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Les portraits de Marie-Thérèse : échange et pouvoir entre la souveraine et les élites politiques de la Monarchie

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Academic year: 2021

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Submitted on 4 Jul 2019

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entre la souveraine et les élites politiques de la

Monarchie

Anne-Sophie Banakas

To cite this version:

Anne-Sophie Banakas. Les portraits de Marie-Thérèse : échange et pouvoir entre la souveraine et les élites politiques de la Monarchie. Histoire. Université Panthéon-Sorbonne - Paris I; Ruprecht-Karls-Universität (Heidelberg, Allemagne), 2016. Français. �NNT : 2016PA01H100�. �tel-02173719�

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1 UNIVERSITE PARIS I PANTHEON

SORBONNE-RUPRECHT-KARLS-UNIVERSITÄT-HEIDELBERG

DEPARTEMENT D’HISTOIRE

Thèse de doctorat

Les portraits de Marie-Thérèse : échange et pouvoir entre la

souveraine et les élites politiques de la Monarchie

Anne-Sophie Banakas Septembre 2015 Cotutelle de thèse

Thèse dirigée par Professeur Docteur. Christine LEBEAU, Université Paris I Panthéon Sorbonne et par Professeur Docteur Thomas MAISSEN, Ruprecht-Karls-Universität

Heidelberg.

Thèse soutenue le 09 Janvier 2016 Jury :

Professeur Docteur Beatrix BASTL, directrice de la Bibliothèque de l’Académie des Beaux-Arts de Vienne

Mme Marie-Elisabeth DUCREUX, directrice de recherche, EHESS

Mme Sylvène EDOUARD (rapporteur), Maître de conférences, HDR, Université Jean Moulin, Lyon 3

Professeur Docteur Sven EXTERNBRINK (rapporteur), Université de Heidelberg

Mme Christine LEBEAU (directrice), professeur des Universités, Université de Paris I Panthéon Sorbonne

Professeur Docteur Thomas MAISSEN (directeur), directeur de l’Institut Historique allemand de Paris

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3 Remerciements

Je remercie mes professeurs Christine Lebeau et Thomas Maissen qui m’ont offert la possibilité d’écrire cette thèse. Je remercie notamment Christine Lebeau, à l’origine de ce beau sujet pour lequel je me suis progressivement prise d’intérêt, et qui a guidé mon travail tout au long de ces années. Je remercie également Thomas Maissen de m’avoir permis de commencer ma thèse à l’université d’Heidelberg, sans laquelle je n’aurais probablement jamais commencé cette thèse et qui m’a permis d’acquérir une certaine rigueur dans l’exposition scientifique. Je n’oublie pas non plus Sven Externbrink et Isabelle Deflers qui m’ont soutenue et suivie lors de ma première année de thèse à Heidelberg.

Je remercie aussi ma famille, mes amis et collègues ; leur soutien et parfois même leur relecture, m’ont aidée à réaliser ce travail: merci notamment à Pascale Banakas, Agnès et Philippe Banakas, Thomas Stockinger, Caroline Authaler, Myriam Olivier, Alexandre Jaisson, Fanny Billod, David do Paço, Benjamin Landais, Farid Ameur, Gilles Combecave, Florence Cloarec et Bénédicte Dupré qui ont relu certains passages, si ce n’est des chapitres entiers comme Thomas Stockinger envers qui je suis tout particulièrement reconnaissante pour son aide et les nombreuses discussions que nous avons eues. Merci aussi à Lars Gunnar Hedenström et Michaela Bodnarova pour leur aide linguistique, merci aussi à mes amis ou connaissances, Claire Josselin Requena, Marie Fel, Heike Fischer, Lucie Martin, Bettina Müller, Marion Romberg, Sonya Isaak, Evan Spritzer, Félicitas Wissing, Ersin Mihci, Klaas van Gelder, Lilla Retali, Jacqueline Jourdain, Jean-François Dousset qui m’ont d’une manière ou d’une autre, à un moment ou un autre, soutenue tout au long de ces années de thèse.

Je remercie aussi les chercheurs et professeurs : Catherine Horel, Janos Poor, Géza Palffy, Werner Telesko, Friedrich Polleroß, Wolfgang Schmale, Eva Kowalska, Szabolcs Serfőző, Štěpán Vácha, Philippe Hamon, Michael Yonan.

Je remercie tout particulièrement les archives de Vienne et de Budapest pour leur coopération. Je suis notamment reconnaissante au DAAD (Deutscher Akademischer Austauschdienst), à l’université franco-allemande de Sarrebruck, à l’institut historique allemand de Francfort sur le Main ainsi qu’aux universités de Paris et d’Heidelberg pour les financements qu’ils m’ont apportés.

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4 Autriche : Château de Schönbrunn, Ilfriede Iby, Académie des Beaux-Arts, Ferdinand Gutschi,

Belvédère, Georg Lechner, merci aussi au Kunsthistorisches Museum, musée d’histoire de l’art de Vienne et la Hofburg d’Innsbruck, Viktoria Hammer. Merci à Birgit Rauscher du conseil municipal d‘Eferding, ainsi qu’aux abbayes de Klosterneubourg (Wolfgang Christian Hubert), Lilienfeld, Seitenstetten, Saint Florian, Rein (Pater Mag. August Janisch), Melk, merci notamment à Maria Prüller de Melk, ainsi qu’à différents musées régionaux, au Landesmuseum de Klagenfurt, Robert Wlattnig ainsi qu’aux Landesmuseum de Sankt Pölten (Helmut Ehgartner), de Linz et du Voralberg tout comme à l’université d’Innsbruck, merci au château d’Eggenberg ainsi qu’au musée de la ville de Graz, au musée de Krems, Sonja Bankl, de Baden avec le docteur Rudolf Maurer; collections de la famille Esterházy : Margit Kopp ainsi que les archives Liechtenstein, Arthur Stögmann ainsi qu’à Rosanna Dematté de l’université d’Innsbruck.

Slovaquie : Musée Červený Kameň : Jozef Tihányi, Musée Slovenské Národné, Lucia Kuklová

du Palais Mirbach de Bratislava, Musée de Bojnice, Ján Papco et Diana Miškovičová, château de Kežmarok avec Miros Semancik, Eva Kowalská chercheuse à Bratislava ainsi que Jana Bahurinská

Hongrie : Château de Gödöllő, János Papházy, Agnes Simon ; Musée des Beaux-Arts de

Budapest, Anna Maria Govzotola, Galerie nationale hongroise : Zsuzsanna Boda, château de Fertőd, Palais Esterházy: Edine Tóth, merci également à Géza Pálffy, à János Poór, à Enikő Buzási, à Marta Vajnagti, à Gabi Dománszky, à Szabolcs Serfőző ainsi qu’aux archives de Budapest.

