A NNALES DE L ’I. H. P., SECTION A
J. G ÉHÉNIAU
Les groupes internes et la théorie de Heisenberg des particules élémentaires
Annales de l’I. H. P., section A, tome 1, n
o1 (1964), p. 21-30
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p. 21
Les groupes internes
etla théorie de Heisenberg
des particules élémentaires (1)
J. GÉHÉNIAU
J
Université de Bruxelles.
Ann. Inst. Henri Poincaré, Vol. I, No 1, 1964,
Section A : Physique
théorique.
L’un des
problèmes
essentiels de laphysique
desparticules
élémentaires est sans douted’exprimer
correctement leurscaractéristiques
internes :nombre
baryonique, isospin, étrangeté,
etc. Le groupeSU2
suffit àl’École
de
Heisenberg
pourreprésenter l’isospin
etl’étrangeté,
parce quel’étrangeté
y est obtenue par des
propriétés
duvide, qui
est lui-même un réservoird’isospin.
Dans le « modèle de la voieoctuple
» ces deux caractères sont décrits à l’aide du groupeSU3.
Dans le modèle du rotateurspatio-temporel,
ce sont les indices p, q des
représentations Dpq
du groupe de Lorentzqui
sont liés à
l’isospin
et àl’étrangeté.
L’École
deHeisenberg
al’avantage
deposséder
uneéquation
dont onpeut espérer
tirer toutes lespropriétés
desparticules. J’exposerai quelques aspects
de cette théorie. J’examinerai ensuite leséquations
du mêmetype qui peuvent
être écrites sur la base des deux autres groupes cités. Ceci à titred’exemples.
La même idée estapplicable
à tout groupe interne.Le
champ
fondamental a d’abord étéprésenté,
par leséquations
de Hei-senberg-Pauli,
comme unspineur ~
de Dirac àquatre composantes (et
sonconjugué ~*).
Ceséquations
sont invariantes pour les groupes continus deLorentz,
dePauli-Gürsey (isospin),
de Touchek(nombre baryonique)
et les groupes discrets
désignés
habituellement parP, C,
T[1].
En
particulier,
elles sont invariantes pour la substitution :(1) Exposé
fait au Séminaire L. deBroglie
(Institut H.Poincaré),
le 3 décembre 1963.22 J. GEHENIAUI 1
mais celle-ci ne
représente
pas lasymétrie d’espace.
Sasignification
apparaît immédiatement dans les notationsproposées
par Dürr[2].
où Ml et Xs2 sont deux
semi-spineurs
depremière espèce.
Dans ces notationset avec 0"0 =
1,
6k = matrices de Pauliqui opèrent
sur lepremier
indicede x, les
équations
fondamentalesprennent
la forme :la transformation de
Pauli-Gürsey
s’écrit :où T sont les matrices de Pauli
qui opèrent
sur le second indice de x ; la trans- formation de Touchek est unsimple changement
dejauge :
v i
et
(!)
devient :Par
(4)
on voit que le second indice de xreprésente l’isospin
et par(6)
que la substitution
( 1 )
doit êtreinterprétée
comme uneopération
PG.Mais
alors, quelle
est lareprésentation
de P ? EnMécanique
ondulatoire il est bien connu que, pour des raisons d’invariancerelativiste,
la fonctiond’onde
semi-spinorielle
depremière espèce 03C6
relative à un état de masse non nulle satisfait à unsystème
de deuxéquations
deKlein-Gordon, équi-
valent à un
système
dequatre équations
de Dirac oùfigurent,
à côté de p,un
semi-spineur
de secondeespèce
lié à p. Dürr a montréqu’au champ quantifié pouvait également
être associé unsemi-spineur
de secondeespèce X. [2].
Le lien entre ces deuxgrandeurs
n’est pas établi avecprécision,
mais on
dispose
ainsi d’unspineur
de Dirac :pour définir la
symétrie d’espace
Les
équations
obtenues par Dürr pour(7)
sont cellesqui
établissent le maximum desymétrie
entre x etx.
Elles sontformées,
eneffet,
de(3)
et,avec Go - =
I,
- ak = - ax,Q.., f,.
23
LES GROUPES INTERNES ET LA THÉORIE DE HEISENBERG
(et
uneéquation
pour/ +)
ou, à l’aide de X et des matrices r de Dirac(et
uneéquation
pour X =X~r4).
