Les adénomes à prolactine
Diagnostic et traitement
DES endocrinologie – 17/05/14
Selma HOUSNI
Adénome hypophysaire sécrétant de la prolactine = Prolactinome
Prolactinome
Microadénome Macroadénome
< 10 mm > 10 mm
Hyperprolactinémie:
PRL> 20 ng/ml en dehors de situations physiologiques (grossesse, post partum , allaitement)
Epidémiologie, Statistiques
Microadénomes à PRL
•4/10 000 habitants
•8 à 9 microadénomes pour 1 macroadénome chez la femme
•Probablement sous estimés chez l’homme (symptomatologie fruste, axe gonadotrope moins sensible à l’hyperprolactinémie)
Macroadénomes à PRL
• 1/10 000 habitants
•75 à 90% des hommes atteints de prolactinome ont un macroadénome. Chez l’homme les macroadénomes à prolactine sont plus invasifs et plus agressifs que chez la femme.
•Plus rare chez la femme après la ménopause
•Seuls 3 à 6% des microprolactinomes évoluent vers un macro adénome
•2 fois plus fréquents que les microadénomes avant l’âge adulte (surtout chez le garçon, chez la fille proportions équivalentes)
A l’âge pédiatrique 0,1 cas d’adénome hypophysaire / million d’habitant:
Adénome à prolactine = 1 cas / 2
Prédisposition génétique
Penser à la NEM 1
•Si association à:
-Hyperparathyroïdie primaire
-Tumeur gastro entéro pancréatique (insulinome, gastrinome…) -Adénomes surrénaliens non sécrétants
•Si antécédents familiaux
=> Recherche de la mutation du gêne MEN1 codant pour la ménine
Penser à adénomes hypophysaires familiaux liés à la mutation du gène AIP
•Devant une histoire familiale d’adénome hypophysaire sans histoire de tumeur endocrine ou d’hyperparathyroïdie.
•Devant un adénome hypophysaire survenant chez l’enfant ou l’adolescent.
La prolactine
Hypothalamus
Hypophyse
PRL
TRH
+
DOPAMINE
-
• Œstrogènes
• Peptide vaso intestinal
• Sérotonine
• ocytocine
• Angiotensine II
+
Conséquences de l’hyperprolactinémie
• 1/ Sur la glande mammaire:
Galactorrhée
• Spontanée dans 20% des cas.
• Provoquée dans 80% des cas Technique = expression concentrique du
mamelon entre le pouce et l’index de façon modérée pour ne pas comprimer les canaux galactophores.
• Peut être présente sans hyperprolactinémie chez 5 à 10 % des femmes.
• Présente chez 30 à 80% des femmes avec une hyperprolactinémie
• Possible uniquement en cas d’imprégnation œstrogénique préalable.
Donc absente:
- Chez la femme ménopausée - Chez l’enfant prépubère
- En cas d’hyperprolactinémie prolongée non traitée (de par l’inhibition de l’axe gonadotrope)
• 2/ Sur l’axe gonadotrope
- Déficit gonadotrope fonctionnel par atteinte hypothalamique:
Diminution de la sécrétion pulsatile de GnRH par inhibition de l’expression du gène kiss 1. Pas d’effet pathogène significatif sur hypophyses et gonades.
Altération sécrétion de FSH et de LH
- Atteinte hypophysaire possible par compression secondaire à un processus expansif.
Chez la femme Chez l’homme
- Anovulation
- Aménorrhée, oligospanioménorrhée (< 4 cycles / ans)
- Infertilité
- Signes de carence œstrogénique:
Diminution libido, sécheresse vaginale avec dyspareunie
- Diminution de la libido - Troubles de l’érection
- Gynécomastie (liée à la diminution du rapport testostérone/estradiol et non à l’effet direct de la PRLsur le tissu mammaire)
- En général conservation de la
virilisation et de la taille des testicules
Carence chronique -> ostéoporose / ostéopénie
Microadénome à Prolactine
Diagnostic clinique
• Chez la femme:
-Syndrome aménorrhée-galactorhée +++
-Au début dysfonction gonadique pouvant se traduire par
oligospanioménorrhée ou cycles réguliers anovulatoires. Puis évolution vers aménorrhée.
