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La formation et la définition des frontières supra-locales

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Academic year: 2022

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Le but de cette journée d’études est d’examiner les processus de délimitation des espaces supra-locaux, correspondant à l’action d’une puissance politique ; s’il peut se constituer des territoires supra-locaux sans action politique (« aires » objectives, culturelles ou d’échanges économiques), ils sont exclus de notre étude, car ils n’ont pas de limites explicitement définies.

Les études médiévistes sur ce sujet se sont focalisées sur les frontières d’Etat, principalement pour le bas Moyen Âge, et sur les frontières confessionnelles (qui peuvent être des fronts pionniers, comme en Péninsule ibérique ou dans la colonisation allemande en Europe orientale), ainsi que, dans une moindre mesure, sur la géographie diocésaine ; mais les autres territoires regroupant des communautés d’habitants ont été moins étudiés, en considérant qu’ils résultaient avant tout de l’agrégation de territoires locaux – dont ils reprendraient les limites

« extérieures », comme cela semble être le cas dans la construction du comtat venaissin par les papes d’Avignon.

Récemment, l’insistance a porté sur le caractère non linéaire et sur la porosité des grandes frontières, considérées pour le Moyen Âge comme des « marches » (zones de transition progressive, en profondeur, voire de véritables interfaces).

Il convient de nuancer cette conception par

« l’effet de barrière », discriminatoire, qu’oppose toute limite aux flux ; c’est surtout dans le domaine de la fidélité politique (l’intégration) que des habitats intercalaires également éloignés de deux centres de commandement peuvent rendre la limite plus floue que les textes ne la présentent.

Ces constructions sont fortement volontaristes et plus ou moins imposées (au moins négociés) par une autorité supérieure, comme le diocèse, une

principauté seigneuriale (y compris les royaumes) et des circonscriptions administratives laïques englobantes ; plus que les territoires créés par des processus endogènes, comme le finage, ils impliquent une véritable conception abstraite et savante de l’espace, et ils ont une relation étroite avec les constructions identitaires.

Cependant, les grands domaines fonciers définis uniquement par le droit de propriété – ce qui est théorique, puisque la terre porte toujours une part de juridiction

« publique » – mais occupés par plusieurs habitats différenciés, principalement durant le haut Moyen Âge, seront inclus dans l’étude envisagée.

On insistera sur la nature des sources, qui sont, comme pour les territoires locaux, de trois types : procès, enquêtes et actes de démarcation, que l’on aura garde de confondre ; mais, à cette échelle, il faut ajouter les descriptions explicites (de type « géographique », relevant de la littérature savante) et les relations de voyages. On prêtera attention aux intervenants dans ces processus ; au premier chef les princes, dont les intérêts ne sont pas toujours une domination la plus étendue possible ; les « connaisseurs de la terre » appelés à témoigner présentent une perception de l’espace et du pouvoir politique intéressante ; enfin, la composition des commissions réalisant les démarcations sur le terrain est instructive.

La nature des limites doit être examinée : bornes artificielles, utilisation de repères ponctuels naturels, création de véritables lignes continues (le plus souvent en s’appuyant sur les cours d’eaux, lignes de crête…) ; du point de vue de l’analyse spatiale, elles se localisent à l’échelle hectométrique, ce qui implique un difficile travail d’identification des lieux (correspondant principalement à des micro-toponymes). Leur mise en place obéit-elle à un parcours sur le terrain et

emploie-t-elle des repères d’orientation abstraits comme les points cardinaux ? Plus intéressante encore est leur relativité : elles sont souvent « par défaut », c’est-à- dire que la limite d’un territoire est constituée explicitement par un autre territoire (ce qui montre qu’ils sont limitrophes). On atteint là l’essence de la frontière, qui est la rencontre de deux processus de polarisation. Bien connus sont les investissements matériels des autorités centrales sur leurs confins, notamment les fortifications, puisque les grandes frontières sont par définition des lieux d’insécurité.

En se plaçant du point de vue purement « endogène » de la formation des territoires, le volontarisme politique des frontières n’est pas total, sauf pour le passage de la limite sur le terrain à une échelle hectométrique. Certes, si l’espace est peu peuplé, le prince peut tailler librement un maillage de circonscriptions systématique (cas de comtés carolingiens).

Mais derrière la fixation d’un seuil se trouvent des processus de territorialisation lourds ; comme ceux-ci nous échappent largement, la délimitation même les éclaire quelque peu. Le processus le mieux accessible est la polarisation de l’espace exercée sur de vastes superficies par des

« lieux centraux », qui sont principalement des villes ; cela se traduit notamment par une hiérarchisation politique des habitats périphériques, dont la capacité d’action (prérogatives administratives) est articulée pour constituer des relais du lieu central : la frontière est fixée « au bout » de ces réseaux. On peut penser que le rapport entre les conditions matérielles de circulation et la force de l’autorité centrale constitue le facteur essentiel de la taille des territoires supra-locaux (les diocèses montagneux sont plus petits que les diocèses de plaine) ; mais le fonctionnement du pouvoir en réseau et la densité de « lieux centraux » interfèrent fortement dans ce rapport mécanique (les diocèses italiens recomposés par les cités- Etats sont plus petits que les diocèses ibériques recomposés par le front pionnier de la Reconquête).