La
première application
de(3)
et(10)
a été lecalcul,
par une méthode de Tamm-Dancoff des masses du nucléon et des mésonspseudo-scalaires d’étrangeté
nulle[1].
Leurs fonctions d’onde sont des éléments de matriceassociés à la destruction d’un
nucléon,
d’unsystème
nucléon-antinucléon.Elles ont, pour les nucléons
( 11 )
huit composantesLes mésons 7t
d’isospin
1 s’obtiennent àpartir
de(12)
par fusioncomplète
du nucléon N’ et de l’antinucléon N" dans l’état S. Cette
opération
fournitégalement
un mésonpseudo-scalaire d’isospin
nul(~).
Les fonctions d’onde ontrespectivement
troiscomposantes
(état symétrique d’isospin)
et une composante(état antisymétrique d’isospin).
La réduction des fonctions à trois et
quatre points qui apparaissent
dansles calculs est effectuée
grâce
à une «règle
de Wick » danslaquelle figure
la valeur moyenne pour le vide
dont on utilise une
expression simplifiée
à un seulpôle
de masse x.Les masses de 7t
et ~
sont données en unités x par leséquations
24 J. GEHENIAU
où m est la masse cherchée. Ci-dessous
quelques
valeursnumériques,
pour xl =
5,88,
extraites de[3] :
Le
rapport prévu
par la théorieest en bon accord avec sa valeur
expérimentale,
~4.Pour le
nucléon,
on avaitl’équation [1]
Il est
remarquable,
vu lesapproximations faites,
que les trois masses deces
particules d’étrangeté
nulle soient obtenues ainsi avec une bonneapproxi- mation, grâce
à un choix convenable de xl - de l’ordre de5,8
- et de x -de l’ordre de la masse du nucléon.
Signalons
une autreapplication.
Elle concerne les momentsmagnétiques
des nucléons. La méthode consiste à évaluer la modification
apportée
àl’énergie
d’un nucléon au repos par laprésence
d’unchamp magnétique extérieur,
uniforme et constant. Cechamp
est introduit dansl’équation (3)
par son
potentiel
et par un terme de Pauli. Ce terme, invariant pour les rotations autour du troisième axe de
l’iso-espace,
estunique,
à un facteur kprès.
A cause duchamp magnétique,
la valeur moyenne pour le vide( 16)
estmodifiée,
commeen théorie
quantique
deschamps
habituelle. Le résultat intéressant est ici que la somme des momentsmagnétiques
duproton
et du neutron est indé-pendante
de k et est de l’ordrede e 2x (Les
contributions aux momentsmagné- tiques
duproton
et du neutron dues au terme de Pauli sontégales
et designes contraires).
Tout ceci ne
permet
pas encore de situer lesparticules étranges
dans lathéorie. C’est ici
qu’intervient
la notion dedégénérescence
du vide[3].
Pour notre propos il suffit
d’imaginer
que le vide estrempli
departicules,
appelées spurions,
dénuées de caractères relatifs au groupe deLorentz,
mais douées d’unisospin, l.
Uneparticule
est vue comme unsystème
LES GROUPES INTERNES ET LA THÉORIE DE HEISENBERG 25
de
Np nucléons, Na antinucléons, n spurions
e,nQ antispurions e
intime-ment liés. Les différences
déterminent son nombre
baryonique
et sonétrangeté.
D’oùl’hypercharge
où
Les lois de transformation du
spurion
pour lesopérations C, S, 3
sontcalquées
sur celles desparticules
matérielles :Il a paru
nécessaire,
pourproduire
laséparation
des niveaux de massebaryoniques,
d’attribuer en outre les deuxparités
~ 1 auspurion.
Cecia eu notamment pour effet de doubler le nombre
d’hypérons d’étrangeté
moins 1. Il existerait dans ce cas, des
hypérons
A(et ~)
depariétés
+ 1et - 1 et,
d’après
leurspectre
de massethéorique,
les deuxpremières parti-
cules par ordre de masses croissantes seraient un A et un 2 de
parités opposées [3].
Cette
prévision
est en contradiction avecl’expérience.
D’où lerejet
dupostulat
sur laparité
desspurions
et l’onpeut
penser que cette correction soit de nature à rectifier la théorie[4].