-Baisse libido
• Chez l’homme:
-Infertilité -Baisse libido
-Dysfonction érectile -+/- gynécomastie
•Insuffisance d’un ou plusieurs autres axes: < 5% des cas
•HYPOGONADISME => OSTOPOROSE
+ Dans les deux sexes:
-Céphalées dans 1/3 des cas -Prise de poids
Diagnostic biologique
•Eliminer les autres causes d’hyperprolactinémie ou fausse hyperprolactinémie…
•Taux de prolactine corrélé à la taille tumorale -50 μg/L à 200 μg/L Microprolactinome
-> 200 μg/L Macroprolactinome
•Seul diagnostic de certitude = anatomopathologique
Relation entre prolactinémie et taille de la tumeur
200
Bonne corrélation
Delgrange et al . J Clin Endocrinol Metab 1997
Diagnostic radiologique
• IRM:
-Coupes coronales et axiales pondérées T1 et T2
-Coupes coronales avec injection de gadolinium à réaliser avant toute tentative thérapeutique
-Localisation des cellules lactotropes (et donc du microadénome): parties latérales de l’hypophyse.
-En T1: hyposignal, parfois normosignal (hyperintensité rare, ou si transformation hémorragique)
-En T2: 80% d’hypersignal. L’hyposignal évoque une sécrétion plus importante.
-Parfois rehaussement par gadolinium
-Signes indirects: convexité localisée de la paroi supérieure hypophysaire,
déviation tige pituitaire du côté opposé à la lésion, anomalies du plancher sellaire.
Rq: 2/3 des adénomes à GH sont en hypo ou iso signal
Augmentation physiologique de la hauteur de l’hypophyse lors de la grossesse, de la puberté, de la période post-pubertaire chez la fille.
Si normale n’exclut pas un microadénome < 3 mm de diamètre.
Hypophyse et selle turcique
IRM normale
coupe frontale T1
IRM normale
coupe coronale T1
IRM normale
coupe axiale T1
Microadénome
Signes directs du microadénome : le signal
En T1:
• En T2:
hyposignal isosignal hypersignal
hypersignal
hyposignal
Microadénome
Signes directs du microadénome : le signal
- Acquisition dynamique: pas de rehaussement par rapport au reste du parenchyme hypophysaire
- Après gadolinium: aspect variable
Visualisation sur l’acquisition dynamique
?
Microadénome
+ = Le diagnostic est fait
+ + = attention
le microadénome disparait
T2 T1
Microadénome
T2 + T1 = Micro à D
???
Dynamique + T1 Gado = Micro à D
Microadénome
Microadénome « invisible » en T1 et T2 , Et évident sur la séquence dynamique
Microadénome
Microadénome... hémorragique
Signes indirects
- Déviation de la tige pituitaire - Déformation du plancher sellaire - Déformation du diaphragme sellaire
Microadénome
Macroadénome à Prolactine
Diagnostic clinique
•Chez la femme:
-Syndrome aménorrhée –galactorrhée
-En général découvert avant le stade « syndrome tumoral » (devant clinique de l’hyperprolactinémie, plus marquée chez la femme. De plus évolution de la taille moins rapide que chez l’homme surtout chez la femme préménopausée)
•Chez l’homme:
-Syndrome tumoral +++ = principale cause de consultation -Galactorrhée dans 10 % des cas
-Troubles sexuels dans 78% des cas… mais généralement négligés
•Chez l’enfant et l’adolescent:
-Syndrome tumoral -Aménorrhée primaire -Retard de croissance -Surpoids
Le syndrome tumoral
•Céphalées rétro-orbitaires, non pulsatiles
•Troubles visuels par compression du chiasma optique (si expansion suprasellaire de l’adénome):
-Quadranopsie temporale supérieure ou scotome central -Plus rarement hémianopsie bi temporale
•Troubles oculomoteurs si envahissement du sinus caverneux ou si apoplexie hypophysaire:
Atteinte du III, du IV ou du VI
• Epilepsie temporale si extension volumineuse vers lobes temporaux (20 à 25% des cas) avec hallucinations olfactives, automatismes oraux, absences, désorientation…
•HTIC, hydrocéphalie si atteinte des trous de Monro
Les signes d’insuffisance ante hypophysaire
•Dans 10 à 30% des cas
•Par effet compressif direct de l’hypophyse ou de la tige pituitaire avec altération du contrôle hypothalamique
•Insuffisance corticotrope, thyréotrope ou somatotrope (+++)
Diagnostic biologique
• PRL > 200-250 μg/L
• Parfois plusieurs milliers de μg/L si adénome volumineux
• Bonne corrélation entre taux de prolactine et taille de la tumeur
•Si taux de prolactine faible et tumeur volumineuse évoquer une hyperprolactinémie de déconnexion par une lésion non
lactotrope ou un « effet crochet »
Hyperprolactinémie et tumeur hypophysaire:
pas toujours un adénome à PRL !
