ÉTUDE
DE LA VALEUR ALIMENTAIRE DUMAIS-GRAIN
SÉCHÉ ARTIFICIELLEMENT POUR LA CROISSANCE
DU POUSSIN.
II. — INFLUENCE DE LA DURÉE QUI
SÉPARE
LARÉCOLTE
DUSÉCHAGE
C. CALET H. TARDIF.
Station de Recherches Avicoles, C. N. R. Z., Jouy-en-Josas (S.-et-O.).
SOMMAIRE
La durée
qui sépare
la récolte duséchage
du maïségréné
se traduit parune fermentation
qui
aboutit à une diminution de 20 p. 100 de l’efficacité dugrain.
Les modificationschimiques
du maïs,responsables
de cette altération,n’apparaissent
pas à l’analyse. Toutefois l’addition de 0,08 p. 100 de trypto-phane
aurégime
remédiecomplètement
à l’abaissement de la valeur alimentaire dugrain
sous l’effet de la fermentation.Une
première
étude(C A r, ET
et de LAMBILLY,i 9 6o)
apermis
depré-
ciser l’influence de la
température
deséchage
du maïs sur sa valeuralimentaire et sur la
disponibilité
de sontryptophane
ou de sa niacine.Lorsque
latempérature
deséchage
s’élèvejusqu’à 9 o°C, aucune modi-
fication de la valeur alimentaire du
grain
n’estenregistrée.
Par contre,des
grains qui
ont fermenté avant leséchage présentent
une efficacitéalimentaire nettement
abaissée,
bien que ladisponibilité
dusystème tryptophane-niacine paraisse
accrue.Les méthodes modernes de récolte du maïs consistent de
plus
enplus
àégrener l’épi.
Ellesobligent
à sécher artificiellement legrain
envue de sa conservation.
Toutefois,
il s’écoule untemps plus
ou moinsvariable entre les moments où les
grains
sontprélevés
sur laplante,
etoù ils sont suffisamment secs. Pendant ces
durées,
legrain
est lesiège
de fermentations
importantes, puisque,
au sein des tas, latempérature
peut
s’éleverjusqu’à
80°.Afin de déterminer
l’importance
et la nature despertes
apparues aucours de la
fermentation,
nous avons étudié les modifications de la valeur alimentaire desgrains
soumis à des durées contrôlées de fermentation.MATÉRIEL
ETMÉTHODES
Nous
disposons
de trois échantillons de maïs de la variété INRA200
cultivés,
sur le même sol, et récoltés le mêmejour.
Le lot n° i estséché
immédiatement ;
le second, au bout de 24 heures destockage
en tas, et le troisième au bout de4 8
heures. Latempérature
deséchage
estfixée à
45 °C
afin de limiter la durée del’opération
et ainsi de ne pas modifier l’évolution des fermentations, sans provoquer toutefois d’alté- ration sous l’effet d’unetempérature trop
élevée. Lesgrains possèdent
à la fin du traitement une humidité de 14 p. 100 environ. Les durées de
séchage
sont de l’ordre de 18 heures. lacomposition fourragère
etl’analyse
des différents acides aminés du maïs ne révèlent pas de diffé-rences notoires entre les
échantillons,
comme le montre le tableau I.On est
surpris
de ne voirapparaître
àl’analyse
aucune différence dans lacomposition chimique
desgrains.
La fermentation nes’accompagne
ni d’une diminution de la matière
sèche,
ni depertes énergétiques,
nid’une élévation corrélative du taux de cellulose. Les teneurs en matières azotées totales et
digestibles
et en acides aminés dosés ne sont pas modi- fiées par le traitement.Les différents échantillons sont
incorporés
dans lesrégimes expé-
(1) Les analyses des divers échantillons de maïs ont été effectuées par le laboratoire de Bio- chimie et de Nutrition du C N R Z.
rimentaux,
au taux de 80 p. 100. Ilsreprésentent
ainsi laplus grande partie
des élémentsénergétiques
durégime.
Afin de mieux mettre enévidence une éventuelle variation dans la
disponibilité
dutryptophane
ou de la nicotinamide au cours de la
fermentation,
le reste de la ration est constitué des sources azotées très déficientes entryptophane
et lavitamine PP ne
figure
pas dans lecomplément vitaminique. Néanmoins,
dans la moitié des lots, les
régimes
sontsurchargés
d’une doseunique
detryptophane qui couvre largement
les besoins de l’animal en cet acide
aminé.
1 8
0
poussins mâles,
issus du croisement Rhode XWyandotte,
sontrépartis
àl’âge
de z5jours
en 18 lotshomogènes
et sont élevéspendant
7
semaines en batteries. le schéma
expérimental
est donné dans le tableau II.La
composition
durégime
debase, qui représente
20 p. 100 des rationsexpérimentales,
renferme les constituants suivants(exprimée
en
pourcentage) :
Le
complément vitaminique
et aminéfournit,
pour 100kg
derégime expérimental,
100g de DI, méthionine et toutes les vitamines nécessairesau
poussin
en dosesoptimales,
sauf la nicotinamidequi
n’est pasprésente.
Ainsi les
régimes qui
titrent 19 p. 100 de matières azotées couvrent tous les besoins nutritifs dupoussin
sauf ceux des facteurs étudiés.RÉSULTATS
Les résultats
portant
sur la croissance et la consommation de nourri- ture sont rassemblés dans le tableau III.Lorsque
lerégime
n’est passupplémenté
entryptophane,
le modede
préparation
dugrain
retentit considérablement sur sa valeur alimen- taire. Plus la durée dustockage
du maïs humide estimportante,
moinsla croissance de l’animal est
rapide.
