Images en Dermatologie • Vol. XI - n° 1 • janvier-février 2018 32
prix
éditorial 2017
3e lauréatSarcoïdose et pratique religieuse
Sarcoidosis and religious practice
A. Baudry 1 , S. Osdoit 1 , P. Schlossmacher 2 , K. Bagny 1
( 1 Service de dermatologie, CHU de Saint-Denis, La Réunion ; 2 Service de pneumologie, CHU de Saint-Denis, La Réunion)
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
maladies immuno-inflammatoires
Sarcoïdose • Phénomène de Koebner • Religion.
S arcoidosis • Ko ebner phenomenon • Religion.
Légendes
Figures 1-4. Sarcoïdes sur cicatrice . Figure 5. Homme en procession (cavadee).
1. Reymond JP. Île de la Réunion. Paris : Marcus, 1998.
2. Scarfi F, Arunachalam M, Galeone M, Difonzo E. Nodular lesions on post-surgical scars: scar sarcoidosis. Acta Derm Venereol 2013;93(2):255-6.
Références bibliographiques
N
ous rapportons l’apparition de sarcoïdes cutanées sur cicatrice (fi gures 1-4) après une pratique religieuse hindoue célébrée par la communauté tamoule, réalisant ainsi un tableau clinique atypique.Observation
Un homme âgé de 46 ans, de phototype V, d’origine tamoule et présentant des lésions papuleuses ayant débuté au niveau des commissures labiales puis s’étant étendues sur le tronc vient consulter dans le service . La biopsie d’une adénopathie pectorale et d’une lésion cutanée montre un granulome épithélioïde et gigantocellulaire sans nécrose caséeuse, avec coloration de Ziehl -Neelsen négative, compatible avec une sarcoïdose. Le caractère atypique des lésions avec atteinte symétrique péri-orale permet d’orienter l’interrogatoire et de trouver une pratique religieuse tamoule (le cavadee) traumatique, réalisée 5 ans auparavant. Les lésions sont apparues sur les zones traumatisées par des aiguilles percutanées. Le bilan montre un trouble ventilatoire restrictif modéré, des adénopathies hilaires bilatérales avec des réticu- lations sous-pleurales au scanner et une enzyme de conversion de l’angiotensine normale. Un traitement par hydroxychloroquine est instauré.
Discussion
Le cavadee est une fête religieuse hindoue célébrée dans le sud de l’Inde et dans l’archipel des Mascareignes (La Réunion, l’île Maurice et Rodrigues). La communauté tamoule y célèbre le dieu Muruga, dieu de la jeunesse et de la beauté, lors d’une festi- vité comportant processions et mortifi cations corporelles. Les fi dèles marchent sur des lits de cendres, des sabres, des clous et se piquent le corps et la langue avec des aiguilles (fi gure 5) . Ces pratiques, précédées d’une préparation comportant jeûne et prières, sont considérées comme un rituel de purifi cation de l’âme (1) . Les facteurs traumatiques décrits dans la survenue de sarcoïdes sont les ponctions veineuses, les injections intramusculaires, les tatouages. Le matériel exogène déposé dans les tissus pourrait déclencher l’apparition de granulomes. Une atteinte systémique existe chez la plupart des patients ayant des sarcoïdes sur des cicatrices ; l’aspect infl ammatoire de celles-ci serait un marqueur de l’évolutivité de la maladie (2) . Notre patient présentait une atteinte parenchymateuse pulmonaire asymptomatique.
Conclusion
Le cavadee, fête religieuse tamoule, peut entraîner, par un phénomène de Koebner, des dermatoses particulières consécutives aux traumatismes de mortifi cation (perfo- ration des joues, de la langue ou du tronc). Il s’agissait dans notre cas de sarcoïdes cutanées apparaissant sur les points de perforation des aiguilles. Une atteinte des 2 commissures labiales était évocatrice. Devant un patient pratiquant, la connaissance de cette pratique permet de comprendre la disposition des lésions cutanées. II
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