32.
Sur K [Y
1, Y
3] nous consid´erons deux graduations. La premi`ere graduation F est induite par la graduation p sur A , de telle sorte que les degr´es de Y
1et Y
3soient ´egaux ` a 2. La deuxi`eme graduation G est induite par la graduation q en assignant ` a Y
1le degr´e 2 et ` a Y
3le degr´e 1 (noter que X
12− X
2est q-homog`ene de degr´e 4).
Les ´el´ements non nuls de K [Y
1, Y
3] de F -degr´e 0, tout aussi comme les
´el´ements non nuls de G -degr´e 0, sont tous et seulement les ´el´ements de K
×. La d´erivation δ a la propri´et´e d’envoyer un ´el´ement F -homog`ene de degr´e m sur un ´el´ement F -homog`ene de degr´e m + 2, et un ´el´ement G -homog`ene de degr´e n sur un ´el´ement G -homog`ene de degr´e n + 1 ; en d’autres termes δ est ` a la fois F -homog`ene de degr´e 2 et G -homog`ene de degr´e 1.
Lemme 2.1. Le corps des fractions diff´erentiel ( K (Y
1, Y
3), δ) (
3) a pour sous-corps des constantes C le corps K (Y
1/Y
32). On a C ∩ K [Y
1, Y
3] = K . Soit L ∈ K [Y
1, Y
3] \ K : on a que L divise δL dans K [Y
1, Y
3] si et seulement si L est un polynˆ ome de K [Y
1, Y
3] homog`ene par rapport ` a G . Dans ce cas, δL/L = µY
3avec µ ∈ (1/12) Z .
3
On consid`ere l’extension naturelle de δ fournie par la r`egle de d´erivation des fractions :
δ(a/b) = (b(δa) − a(δb))/b
2.
D´ emonstration. Noter que δ(Y
1/Y
32) = 0, donc δF = 0 pour tout F ∈ C d’apr`es (7). Posons U = Y
1/Y
32, V = Y
3: on a K (Y
1, Y
3) = K (U, V ) et δU = 0, δV = (1/12)V
2. Soit R ∈ K (U, V ) ; on a
δR = ∂R
∂U (δU) + ∂R
∂V (δV )
= ∂R
∂V V
212 .
Donc δR = 0 si et seulement si ∂R/∂V = 0, d’o` u C = K (Y
1/Y
32) ; on en d´eduit que C ∩ K [Y
1, Y
3] = K .
Soit L ∈ K [Y
1, Y
2] homog`ene de degr´e n par rapport ` a la graduation G ; on peut ´ecrire (c
a,b∈ K ) :
L = X
2a+b=n
c
a,bY
1aY
3b. On a :
δL = ∂L
∂Y
1(δY
1) + ∂L
∂Y
3(δY
3)
= 1
6 Y
3Y
1∂L
∂Y
1+ Y
32
∂L
∂Y
3= 1
6 Y
3X
2a+b=n
c
a,b(a + b/2)Y
1aY
3b= n
12 Y
3L. (8)
Soit maintenant L ∈ K [Y
1, Y
3] tel que δL = M L avec M ∈ K [Y
1, Y
3]. Si L 6∈ K , alors M 6 = 0, car C ∩ K [Y
1, Y
3] = K . On peut ´ecrire :
L = L
h+ L
h+1+ · · · + L
k, M = M
s+ M
s+1+ · · · + M
t(9) avec L
h, L
k, M
s, M
tnon nuls, L
iF -homog`ene de degr´e i et M
jF -homog`ene de degr´e j. On a :
δL = δL
h+ · · · + δL
k= (M
s+ M
s+1+ · · · + M
t)(L
h+ L
h+1+ · · · + L
k), d’o` u δL
h= M
sL
het δL
k= M
tL
k. Comme δ est homog`ene de degr´e 2 par rapport ` a F , on en d´eduit que L
h6∈ K et s = t = 2. Donc δL = (λY
1+µY
3)L, avec λ, µ ∈ K . Ecrivons L = Y
3lL
′avec L
′∈ K [Y
1, Y
3] non divisible par Y
3. On a aussi :
λY
1Y
3lL
′+ µY
3l+1L
′= δL = δ(Y
3lL
′)
= (l/12)Y
3l+1L
′+ Y
3lδL
′.