dopamine
dopamine
dopamine
c. lactotrope
PRL -
prolac- tinome
PRL
- compressionion de la tige pituitaire
PRL
normal
2 1
3
Tumeur non prolactinique
Diagnostic radiologique
• IRM hypophysaire:
-Pose le diagnostic:
Adénome centré sur la selle turcique
Hypersignal T1
Aspect hétérogène surtout en T2 ( zones kystiques ou nécrotiques)
Tissu hypophysaire sain rehaussé par l’injection de gadolinium et situé à la périphérie de l’adénome
Tige pituitaire inclinée latéralement, portion proximale seule visible -Recherche une extension extrasellaire:
Vers le haut: citerne opto-chiasmatique
Vers le bas: en direction du sinus sphénoïdal
Latérale: sinus caverneux (envahissement = encerclement d’au moins 75%
de le carotide intra caverneuse)
-Permet de réaliser un bilan d’opérabilité
-Recherche un éventuel diagnostic différentiel (tumeur non hypophysaire)
Macro adénome à prolactine : T1 + gado
T1 + gado : atteinte chiasmatique
Après traitement: fonte de l’adénome
Autres causes d’hyperprolactinémie
• Hyperprolactinémie de déconnexion:
- Volumineuse tumeur hypophysaire et PRL < 150-200 μg/L: très vraisemblable - ATTENTION! parfois volume de l’adénome surestimé car partie kystique => en cas
de doute:
Test à la TRH: injection IV de TRH (peu sensible et peu spécifique)
Hyper PRL de déconnexion: augmentation de + de 100% de la PRL
Adénome à PRL: pas de modification de la PRL
Test thérapeutique par les agonistes dopaminergiques:
Réduction de la taille de l’adénome en 3 mois maximum sous DA en cas d’adénome à PRL
• Hyperproactinémies médicamenteuses:
- Médicaments hyperprolactinémiants:
Neuroleptiques:
Anti émétiques:
Antidépresseurs: tricycliques et IMAO +++, ISRS et ISRNS moins…
Œstrogènes: pas d’hyper PRL avec les doses actuelles d’oetro-progestatifs ni avec les THS de la ménopause. Hyper PRL possible chez les transsexuels recevant de fortes doses d’oestrogènes.
Antihypertenseurs centraux
Action antagoniste dopaminergique
• Hyperprolactinémie et hypothyroidie périphérique:
Etude datant de 2003:
- Prévalence d’hyperprolactinémie chez 1003 patients présentant une hypothyroïdie périphérique = 8%
- Dans 5% des cas l’hyperprolactinémie était probablement bien liée à
l’hypothyroïdie avec normalisation du taux de PRL sous levothyrox chez 26 patients / 39.
- Doser la TSH devant toute hyperprolactinémie est légitime.
- Attention : 1 hyperplasie de l’hypophyse est possible!
• Hyperprolactinémie et stress:
- Le stress fait monter le PRL mais de façon négligeable et il n’est pas nécessaire de réaliser les prélèvements de PRL au repos.
• Hyperprolactinémie par mutation hétérozygote du gène récepteur de la PRL R-PRL moins sensible à la PRL => augmentation de la concentration de PRL.
• Hyperprolactinémie physiologique:
- La grossesse
- Post partum : 3 mois après accouchement
Bibliographie
• « Les hyperprolactinémies » – Editions MédecineDiffusion – sous le direction de Jacques Young
• « Diagnostic et prise en charge des hyperprolactinémies » – Consensus d’experts de la Société française d’endocrinologie (SFE)- T. Brue, B. Delemerb, et les membres du groupe de travail de la SFE pour le consensus sur les
hyperprolactinémies – 2007
• « Prolactinomas » - The New England Journal of Medicine - Anne Klibanski, - 2010
• “Diagnosis and Treatment of Hyperprolactinemia: An Endocrine Society Clinical Practice Guideline” - J Clin Endocrinol Metab - Shlomo Melmed, Felipe F. Casanueva, Andrew R. Hoffman, David L. Kleinberg, Victor M.
Montori, Janet A. Schlechte, and John A. H. Wass – 2011
• “Hyperprolactinémie” Philippe Chanson, Jacques Young, Encycl Med Chir – 2014- (à paraître)
MERCI!
EN
BONUS…
Traitement des adénomes à Prolactine
Microadénome à prolactine
•Sans retentissement gonadique ou sexuel ou après la ménopause:
Abstention thérapeutique possible
•Si trouble du cycle -> risque d’ostéoporose ++:
Traitement nécessaire
Par DA ou par traitement œstroprogestatif OU par chirurgie…
• Traitement médical:
Agonistes dopaminergiques:
- Bromocriptine = Parlodel®
- Lisuride = Dopergine®
- Quinagolide = Noprolac®
- Cabergoline = Dostinex®
• Traitement chirurgical:
- Résection par voie nasale transnarinaire trans-sphénoïdale = adenomectomie sélective.
- Si échec ou refus du traitement par agonistes dopaminergique.
• Résultat de la chirurgie:
- Si la prolactinémie est normalisée après la chirurgie, le taux de récidive est de 5 à 21% à 10 ans.
