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terre écrite collection dirigée par alain lévêque

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Academic year: 2022

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terre écrite

collection dirigée par alain lévêque

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s p o r a d e

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s p o r a d e j e a n b l o t

arthaud

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1 1 photographies :

Klaus D. Francke, à l'exception de la première photo (p. 48) : J. Vargues/

Atlas-Photo Dessins : Nadia Blokh

Maquette et mise en page : Patricia Lemaigre Dubreuil

© Librairie Arthaud. Paris 1 979. Tous droits réservés. Printed in France.

ISBN 2 - 7 0 0 3 - 0 2 7 3 - 7

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pour Alain Lévêque, à qui je dois ce livre.

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E

lle est là-bas, posée sur le flot, et je devine la vague qui pèse sur elle, le vent qui la survole, le soleil qui la brûle peut-être. Ou bien, c'est la nuit.

Tout se tait. Tendus vers les étoiles qui écrivent au ciel ce message que le regard, chaque fois que revient pour lui cette heure, se croit sur le point de déchiffrer et de comprendre, mais qui ne lui renvoie toujours que l'image opaque du bonheur auquel il lui faut consentir, les arbres respirent et, bordée par son écume, la mer se couche, vient poser ses lourdes têtes sur les plages et s'endort.

Tu dors là-bas, au loin. Tu reposes en moi, intime, ici et là-bas différemment bercée. Partout où je suis, tu es, derrière mes yeux que tu éclaires, au fond du coeur que tu apaises. Partout où je vais, tu m'accompagnes si bien qu'il m'arrive en maints endroits, dans la foule des voitures ou la solitude, au fil de pensées, soucis ou tracas, aux carrefours qui reviennent pour me proposer leurs chemins opposés où je perds le sens, de m'arrêter, l'œil vague, distrait un instant, détourné vers toi que je

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porte, douce, impérieuse, pareille à un recours toujours offert, pour te caresser au fond du cœur.

Qu'il est étrange de te savoir là-bas en cet instant même. Tu es sans pensée tandis que je pense à toi, ni tout à fait une chose, ni tout à fait un être, une présence, qui a la forme de tes rochers, l'odeur de tes pins, la texture de ton sable et la double voix de la mer qui se brise et du vent qui parle par les cimes ployées. Et s'il s'agit d'un rêve encore, il a sur ceux qui détournent du chemin auquel il convient d'être fidèle l'avantage d'être concret et inscrit sur la carte. Près de toi, par le geste, le port, le mouvement, la couleur de la peau et la vigueur, je suis un autre; bientôt, selon le modèle ou la loi que tu imposes, par un mouvement pareil à celui de la vague qui s'allonge sur la plage, la pensée se fait lente, grave, et se tourne vers la sagesse. Une sainte torpeur nous habite.

Cette nuit, tu seras seule à lutter contre la tem- pête, mais chaque coup de la mer sur tes rochers me fera mal. J'écouterai les cordes qui retiennent dans tes criques les barques tourmentées que la houle va mordre, secouer dans son effort pour te les arracher et les entraîner loin, profond, dans le cauchemar où les langoustes errent, en brandissant au ralenti leurs armes, et que la pieuvre observe dans son insomnie. Je serai avec tes brebis, serrées les unes contre les autres, leurs laines emmêlées, au pied de tes murs effondrés que le vent lacère, avec tes ânes plantés en sentinelle par la préhistoire au haut des rochers où roule la tempête et qui regardent sans faiblir la nuit déchaînée. Tu seras seule, car tu ne me connais pas;

moi, non. Car si je t'écris, c'est pour te dire que depuis que je t'ai découverte, à cette heure de l'aube où le ciel se sépare des eaux, je ne suis plus jamais tout à fait seul.

L'étrange histoire que la nôtre! J'y repense ce soir et de nouveau m'étonne. Tu étais si loin, ancrée dans une mer dont je ne connaissais le nom que par des légen- des. Rien sinon le goût du soleil — mais il brille en bien d'autres lieux singulièrement plus proches, accessibles et connus — ne pouvait me conduire vers toi, moi qui aime

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le monde et son bruit, la ville et ses lumières, les nuages et les conversations avec de vifs esprits. Toi et tes chè- vres! Tu méritais mieux : un grand poète pour te célébrer à ta mesure, de la race des héros qui t'ont visitée naguère, au lieu de cet étranger ébloui et de son balbutie- ment par toi apaisé. En un sens, je méritais aussi davan- tage que ce bout de rocher au loin en guise de bonheur.