La d´efinition de δ implique que Y
3divise δL
′(d’apr`es (7) l’image de δ est contenue dans l’id´eal engendr´e par Y
3). Donc Y
3divise λY
1, ce qui implique λ = 0 et
δL = µY
3L. (10)
Ecrivons L = L
i1+ · · · + L
iravec L
iknon nul et homog`ene de degr´e i
kpar rapport ` a la graduation G , les i
kdistincts et r ≥ 1. En appliquant (8) on obtient :
δL = δL
i1+ · · · + δL
ir= Y
3i
112 L
i1+ · · · + i
r12 L
ir. En combinant cette ´egalit´e avec (10) on trouve :
i
112 L
i1+ · · · + i
r12 L
ir= µ(L
i1+ · · · + L
ir).
Si r > 1 on trouve une contradiction ; si r = 1 alors µ = i
1/12 et L est homog`ene par rapport ` a G .
D´ emonstration de la proposition 2.2.
Supposons que la relation DH = V H soit satisfaite et montrons l’homo- g´eneit´e de V pour la graduation p. Ecrivons :
H = H
h+ H
h+1+ · · · + H
k, V = V
s+ V
s+1+ · · · + V
tavec H
h, H
k, V
s, V
tnon nuls et pour tout i, j, H
iisobare de poids i et V
jisobare de poids j. On a :
DH = DH
h+ · · · + DH
k= (V
s+ V
s+1+ · · · + V
t)(H
h+ H
h+1+ · · · + H
k),
d’o` u DH
h= V
sH
het DH
k= V
tH
k. On en d´eduit que s = t = 2. Donc V = V
2= λX
1+ µX
3(non nul car H n’est pas constant) avec λ, µ ∈ K .
Montrons ensuite que V = µX
3avec µ ∈ Q
×. On a que π(DH) = δ(π(H)) = π(V )π(H) dans K [Y
1, Y
3]. Posons L = π(H) et M = π(V ) : on a δL = M L. D’apr`es le lemme 2.1, L est G homog`ene de degr´e n et V = λX
1+ µX
3est congru ` a µX
3modulo (X
12− X
2) avec µ = n/12 ; comme il est de poids 2, V = µX
3. En particulier, µ ∈ Q
×. Ainsi :
DH/H = µX
3, DX
2/X
2= (1/3)X
3sont Z -lin´eairement d´ependants, ce qui implique l’existence d’entiers α, β,
non tous nuls, avec H
αX
2β∈ K
×. Comme H est un polynˆome irr´eductible
en X
1, X
2, X
3, ceci implique (H) = (X
2) et µ = 4/12 = 1/3.
2.2 Id´ eaux D -stables de codimension 2 .
Dans cette partie, nous d´emontrons la proposition suivante.
Proposition 2.3. Soit Q un id´eal premier de A de codimension 2, D-stable, ne contenant pas X
2. Alors, soit Q = (X
3, X
12− X
2), soit il existe un ´el´ement d ∈ K
×tel que
Q = (X
12− X
2, X
32+ dX
1).
Pour d´emontrer cette proposition, nous allons distinguer deux cas, selon que Q est isobare ou non. Si Q est isobare, alors le lemme 2.3 ci-dessous implique que X
12− X
2∈ Q . Si Q n’est pas isobare, alors le lemme 5.2 de l’appendice implique que Q contient un id´eal non nul, isobare principal et D-stable, ´egal ` a (X
12− X
2) d’apr`es la proposition 2.2. Dans tous les cas donc, Q contient l’id´eal (X
12− X
2) et l’image de Q par π est un id´eal principal δ-stable non nul de K [Y
1, Y
3] que nous ´etudions ensuite, en appliquant les r´esultats du paragraphe 2.1.
Nous d´emontrons le lemme qui suit, o` u nous utilisons les crochets de Rankin, qui sont d´efinis uniquement sur des polynˆomes isobares de A , mais pas sur des polynˆomes quelconque. Le crochet de Rankin [U, V ] de deux polynˆomes isobares U, V est d´efini par
[U, V ] = p(U )U (DV ) − p(V )V (DU ).
Voici les propri´et´es principales du crochet.
Lemme 2.2. Soient X, Y, M des ´el´ements isobares de A .
• Si X ∈ A est de poids x et Y est de poids y, alors [X, Y ] = − [Y, X]
est isobare de poids x + y + 2.
• Si X, Y ont mˆeme poids, alors l’application d
M(X) := [X, M ] satisfait d
M(X + Y ) = d
M(X) + d
M(Y ).
• On a d
M(XY ) = d
M(X)Y + Xd
M(Y ).
