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GA14Y020 Mobilités, migrations

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GA14Y020 Mobilités, migrations

TD 7. Roissy dans les mobilités quotidiennes.

Doc. 1 : La mesure des mobilités quotidiennes : les navettes domicile-travail. Source : Commenges H. et Fen-Chong, J., « Navettes domicile travail : naissance et développement d’un objet statistique structurant », Annales de géographie, n°715, pp. 333-335.

Le nouveau zonage en aires urbaines de l’INSEE, établi à l’aide des navettes domicile-travail, dessine une image de la structuration du territoire français par des pôles urbains, et permet d’apprécier « l’influence des villes au-delà de leurs limites physiques définie par la continuité du bâti » (Brutel, 2011). Les navettes « esquissent des espaces de vie et permettent d’observer des relations privilégiées entre des lieux » (Gilli, 2002 : 290). Les navettes permettent d’appréhender « le rôle de la mobilité sur la transformation des espaces du quotidien » (Massot, 1998 : 155) et de dresser la carte des territoires vécus (INSEE et al. 2002). Pour qui ignore ce qu’est une navette, il peut paraître surprenant qu’un même objet statistique permette d’appréhender la structuration des espaces, serve de critère de rattachement à l’espace urbain, soit le marqueur de territoires vécus et le reflet principal des pratiques de mobilité quotidienne. Ce que l’on désigne sous le nom de « navettes », de « migrations alternantes » ou de « migrations pendulaires » est le lien réalisé entre deux informations renseignées au niveau individuel par le recensement de la population : le lieu de résidence et le lieu de travail. Cette première définition appelle deux précisions importantes.

D’une part, les navettes ne concernent qu’une fraction de la population, la population active occupée dont la commune de travail est différente de la commune de résidence, qui représente en 2008 environ le quart de la population française. D’autre part, il faut un certain type de construction empirique et/ou théorique pour produire un discours technique ou scientifique sur la mobilité quotidienne et sur la structuration spatiale à partir des navettes. En effet, en termes de mobilité, l’objet navette ne dit rien sur l’existence, sur la fréquence et sur l’itinéraire du potentiel déplacement entre le domicile et le travail. En termes de structuration spatiale, cet objet ne dit rien sur la morphologie urbaine, sur la structure des réseaux ni sur les pratiques spatiales. Malgré cette apparente limitation, les navettes sont depuis les années 1960 l’objet d’un nombre croissant de travaux, dans les champs de la géographie, de la démographie et de la socioéconomie des transports.

Nous partons du constat que l’objet navette, depuis sa naissance dans les années 1930, a pris une importance grandissante dans les études de géographie urbaine et de mobilité quotidienne. Alors que cet objet a très peu évolué dans son mode de production, son domaine de validité s’est considérablement étendu. Sur la base de ce constat, bien documenté dans ce travail, nous chercherons d’abord à comprendre les raisons de la montée en importance de l’objet navette, puis nous préciserons les constructions empiriques et théoriques sur lesquelles s’appuie l’extension de son domaine de validité. Nous faisons l’hypothèse que ces constructions ont façonné une certaine vision du territoire et de mobilité que nous qualifierons de « salariale », en écho aux travaux d’Antoine Haumont (2000). La notion de « salariat » est reste assez peu utilisée dans les sciences humaines et sociales, qui mobilisent plutôt la catégorie englobante de « travail » (Vatin et Bernard, 2007). Pourtant le développement du salariat est étroitement lié à la structuration des espaces urbains par des flux massifs et hiérarchisés reliant des lieux de résidence et des lieux d’emploi. Qui plus est, la naissance de l’objet statistique navette est issue de l’émergence d’une société majoritairement salariale. Notre article prétend réhabiliter cette notion de salariat, que seul Antoine Haumont a réellement utilisé pour appréhender les mobilités quotidiennes, en tous cas dans le cas français.