République tchèque : Musée historique de la ville de Prague : Zuzana Strnadová, Litomyšl :

Veronika Cinková, Galerie nationale de Prague : Marcela Vandráčková, Musée national de Prague : Petr Landr ; Stift Strahov : Libor Šturc ; Konopiště: Lenka Svobodová ; Vizovice : Jana Pluhařová ; monastère de Teplá : Michaela Bäumlová ; Leitmeritz, Litoměřice : Eva Hovorková, château de Valtice, Feldsberg/ Liechtenstein, Michaela Suchénková, Olomouc et Jaroslava Kunzfeldová, ainsi qu’à Štěpán Vácha.

Slovénie : Ljubljana, galerie nationale slovène : Barbara Jaki, Mojka Jenko ; Ptuj, musée régional :

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5 Italie : Bolzano, Handelskammer Bozen, Elisabetta Carnielli ; Musée civique de Mantoue, Chiara

Pisani.

Allemagne : Passau, les collections d’Etat bavaroises, Martin Schauve ; château d’Hof Bamberg,

Baptist Ruß ; château de Nymphenburg, Christoph von Pfeil ; Paderborn, château de Corvay, Günter Jüggesbaumter ; Augsbourg, les collections princières et musées d’Augsbourg, Christopher Nicht, Hildegard Stuhler ; Germanisches National Museum, Musée national germanique, Claudia Selheim, Schloss Calenberg, Coburg, Franziska Bachner, et l’université de la vile de Fribourg en Bresigau.

Belgique : Bruxelles : hôtel de ville, Bérengère de Laveleye ; musée des Beaux Arts : Joost

Vanderawera ; Lier : musée de la ville de Lier, Luc Coenen ; Bruges : Hôtel de Ville : Laurence Van Kerkhoven, Klaas van Gelder de l’université de Gand.

France : Musée lorrain de Nancy : Richard Dagorne, Claire Tiné et Bénédicte Pasques ; Musées

des châteaux de Versailles et de Trianon.

Dans tous les cas, nous tenons à remercier toutes les personnes et tous les musées qui nous ont permis d’accéder aux portraits exposés dans cette thèse. Toutefois, pour des raisons de protection et de droits d’auteur, nous avons préféré ne pas montrer tous les tableaux normalement exposés dans divers musées. L’inscription « portrait enlevé » se retrouve ainsi tout au long de la thèse. Concernant l’orthographe des noms des villes de la Monarchie dans la thèse, il nous a été difficile de choisir entre la version française, allemande ou slovaque, tchèque, hongroise ; nous utilisons les noms Vienne, Prague, Presbourg (Bratislava), Buda-Ofen ou Buda.

Les portraits de Marie-Thérèse : échange et pouvoir entre la souveraine et les élites politiques de la Monarchie

A partir d’un corpus de deux cent vingt et un portraits répartis principalement dans les anciens territoires de la Monarchie des Habsbourg (Autriche, Royaumes de Hongrie et de Bohême, mais aussi les Pays-Bas autrichiens ainsi que certains territoires italiens), réalisés entre la naissance de Marie-Thérèse en 1717 et sa mort en 1780, une base de données a été mise en place, qui a permis d’analyser l’importance des portraits de Marie-Thérèse au sein des pays de la Monarchie. Tour à tour, archiduchesse d’Autriche, puis « roi » de Hongrie et de Bohême, fille,

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épouse et mère des empereurs du Saint Empire Romain Germanique, Charles VI, François Ier et Joseph II, impératrice-veuve, les types de portraits diffusés tout au long du règne et de la vie de Marie-Thérèse sont à chaque fois liés à des contextes et des publics précis. L’unité et la continuité entre les Habsbourg et les Habsbourg-Lorraine est fortement soulignée à travers les portraits.

Malgré la Pragmatique Sanction de 1713 censée garantir l’accès au trône de la fille aînée de Charles VI, l’arrivée au pouvoir de Marie-Thérèse en 1740 est tout de suite remise en cause et marquée par de nombreuses contestations externes comme internes. Les guerres marquent les vingt premières années du règne de Marie-Thérèse, qu’il s’agisse des guerres de Succession d’Autriche ou de la guerre de Sept ans. Même l’allégeance des élites de la Monarchie n’est jamais une chose totalement acquise. Comme le monarque ne peut être présent en personne en tout lieu et en tout temps, il doit être dédoublé par l’image. Au cours du temps, l’image royale se confond avec la figure de l’entité monarchique et étatique. La mise en place de la figure royale permet celle de l’Etat. La formation étatique sous le contrôle de la Monarchie est encore fragile et nécessite un certain nombre de rituels ; la commande et le don de ces portraits royaux apparaît ainsi comme l’un d’entre eux.

Dans le contexte conjoncturel de la situation de Marie-Thérèse ainsi que dans celui plus structurel de la Monarchie des Habsbourg au cours du XVIIIe siècle, l’image de la souveraine

apparaît comme un enjeu de taille pour la souveraine elle-même, comme pour les élites de la Monarchie (nobles de récente ou d’ancienne noblesse, élites urbaines et ecclésiastiques) ainsi que pour les peintres qui permettent la réalisation des portraits. L’élaboration de l’image d’une femme qui est aussi «roi» de Hongrie et de Bohême puis impératrice-veuve offre un riche répertoire d’images qui agit d’autant plus efficacement qu’il s’agit de mettre en place une figure particulièrement forte et reconnaissable du pouvoir central. Tout au long des quarante années de son règne, les portraits de Marie-Thérèse peuvent être considérés comme des marques de ralliement, que cela soit à la Maison d’Autriche et surtout par rapport à la personne de la souveraine, même si les motivations des acteurs qui commandent des portraits royaux sont diverses. Toutefois, les portraits apparaissent dans l’ensemble à la suite d’évènements particuliers et indispensables pour le bon fonctionnement monarchique comme les couronnements et les diètes qui entraînent la visite de Marie-Thérèse dans les différentes capitales de la Monarchie. La construction de l’ensemble étatique nécessite la présence constante de l’image royale, et engage autant la souveraine que ceux qui y exposent son portrait. Les portraits royaux font d’ailleurs l’objet de commandes des deux côtés, de celui de la cour comme de la part des élites.