Les différences observées entre les valeurs extrêmes tantà 4
semainesqu’à
7 semaines sont de l’ordre de20 p. 100. On ne remarque pas de variations
importantes
dans la con-sommation du maïs à la
quatrième
semaine. Par contre, au fur et à mesureque l’animal
vieillit, l’appétance
des différents maïs est modifiée et la fermentation conduit à une diminution de laquantité
d’alimentingéré.
Il en
résulte,
dans tous les cas, une élévation de l’indice deconsommation, qui
est toutefoisplus marquée lorsque
l’animal estjeune.
Il fautsouligner
que ce sont les maïs les
plus
fermentésqui
fournissent les indices de consommation les moins recherchés.L’effet le
plus spectaculaire est consécutif à l’addition de tryptophane.
On assiste en effet à une
augmentation
considérable de la vitesse de croissancequi
est presque doublée aussi bienà 4 qu’à
7 semaines. I,asupplémentation
desrégimes
distincts par une dose élevée detryptophane
remédie entièrement aux déficiences des divers échantillons de maïs
quelle
que soit leurorigine.
Les différences très faibles que l’onenregistre
dans les
gains
depoids
ne sont passignificatives
même à 7 semaines.De son
côté,
l’indice de consommation estégalement amélioré,
mais ilreflète encore la hiérarchie des valeurs alimentaires des maïs,
primi-
tivement établie.
DISCUSSION
On
pouvait
s’attendre à ce que, au cours dustockage
du maïshumide,
la fermentation se traduise par uneperte
des constituants de lacéréale,
etplus spécialement
desprincipes énergétiques.
Enfait, l’analyse
chimique
montrequ’il
n’en estrien, puisque
la valeurfourragère
desdivers échantillons est
rigoureusement
la même. Cette observation est àrapprocher
de celle d’ARCHIBALDetal.,
1051,qui
montre que la valeurénergétique
d’unfourrage
ne s’abaissequ’au
bout deplusieurs
semainesde fermentation. Ce
phénomène n’apparaît
que dans la mesure où la teneur en matière sèche de laplante
est diminuée. Pourtant lesréponses
de croissance
enregistrées
révèlent les différentesaptitudes
des maïs. Ilsemble que le maïs subisse une diminution de sa valeur alimentaire au cours de la fermentation
qui porte
sur uneperte
detryptophane.
En effetl’adjonction
d’unelarge quantité
detryptophane
faitdisparaître
lesinégali-
tés d’efficacité des maïs et remédie
également
à la déficience des diversrégi-
mes. On connaît le rôle du
tryptophane
dans lasynthèse
de la nicotinamide.R
OSENet
al., 194 6,
montrent quel’adjonction
detryptophane
aurégime
pro- voque une élimination accrue des dérivés de la vitamine PP.De plus,
le be-soin en
tryptophane
s’accroîtlorsque
la ration est déficiente en vitamine PP.Le
tryptophane
serait donc unprécurseur
de cette vitaminequi
est sou-vent
indisponible
dans les aliments. C’est le cas enparticulier
du maïs.K ODIC E K
,
B RAUDE ,
Korr et MITCHELL, 1959, ont dosé les vitamines B dans le maïs traité selon différents modes depréparation.
La teneuren vitamine PP libre du maïs non traité est très faible
( 1 , 7
p. 100de la
vitamine
totale).
Elle devient par contre très élevéelorsque
le maïsa été cuit dans l’eau de chaux
( 9 8
p. 100 de la vitaminetotale).
La modi-fication de la valeur alimentaire du
grain
réside dans la mise endisponi-
bilité de la nicotinamide et non pas du
tryptophane
dont la teneur demeureconstante
( 0 ,8 5
p. 100dans les deuxcas).
La libération de la vitamine PP descomplexes
où elle se trouve liéedépend
essentiellement de la manière dont le maïs estpréparé.
Ainsi KODICEK et WILSON, ig5g, étudiant la valeur alimentaire de « tortilla » obtenus par deux recettes différentesaprès trempage
du maïs dans l’eau dechaux,
observent dans l’un descas, une
hydrolyse partielle
et une libérationincomplète
de la vitamine PP. D’un autrepoint
de vue, LAGUNA etC ARPENTER ,
1952, montrent que lesimple trempage
dans l’eau n’est pas suffisant pour valoriser le maïs. Pour cela unehydrolyse
doit être effectuéequi
doitporter
sur les fractions nonglucidiques
dugrain.
Ce sont vraisemblablement ces deux dernières raisonsqu’il
fautinvoquer
pourexpliquer
le fait que la fermen- tation desgrains
de maïs n’a pas conduit à une élévation de leur valeuralimentaire,
selon notrehypothèse
dedépart.
SUMMARY
Field-shelled corn
during
the course ofharvesting
is an ever morespreading technique, although
it makes it necessary to have corn driedartificially.
In an earlier
study,
it has been shown that the temperature ofdrying
didnot affect the nutritive value of corn if it did not rise above
go o c.
The present work reports the effects on corn
efficiency
of thelength
oftime between
harvesting
anddrying.
Thelonger
theperiod,
thelonger
cornferments. This fermentation is shown
by
a decrease inefficiency.
The addition of 0,08 p. 100 of
tryptophane
overcomescompletely
theunfortunate effect of fermentation.
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The effect oftryptophane
on the