• Si I est un id´eal de A qui est D-stable, et X ∈ I , alors d
M(X) ∈ I . Les premi`eres deux propri´et´es sont triviales. D´emontrons la troisi`eme propri´et´e. On a :
d
M(XY ) = [XY, M ] = p(XY )XY DM − p(M)M D(XY )
= (p(X) + p(Y ))XY DM − p(M )M ((DX)Y + XDY )
= (p(X)XDM − p(M)M DX)Y + X(p(Y )Y DM − p(M )M DY )
= d
M(X)Y + Xd
M(Y ).
D´emontrons la quatri`eme propri´et´e. Si X ∈ I et M est isobare, alors DX ∈ I car I est D-stable. Donc XDM, M DX ∈ I , et d
M(X) = p(X)XDM − p(M )M DX ∈ I .
Lemme 2.3. Tout id´eal premier isobare Q de A , D-stable et de codimension 2, ne contenant pas X
2, contient l’id´eal principal (X
12− X
2).
D´ emonstration. Nous pouvons supposer que Q ∩ K [X
2] = (0). En effet, si Q ∩ K [X
2] 6 = (0) alors X
2− a ∈ Q avec a ∈ K car Q est premier. Mais a = 0 car Q est isobare, d’o` u X
2∈ Q et d
X1(X
2) ∈ Q grˆ ace au lemme 2.2, car Q est D-stable. Or :
d
X1(X
2) = 4X
2DX
1− 2X
1DX
2= 2(X
12− X
2)X
2d’o` u le lemme dans ce cas car comme Q est premier, il contient un des facteurs de (X
12− X
2)X
2.
Nous pouvons supposer, sans perte de g´en´eralit´e, qu’il existe un poly- nˆ ome isobare et non nul M ∈ Q ∩ K [X
1, X
2]. En effet, si Q ∩ K [X
1, X
2] = (0), alors Q serait principal. Donc Q contient un ´el´ement non nul F de K [X
1, X
2] ; ´ecrivons F = P
i
F
iavec F
i∈ K [X
1, X
2] isobare de poids i.
Comme Q est isobare, F
i∈ Q pour tout i (voir le lemme 5.2 de l’appendice), d’o` u l’existence de M.
Remarquons que M d´epend de X
1car Q ∩ K [X
2] = (0) : choisissons M de degr´e minimal par rapport ` a X
1.
A nouveau, grˆ ace au lemme 2.2, on a d
X2(M) ∈ Q . On a : d
X2(M) = ∂M
∂X
1d
X2(X
1) + ∂M
∂X
2d
X2(X
2) + ∂M
∂X
1d
X2(X
1)
= ∂M
∂X
1d
X2(X
1)
= − ∂M
∂X
1d
X1(X
2)
= − 2 ∂M
∂X
1(X
12− X
2)X
2,
car ∂M/∂X
1= 0 et d
X2(X
2) = 0. Comme Q est premier, on a soit
∂M/∂X
1∈ Q , soit X
12− X
2∈ Q car X
26∈ Q . Si X
12− X
2∈ Q nous
avons termin´e. Sinon, on a M
′= ∂M/∂X
1∈ Q : comme M est de degr´e
minimal par rapport ` a X
1, il faut que M
′= 0. Dans ce cas, M ∈ K [X
2] \{ 0 } ,
mais ceci est impossible car nous avons suppos´e que Q ∩ K [X
2] = (0).
D´ emonstration de la proposition 2.3.
Soit I un id´eal de A ; on note ˜ I l’id´eal engendr´e par les polynˆomes isobares de I . D’apr`es le lemme 5.2 de l’appendice, ˜ Q est non nul, premier et D- stable. Si Q n’est pas isobare, alors ˜ Q est de codimension 1 donc principal non nul et ˜ Q = (X
12− X
2) d’apr`es la proposition 2.2. Si Q est isobare alors le lemme 2.3 implique que Q contient X
12− X
2. Dans les deux cas, Q contient X
12− X
2et donc π( Q ) est un id´eal principal non nul et δ-stable de ( K [Y
1, Y
3], δ). Soit L un de ses g´en´erateurs ; d’apr`es le lemme 2.1, L est G - homog`ene. La projection π induit un isomorphisme K [X
1, X
3] ∼ = K [Y
1, Y
3], et puisque Q contient X
12− X
2, on a que Q contient aussi un ´el´ement non nul W ∈ K [X
1, X
3], q-homog`ene, tel que π(W ) = L.
La q-homog´eneit´e de W implique : W = X
3st
Y
i=1
(α
iX
1− β
iX
32),
avec s ∈ { 0, 1 } et α
i, β
i∈ K pour tout i = 1, . . . , t. Mais Q est premier, et contient un facteur irr´eductible de W . Ainsi, il existe α, β ∈ K (non tous nuls) tels que αX
1− βX
32∈ Q . On en d´eduit dans ce cas que :
Q = (X
1− X
22, X
3), ou Q = (X
12− X
2, X
32+ dX
1) avec d ∈ K
×.