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L’objectif de notre travail fut de rassembler les portraits de Marie-Thérèse pour les analyser sous l’angle de la production (avec l’analyse des peintres), sous celui de leur localisation (pays, institutions, emplacement particulier au sein d’une pièce), et des occasions de la commande et/ou de l’envoi des portraits. Enfin, les tableaux ont été étudiés sous l’angle de leur contenu iconographique, contenu qui évolue au cours des quarante années du règne et reflètent ainsi les divers enjeux des périodes comme des publics auxquels les tableaux sont destinés.

L’analyse des portraits sous ces différents angles aide à appréhender les rapports de la souveraine avec ses élites, comme des élites entre elles et avec le pouvoir royal habsbourgeois. Il est possible d’en conclure à une interdépendance des acteurs entre eux, que cela passe par le choix d’un réseau de mêmes peintres, ou que cela relève des mêmes occasions de commander et/ou de recevoir des portraits royaux, ainsi que dans les types de portraits diffusés qui sont assez homogènes.

Mots clefs : Monarchie, représentation, genre, reine, échange diplomatique et politique, élites.

Portraits of Maria Theresa: Instrument and object of power and exchanges between the queen Maria Theresa and her political elites

The PhD is about the representation of Maria Theresa, queen of Hungary and Bohemia and archduchess of Austria. It focuses on portraits, using them as the basis for exploring the relationship between the monarch and the elites. To this end, I consider in turn the production, the distribution and the content of the paintings.

How did the portraits of Maria Theresa reinforce the legitimacy of her rule in a situation of crisis? At the same time, how did portraits provide legitimacy for both the position of the elites and their relation to Maria Theresa? These images can be considered as self-projections not only of the queen, but of the various groups that made up her monarchy. The marks and symbols of each province as well as those of the monarchy as a whole are displayed in the portraits.

Royal portraits were commissioned both by Maria Theresa and her court, and by the elites of the monarchy: nobles, ecclesiastical institutions, cities and others. The same painters often worked for both the monarch and the elites, creating similar images and representations of the ruler. The most important occasions for these commissions were visits by Maria Theresa, on the occasion of a coronation, a diet or some other event; the portrait left behind served to

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perpetuate the presence of the monarch. It manifested the bond between the elites and the ruler; this display was in the interests of both sides. The portraits were displayed in the centres of power and representation both of the dynasty (imperial residences) and of the institutions and groups of which the monarchy was composed (aristocratic chateaux, town halls, universities). The act that placed them there were themselves performances of the mutual relation: the gift of a portrait by Maria Theresa was a sign of favour and recognition; when elites themselves ordered a portrait, this was both an act of homage and an assertion of status.

The same types of paintings were ordered by the monarch and by the elites, indicating a consensus about the representation of the royal image. Maria Theresa was queen of Hungary and Bohemia, archduchess of Austria and ruler of many other provinces, each with its own title and symbolism; she was the daughter, wife, widow and mother of emperors. Her person incarnated the unity of all these provinces and the continuity between the house of Habsburg and the new line of Habsburg-Lorraine. Her body, her postures and gestures and her attributes represented in her portraits changed over the course of her reign, reflecting the development of the structure of the monarchy, the role of its ruler, and the strategies of legitimation. New symbols of legitimacy such as pen and paper appeared alongside traditional ones such as crowns and sceptres, or even supplanted them. Established imagery of both male and female Habsburgs was continued, adapted and even reinvented for Maria Theresa; regional traditions of many provinces were incorporated into her images.

Keywords: Monarchy, gender, queen, representation, political and diplomatic exchange, elites.

Die Porträts der Herrscherin Maria Theresia: Instrument und Gegenstand von Macht und Austausch zwischen Maria Theresia und ihren Eliten

Diese Dissertation beschäftigt sich mit der Darstellung der Herrscherin Maria Theresia anhand von 221 Porträts, die zwischen der Geburt der Herrscherin im Jahre 1717 und ihrem Tod im Jahre 1780 angefertigt wurden, die meisten nach dem Regierungsantritt im Jahre 1740. Die Porträts befinden sich in allen ehemaligen Ländern der Monarchie, und zwar in den österreichischen Erbländern, in Ungarn, Böhmen, Italien und in den österreichischen Niederlanden.

Die Porträts erlauben es, die Beziehungen zwischen Maria Theresia und den Eliten der Monarchie (Adlige, Klöster, Städte) zu untersuchen. Sowohl die Produktion als auch die

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Verbreitung und der ikonographische Inhalt werden berücksichtigt. Wie stärkten die Porträts die Position und die Legitimität der Herrscherin Maria Theresia in einer schwierigen Situation? Wie legitimierten sie sowohl die Monarchin als auch die Eliten der Monarchie, die das königliche Porträt auch selbst in Auftrag gaben, in ihrer jeweiligen Stellung?

Die meisten Maler der königlichen Porträts wurden an der Wiener Akademie ausgebildet, deren Direktor der wichtigste Hofmaler Maria Theresias, Martin van Meytens, war. Viele Maler, die für Kopisten gehalten werden können, imitierten die Porträts von Martin van Meytens und seiner Werkstatt. Diese Maler, die meistens unbekannt geblieben sind, vermitteln übrigens ein etwas weiblicheres Bild der Herrscherin. Die Maler, insbesondere die Hof- und Kammermaler, arbeiteten für verschiedene Auftraggeber und fertigten das königliche Porträt sowohl für den Wiener Hof als auch für die Eliten aus den verschiedenen Ländern der Monarchie an.

Die Porträts wurden aus verschiedenen Anlässen und Motiven in Auftrag gegeben. Insbesondere war es üblich, nach einem Besuch der Herrscherin ein Porträt zu empfangen oder zu bestellen. Maria Theresia bereiste ihre Länder und besuchte ihre Eliten häufig im Laufe ihrer Regierung, etwa anlässlich ihrer Krönungen sowie der Abhaltung von Landtagen an verschiedenen Orten der Monarchie (Pressburg, Ofen, Prag). Besuche von Schlössern und Klöstern dienten dazu, ihre Kontakte mit den Prälaten und den Adligen zu vertiefen. Porträts dienten in der Zeit nach einem Besuch nicht nur als Erinnerung an diesen, sondern bekräftigten einerseits die Ehrerbietung und Dankbarkeit der Besitzer gegenüber der Monarchie, andererseits ihren Status in deren politischem und sozialem Gefüge. Ihre Entstehung und Ausstellung konnte daher auch von Rivalitäten innerhalb der Eliten motiviert sein.