Les enjeux de la cristallisation des limites opposent les intérêts locaux (souvent économiques : usage d’un cours d’eau, complémentarité topographique ou pédologique, accès à une route…), notamment des élites, à la stratégie princière, qui est à une autre échelle.

D’ailleurs, contrairement aux frontières nationales modernes, monolithiques, les limites supra-locales anciennes ne portent souvent que sur une modalité socio- politique fonctionnant à une échelle déterminée : la fidélité politique (impliquant obéissance, service et paiement) ou l’action d’agents administratifs ; leur tracé peut donc ne pas correspondre exactement avec les limites locales, qui sont souvent déterminées pour discriminer un droit de pacage, un péage sur un itinéraire de marchandises, un paiement de la dîme… C’est la co-spatialité, qui peut faire se superposer des limites ne passant pas exactement au même endroit. Par ailleurs, les juridictions politiques peuvent être en concurrence et/ou en décalage chronologique, auxquels se rajoutent les différences d’échelle : les frontières des royaumes ibériques coupent en deux certains diocèses.

Le « sens » de la construction de l’espace (du plus petit au plus grand ou inversement) doit également être pris en compte pour déterminer si les frontières locales et supra-locales se superposent : la paroisse est issue du démembrement du diocèse, de même que, dans la Péninsule ibérique, les territoires des simples aldeas se sont configurés dans le cadre des très vastes (mais très vagues) juridictions englobantes, dites concilium/concejo, confiées à des chefs- lieux fortifiés ; à l’inverse, beaucoup de circonscriptions administratives civiles, datant surtout de la « naissance de l’Etat moderne » (mais même de l’époque carolingienne), regroupent des territoires locaux souvent bien antérieurs.

Ce sont quelques-uns des problèmes qui pourront être abordés.

La formation et la définition des frontières supra-locales

(principautés territoriales, diocèses, circonscriptions administratives)

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Comité scientifique

Stéphane BOISSELLIER (Professeur d’histoire médiévale, Université de Poitiers) François CLEMENT (MCF de langue et civilisation arabes, Université de Nantes)

Nacima BARON (Professeur de géographie, Université de Marne-la-Vallée) Nathalie BOULOUX (MCF d’histoire médiévale, Université de Tours) Programme

9 h 30 Ouverture de la journée (C. Galderisi, Directeur du CÉSCM, et S. Boissellier, Pr, Université de Poitiers)

Communications de la matinée

9 h 50 Grandes frontières : pratiques et représentations (présidence Cécile Treffort, Pr, Université de Poitiers)

9 h 50 Damien Glad, doctorant allocataire de recherche Université de Paris I, chargé de cours à l’Ecole du Louvre : Le Danube à l'époque romaine tardive et protobyzantine 284-642. Limes ou espace d’échanges ?

10 h 20 Charles Garcia, Mcf (espagnol) Université de Poitiers : L’action des limites supra-locales sur les limites locales : le cas de la frontière orientale du royaume de León, XIIe-XIIIe siècle

10 h 50 Pascal Burési, Cr CNRS UMR 8167 Université de Paris I : L’apparition de la notion de frontière dans la péninsule Ibérique : entre logiques locales, étatiques et pontificales (XIe-XIIIe siècle)

11 h 20 Discussion

12 h 00 Repas (buffet sur place) Communications de l’après-midi

13 h 30 Diocèses et seigneuries (présidence Luc Bourgeois, Mcf Hdr d’archéologie, Université de Poitiers)

13 h 30 Caroline Chauveau, doctorante Université de Poitiers : La construction territoriale de la seigneurie de La Garnache (Xe-XIIIe siècle), nouvelles données archéologiques

14 h 00 Jean-Luc Fray, Pr Université de Clermont-Ferrand : En-deçà des bornes et par- delà les monts : espaces et agrégations de territoires d’un lignage seigneurial auvergnat dans les derniers siècles du Moyen Âge

14 h 30 Régis Le Gall, doctorant Université de Poitiers : La formation des espaces diocésains en Bretagne Occidentale : Léon, Cornouaille, Trégor (IVe-Xe siècles) 15 h 00 Nathalie Bouloux, Mcf Université de Tours : Le rôle des limites dans les

descriptions géographiques XIV-XVe siècles 15 h 30 Discussion

16 h 20 Conclusions

Renseignements

CÉSCM Hôtel Berthelot 24, rue de la Chaîne - BP 603

86022 POITIERS Cedex tél 05 49 45 45 57

secretariat.cescm@mshs.univ-poitiers.fr www.mshs.univ-poitiers.fr/cescm/

Lieu :

Centre d’études supérieures de civilisation médiévale (Université de Poitiers/CNRS)

Session organisée par

Stéphane Boissellier, professeur des Universités, membre du CÉSCM avec le soutien du

Département d’histoire de l’Université de Poitiers

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