2.3 Id´ eaux D -stables de codimension 3 .
La proposition suivante compl`ete la description des id´eaux premiers D- stables de A ne contenant pas X
2, et permet de terminer la preuve de la proposition 2.1.
Proposition 2.4. Soit Q un id´eal premier de codimension 3, D-stable de A . Alors Q est ´egal ` a l’un des id´eaux suivants :
Q = (X
1− c, X
2− c
2, X
3).
avec c ∈ K .
D´ emonstration. Ici, Q est un id´eal maximal Q = (X
1− u, X
2− v, X
3− w), pour quelques u, v, w ∈ K . Pour que D(X
1− u), D(X
2− v), D(X
3− w) ∈ Q , il faut que ces polynˆomes s’annulent tous en (u, v, w). On doit r´esoudre les
´equations :
uw + u
2− v = 0
vw = 0
w
2− 2(u
2− v) = 0,
pour obtenir les n´ecessaires conditions de compatibilit´e sur u, v, w. On trouve : u = c, v = c
2, w = 0 avec c ∈ K . Mais pour ce choix, Q est D-stable :
D(X
1− c) = 1
6 ((c + X
1+ X
3)(X
1− c) − (X
2− c
2) + cX
3) D(X
2− c
2) = 1
3 (X
3(X
2− c
2) + c
2X
3) DX
3= 1
12 ( − 2(c + X
1)(X
1− c) + 2(X
2− c
2) + X
32.
3 D´ emonstration du th´ eor` eme 1.2.
Nous commen¸cons avec deux lemmes pr´eliminaires.
Lemme 3.1. Soit P un id´eal premier de Y
Kne contenant pas Q : on a que AP ∩ Y
K= P .
D´ emonstration. Posons T = AP ; on a clairement P ⊂ T ∩ Y
K. Soit q ∈ T ∩ Y
K; on a
q = a
1p
1+ · · · + a
sp
s(11) avec a
i∈ A et p
i∈ P pour tout i. Il existe un entier l ≥ 0 tel que r
i:= Q
la
i∈ Y
Kpour tout i. Donc
Q
lq = X
i
r
ip
i∈ P .
Mais Q
l6∈ P et P est premier. Donc q ∈ P , d’o` u T ∩ Y
K⊂ P .
Lemme 3.2. Si d ∈ K
×, alors l’id´eal P
dest premier de codimension 2, et son lieu de z´eros est la sextique affine lisse image de la param´etrisation t 7→ ( √
− dt + t
2, t
4, t
6).
D´ emonstration. On commence par d´eterminer le lieu des z´eros de P
ddans l’espace affine A
3( K ). Puisque Θ ∈ P
det K est alg´ebriquement clos, on se ram`ene ` a d´eterminer les z´eros de la forme (s, t
4, t
6) avec s, t ∈ K . Observons que :
F
d(s, t
4, t
6) = t
4U, G
d(s, t
4, t
6) = − t
6U, H
d(s, t
4, t
6) = U V, avec
U = s
2+ t
4− t
2(2s − d)
V = s
2+ t
4+ t
2(2s − d).
Comme t ne divise pas V , on a F
d(s, t
4, t
6) = G
d(s, t
4, t
6) = H
d(s, t
4, t
6) = 0 si et seulement si U = 0, c’est-` a-dire :
s = ± √
− dt + t
2. Puisque √
− dt + t
2= − √
− d( − t) + ( − t)
2, le lieu des z´eros de P
dest ´egal ` a la sextique affine lisse C
dimage de la param´etrisation :
t 7→ ( √
− dt + t
2, t
4, t
6)
(isomorphe ` a la droite affine). Comme C
dest irr´eductible, P
dest primaire.
Montrons que P
dest r´eduit ; il suffit de montrer que la matrice jacobienne J des polynˆomes Θ, F
d, G
d, H
dpar rapport aux inconnues P, Q, R a rang 2 partout dans C
d. Tout d’abord, on a :
det
∂Θ
∂P
∂Θ
∂Q
∂F
d∂P
∂F
d∂Q
= 4R(P Q − R),
det
∂Θ
∂P
∂Θ
∂R
∂F
d∂P
∂F
d∂R
= − 6Q
2(Q
2− P R).