Mais de nous savoir si mal assortis et que rien ne nous destinait l'un à l'autre me rend plus précieux l'amour que je te porte. Quand le cœur est sans raison, il se trouve affermi. Quand rien dans la réalité n'épaule le sentiment, il se sait plus réel et plus fort, puisqu'il survit sans s'appuyer sur rien. Tu es belle, tout est dit. Pourtant, j'en connais de ton espèce qui te surclassent par la beauté, dont les mers sont plus bleues, les côtes mieux découpées, les pins plus grands, en rangs plus serrés, les maisons plus blanches et mieux couchées. Ainsi, pas même ta beauté ne m'explique notre histoire. Donc, c'est toi, c'est moi, dont la rencontre forme un mystère que je voudrais explo- rer en même temps que ces mille incidents fortuits qui, réunis ou plutôt rivés l'un à l'autre en une chaîne que l'intelligence n'a pas voulue, que la volonté n'a pas inven- tée, où elles ne se reconnaissent ni l'une ni l'autre, tracent la forme d'un destin et font qu'un amour, non pas prenne naissance — le cœur est chaud heureusement et il en naît à tout instant — mais dure, et qu'on devine qu'il durera aussi longtemps que l'amant.

J'étais jeune encore et toi encore sauvage. Te retrouver telle me sera facile, mais la jeunesse... Com- ment la ramener au jour et lui rendre la parole? Parce qu'elle est vertu avant que d'être un âge, elle s'évanouit devant le regard qui la cherche. Ni inscrite dans la mémoire, ni dans la peau ou le muscle, elle est tout entière dans un cœur vigoureux. On ne peut la retrouver, ni elle, ni son image, mais seulement se convertir, ne serait-ce qu'un instant, à sa confiance, à sa générosité, à son assentiment. Pour retrouver la jeunesse, il suffit de pardonner. Essayons donc, ne serait-ce qu'un instant, afin

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que le murmure du monde revienne s'imprimer en nous;

que le paysage, retrouvant son ancienne puissance, puisse de nouveau par sa seule présence faire couler les larmes de la joie.

Que le monde était beau! Blanc le bateau et rapide entre les deux vagues retournées comme une évidence, que sa proue découpait dans la nuit. La chaleur m'avait chassé sur le pont, j'étouffais dans la cabine, mais c'était aussi de sentir si proche un être mystérieux et dont je ne savais rien, sinon qu'il était fait pour moitié des ténèbres complices qui se pressaient contre nos flancs et, pour moitié, d'un noir autre qui s'éloignait sans un signe vers les étoiles. C'est lui que j'allais retrouver. J'étais assez jeune pour deviner, tandis que je m'allongeais sur le pont, qu'il m'accueillait ou même qu'il m'avait attendu, mon bonheur, mon regard, pour parfaire sa forme. En se balançant dans son sommeil, le mât somnambule me désignait la voûte constellée. Comme tu me portais bien Eva-Maria, Eve et Marie, la bien nommée, car la volupté et la tendresse par ces noms désignées semblaient s'in- carner dans ton mouvement, le galbe de tes planches, les lyres de tes gréements. La mer s'ouvrait à ta blancheur où se retrouvaient, d'Eve, le charme, de Marie, la pureté.

Eva-Maria : c'était le jouet ou l'amour et c'est souvent la même chose, parce que l'on aime par la part enfantine du cœur, si bien que tout objet aimé tend à devenir un jouet; jouet donc, ou amour d'un homme puissant. Il est mort aujourd'hui. Grec d'Alexandrie, à la mâchoire de condottiere, aux yeux d'enfant, avec dans le geste, le port, la démarche, une grâce qui surprenait dans le corps rude et faisait que son mouvement déroutait, il vint vers moi du fond du salon, le verre à la main, le sourire aux lèvres. C'était à Genève. Dans l'air, un peu de l'eau tiède du lac, et la montagne s'était éloignée dans la brume, nous laissant seuls avec ces tropiques d'un soir.