Cette analyse concerne la littérature scientifique et technique française, cependant un certain nombre d’assertions seraient aisément transposables à d’autres pays, en particulier du fait de la circulation des savoirs techniques après la Seconde Guerre Mondiale (Gardon et al., 2009). La navette est devenue au cours du XXe siècle l’objet qui traduit la structuration de l’espace, qui participe à la définition de son urbanité, qui résume les pratiques de mobilité quotidienne et dessine les espaces de vie. A sa création, elle n’était pourtant destinée à aucune de ces tâches.

Comment l’objet navette, dont le pouvoir descriptif et explicatif de la structuration de l’espace et de la mobilité quotidienne est apparemment limité, en est arrivé à occuper une situation de quasi-monopole en cette matière ?

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Doc. 2 : Le projet du grand paris-express

Doc 2.A: La nouvelle feuille de route du Grand Paris Express. Source : Société du Grand Paris, 2018.

https://www.societedugrandparis.fr/gpe/actualite/la-nouvelle-feuille-de-route-du-grand-paris-express-1683

Doc. 2.B Les écueils du Grand Paris Express. Source: Jacqueline Lorthiois & Harm Smit, « Les écueils du Grand Paris Express », Métropolitiques, 27 juin 2019. URL : https://metropolitiques.eu/Les-ecueils-du-Grand-Paris-Express.html Un raisonnement erroné consiste à penser l’adéquation offre/demande à l’échelle de l’ensemble de la région francilienne, comme si tout lieu de domicile pouvait s’associer à n’importe quel lieu d’emploi. Or, compte tenu de l’ampleur des temps et des coûts de transports, l’Île-de-France est beaucoup trop vaste pour pouvoir fonctionner comme un bassin d’emploi unique qu’il s’agirait de traverser de part en part. En conséquence, la priorité à la mobilité physique (pouvoir se déplacer) s’efface, au bénéfice de la mobilité résidentielle (pouvoir déménager pour moins se déplacer). Il faudrait donc se départir de l’idée simpliste que les axes de déplacement forment le squelette de l’organisation urbaine de demain et qu’il suffit d’une injonction auprès des collectivités locales pour favoriser l’urbanisation autour des gares. La population ne s’agglutine pas spontanément autour de celles-ci, qui restent des lieux de dispersion bien plus que de concentration. Ainsi, on peut s’interroger sur la pertinence de concentrer les réseaux sur le pôle de La Défense, alors que ce site dispose de dix-huit fois plus d’emplois que d’actifs résidants.

Les déplacements domicile-travail – compris au sens large – ne concernent pas tous les […] déplacements (40 % des flux), mais ce sont de loin les plus longs (61 % des distances), les plus chronophages (51 % des temps), les plus coûteux et inconfortables. Concentrés aux heures de pointe, ils conditionnent le dimensionnement des réseaux et fractionnent l’espace. Deux cartes complémentaires (en rouge, les concentrations d’emplois ; en bleu, celles de la main-d’œuvre) montrent les défis posés aux aménageurs d’Île-de-France : jamais les inégalités territoriales n’ont été aussi élevées et elles sont encore aggravées par la nouvelle organisation métropolitaine.

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3 Sur la première carte, nous constatons une énorme concentration de l’emploi : 19 communes – sur 1 274, soit 1,5 % – forment une tache rouge centrale qui cumule la moitié de l’emploi régional, dans un vaste océan « gris » qui couvre les 1 255 municipalités restantes.

Sur la seconde carte, on observe une dispersion trois fois plus élevée de la main-d’œuvre, qui reflète bien la localisation géographique de la population francilienne et l’histoire de l’urbanisation : 61 communes sur 1 274 – soit 4,7 % – regroupent la moitié des actifs franciliens ayant un emploi. Sans surprise, les deux cartes traduisent la dissociation domicile/travail qui caractérise l’Île-de-France et les besoins de mobilité qui en résultent.