Si (P, Q, R) 6 = (0, 0, 0), ces deux mineurs de J ne peuvent pas ˆetre tous les deux nuls sur C
dcar cela reviendrait ` a dire que P = c, Q = c
2, R = c
3pour quelques c ∈ K
×et C
dne contient aucun point de cette forme si d 6 = 0.
D’autre part, si (P, Q, R) = (0, 0, 0), le mineur de J :
det
∂F
d∂Q
∂F
d∂R
∂H
d∂Q
∂H
d∂R
= − (2P − d)(2P
2− 2Q − 4P d + d
2)
vaut d
36 = 0, donc P
dest r´eduit.
Comme P
dest primaire et r´eduit, il est premier.
Nous pouvons compl´eter la d´emonstration du th´eor`eme 1.2. Supposons que P soit un id´eal premier D-stable de Y
K. Supposons d’abord que Q ∈ P ; l’´egalit´e DQ = (1/3)(P Q − R) implique que R ∈ P , et P a codimension ≥ 2.
Si la codimension de P est 2 alors P = (Q, R). Si la codimension de P est 3
alors P est un id´eal maximal qui contient Q, R, donc il contient P − c pour
une constante c ∈ K . On v´erifie facilement que c = 0 est le seul ´el´ement de
K tel que (P − c, Q, R) soit D-stable.
Les seuls id´eaux premiers non nuls D-stables de Y
Kqui contiennent Q sont donc :
(Q, R), (P, Q, R).
Supposons maintenant que Q 6∈ P . D’apr`es le lemme 3.1, l’id´eal T = AP satisfait T ∩ Y
K= P ; il est de plus D-stable. Le lemme 5.3 de l’appendice implique qu’il existe un id´eal premier Q de A , D-stable, tel que Q ∩ Y
K= P et donc Q est l’un des id´eaux d´ecrits dans la proposition 2.1 pour quelque c ou d.
Pour terminer la preuve du th´eor`eme 1.2 il faut calculer, pour chaque Q id´eal premier de A d´ecrit dans la proposition 2.1, l’id´eal premier Q ∩ Y
Kqui est for¸cement D-stable ; nous consid´erons quatre cas.
(1). Comme Θ = X
22(X
2− X
12), on voit tout de suite l’´egalit´e (X
2− X
12) ∩ Y
K= (Θ).
(2). En utilisant les ´egalit´es P = X
3+ X
1, Q = X
2, R = X
1X
2on v´erifie facilement que l’id´eal (X
1− c, X
2− c
2, X
3) ∩ Y
K, qui est premier, contient P − c, Q − c
2et R − c
3. Comme l’id´eal (P − c, Q − c
2, R − c
3) est maximal, on trouve :
A (X
1− c, X
2− c
2, X
3) ∩ Y
K= (P − c, Q − c
2, R − c
3).
(3). En faisant comme au point (2), on v´erifie aussi que l’id´eal premier (X
12− X
2, X
3) ∩Y
Kcontient P
2− Q et P
3− R. Comme A (X
12− X
2, X
3) ∩Y
Kest de codimension 2 et comme l’id´eal (P
2− Q, P
3− R) est premier de codimension 2, on a :
A (X
12− X
2, X
3) ∩ Y
K= (P
2− Q, P
3− R).
(4). Pour terminer la d´emonstration du th´eor`eme 1.2 nous devons encore d´emontrer que, pour d un ´el´ement non nul de K , si l’on pose
Q
d:= (X
12− X
2, X
32+ dX
1) ⊂ A alors Q
d∩ Y
K= P
d. On a les ´egalit´es :
Θ = X
2(X
12− X
2),
F
d= X
2( − (X
12− X
2) + (X
3+ dX
1)),
G
d= X
2((d − X
1− 2X
3)(X
12− X
2) − X
1(X
3+ dX
1)), H
d= (X
12+ 4X
1X
3+ 6X
32− X
2− 4dX
3+ d
2)(X
12− X
2) +
(4X
1X
3+ X
32+ 4X
2− dX
1)(X
3+ dX
1),
ce qui implique P
d⊂ Q
d∩Y
K. Comme l’id´eal premier Q
d∩Y
Ka codimension
2, le lemme 3.2 implique l’´egalit´e P
d= Q
d∩ Y
K. La preuve du th´eor`eme 1.2
est termin´ee.
4 D´ emonstration des th´ eor` emes 1.3 et 1.4.
Nous d´emontrons d’abord le th´eor`eme 1.3. On consid`ere l’anneau de poly- nˆ omes en cinq ind´etermin´ees
N := C [L, Z, P, Q, R], et ses sous-anneaux
Y = C [P, Q, R], L := C [L, Z].