— Quoi! Vraiment? Depuis dix ans?

Oui, depuis dix ans j'avais quitté la Grèce, sans esprit de retour. Pourquoi je ne devais plus y retourner,

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comment j'avais coupé le chemin qui me conduisait vers elle, c'est là une autre histoire que je raconterai peut-être un jour. L'indignation de Constantin était sincère. Amusée sans doute, courtoise certainement, mais sincère. Ne pas connaître la Grèce était une erreur ou un malheur que la biographie, les hasards de l'histoire ou de la fortune pouvaient expliquer. Mais que l'ayant connue on pût y renoncer provoquait en lui une sorte de sursaut qui faisait briller ses yeux grossis par les lunettes et rire sa bouche forte et gourmande.

— Il faut y retourner.

— Mais oui. Un jour... peut-être...

— Non! Cet été...

Le poing se serre. C'était un ordre que l'on m'adressait, en même temps qu'une invitation. Alors, il m'a parlé de l ' Il aurait voulu être modeste, assortir son propos à la coupe de son vêtement et m'assurer, avec une pointe d'accent anglais, qu'il s'agis- sait d'un vieux rafiot, mais qu'on pouvait lui faire confiance. Je le vis lutter un instant... Il était trop grec d'abord, trop lui-même ensuite, pour me dissimuler long- temps qu'il s'agissait du plus beau des bateaux qui aient jamais fendu la vague... Son regard prit feu, son geste s'enhardit et fit surgir dans la torpeur du salon de grandes voiles claquantes, les gréements vibrants dans la course et les flancs de l ' J'acceptai, remerciai comme il faut. Il ne nous resta plus qu'à finir nos verres et la soirée, à la fenêtre suspendue dans la langueur citadine, en goûtant notre amitié neuve. Lui d'abord, moi peu après, nous faisions lever sur le lac noir de lumineuses tempêtes, lancions l'aquilon dans l'été immobile et, agrippés au bastingage du balcon genevois, nous venions offrir nos yeux et notre visage à la morsure de la plus salée et de la plus ensoleillée des mers.

Un beau voyage, et dont je n'imaginais pas qu'il dût avoir une suite. Mais une semaine ne s'était pas écoulée que je recevais d'Athènes mes instructions de route, sur un ton qui n'admettait pas une réponse évasive.

Je câblai « A vos ordres » et me mis à rêver. La tâche

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n'était pas facile : tout un travail à faire, qui demandait patience et doigté. Je parlais doucement à celui que je n'avais pas revu depuis dix ans, que j'avais quitté un matin d'hiver à Hassani, les dents serrées, le cœur amer et, en guise d'adieu, un mouvement de colère qui disait à peu près : « Toi, je ne veux plus te revoir! » Maintenant, il me fallait revenir vers ce jeune homme et lui parler à voix basse, lui dire : « Tu sais, nous allons en Grèce. Nous retournons en Grèce » et l'écouter se réveiller doucement.

Pour couper court aux effusions des retrouvailles, je tranchai : « Tu sais, c'est une tout autre Grèce ».

Je mentais. A peine l'avion en bout de piste nous eut-il largués dans la nuit que je fus convaincu de mon mensonge.

C'était le même velours tiède, bordé des mêmes lauriers-roses. Une nuit qui montait très haut, très loin, qui prenait appui sur la montagne plus claire, bordée du même rayon des lumières qui tremblent, vacillent, lumiè- res des cafés, lumières des bateaux, confondues afin que l'ombre sonore de la mer s'allie, avec pour seule bavure un moment d'écume, à l'ombre silencieuse de la terre. Et les odeurs? Un continent où je retrouvais, oubliés par le jour ou nés du soir, quelques repères : le mouton que l'on grille, le poisson dans son bain d'huile, la belle-de-nuit qui s'ouvre, le macadam tiède, le laurier encore et, au- delà, l'Egée. Plus secrète, plus périlleuse, venue de loin, aussitôt intime, une lenteur paralyse le geste, réduit le pas, redresse le corps.