A
(11)
et(12) s’ajoutent
maintenant les élémentsLes fonctions d’onde
(22)
sont des états despin t, d’étrangeté
moins 1 etd’isospin
0 ou 1. L’étatantisymétrique d’isospin
est àquatre composantes
l’état
symétrique d’isospin
a 12composantes
Par fusion
complète
on tire de(23),
comme de(12),
desparticules pseudo-
scalaires
d’étrangeté 1, d’isospin i
ou~.
Les étatsd’isospin ! peuvent être,
26 J. GÉHÉNIAU
par
rapport
aux indicesd’isospin
des deuxparticules N’,
e, soit anti-symétriques
soit
symétriques
Les fonctions d’onde du
quadruplet
sontcomplètement symétriques
Le nombre d’états
possibles
est réduit parl’exigence
suivante : la fonction d’onde doit êtresymétrique
parrapport
aux indicesd’isospin
desparti-
cules
(nucléons
etspurions),
ainsi que desantiparticules (antinucléons
etantispurions),
liées entre elles dans lesystème.
Ce
postulat
écarte(26).
Reste comme mésonspseudo-scalaires
le tri-plet (14),
lesingulet ( 15),
le doublet(27)
et lequadruplet (28).
L’équation
de masse est, pour le doublet[4],
d’où avec xl =
5,88,
en bon accord avec la valeur
expérimentale ( ~ 3,61).
A la conférence de Sienne
[4], Heisenberg
aégalement
situé dans sathéorie l’invariant
où :
est le carré de
l’isospin
total. Ceci nousrapproche
curieusement du modèle de la voieoctuple,
par le théorèmed’Okybo [5].
Dans le modèle de la voie
octuple,
les notionsd’isospin
etd’hypercharge
sont introduites simultanément par les
propriétés
du groupeSU3
d’avoircomme sous-groupes
qui
commutent entre eux un groupeSU 2
et un groupe dejauge
H à unparamètre.
Cespropriétés permettent également
d’intro-duire directement ces deux notions de manière
explicite
dansl’équation
LES GROUPES INTERNES ET LA THÉORIE DE HEISENBERG 27
fondamentale de
Heisenberg,
en donnantà ~
la variance duproduit
d’unsemi-spineur
pourLi
par un tenseur irréductible pourSU, :
La
représentation
àprendre
dansSU3
nes’impose
pas apriori.
Avec
2)n
on a lepoint
de vue leplus global
Les fonctions d’onde
(11)
sont alors celles de l’octet debaryons,
dont lamasse commune satisfait à une
équation
dutype (19)
obtenue en résolvantune
équation
dutype (3)
ou(10)
par la méthode de Tamm-Dancoff à l’aide de la valeur moyenne pour le vide(16) qui
est maintenantnumériquement
invariante pour
SU3.
Laséparation
de ce niveaud’après l’isospin
et l’étran-geté
est réalisée en abandonnant l’invariancecomplète
de(16)
pourSU3,
tout en conservant son invariance pour les deux sous-groupes mentionnés ci-dessus. Dès
lors, (16)
devient leproduit
d’un tenseur de
l’espace-temps
de Minkowski par descomposantes
d’untenseur de
S Us qui
forment unegrandeur numériquement invariante pour SU,
et H seulement. La
première expression qui
seprésente
ainsipour Q
estdonnée par le théorème d’Okubo et, dans ce cas, Q n’est autre que
(31),
vu dans
SUs.
Ceci a pourconséquence
deproduire
laséparation
des massesbaryoniques
conformément à la relationIl convient de noter que dans cette voie un
problème
nouveau se pose, celui de l’unicité del’équation
fondamentale. Cette unicitén’est,
eneffet, plus
assuréelorsque
la variance de x pourSU3
est celle de lareprésentation régulière
Ce
problème
ne se pose paslorsque
la variancede x
pourSUsest,
pardéfinition,
celle de lareprésentation
à trois dimensionsDans ce cas,
l’équation
fondamentale est encoreunivoquement
déter-minée par les conditions d’invariance. Elle a d’ailleurs la même forme
qu’en (3),
à cette différenceprès
que l’indiced’isospin t
=1,
2 estremplacé
par un indice
qui prend
trois valeurs1, 2,
3.Introduisons ces modifications dans la
première application
mentionnéeplus
haut. Si l’invariancecomplète
pourSU 3
estexigée,
le facteur Q de(34)
est la matrice unité
3 x 3, ( 11 )
fournit trois états de même masse, mais28 J. GÉHÉNIAU
(12)
conduit à deux niveaux d’étatspseudo-scalaires,
un octet de massedonnée par la même
équation qu’en (17),
et unsingulet
de masse donnéepar
l’équation
La
séparation
des niveauxd’après
leurisospin
et leurétrangeté
est réaliséeen abandonnant l’invariance de
(16)
pourSU3
tout en conservant soninvariance pour
SU2
et H. L’octet de mésonspseudo-scalaires
se scindeen un
triplet (7~),
un doublet(K)
et unsingulet ("11),
tandis que letriplet baryonique
se scinde en un doublet(nucléons)
et unsingulet (A),
commedans le modèle de Sakata.