Nous ´etudions la d´erivation E sur N d´efinie par : E S =
= 1
12 (P
2− Q) ∂S
∂P + 1
3 (P Q − R) ∂S
∂Q + 1
2 (P R − Q
2) ∂S
∂R + Z ∂S
∂Z + ∂S
∂L , pour S ∈ N . Les sous-anneaux Y , L , munis de la d´erivation E , sont des sous- anneaux diff´erentiels. Puisque log(z), z, E
2(z), E
4(z), E
6(z) sont des fonc- tions alg´ebriquement ind´ependantes sur C , on a l’isomorphisme d’anneaux diff´erentiels
( N , E ) ∼ =
R
2, z d dz
(12) d´efini en associant log(z) 7→ L, z 7→ Z, E
27→ P, E
47→ Q, E
67→ R. Soit K une clˆ oture alg´ebrique du corps des fractions de L . Sur
Y
K:= K [P, Q, R] ⊃ N
nous avons la d´erivation D d´efinie par les relations (3) et par D( K ) = 0.
Sur N nous avons aussi la d´erivation D
′d´efinie par D
′( Y ) = 0 et par les relations D
′Z = Z, D
′L = 1. Clairement, pour S ∈ N , on a :
E S = DS + D
′S.
Un ´el´ement de N est dit isobare de poids s s’il s’exprime comme une somme de monˆ omes
L
aZ
bP
t1Q
t2R
t3avec 2t
1+ 4t
2+ 6t
3= s.
Si F ∈ N alors nous notons p(F ) le plus grand poids d’un monˆ ome de F ; on a p(DF ) ≤ p(F ) + 2. D’autre part, pour F ∈ N non nul, on a clairement deg
Z(DF ) ≤ deg
Z(F ) et deg
L(DF ) ≤ deg
L(F ). Nous d´emontrons le lemme qui suit, qui g´en´eralise le lemme 5.2 p. 161 de [6].
Lemme 4.1. Soit P un id´eal premier principal non nul de N qui est E -
stable. Alors P = (Θ) ou P = (Z ).
D´ emonstration. Soit M ∈ N un polynˆome non nul et irr´eductible tel que
E M = F M, (13)
avec F ∈ N ; nous devons d´emontrer que soit M = cΘ, soit M = cZ , avec c ∈ C
×.
Comme p( E M ) = p(F )+p(M ), on a que p(F ) ≤ 2. Comme deg
Z( E M ) = deg
Z(F )+deg
Z(M ) et deg
L( E M) = deg
L(F )+deg
L(M), on a que deg
Z(F ) = deg
L(F ) = 0 et
F = λ
1P + λ
2(14)
avec λ
1, λ
2∈ C . On a aussi F 6 = 0 car M ´etant irr´eductible, il est non constant, et d’apr`es l’isomorphisme (12), le sous-corps des constantes du corps des fractions de N pour la d´erivation E est C .
Notre but est maintenant de montrer que λ
1, λ
2∈ Z dans (14). Nous commen¸cons par d´emontrer que λ
1∈ Z .
Ecrivons
M = M
h+ M
h+1+ · · · + M
k, (15) avec 0 ≤ h ≤ k, M
ihomog`ene de poids i et M
h, M
knon nuls.
Ecrivons ´egalement
M
k=
t
X
j=1
c
jV
j,
avec V
1, . . . , V
t∈ Y isobares de poids k, et c
j∈ L . On a E M
k=
t
X
j=1
c
jE V
j+
t
X
j=1
( E c
j)V
j.
En comparant les poids des termes isobares dans (13), on v´erifie : E M
k= λ
1P M
k+ λ
2M
k+ λ
1P M
k−1,
d’o` u :
DM
k= λ
1P M
k. (16)
D’apr`es la troisi`eme affirmation du th´eor`eme 1.2, il existe un unique id´eal premier principal non nul et D-stable de Y
Kqui est l’id´eal (Θ). Donc tout id´eal principal non nul D-stable est de la forme (Θ
m) et M
k= cΘ
mavec c ∈ K
×, d’o` u l’´egalit´e λ
1= m ∈ Z dans (14).
Montrons ensuite que λ
2∈ Z dans (14). Nous pouvons supposer dans la suite que M
h6∈ Y car si M
h∈ Y , λ
2= 0. Ecrivons maintenant
M
h=
t
X
j=1
c
jU
j,
avec U
1, . . . , U
t∈ Y isobares de poids h, et c
1, . . . , c
t∈ L . Si h = 0, alors M
h∈ L . Si h > 0, on a
E M
h=
t
X
j=1
c
jE U
j+
t
X
j=1
( E c
j)U
j.