N.? C'était son premier voyage. Elle n'en finissait pas de tout reconnaître. Car on ne connaît pas ce pays et on ne saurait l'apprendre. On le reconnaît seulement si l'on est doué, appelé par lui. Ma femme était douée : elle reconnaissait tout et n'en revenait pas, aussitôt, comme il le faut, non pas successivement, mais au même instant, exaspérée et ravie. Car c'était la même Grèce. Oh oui!

Bien entendu, on avait perdu nos valises et bien entendu on les retrouva. Bien entendu, il n'y avait pas de porteur et ensuite cinq qui se disputaient et que l'on ne devait pas

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tarder à perdre et, très vite, à retrouver. Bien entendu, les cartes de débarquement ne convenaient pas et, c'est l'évidence, on avait égaré les bonnes. Tant et si bien que si les formalités de douane, de police, de contrôle des changes ne devaient pas durer plus qu'ailleurs, on avait eu le temps, en cette petite demi-heure, de traverser dix désespoirs et de saluer autant de miracles. Le meilleur fut sans doute celui de ce chauffeur qui nous engagea, nous ayant presque aussitôt reconnus — le « presque » étant le temps du désespoir qui précède le miracle —, à le suivre et à prendre place dans sa voiture.

— Où allons-nous?

— La Eva-Maria vous attend à Glyfada.

Glyfada, c'est la baie qui jouxte Cavouri. Cavouri, le nom de ce que je ne voulais plus revoir et qui avait accueilli, six longs mois durant, celui dont je ne voulais plus. Je sentis mon cœur se serrer.

La joie de N. me rendit le présent et l'ombre chaude que nous reconnaissions ensemble. « Que c'est beau! » disait-elle. On ne voyait rien. J'exagère. Mais ce que l'on entrevoyait était sans importance, pareil à un murmure, à côté du bien-être odorant qui nous avait accueillis, où nous avions sombré et qui nous baignait de partout. Pourtant, ces silhouettes si minces, isolées, len- tes, le long de l'ombre où l'on devinait la mer, ces mares de lumière jaune autour des cafés, ces poivriers ou ces pins si maigres que les phares saisissaient un instant afin d'en révéler la forme modelée par un vent qu'on n'imagi- nait pas dans l'heure immobile, tout cela apaisait le regard et faisait partie du plaisir dont on écoutait monter la rumeur. Ensuite, la route se divise et c'est déjà Glyfada et, des deux côtés, en rangs serrés, la fête des lauriers, la voiture qui cahote, ralentit, s'arrête, Constantin qui nous serre sur son cœur. Ensuite, il tend le bras vers l'ombre :

« Le voilà! » Sur la tapisserie de la nuit, un grand cygne brodé, immobile, qui paraît se souvenir, observer, écoute l'eau, le vent du ciel et nos voix — toute fierté et tout silence.

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— Qu'il est beau!

— Ce n'est qu'une goélette.

Un autre couple était du voyage. Nous fîmes connaissance. Ils étaient grecs et c'était assez pour nous charmer. A table! C'était une taverne au bord de l'eau et les garçons allaient de temps à autre vider les assiettes de leurs restes dans une mer qu'on ne voyait pas et qui se taisait. Les plats et le vin avaient une saveur qui disait

« Souviens-toi! » Nous étions gais, bruyants, mais, tout de même que les lumières de la taverne, déposées dans la nuit et étroitement circonscrites, nous nous sentions entourés par un silence attentif et qui, pareil à l ' que nous ne quittions guère des yeux, paraissait nous veiller. Je tenais mon rôle, trinquais comme il faut et ne manquais pas de vanter le goût du poulpe mariné ou celui du mouton, tourné vers Athènes et ses lumières. Derrière mon dos, je sentais Cavouri se lever et vivre, l'ombre de ses pins, la lumière phosphorescente de ses sentiers de sable trembler et courir, et j'entendais son sanglot.