Figure 1. Concentrations d’emplois en Île-de-France

Figure 2. Concentrations de la main-d’œuvre en Île-de-France

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4 La synthèse des deux cartes précédentes démontre la faible utilité locale du réseau du GPE. Si la ligne 15 Sud du métro traverse de fortes concentrations de main-d’œuvre, ce n’est guère le cas de la ligne 18 : on ne repère sur la deuxième carte des zones de main-d’œuvre que Massy et Versailles. En effet, cette ligne relie trois bassins d’emploi qui n’ont quasiment rien en commun (Lorthiois 2017). Sur la ligne 17 Nord, aucune gare ne dessert des communes en bleu : son tracé ne tient aucun compte des bassins de main-d’œuvre locaux et ne relie entre eux que des pôles d’emplois, ce qui correspond – rappelons-le – à 3 % seulement des besoins de déplacements. Les lignes 14 et 15 du GPE desservent le cœur d’agglomération de l’Île-de-France, mais que les lignes 17 Nord et 18, ainsi qu’un grand tronçon de la ligne 16, traversent des secteurs de très faible densité. Elle met également en évidence que le GPE ne rend aucun service aux 5,3 millions d’habitants de la grande couronne, qui se déplacent en grande majorité en voiture individuelle.

Comme l’autre moitié (celle non cartographiée) de la main-d’œuvre est dispersée dans l’océan gris de la deuxième carte, on y lit aussi la difficulté d’organiser efficacement des déplacements entre les territoires riches en emplois sans habitants (Roissy, Orly, Rungis…) et des territoires d’habitats diffus sans emplois (Clichy-Montfermeil, bassin de Sarcelles, vallée de l’Orge…). On voit bien qu’avec ce degré de concentration, les besoins de mobilité ne cessent de croître.[…]

Plutôt que d’accéder à de nouvelles facilités de mobilité, les Franciliens ont besoin d’une politique de « ménagement du territoire », afin de « vivre et travailler, se détendre dans leur bassin de vie ». L’alternative consiste donc à stopper la course perpétuelle entre offre et demande et à cesser de considérer l’Île-de-France comme un seul système qu’on pourrait réparer. Il faut revenir à un système polycentrique avec des bassins d’habitat qui soient aussi des bassins d’emplois et de vie. Plutôt que de construire des transports lourds qui traversent les territoires sans les desservir, il faut préférer des modes plus légers (tram-trains, tramways, bus à haut niveau de service, pistes cyclables, téléphériques…) qui maillent l’espace local avec du cabotage entre communes. Le but serait de créer des « zones intenses » fondées sur les échanges internes et de diminuer les déplacements lointains. Cela suppose de relocaliser très fortement les activités économiques dans les zones d’habitat et de cesser de faire croître des pôles d’emplois sans ou avec peu d’habitants, comme Roissy, Orly et La Défense, avec des projets contestés comme l’urbanisation du Triangle de Gonesse et du plateau de Saclay. Il faut aussi reconstituer un tissu d’activités dans des centres-villes désertés en grande banlieue (Meaux, Melun, Évry, Pontoise, Sarcelles…). Un modèle à suivre est le bassin de Saint- Quentin-en-Yvelines-Versailles, zone intense réussie où 57 % des résidents habitent et travaillent dans un quadrilatère de 15 km sur 7 et où 83 % de la main-d’œuvre ayant un emploi exerce son activité dans les Yvelines.

Car, bien évidemment, le meilleur transport, le moins cher, le plus court et le moins pénible, est celui qu’on évite !