Es hat sich gezeigt, dass die Porträts sowohl von Maria Theresia als auch von den Eliten in Auftrag gegeben wurden. Sie wurden in bestimmten Räumen der adligen und kaiserlichen Schlösser ausgestellt: nämlich in Audienzzimmern, die auch Kaiserzimmer oder

Maria-Theresien-Zimmer genannt wurden. Sie waren Repräsentationszeichen für die Herrscherin und zugleich

Repräsentationsmittel für das eigene Prestige der Eliten.

Die Bildtypen waren ähnlich, ob die Porträts von den Eliten oder vom Hof in Auftrag gegeben wurden; sie änderten sich aber im Laufe der Regierung und stellten verschiedene unter den zahlreichen Rollen Maria Theresias in den Vordergrund. Sie trat verschiedentlich als Erzherzogin von Österreich, als König (nicht Königin) von Ungarn und Böhmen, als Tochter, Ehefrau und Mutter von Kaisern des Heiligen Römischen Reiches in Erscheinung. Neben und zugleich mit ihren Rollen als Herrscherin konnte Maria Theresia auch als Frau, Mutter und Witwe gezeigt werden. Die Krone und die Kaiserwürde des Heiligen Römischen Reiches Deutscher

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Nation, die Maria Theresia als Frau nicht tragen durfte, spielten immer noch eine wichtige Rolle, insbesondere in der Darstellung von Maria Theresia und ihrer Familie. Komplementäre Porträts von Maria Theresia und ihrem Ehemann, Kaiser Franz I., respektive später ihrem Sohn, Kaiser Joseph II., dienten dazu, die Kontinuität zwischen den Habsburgern und den Habsburg-Lothringern zu betonen.

Nach dem Aussterben der männlichen Linie der Habsburger im Jahre 1740 war es wichtig für Maria Theresia, ihre zahlreichen Kinder durch Porträts darzustellen. Neben Kronen und Zeptern werden nach und nach neue Legitimations- und Herrschaftssymbole in den Bildern dargestellt. Dokumente, Papiere, Bücher spiegeln am Ende des Lebens der Herrscherin neue Herrschaftswerte wider. Als Zeitgenossin der Aufklärung wird die Darstellung Maria Theresias von diesen neuen Symbolen geprägt.

Stichworte: Monarchie, Repräsentation, Königin, Eliten, diplomatisches und politisches

Geschenk.

IHMC ; Institut d’histoire moderne et contemporaine, 17 rue de la Sorbonne, 75 231 Paris, Cedex 05.

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Table des matières

INTRODUCTION ... 21

Présentation du sujet et état des recherches ... 21

Pouvoir et représentation : Représentation et image du pouvoir ... 22

Les deux corps du roi et le portrait royal ... 24

Le portrait de Marie-Thérèse : un corps de femme et un titre de roi ... 27

Contexte du règne de Marie-Thérèse et structure de la Monarchie ... 30

Historiographie et explication du problème historique autour de la Monarchie ... 33

Etudes sur la représentation des Habsbourg et des Habsbourg-Lorraine ... 41

Problématique, objectifs, méthodologie ... 46

Description de la démarche ... 49

Déroulement de la recherche : Périodes étudiées et délimitation géographique ... 52

Délimitation des portraits étudiés ... 54

Déroulement de l’enquête ... 57

Informations sur les sources écrites : dispersion géographique et nature de ces sources ... 58

Plan de la thèse ... 61

PREMIERE PARTIE ... 63

LES PEINTRES ET L’ANALYSE DE LA PRODUCTION DES PORTRAITS DE MARIE-THÉRÈSE : LES AGENTS DE LA FORMATION DE L’IMAGE ROYALE ... 63

Chapitre I. Le portrait princier : un art officiel au service du prince, de plus en plus institutionnalisé ... 73

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Etre peintre de cour à l’époque moderne et tout particulièrement à Vienne au XVIIIe siècle :

Le statut du peintre à l’époque moderne : Hofkünstler et Kammermaler ... 73

Les académies et le portrait princier ... 80

L’Académie de Vienne : lieu de formation des portraitistes de Marie-Thérèse ... 84

Les académies dans les provinces de la Monarchie ... 86

L’atelier de Martin van Meytens : un travail d’équipe pour l’élaboration des portraits de Marie-Thérèse ... 90

Chapitre II. Les peintres au service de Marie-Therese : une image viennoise réalisée par de multiples peintres ... 99

Marie-Thérèse et ses peintres ... 99

Martin van Meytens, un peintre entre cour et Académie: le peintre de la souveraine et des grands de la Monarchie ... 100

Les voyages des peintres de cour en cour pour le compte des grands de l’époque ... 112

De nombreux peintres de cour autour de Marie-Thérèse ... 115

Les portraitistes contemporains et successeurs de Martin van Meytens : une démultiplication du portrait de Marie-Thérèse ... 119

Exemple de copie de Martin van Meytens à Klagenfurt ... 124

Un exemple de copiste, Josef Kremer : portrait de Marie-Thérèse pour l’abbaye de Melk .. 127

Une nouvelle génération de peintres à la fin du règne, une nouvelle formation académique et conception du pouvoir : entre académie viennoise et expérience romaine ... 134

Chapitre III. Des peintres régionaux au service des autres ordres et états de la Monarchie .... 149

Des peintures de la jeune Marie-Thérèse réalisées par des peintres issus des diverses contrées de la Monarchie ... 150

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Daniel Schmidelli, un peintre formé à l’Académie de Vienne: le peintre de la noblesse et de

l’élite presbourgeoise et hongroise ... 152

D’autres peintres pour les abbayes de la Monarchie : l’exemple du Schmidt de Krems et son atelier ainsi que d’unez famille de peintres, Franz Anton et Franz Karl Palko ... 160

Les peintres des provinces très éloignées de Vienne : le cas particulier des Pays-Bas autrichiens et de leurs cités ... 166

Conclusion de la Première Partie ... 179

SECONDE PARTIE. LE PORTRAIT : RÉVÉLATEUR DES CONTACTS ENTRE LES PRINCIPAUX INTERLOCUTEURS POLITIQUES ET SOCIAUX DE LA MONARCHIE ... 186

Introduction de la Seconde Partie ... 187

Chapitre IV. Une Monarchie polycentrique. La carte des soutiens de la Monarchie ou la répartition des différents pouvoirs ? ... 203

Les points stratégiques du pouvoir ; la croissante pénétration et maîtrise de l’espace par l’Etat monarchique ... 203