Donc si h ≥ 0 (apr`es comparaison des termes de mˆeme poids dans (13)) :
∂M
h∂L + ∂M
h∂Z = λ
2M
h, et
D
′M
h= λ
2M
h. (17) On voit tout de suite que si M
h6∈ Y , alors M
hd´epend de Z. Ecrivons :
M
h= X
a,b≥0
c
a,bL
aZ
b= X
a,b>0
c
a,bL
aZ
b+ X
b>0
d
bZ
b+ X
a>0
e
aL
a+ f
0, c
a,b, d
b, e
a, f
0∈ Y . On a :
D
′M
h= X
a,b>0
(bc
a,b+ (a + 1)c
a+1,b)L
aZ
b+ X
b>0
(bd
b+ c
1,b)Z
b+ X
a>0
(a + 1)e
a+1L
a+ e
1+ f
0.
Soit a
0maximal avec c
a0,b06 = 0 pour quelques b
0≥ 0.
Si a
0= 0, alors M
h∈ Y [Z]. Donc M
h= k
0+ k
1Z + · · · + k
rZ
r(k
j∈ Y et k
r6 = 0), et D
′M
h= k
1Z + · · · + rk
rZ
r, d’o` u rk
r= λ
2k
ret λ
2= r ∈ Z .
Si a
0> 0 alors b
0> 0 et :
b
0c
a0,b0= b
0c
a0,b0+ (a
0+ 1)c
a0+1,b0= λ
2c
a0,b0,
puisque c
a0+1,b0= 0. Donc λ
2= b
0et aussi dans ce cas, λ
2∈ Z . Terminons la d´emonstration du lemme. Nous avons montr´e que
E M = (λ
1P + λ
2)M avec λ
1, λ
2∈ Z . De plus, E Θ = P Θ et E Z = Z . Donc
E M
M = λ
1E Θ
Θ + λ
2E Z Z .
On en d´eduit que E (M Θ
−λ1Z
−λ2) = 0, d’o` u M Θ
−λ1Z
−λ2∈ C
×(le corps
des fractions de N a C comme sous-corps des constantes pour la d´erivation
E ). L’irr´eductibilit´e de M implique M = cΘ ou M = cZ , avec c ∈ C
×.
D´ emonstration du th´ eor` eme 1.3. Soit J un id´eal premier de N . Si J ∩ Y [Z ] = (0), alors J est principal et ne peut pas ˆetre E -stable d’apr`es le lemme 4.1.
Donc, si J est E -stable, alors J
1:= J ∩Y [Z] est un id´eal premier E -stable non nul de Y [Z].
Si J
1∩ Y = (0) alors J
1est principal, donc J
1N est un id´eal premier principal E -stable de N , et le lemme 4.1 implique Z ∈ J .
Sinon, I = J
1∩Y est un id´eal premier D-stable non nul de Y ; il contient Θ d’apr`es le th´eor`eme 1.2 (avec K = C ).
La preuve du th´eor`eme 1.3 se termine en considerant l’isomorphisme diff´erentiel (12).
D´ emonstration du th´ eor` eme 1.4. Ce th´eor`eme est un corollaire du th´eor`eme 1.3. Soit P un id´eal premier non nul et z(d/dz)-stable de R
1. L’id´eal T := N P est un id´eal z(d/dz)-stable de N tel que T ∩ R
1= P . Le lemme 5.3 de l’appendice implique qu’il existe un id´eal premier z(d/dz)- stable Q de N tel que Q ∩ R
1= P . Le th´eor`eme 1.3 implique que z∆ ∈ Q , donc z∆ ∈ P .
5 Appendice : lemmes auxiliaires.
Soient X
0, . . . , X
sdes ind´etermin´ees. On consid`ere sur K [X
0, X
1, . . . , X
s] une graduation p d´etermin´ee par p(k) = 0 pour tout k ∈ K
×, et en assignant
`
a X
iun degr´e p(X
i) = p
i∈ Z
>0. Supposons que p
0soit ´egal au plus petit commun diviseur de p
1, . . . , p
s. Nous d´emontrons deux lemmes.
Lemme 5.1. Soient F, G ∈ K [X
0, X
1, . . . , X
s] deux polynˆ omes p-homo- g`enes. Si le r´esultant R =R´es
X0(F, G) ∈ K [X
1, . . . , X
s] est non nul, alors il est p-homog`ene.