On
peut
obtenir directement l’octet debaryons
àpartir
de(36),
à condition que le vide soitdégénéré.
Dans ce cas(22),
où e est maintenant un vecteur de2)oi
se réduit en unsingulet
et un octet. Laséparation
des niveaux de l’octet esttoujours
réalisée suivant les mêmesprincipes; (35)
en résulteencore. Mais cette
fois,
le nucléon renferme unspurion
comme les autresbaryons
et il faut éliminer arbitrairement les états sansspurion.
J’ai
suggéré
il y aquelque temps déjà
d’introduire uneéquation
dutype (3)
dans l’étude du modèle du rotateurspatio-temporel [6] [7].
Quelle
variance interne attribuer à x dans ce cas ? Laplus simple
seraitcelle d’un
semi-spineur :
Mais c’est insuffisant parce
qu’avec
lesproduits xx+x
on nepeut
formerune
grandeur qui
a la variance interne de x,puisque
Il est donc nécessaire de poser
où
2)(~0) désigne
lareprésentation spinorielle
àquatre
dimensions. Lechamp
xpossède
huit composantesqui constituent,
dansl’espace interne,
2 X 2semi-spineurs
depremière espèce
et 2 X 2semi-spineurs
de secondeespèce
J
Le
lagrangien
leplus gênerai
est formé de29
LES GROUPES INTERNES ET LA THÉORIE DE HEISENBERG
et d’une combinaison linéaire arbitraire à coefficients réels des
cinq
invariantsdu
quatrième degré (dont
deux seulement sont linéairementindépendants)
où les matrices de Dirac
opèrent dans’ l’espace
interne.Au lieu de
(3),
on a donc(et
uneéquation
enx+),
où a,b,
... sontcinq
constantes réelles.La valeur moyenne pour le vide
est
toujours
de la formeoù Q est un
opérateur
del’espace
interne. La seule matricenumériquement
invariante pour le groupe
complet
de Lorentz est la matriceunité;
maissans l’invariance pour la
symétrie d’espace,
onpeut
écrireplus généralement
Dans ce cas, la
représentation q)
se scinde en et Confor-mément au modèle du rotateur
spatio-temporel,
lepremier
indice fixel’isospin
et le second
l’étrangeté
Il en résulte que
représentent respectivement
un doubletd’étrangeté
nulle(nucléons)
et deuxsingulets d’étrangetés
moins un(A)
etplus
un( V ).
Laprésence
de84
dans(44)
fixe le choix des fonctions d’onde desantiparticules
30 J. GÉHÉNIAU
La
particule
et sonantiparticule
ont donc la mêmereprésentation
dansl’espace
interne et ceci est bien conforme au modèle du rotateurspatio- temporel.
Ce modèle
possède
ainsi au même titre que la théorie deHeisenberg,
son
équation
fondamentale àpartir
delaquelle
onpeut
calculer notamment les masses desparticules.
C’est cequ’il
conviendrait de faire pour la mettre àl’épreuve.
Le but
principal
de cetexposé
est de montrerqu’il peut
être intéressant d’introduiresystématiquement
uneéquation
deHeisenberg-Pauli
enphy- sique
desparticules.
Cetteproposition implique
naturellement l’étude appro- fondie deséquations
non linéaires deschamps quantifiés.
BIBLIOGRAPHIE
[1]
H. P. DÜRR, W. HEISENBERG, H. MITTER, S. SCHLIEDER et K. YAMAZAKI,Z.
Naturforschung,
14 a, 1959, p. 441.[2] H. P. DÜRR, Z.
Naturforschung,
t. 16 a, 1961, p. 327.[3] H. P. DÜRR et W. HEISENBERG, Z.
Naturforschung,
t. 16 a, 1961, p. 726.[4] W. HEISENBERG, Communication
présentée
à la conférence de Siennesur la