Doc. 3. Quelle desserte pour les grandes plates-formes aéroportuaires ? L'exemple de Roissy-Charles de Gaulle et du projet du CDG Express. Source: Subra P., 2008, « Quelle desserte pour les grandes plates-formes aéroportuaires ? L'exemple de Roissy-Charles de Gaulle et du projet du CDG Express », L’information géographique

Le deuxième obstacle est celui que constitue la desserte terrestre de Roissy CDG. Car l’attractivité d’un aéroport ne se joue pas que dans les airs (la multiplicité et la fréquence des liaisons aériennes) et sur les pistes ou dans les terminaux (la capacité de trafic, les retards, la rapidité des correspondances, la réduction des temps d’enregistrement ou de récupération des bagages). Elle se joue également autour de l’aéroport, dans les dessertes terrestres depuis ou en direction des zones émettrices de trafic : la métropole proche et en particulier les zones à fort potentiel de passagers aériens : quartiers d’affaires, quartiers de la ville centre et secteurs de la banlieue où résident en masse les catégories à plus fort pouvoir d’achat, qui sont les plus gros consommateurs de transport aérien ; mais aussi et plus largement autres métropoles régionales proches.

De ce point de vue la situation de Roissy est contrastée. Les liaisons avec plusieurs métropoles proches ont été considérablement améliorées par la construction de la gare TGV, située sur la ligne d’interconnexion entre les LGV Nord et Sud-est. Roissy est à moins d’une heure de Lille et de son agglomération (1,5 millions d’habitants), à 1 h 30 de Bruxelles, à 2 heures de Lyon et a donc considérablement renforcé son accessibilité depuis ces villes, ce qui lui permet de capter une clientèle supplémentaire, d’autant que Lille ne possède pas d’aéroport international (Lesquin est

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5 spécialisée dans le trafic intérieur) et que celui de Bruxelles est handicapé par la disparition de la compagnie nationale, la Sabena, en 2001. Mais à l’inverse la mise en service du Thalys a entraîné la disparition de la ligne Air France Paris- Bruxelles.

Par contre l’accessibilité depuis l’agglomération parisienne constitue un réel problème, qui a commencé à être perçu comme un obstacle potentiel au développement de la plate-forme à partir du début des années 1990.

Plusieurs réponses ont été apportées successivement avec la création en 1976 – deux ans après l’ouverture de l’aérogare 1 –, d’une bretelle sur la ligne ferrée Mitry-Claye-Paris, laquelle est transformée en RER B en 1983, puis le prolongement de ce RER B jusqu’à l’aérogare CDG 2 en 1994. Malgré les améliorations apportées en 1997 (huit trains par heure, dont quatre directs) le service assuré demeure de mauvaise qualité : le trajet dure 35 minutes, l’usage mixte, c’est-à-dire la double fonction que remplit le RER B – desserte de l’aéroport et desserte de la banlieue nord-est – pose de nombreux problèmes : irrégularité, surcharge des trains aux heures de pointe, car ce secteur de la banlieue s’est fortement urbanisé dans les années 1980 et 1990, sentiment d’insécurité notamment le soir, manque de place pour les bagages. La durée des trajets s’est allongée (elle était de 20 minutes lors de la mise en service) en raison de la fréquence des pannes, elle-même conséquence d’un sous-investissement dans le renouvellement des rames, des motrices, des voies et des systèmes électriques. Le RER n’assure donc qu’une faible part de la desserte terrestre de l’aéroport : 20 %. L’essentiel revient au mode automobile : voitures des particuliers, taxis, cars d’Air France. Deux autoroutes supportent la quasi-totalité de ce trafic routier : l’A1 vers la porte de la Chapelle et l’A3 vers celle de Bagnolet. Sans l’être autant que l’A86 et l’A6, qui dessert Orly, ces deux axes sont parmi les plus fortement congestionnés d’Île-de-France : entre 160 000 et 210 000 véhicules les empruntent chaque jour (moyenne en 2001), et le total annuel des encombrements s’est élevé en 2002 à plus de 48 000 heures x kilomètres pour l’A1 et près de 52 000 pour l’A3. Ce haut niveau de congestion s’explique par le fait que ces deux autoroutes, outre celle à destination ou en provenance de Roissy, supportent un important trafic local (banlieue-Paris) et un trafic de poids lourds en transit sur l’axe Europe du Nord-Europe du Sud (environ 20 % du total).