La répartition des portraits par pays ... 206

Pays héréditaires autrichiens : soixante-quatre portraits du corpus ... 209

Royaume de Bohême : trente-trois portraits du corpus ... 213

Réseaux des états et principautés issus du Saint Empire ... 221

Le royaume de Hongrie, une région privilégiée par Marie-Thérèse : quatre-vingt-quatorze portraits ... 229

La Hongrie royale : une présence dominante des portraits dans l’ancienne Hongrie royale, également nommée Haute-Hongrie, soixante portraits du corpus sur les quatre-vingt-quatorze en Hongrie ... 231

La Hongrie royale, une région entre proximité et distance par rapport à Vienne ... 243

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Les possessions italiennes : cinq portraits du corpus ... 249

Milan et la Lombardie : une province directement dépendante de Vienne ... 251

La répartition des portraits par institutions ; les états et ordres de la Monarchie, les anciens et nouveaux représentans du pouvoir royal comme des pouvoirs locaux ... 252

Les espaces religieux, d’anciens soutiens de la Maison d’Autriche et des points stratégiques pour les Habsbourg ... 253

Les villes en position intermédiaire par rapport au pouvoir nobiliaire et au pouvoir royal .. 255

Des portraits dans les universités et les institutions scientifiques au service de l’Etat... 258

Universités hongroises ... 261

Autres universités de la Monarchie ... 262

Les Académies : nouvelles structures étatiques sous contrôle royal ... 264

Des portraits dans des pays extérieurs à la Monarchie ... 266

Conclusion du Chapitre IV ... 268

Chapitre V. Les processus de commandes de portraits royaux : les mécanismes de distribution : des initiatives de la cour et des élites avec des stratégies de représentation interdépendantes . 271 Les modes de diffusion des tableaux relèvent de différents types de transactions ... 273

La présentation du mécanisme du don : les portraits font partie de cadeaux parmi d’autres cadeaux ... 275

Fonction de substitution traditionnelle ... 278

Les commandes de la cour suivies de dons ... 280

La liste des cadeaux qui ont été « défendus » entre 1743 et 1763 sur l’ordre de la chambre des comptes est la suivante. Circuit administratif des portraits ... 284

Entre acte de générosité et acte de pouvoir, une générosité en forme de pouvoir : être généreux pour gouverner et régner ... 293

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Substituer la présence royale à la suite d’une visite impériale : Dons et/ ou commandes de

portraits royaux après une visite impériale ... 296

Les couvents autrichiens et tchèques, de riches interlocuteurs politiques pour la Monarchie ; des espaces privilégiés par les nombreuses visites de la souveraine au cours des quarante années de règne ... 297

Visite de Marie-Thérèse à l’abbaye de Saint-Florian suivie de la commande du portrait de Marie-Thérèse par l’abbaye ... 300

Visites de Marie-Thérèse en Hongrie comme en Bohême et Moravie ... 312

Les élites commandent et/ou reçoivent des portraits pour commémorer la présence impériale ... 316

A Vienne et dans les villes autour, dans le centre de l’Empire ... 321

Commandes des villes hongroises, villes libres et royales hongroises ... 324

Commandes des villes issues des Pays-Bas autrichiens ... 326

Comandes des villes de Prague et d’Olomouc ... 333

Commande des villes de Bolzano et de Gorizia ... 335

Les états commandent eux aussi des portraits ... 339

Les commandes de la part des universités et des académies ... 342

Un exemple intéressant et périphérique : l’université de Fribourg en Brisgau commande elle-même le portrait royal ... 342

Conclusion du chapitre V ... 344

Chapitre VI. Conserver le corps royal ou la création d’un lien d’interdépendance : entre banalisation et sacralisation du portrait royal, les espaces de conservation des portraits de Marie-Thérèse ... 347

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Lieux de représentation habsbourgeois : des pièces en l’honneur de l’empereur puis de

Marie-Thérèse ... 351

L’espace d’apparition du portrait de Marie-Thérèse ... 356

Les résidences impériales, les lieux par excellence d’exposition des portraits de la famille de Marie-Thérèse : représenter le noyau familial dans certaines salles des palais impériaux... 359

Le portrait, un document de mémoire et une stratégie d’autoreprésentation, une forme de memoria parmi d’autres ... 366

Les collections des fidèles et des agents de Marie-Thérèse : un besoin de mémoire ; représenter Marie-Thérèse et la famille impériale dans les collections nobiliaires, des nobles parmi les nobles ... 367

De grandes collections nobiliaires de la Monarchie au XVIIIesiècle ... 372

Les archives personnelles des grandes familles et leurs collections : des aristocrates issus des provinces de la Monarchie et présents à Vienne ... 374

Exemples de grandes collections dans les demeures des nobles hongrois, en particulier chez les Esterházy ... 375

La collection du baron de Bruckenthal, caractéristique de l’époque des Lumières ... 381

Conclusion du Chapitre VI ... 382

Conclusion de la Seconde Partie ... 383

TROISIÈME PARTIE ... 390

LES FIGURES DE LA SOUVERAINE OU L’IMAGE EN FORMATION DE L’ETAT : UN CONSENSUS SUR LES REPRESENTATIONS DISTRIBUEES ... 391

Introduction de la Troisième Partie... 392

Chapitre VII. Le portrait, un outil de pouvoir et de légitimation : l’écriture d’un discours collectif à partir d’éléments iconographiques communs ... 404

Quelques clefs pour étudier les portraits comme outils de légitimation. Le portrait royal : un art au service du souverain et un genre très théorisé ... 404

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Des portraits grands et majestueux ou d’autres portraits plus simples et intimes : Des portraits en pied, à genou ou de moitié, des portraits majestueux à côté de petits portraits 413

Les portraits, des objets « artisanaux » avec une dimension très technique ... 413

Des portraits codifiés ... 416

Valeur et visée de la gestuelle et du regard dans les portraits de Marie-Thérèse ... 417

Chapitre VIII Les portraits ou les reflets des principaux enjeux du règne ... 449

Des modèles de portraits sont repris par les artistes à diverses périodes du règne et sont adaptés à des publics précis : un corps politique relativement stable et permanent s’esquisse ainsi à travers l’image royale. ... 449

Les portraits et les phases de la légitimation; les portraits et les pays de la Monarchie ... 457

L’image d’une archiduchesse: une image adaptée à une époque et à un public ... 457

Représentation en roi de Hongrie: une image répandue ... 465

Roi, rex foemina, et non reine de Hongrie ... 467

La représentation de Marie-Thérèse entre imitation des traditions des pays héréditaires et tradition habsbourgeoise ... 470