J'écoutais mon chien m'appeler dans le clair-obscur des années et de l'oubli. Là, derrière mon dos, le passé avait repris ses formes, son odeur, ses couleurs, son humeur : il suffisait de se retourner pour le saisir. Et pour recom- mencer de souffrir.

Le saut dans la barque, l'échelle pour monter sur le pont. Là, je restai un moment immobile à suivre des yeux les deux mâts et leurs cordages, d'un regard qui était une louange et qui les épousait. Les cabines étaient étouffantes. Nous nous retrouvâmes bientôt sur le pont et déjà le ciel nous prenait dans le filet de ses étoiles et les lumières se laissaient recouvrir par une vague à l'horizon et revenaient ensuite. Pas un souffle : le bruit des moteurs et leur vibration, le tissu de la mer que la proue déchire;

pas un mouvement. Je fis semblant de ne pas reconnaître la baie de Cavouri.

— Nous dormirons à Sounion.

C'était là que l'aube nous attendait. Je ne parlerai pas du temple — il m'intimide — mais seulement du rocher

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qui fit taire le souvenir et la pensée. Le bateau à l'ancre acceptait chaque ride de l'eau et la saluait distraitement.

Le rocher naissait dans l'ombre, prenait forme insensible- ment et sa pierre annonçait les couleurs du levant. Il ne proposait à la pensée aucune énigme, nulle figure à l'imagination. Ce qu'il annonçait dans son dévoilement était autrement puissant que les hôtes bavards de l'Olympe, était muet, assez terrible, interdisait la fable, tout rêve et le sentiment en même temps que la parole.

Bleu d'ombre, rose d'aurore, il était ce qui est. Il n'exigeait rien, démontrait simplement, par la force de sa présence, l'inanité de la vie intérieure et dissipait la cohorte de ses fantômes. Il ne restait qu'à accepter, à céder, à se jeter à la mer touchée par les premiers rayons, à couler profond, à remonter vers l'horizon des vagues, de là sur le bateau, vivant, c'est-à-dire sans pensée, mais plein d'appétit, et à contempler le vaisseau des ruines blanches sur la plus haute vague figé, en se taisant. Je me tus, de telle sorte, si loin, profond, qu'il me parut que je ne pourrais plus jamais parler, non pas seulement à N., qui s'avançait sur le pont, humide encore de sommeil, mais bien à moi- même. Cette fois, j'étais bien en Grèce, de retour dans une douloureuse patrie qui n'acceptait que l'hommage du silence et exigeait que l'on soit plein, que l'on sonne le plein, comble le creux que fait l'âme et que l'on se perde dans la contemplation, par exemple, de son pied, chose qui pouvait être admirable, parce qu'elle était, ainsi que ce rocher.

D'île en île, de baie en rade, de port en plage, sans souvenir ni pensée. Le jour : au soleil et accordé à la vague, qu'on y plonge ou que l'on suive, fasciné, son mouvement généreux qui passe, plie, s'ouvre et se donne à la mer tout entière; les soirs, serrés autour des lampes dans des ports minuscules dévorés par la nuit, avec pour voisins des caïques au ventre bombé et autour une ombre si dense, si habitée et aventureuse que c'était, chaque soir, festin de pirate. Le corps qui s'étire, la bouche qui bâille et, pour toute conversation, ce soupir : « Ah, qu'on

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« Kaïros, si je t'écris, c'est pour te dire que depuis que je t'ai découverte, à cette heure de l'aube où le ciel se sépare des eaux, je ne suis plus jamais tout à fait seul. »

C'est à une île que Jean Blot déclare ainsi son amour. Une île grecque située quelque part dans la mer Egée, avec ses pêcheurs, ses rochers, ses oliviers, ses sources.

Cette rencontre, dont il narre avec tendresse et humour les péripéties, a la gravité d'une révélation. A Kaïros, où le sourire des dieux brille encore, le voyageur ébloui ne rend pas seulement grâce à la beauté et à un antique art de vivre. Il ne tarde pas à reconnaître dans l'accord des éléments et des hommes un pays qu'il portait enfoui en lui-même.

Alors il s'arrête. Et dans le silence attentif de Kaïros, le lecteur entend à son tour le murmure du monde...

A.L.

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