Le risque d’un conflit avec les riverains et les élus locaux avait été largement sous-estimé par ADP, la SNCF et RFF. Non pas que les solutions techniques retenues ne tiennent pas compte des nuisances que la nouvelle liaison risque de créer. Au contraire. Le choix de creuser un tunnel de plus de dix kilomètres pour traverser la partie la plus densément urbanisée de la banlieue nord-est ne s’explique que par le souci de limiter ces nuisances. Mais avec cette concession, qui se traduit par un renchérissement considérable de l’opération, les responsables du GIE pensaient avoir fait l’essentiel et ne s’attendaient pas à la levée de boucliers qui va se produire lors de la concertation préalable. Les dirigeants de RFF ne prévoyaient d’ailleurs pas d’organiser un débat public sur le projet CDG Express, réservant cette procédure lourde pour leurs projets phares, les nouvelles lignes à grande vitesse. Le choix du tunnel semblait garantir au projet un statut quasi « extraterritorial », or c’est précisément ce caractère extraterritorial qui va poser problème.

Cette erreur d’analyse s’explique sans doute par trois facteurs principaux :

1. les enjeux qui justifient la réalisation d’une nouvelle liaison terrestre entre Paris et son principal aéroport international sont tels que, pour des ingénieurs, il est difficile d’imaginer que l’utilité du projet puisse être contestée ;

2. dans la phase amont qui court de 1996-1998 à 2001 la préoccupation principale des promoteurs du projet CDG Express a été de l’emporter sur le projet concurrent de liaison routière, celui du Roissy Express ; or la question des nuisances supportées par les riverains n’est à aucun moment un des critères discriminants entre les deux projets, qui tous deux ont choisi de traverser la banlieue en souterrain ;

3. le projet est élaboré sans que soit réellement pris en compte le contexte territorial de la future infrastructure, un contexte caractérisé par de très fortes spécificités, qui concernent à la fois la situation réelle de la Seine- Saint-Denis et une série de représentations à travers lesquelles les acteurs de ce territoire le perçoivent et pensent qu’il est perçu, c’est-à-dire celle d’un territoire délaissé, abandonné par l’État et subissant une crise économique, sociale et urbaine d’une gravité exceptionnelle.

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6 Doc. 4 Une centralité urbaine labellisée aéroville Source : J.B. Frétigny, 2013, op. cit. Une centralité urbaine labellisée aéroville en quête de gouvernance

Le rôle des aéroports dans les mutations urbaines et intra-métropolitaines contemporaines a bien davantage retenu l’attention, notamment avec le label d’airport city ou d’aéroville, largement adopté par les praticiens et par une part des chercheurs en urbanisme et en aménagement. Favorisant la construction polycentrique des villes et des métropoles, voire le changement d’échelle de l’espace urbain au profit de l’échelle régionale, les aéroports contribuent à l’émergence de centralités secondaires complexes en périphérie qu’explorent ces divers travaux (Knippenberger, Wall 2010 ; Drouet et al. 2000 ; El-Makhloufi 2013 ; Güller, Güller 2003 notamment). Ils analysent ainsi de vastes pôles d’échange à l’interconnexion de multiples réseaux de transport. Ils disposent d’une forte accessibilité pour les réseaux à large maille largement promue et sont des lieux privilégiés à la fois de la concentration de services et de polarisation de l’espace urbain. Situé en périphérie urbaine, l’aéroport apparaît comme une composante majeure du front d’urbanisation dont il est un des plus fidèles marqueurs. Plus engoncé dans le tissu urbain, sa position même témoigne de sa contribution à l’extension urbaine. L’aéroport apparaît ainsi comme un catalyseur de la croissance urbaine.

La plupart de ces travaux proposent une analyse économique de l’aéroville comme un surpassement de l’aéroport : airports are not just airports anymore (Güller, Güller 2003 : 5). Elle s’attache surtout à décrire les dynamiques de concentration croissante d’activités et d’acteurs liés à la plate-forme (Conventz 2010, Boquet 2009, McNeill 2009 par exemple).