La sainte couronne de Hongrie « fait » le roi : la couronne comme incarnation du royaume de Hongrie ... 473

Les portraits de Marie-Thérèse ou la visualisation du rapport entre le royaume de Hongrie et la Monarchie : un portrait exemplaire présent partout ... 476

L’Autriche et la Bohême, deux entités étroitement et plus anciennement associées ... 511

Le bonnet archiducal ... 521

L’habit pour remplacer la couronne dans certaines régions ... 527

Des images partagées par toutes les élites de la Monarchie ... 530

Tradition du motif de la représentation impériale chez les Habsbourg ; la transmission impériale pour les Habsbourg ... 532

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De la représentation du Saint-Empire à la représentation de la Sainte Famille des Habsbourg-Lorraine : Marie-Thérèse à côté de son époux puis de son fils ... 535 Représentation de Marie-Thérèse : un corps naturel de femme et un corps politique de souverain ... 540 Les insignes impériaux familiaux présents dans les portraits ... 552 Un type de portrait commun à la Monarchie : le portrait à côté des couronnes, de la couronne de Hongrie et/ou de la couronne impériale familiale ... 556 Conclusion du chapitre VIII ... 559 Chapitre IX La figure de la mère à la tête de la Maison et la représentation d’une famille impériale comme éléments de légitimation ; une femme, mère et guerrière ... 564

Un corps politique relativement stable et permanent enrichi par un corps de femme ... 564 La famille : un argument politique de choix pour une monarchie en crise ... 571 Le règne d’une nouvelle dynastie sur l’Europe : faire accepter l’union entre les Habsbourg et les Lorraine ... 579 Les années 1750 ou la décennie des grands portraits de famille ... 580 Cas particulier de la souveraine et de ses fils après la mort de François-Etienne en 1765.... 585 Une représentation comparable à celle d’autres portraits de famille des membres de la noblesse et des autres souverains de l’époque ... 587 Une souveraine mère mais aussi guerrière... 595 Une reine guerrière pour une commande flamande : lien entre la commande et le type iconographique ... 595 Chapitre X L’image d’une veuve : accomplissement et succès d’une entreprise de légitimation effectuée tout au long du règne. L’image de veuve comme renfort au corps politique ... 602

Une souveraine légitimée qui devient elle-même une instance de légitimation ... 602 Une souveraine veuve dans la lignée des veuves Habsbourg ... 611

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19

La représentation des ordres : des insignes hérités aux insignes fondés ... 615

La Sternkreuzorden : l’ordre de la Croix Etoilée ; une représentation féminine traditionnelle Habsbourg ... 618

Les fondations d’ordres et de chapitres religieux : un exemple courant pour les dames nobles du XVIIIe siècle ... 619

Les ordres de distinction civils et militaires : l’ordre de Marie-Thérèse et l’ordre de Saint Etienne : de nouveaux ordres de mérite ... 620

Le veuvage, l’image de la veuve et de la reine réformatrice : une nouvelle pose et de nouveaux insignes pour une nouvelle légitimité ... 628

Une représentation au service du bien public ... 635

Conclusion du Chapitre X et de la Troisième Partie ... 640

CONCLUSIONS ... 647

SOURCES CONSULTÉES ... 661

Sources primaires ... 661

Sources imprimées ... 662

BIBLIOGRAPHIE ... 664

Littérature consacrée à l’image en histoire et au portrait, en particulier au portrait princier et politique ... 664

Catalogues d’exposition ... 680

Les Habsbourg: leur politique de représentation durant l’époque moderne et leur histoire, leur politique, en particulier durant l’époque moderne et au XVIIIe siècle ... 686

Un aperçu des portraits et de la représentation Habsbourg ... 686

Concernant les insignes, les titres et les armes des Habsbourg ... 697

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21

INTRODUCTION

Présentation du sujet et état des recherches

Une gravure diffusée dans les années 1740 représente le maréchal Khevenhüller brandissant devant ses troupes le portrait de Marie-Thérèse ainsi qu’une de ses lettres pour les exhorter à ne pas abandonner le combat. Cette gravure est réalisée en 1742 à Amsterdam en pleine guerre de Succession d’Autriche. Au moment où le prince de Bavière occupe la Haute-Autriche, incarner la présence royale de Marie-Thérèse par l’intermédiaire de son portrait prend une signification symbolique et stratégique particulière. Cette anecdote souligne que le portrait de Marie-Thérèse est également mis en scène par des puissances étrangères ; ces dernières lui attribuent de fait une certaine valeur1.

Dans les sociétés de l’époque moderne, la représentation politique occupe un rôle considérable. L’analyse du rapport étroit entre la représentation visuelle incarnée par exemple par le portrait et la nature représentative du pouvoir du souverain, permet de s’interroger sur la traduction de ce problème dans le cas particulier et complexe, complexe parce que Marie-Thérèse est une femme, de la monarchie habsbourgeoise au milieu du XVIIIe siècle.

Considérant l’importance de la représentation et tout particulièrement du portrait, genre en vogue au XVIIIe siècle, pour l’affirmation du pouvoir royal, il n’est pas étonnant que les

portraits de Marie-Thérèse aient été très nombreux, quelle que soit la période de ses quarante années de règne ; nous en avons recensé deux cent vingt et un.

1

Warnke Martin „����������� ���nographie“ in Andreas Beyer (Dir������� ����������� ���� ������� ���� �������� ��������������������������������������������������������������������������������������������������������� ������� ���� ����������������������� ���� ���������������� �������� ���� ����� ������ ��������� ������ ������������ ��������������������������������������������������������������������������������������������������������� ��������������������������������������������������������������������������������������������������������������� ��������������������������������������������������������������������������������������������������������� ����������������

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22

Pouvoir et représentation : Représentation et image du pouvoir

Le terme de représentation est au cœur de la plupart des réflexions politiques. Dès le début du XIVe siècle, le terme prend une signification juridique précise2. Il s’agit en effet de

légitimer la souveraineté temporelle et spirituelle des princes laïcs et ecclésiastiques. La fonction première attribuée à la représentation est celle de substitution symbolique. Cet aspect est en effet indispensable car le souverain ne peut être présent en tout lieu ni en toutes circonstances. Parler de substitution, c’est aussi évoquer la représentation au sens de « parler pour », « au nom de ». Le prince parle ainsi au nom de ses états et/ou pour ses états qui se réunissent en diètes et sont composés des principaux ordres du temps (les nobles, les élites urbaines et ecclésiastiques).