- Complications :
Diabète insipide
Insuffisance ante hypophysaire
Brèche dure-mérienne
Macroadénome à prolactine
• 1
ertemps: traitement médical par DA:
-Permet régression de l’adénome en quelques heures ou jours -Même en cas de troubles visuels graves!
-Suffit seul le plus souvent pour contrôler la tumeur
-Amélioration/guérison des troubles visuels liés à une compression chiasmatique
-Rétablissement d’un axe gonadotrope normal et du développement pubertaire chez les enfants et adolescents.
•On proposera une chirurgie dans un deuxième temps si:
-Résistance absolue aux DA
-Apoplexie adénomateuse sous traitement
-Rhinorrhée cérébrospinale (communication entre les espaces sous arachnoïdiens et les sinus de la face apparue au moment de la fonte de l’adénome hypophysaire)
Les agonistes dopaminergiques
Parlodel® Dostinex® Norprolac®
Bromocriptine Cabergoline Quinagolide
+ Mieux toléré
- Tolérance
variable
Durée du traitement par agoniste dopaminergiques?
•Risques liés à la poursuite du traitement:
Valvulopathies cardiaques? ETT en bilan pré thérapeutique puis régulières.
•En pratique tentative d’arrêt du traitement si normalisation de la PRL pendant plusieurs années.
•La PRL augmente et les symptômes ré-apparaissent dans 20 à 30% des cas après arrêt du traitement par PARLODEL et dans 1/3 des cas pour le DOSTINEX.
•Attention car le DOSTINEX a une demi vie très longue: la PRL peut remonter des années plus tard!
•Résidu adénomateux = FDR de récidive après arrêt des DA.
Contraception
• Contraception à proposer:
- Pilule œstroprogestative - DIU
- Pilule macro/micro progestative en dernière intention
• Un traitement œstroprogestatif peut être proposé seul dans les hyperprolactinémies faibles et permet:
- Imprégnation hormonale œstroprogestative.
- Protection osseuse.
- Contraception fiable.
A savoir:
• Une hyperprolactinémie modérée n’empêche pas la survenue d’une grossesse (ovulation possible) => contraception nécessaire en cas de non désir de grossesse.
• La contraception progestative seule majore la carence
œstrogénique et donc le risque d’ostéoporose /d’ostéopénie.
• Chez l’homme, il ne faut pas utiliser de traitements substitutifs
androgéniques à base d’androgènes non aromatisables (ne se
transforment pas en estrogènes, donc n’ont pas d’effet sur l’os)
Grossesse
Risques encourus pendant le grossesse en cas d’adénome à PRL:
•Augmentation du volume tumoral:
Par effet agoniste des œstrogènes sur les cellules lactotropes
et/ou secondaire à l’arrêt du traitement par agonistes dopaminergiques Dans le microadénome: augmentation du volume dans 2 à 5% des cas
Dans le macroadénome:
Si traitement médical seul , entrepris depuis moins de 1 an: augmentation du volume dans 20 à 30% des cas
Si chirurgie ou radiothérapie préalable: le risque tumoral est inferieur à 5%
des cas
•Risque fœtal iatrogène
Conduite à tenir en cas de grossesse:
Dans le micro adénome à prolactine
Arrêt des agonistes dopaminergiques (AD) dès le début de la grossesse
Surveillance CLINIQUE trimestrielle (sd tumoral)
Pas de surveillance de la PrL, élévation non interprétable pendant le grossesse
Normale Syndrome tumoral
Poursuite surveillance simple IRM sans gadolinium
Stable Augmentation volume
Reprise AD
Allaitement autorisé Allaitement contre indiqué
Dans le macro adénome à prolactine
Extrait de « les hyperprolactinémies », 2008, Edition MedecineDiffusion Sous la direction de Jacques Young
Quel agoniste dopaminergique proposer?
• Bromocriptine
• Cabergoline
Evolution du prolactinome dans le post-partum
• Diminution de l’hyperprolactinémie (50% des cas)
• Réduction de l’adénome (30% des cas)
• Guérison (10% des cas)
Dues à modifications vasculaires de l’adénome liées au
modifications de sécrétion d’œstrogène durant le grossesse.
Transformations hémorragiques de l’adénome
•Dans 20% des macro adénomes à prolactine
•En général asymptomatique
•Tableau d’apoplexie hypophysaire:
-Céphalées
-Syndrome pseudo méningé -Paralysies oculomotrices
-Insuffisance ante hypophysaire (Parfois réversible)
•A l’IRM:
-En aigu: Hyper signaux hétérogènes en T1 (hémorragie)
•Parfois attribuées aux agonistes dopaminergiques
= hémorragie brutale dans le macro adénome