D´ emonstration. On ´ecrit :
F = F
0+ F
1X
0+ · · · + F
mX
0m, G = G
0+ G
1X
0+ · · · + G
nX
0n, avec F
m, G
nnon nuls, et F
i, G
j∈ K [X
1, . . . , X
s] pour tout i, j. Il est bien connu que le r´esultant R est homog`ene par rapport ` a chaque groupe de variables (F
i)
i=1,...,met (G
j)
j=1,...,nde degr´es respectifs n, m. De plus, d’apr`es [11], th´eor`eme 6.1, R est “ν -homog`ene de d´egr´e mn”, avec ν = (0, 1, . . . , n, 0, 1, . . . , m). Ceci veut dire que si le monˆ ome
M
α,β= F
0α0· · · F
mαmG
β00· · · G
βnnapparaˆıt avec un coefficient non nul dans l’expression de R, alors :
m
X
i=1
iα
i+
n
X
j=1
jβ
j= mn. (18)
La p-homog´eneit´e de F, G implique que tous les F
iet G
jsont p-homog`enes.
Il existe deux entiers k, h tels que p(F
i) = m + k − i et p(G
j) = n + h − j pour tout i, j (on applique l’hypoth`ese sur p
0).
Donc si le monˆ ome M
α,βapparait avec coefficient non nul dans l’´ecriture de R, alors il est p-homog`ene ; calculons son degr´e.
p(M
α,β) =
m
X
i=0
α
ip(F
i) +
n
X
i=0
β
jp(G
j)
= (k + m)
m
X
i=0
α
i+ (h + n)
n
X
j=0
β
j−
m
X
i=1
iα
i−
n
X
j=1
jβ
j= (k + m)n + (h + n)m − mn
= kn + hm + mn,
en appliquant (18). Ainsi, tous les monˆ omes qui interviennent dans l’´ecriture de R avec un coefficient non nul ont mˆeme p-degr´e kn + hm + mn, ce qui implique que R est p-homog`ene de degr´e kn + hm + mn.
Soit I un id´eal de K [X
1, . . . , X
s] et notons ˜ I l’id´eal engendr´e par les
´el´ements p-homog`enes de I . Soit D une d´erivation p-homog`ene de poids d sur K [X
1, . . . , X
s].
Lemme 5.2. Nous avons les propri´et´es suivantes.
1. Si I est D-stable, alors I ˜ est D-stable.
2. Si I est premier, alors I ˜ est premier.
3. Si I est premier et n’est pas principal, alors I 6 ˜ = (0).
D´ emonstration. 1. Soit U ∈ I ˜ ; alors U = U
0+ · · · + U
kpour certains polynˆomes p-homog`enes U
0, . . . , U
k∈ I . Pour tout j on a DU
j∈ I car I est D-stable. De plus DU
jest p-homog`ene, donc DU = DU
0+ · · · + DU
k∈ I ˜ . 2. C’est bien connu : voir chapitre 7, paragraphe 2 de [12].
3. Notons, pour tout polynˆome non nul F ∈ K [X
1, . . . , X
s] :
h
F = X
0p/p0F X
1X
0p1, . . . , X
sX
0ps∈ K [X
0, X
1, . . . , X
s],
o` u p est le plus grand degr´e d’un monˆ ome non nul de F par rapport ` a la graduation p.
Il faut montrer que I contient un polynˆome p-homog`ene non nul. Par
hypoth`ese il existe U, V ∈ I premiers entre eux ; donc
hU et
hV sont premiers
entre eux. Donc T := R´es
X0(
hU,
hV ) ∈ A est non nul, et p-homog`ene d’apr`es
le lemme 5.1. De plus T ∈ I car il existe A, B ∈ K [X
0, X
1, . . . , X
s] tels que
T = A
hU + B
hV d’o` u, en prenant X
0= 1, T = aU + bV pour a, b ∈ A , on
obtient T ∈ I .
Lemme 5.3. Soient B ⊂ A deux anneau noeth´eriens, soit D une d´erivation de A telle que ( B , D) soit un anneau diff´erentiel. Soit T un id´eal D-stable de A tel que P := T ∩ B soit premier. Il existe alors un id´eal premier D-stable Q de A tel que Q ∩ B = P .
D´ emonstration. D’apr`es le th´eor`eme 1 p. 24 de [8], les id´eaux premiers Q
1, . . . , Q
tassoci´es de T sont D-stables, et T admet une d´ecomposition primaire :
T =
t
\
j=1
T
javec T
jqui est Q
j-primaire, et D-stable, pour tout j. On a : P =
t
\
j=1
T
j
∩ B =
t
\
j=1