Une étude sur les portraits d’un souverain amène donc à une analyse de la nature et de l’essence même du et/ou des pouvoir(s), qui s’articulent autour du phénomène de la représentation, et trouvent dans le portrait royal un moyen d’expression particulièrement adéquat. Acte politique décisif et constitutif de la Monarchie, la représentation peut apparaître comme une mise en scène en même temps qu’une célébration de la souveraineté. Cet acte confère une autorité à l’individu qui est censé incarner ce régime, en l’occurrence le chef d’Etat ; les arguments qui constituent cette légitimité sont ainsi renouvelés et réaffirmés. En posant la question du pouvoir comme objet mais aussi comme sujet et acteur à part entière de la représentation, on peut se demander quel pouvoir est propre aux portraits de Marie-Thérèse et surtout de quel pouvoir il peut être question dans le cas de la Monarchie des Habsbourg-Lorraine, dans la situation, et à l’époque de Marie-Thérèse.

Louis Marin montre comment le pouvoir agit au sein de la représentation et inversement comment la représentation génère du pouvoir. Le portrait du roi engendre le pouvoir du monarque en le représentant3. La représentation intervient généralement dans le cadre de l’espace

façonné et delimite par le pouvoir, à travers l’élaboration d’images dont les portraits royaux sont partie intégrante. Le mot représentation désigne l’acte qui permet de donner à voir une absence. Le synonyme en est alors symbolisation. Le terme renvoie également à l’action qui permet de

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3

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23

donner à voir une présence, en la montrant et en l’exhibant. La définition donnée par Louis Marin à ce propos résume bien ce double sens de substitution et de légitimation : « La

représentation en général a un double pouvoir : celui de rendre à nouveau et imaginairement présent, voire vivant, l’absent et le mort, et celui de constituer son propre sujet légitime et autorisé en exhibant qualifications, justifications et titres du vivant de l’être »4. La représentation est l’action permettant de rendre sensible et préhensible quelque chose ou quelqu’un au moyen d’une figure ou d’un signe5. Ce concept est

lié à la notion de présence symbolique. En tant que représentations visuelles du pouvoir, les tableaux nous informent sur la façon dont la Monarchie des Habsbourg-Lorraine, et tout particulièrement Marie-Thérèse, entendent se définir et rester présents en ce milieu du XVIIIe

siècle. Le terme ne se réfère ainsi pas seulement aux portraits visuels ; il fait également référence à l’image du monarque telle qu’elle est reçue, façonnée et interprétée dans l’imaginaire collectif ou dans les représentations que les contemporains s’en font6.

Marie-Thérèse doit être légitimée en différents lieux, auprès de divers acteurs et de soutiens décisifs pour la Monarchie au cours des quarante années de son règne. À travers le portrait royal, la reine et sa dynastie sont visualisées et représentées, leur pouvoir et la nature de leur pouvoir visualisés. La conception, la diffusion ainsi que la contemplation des portraits et de leurs multiples contenus participent à la mise en place d’un véritable mode de gouvernement.

Horst Bredekamp pose la question suivante : « Pourquoi Thomas Hobbes ne peut-il penser l’État

sans en créer une image », dans l’analyse qu’il fait du frontispice ornant le principal ouvrage de

Thomas Hobbes7. Selon lui, l’image qui illustre le Léviathan est un élément décisif et essentiel du

discours politique du philosophe anglais. Elle résume toute la problématique qui est propre à l’image, à son usage et à son rôle dans le domaine politique8.

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Sur l’œuvre de Louis Marin�������������������������������������������������������������������������������������

5

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6

�������� ��������� Marianne au combat, L’imagerie et la symbolique républicaines de 1789 à 1890�� �������� ���������������������������������������: l’imagerie et la symbolique républicaines de 1880 à 1914����������

�������������������������������������������������: l’imagerie et la symbolique républicaines de 1914 à nos �������������������������������������������������������������������������������������������������������������������

�������������

���������� ������������������ ���������� ��� ������� ������. Le Léviathan, archétype de l’Etat moderne.

Illustration des œuvres et ��������������������������������������������sciences de l’Homme, 2003, p. 9�������������

aussi le résumé de l’ouvrage de Bredekamp.�

Parmi les travaux consacrés à l’iconographie politiq��������������������������������������������������������

de l’histoire culturelle. Maurice Agulhon s’est tout particulièrement penché sur l’imagerie de la symbolique républicaine tout au long d’une trilogie sur la�������������������� �����������������������

����� ������ ���� ��������� ��� ������� ��������� ����������� ��� ����� ������ ��� ��������������� ��� ���������� ��� l’Etat, �������������������Reppresentare il Principe, Figurer l’Etat. Les programmes iconographiques d’Etat en France �����������������������������������������L’Etat moderne�������������������������������������������������������

(25)

24

Si pour être appréhendé, l’État doit être personnifié, pour être aimé et servi, il doit être représenté9. Précisément au cours de l’époque moderne, l’État devient l’institution dont le

monarque est le représentant si ce n’est l’incarnation. L’État naissant, entre le XIIIe et le XVIIIe

siècle, renforce et réitère les arguments principaux de sa légitimité, en englobant justement les structures politiques déjà existantes10.

La figure monarchique repose sur différents principes, souvent composites, et sur des héritages variés. En Autriche, il s’agit des traditions des duchés d’Autriche mais aussi des royaumes de Hongrie et de Bohême ainsi que du Saint Empire ; l’héritage espagnol demeure aussi incontournable. Le portrait condense la représentation du corps naturel du monarque mais aussi de son corps symbolique et politique (à travers notamment les regalia comme les couronnes). C’est là toute l’ambiguïté de la représentation, qui devient un enjeu politique, diplomatique et social d’importance faisant intervenir plusieurs acteurs. En participant de leur côté à l’élaboration de la représentation de Marie-Thérèse qu’ils modulent selon leurs attentes, les royaumes et leurs élites11 incarnent et représentent les intérêts divers des états et des ordres ; ils en finissent même

par incarner l’État au sens moderne du terme.