L’image de la ville dans la ville guide l’évocation des équipements emblématiques de la ville : du lieu de culte à la caserne de pompiers, du bureau de poste au château d’eau ou à la centrale thermique en passant par le casino ou le musée. Les études soulignent l’intensité des investissements fonciers et immobiliers à dimension métropolitaine à plus ou moins grande proximité de la plate-forme : hôtels, centres de conférence, parcs d’exposition, centres d’affaires, zones de bureaux, voire parcs technologiques ou de loisirs. Les travaux soulignent la valeur foncière considérable accordée à ces espaces, qui avoisine régulièrement, voire dépasse, celle des centres urbains hérités. Ces travaux évoquent aussi les autres fonctions supérieures hébergées par la plate-forme multimodale, liées au transport public, aux activités aéronautiques ou encore logistiques, comme pour les messageries express, et au-delà, les multiples développements résidentiels liés à la concentration de l’emploi.

La dimension proprement politique de ces pôles en devenir est cependant souvent absente alors qu’elle se pose avec une acuité toute particulière au regard du succès de certaines notions auprès des acteurs institutionnels impliqués dans le développement des aéroports. Rares sont les grands aéroports qui n’ont pas leur projet articulé autour de cette idée porteuse, qu’il se nomme aéroville, airport city, sky city ou airport corridor comme pour Schiphol, suggérant l’émergence de véritables villes autosuffisantes, concurrençant les centres historiques des villes. La notion d’aerotropolis tout spécialement, forgée par John Kasarda (et al. 2011), chercheur en économie aux États-Unis, a rencontré un très large écho. Son succès rappelle celui de la notion de creative city de Richard Florida (2005)

auprès des praticiens. L’aerotropolis suggère le passage à un nouveau cycle de développement urbain, dans lequel son auteur confère aux aéroports un rôle historique de structuration de l’espace urbain comparable à celui des ports au cours des siècles, dépassant l’environnement immédiatement de l’airport city pour embrasser de vastes régions urbaines.

Dans le contexte contemporain, il est difficile de départir ce type d’analyse des discours promotionnels à valeur performative des aéroports, entretenant un mediascape nourri de marketing territorial pour attirer et séduire les investisseurs, et à ce titre largement redevable d’une analyse critique. Contestant la pertinence de ces représentations, certains travaux soulignent au contraire le caractère hétérogène de l’urbanisation liée aux aéroports.

Ils donnent à voir des centralités urbaines existantes plus modestes, plus fragmentées, des morceaux de ville plutôt que des villes intégrées, où le consensus affiché de l’airport city masque mal la fractalisation des périmètres de gestion politique de ces espaces (Schlaack 2010, Knippenberger 2010). Si l’on comprend bien en quoi la conception unificatrice et consensuelle de l’airport city joue un rôle dans la construction d’un projet urbain, l’étude de sa mise en oeuvre concrète par les acteurs pose la question plus proprement politique et éminemment démocratique de la gouvernance de ces centres urbains émergents, autoproclamés par les gestionnaires de réseau. Les usagers, considérés comme temporaires, se voient difficilement reconnus une légitimité à y intervenir, contrastant avec le statut accordé aux habitants des villes. L’aménagement de l’aéroport pourrait bien faire figure de laboratoire de la mutation de tous les autres espaces urbains spécialisés marqués par de fortes mobilités, des pôles d’échanges aux centres commerciaux en passant par les quartiers d’affaires. Il l’est plus explicitement dans le rapport aux résidants environnants.

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7 Doc. 5 Carte - Navettes domicile-travail des franciliens vers le pôle d’emplois de Roissy (5 communes)

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8 Document 6 : Roissy, pôle structurant métropolitain Source :

L’emploi dans le secteur de Roissy

(plateforme aéroportuaire et proximité immédiate), http://www.aeroportsdeparis.fr/docs/default-

source/groupe-fichiers/rse/paris-cdg-recensement-2013.pdf

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