Les deux corps du roi et le portrait royal

Si le portrait royal expose, à sa manière, différents discours, il exerce en lui-même une certaine forme de domination, liée à sa nature même. Comme l’évoque Horst Bredekamp12,

Erwin Panofsky mettait déjà l’accent sur les deux pôles du transi (la représentation réaliste d’un défunt) ainsi que sur la représentation au vif, dans les conférences qu’il tint en 1956 au sujet de la sculpture funéraire13. Ces thématiques sont également fondamentales dans l’œuvre d’Ernst

9

�������������������������������������� L’image du roi de François I��������������������������������������

�����������������������l’Homme, 2006, introduction, p. 1. �������������������������������������������������� Kurt Johannesson, „Le portrait du prince comme genre rhétorique“ in Allan Ellenius (�������������������� ����������� ��� ������������, Traduit de l’anglais par Laurent Bury, ������ ��������� ����������� ������� ����������

��������������������������������������������������������������������������������������������������������������� ���������������������������������������������������������������������������

����������� ������� ����������tion de l’État moderne et formes culturelles��� ������������ ��� ���������� ����� ���

Genèse de l’État moderne, �����: Collection de l’École Française de Rome, 1985, pp. 491/503.�

��������������������������������������������������������������������������������������������������� 12

Voir la préface d’Horst Bredekamp à�l’ouvrage de Naïma Ghermani, ����������������������������������������

pouvoir dans l’Allemagne du XVI��������������������������������������������������������������������

(26)

25

Kantorowicz, The Kings Two Bodies, qui traite de la liturgie des deux corps du roi14. Puis, dans les années 1960, les historiens et cérémonialistes américains, comme Ralph Giesey, abordent les cérémonies funéraires de la Renaissance française comme de hauts moments de la représentation royale15. Ernst Kantorowicz étudie la dynastie des Tudor comme la Monarchie française en s’appuyant notamment sur les effigies de cire des rois. A travers cette analyse de la personne et de la fonction royales, il apparaît que le roi possède un corps terrestre, humain et mortel, ainsi qu’un corps politique et immortel, représentant sa fonction et incarnant l’idée d’Etat16.

Le portrait de Louis XIV réalisé par Rigaud en 1701 est souvent et volontiers considéré comme le prototype du portrait d’État17. Le roi soleil fait partie des souverains qui restent des

figures importantes de la littérature et de la recherche, à côté de Charles Quint, d’Elisabeth d’Angleterre18 ou encore de Christine de Suède19, et encore plus récemment la famille des

Aragon20. Le portrait de Louis XIV à Versailles constitue le modèle principal de représentation pour les souverains de l’époque moderne. Gérard Sabatier21, Jean-Marie Apostolidès22, Louis

Marin23, Peter Burke24, Hendrik Ziegler25 et Stefan Germer26 ont tous abordé un aspect de cette

�������������� ������� The King’s two Bodies. �� ������ ��� ��������� ���������� ���������� ����������� ����� ��� ���

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���������� ������ la préface de Bredekamp à l’ouvrage de Ghermani, p. 1 et� ���������� �������� �������� �������� �������������� ���� ����������� �������� ��� ���� �������� ���� ������������� ����������������������������������������

������ ���� ��������� ���������� ���� ��� �������� ���� ����� ��rps du roi élaborée par Kantorowicz s’applique à l’époque médiévale. Toutefois, nous pensons que ce modèle de réflexion peut également être utilisé pour l’époque moderne même s’il faut l’appliquer avec prudence.� ��� ������ ������ ���� ������ ������ ��� ����� ��� ������ �������������������������������������������������������������� ���������������������������������������������������������������������������������������������������������� ������������������������������������������������������������������������������������������ 16 ��������������������������������� 17 ��������������������������������������������������������������������������������������������������������� ����������������������������������������������������������������������������������������������� ��������������������������������������������������������������������������������������������������������������� ������������������������������������������������������������������������������������������������������������� ����������������������������������������������������������������������������������������������������������� �����������������������������������������, Madrid, El Viso, 1999 ou encore l’�����������������������������

��������Pouvoirs du portrait sous les Habsbourg d’Espagne, cths, INHA, L’art et l’essai, 2011��

19

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������������������Du Portrait du roi à l’image de l’Etat������������������������dans l’Italie de la Renaissance��

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(27)

26

représentation du Roi Soleil. Ces auteurs envisagent le portrait royal comme un élément essentiel dans l’élaboration de la gloire royale comme de la mystique monarchique. Mentionnons ainsi les nombreuses contributions de Gérard Sabatier dans le domaine du politique et des représentations27. Même si les portraits de Marie-Thérèse ne peuvent pas être véritablement comparés à ceux d’Elisabeth d’Angleterre ni même à ceux de Louis XIV, et justement pour cette raison même, une étude approfondie de ces portraits est indispensable.

Bien que le portrait du Roi Soleil exécuté par Rigaud passe souvent pour le portrait royal type de l’époque moderne, il existe beaucoup d’autres portraits, antérieurs au XVIIIe siècle et qui

ne se limitent nullement à la France, où le souverain est peint à côté des couronnes de manière altière et majestueuse. Le genre du portrait royal ne peut donc être réduit ni à Rigaud ni à son modèle, Louis XIV, même si ce peintre et son souverain ont porté à leur paroxysme certaines tendances picturales, qui sont alors apparues comme la meilleure mise en scène de ce qui est couramment désigné comme l’absolutisme royal. Le XVIIIe siècle est très souvent considéré

comme le siècle d’or du portrait d’apparat, dit aussi portrait royal ou encore portrait d’Etat. C’est alors que l’État, sous sa forme administrative moderne, prend forme. En contemplant le portrait du souverain, on observe alors plus que jamais le portrait de cette entité politique en train de se consolider derrière et grâce à la figure royale. Cette entité qui acquiert les caractéristiques d’un Etat se met en place progressivement, avec l’aide d’un certain nombre d’agents, individuels ou collectifs. Les familles régnantes de l’époque à l’instar des Habsbourg, et en particulier les souverains respectifs, encadrent et stimulent ce processus. L’Etat perdure au-delà de la disparition du corps naturel du souverain. Ce corps, incarné à travers le portrait, n’est pas seulement un corps naturel, mortel, en l’occurrence un corps de femme pour Marie-Thérèse, c’est aussi un corps politique, ou plutôt l’association des deux. L’originalité de Marie-Thérèse tient au fait que son statut de femme, de veuve en particulier durant les quinze dernières années du règne, renforce sa position politique. La situation de Marie-Thérèse est particulièrement complexe dans la mesure où son corps de femme se distingue de sa fonction de souverain. Tout au long de son

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���������������������Reppresentare il Principe, Figurer l’Etat������������������������phiques d’Etat en France

��� ��� ������� ��������������������������� ��� ������ ��������������� L’Etat moderne���������������������������������� ������������������� ������������������������������������������������������������������������������������������������������������������ ������������� �������������������������������������������������������������������� ���������������������������������������������� ������������� ������������������������������������������������������

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