Énoncé
Ce problème porte sur l'inégalité isopérimétrique reliant l'aire et le périmètre de certaines gures géométriques.
Dans tout le problème,ndésigne un entier supérieur ou égal à3 etω désigneei2πn. Un polygone (àn côtés) est un élément deCn. Par exempleZ = (z0, z1,· · ·, zn−1)est un polygone. On convient alors quezn=z0.
Un polygoneZ est dit équilatéral lorsque|zj+1−zj| est indépendant de l'indicej entre0 etn−1.
Il est dit régulier direct lorsqu'il existea∈C∗et b∈Ctels que
∀k∈ {0,· · ·, n−1}, zk=aωk+b Il est dit régulier indirect lorsqu'il existea∈C∗et b∈Ctels que
∀k∈ {0,· · ·, n−1}, zk=a¯ωk+b Un polygone régulier direct ou indirect est dit simplement régulier.
Pour un polygone
Z= (z0, z1,· · ·, zn−1)
on dénit son conjugué (notéZ) et son translaté parc (notéZ+c avecc∈C) par : Z = (z0, z1,· · ·, zn−1), Z+c= (z0+c, z1+c,· · ·, zn−1+c)
On dénit aussizb0,zb1,· · ·,bzn−1,bzn par :
∀j∈ {0,· · ·, n}, bzj= 1
√n
n−1
X
k=0
(¯ωj)kzk On peut remarquer quezbn=zb0.
Partie I. Calculs préliminaires.
1. a. Soitk∈J1, n−1Ketε∈ {−1,+1}. Montrer que sin
kπ n
+εtanπ n
cos kπ
n
≥0
b. En utilisant le tableau de variations dex→tanx−xdans un intervalle à préciser, montrer que
ntanπ n
≥π
z
0= 1 z
1= 2i
z
2= −1
z
3= −2i
Fig. 1: Un polygone à 4 côtés
2. SoitZ= (z0,· · ·, zn−1)un polygone régulier avecaet bcomme dans la dénition.
a. Montrer queZ est équilatéral.
b. Montrer les points dont les axes sont leszisont sur un cercle dont on précisera le centre et le rayon.
c. Exprimerbpuisaen fonction deszi.
3. Montrer que le polygone de l'exemple de la gure1est équilatéral mais pas régulier.
4. Soitp∈Z, discuter selonpde la valeur de
√1 n
n−1
X
k=0
(ωp)k
5. SoitZ= (z0, z1,· · · , zn−1)∈Cn. Vérier que
∀j∈ {0,· · · , n−1}, zj = 1
√n
n−1
X
k=0
(ωj)kbzk
Partie II. Inégalité isopérimétrique pour les polygones.
Pour tout polygoneZ= (z0,· · ·, zn−1), on dénit L(Z),E(Z)etA(Z)par :
L(Z) =
n−1
X
k=0
|zk+1−zk|, E(Z) =
n−1
X
k=0
|zk+1−zk|2, A(Z) =1 2Im
n−1
X
k=0
zk+1zk
!
Il est évident que L(Z) est le périmètre du polygone. Le réel A(Z) représente son aire algébrique mais vous ne devez ni justier ni utiliser cette propriété.
1. Soitc∈Cet Z∈Cn. ExprimerA(Z)etA(Z+c)en fonction deA(Z). 2. On suppose dans cette question seulement queZ est un polygone régulier.
a. ExprimerL(Z),E(Z),A(Z)en fonction desin πnou desin 2πn b. En déduire les rapports
|A(Z)| L(Z)2
|A(Z)| E(Z)
L(Z)2 E(Z)
3. SoitZ ∈Cn. Montrer queL(Z)2≤nE(Z). Sous quelle condition surZa-t-on l'égalité ? 4. SoitZ∈Cn.
a. Établir les relations A(Z) = 1
2
n−1
X
k=0
sin 2kπ
n
|zbk|2 E(Z) = 4
n−1
X
k=0
sin2 kπ
n
|bzk|2 b. Montrer que
E(Z)−4 tanπ n
A(Z) = 4
n−1
X
k=0
sin kπ
n sin kπ
n
−tanπ n
cos kπ
n
|bzk|2 c. Montrer que
|A(Z)|
E(Z) ≤ 1 4 tan πn 5. On admet qu'il existeZ0∈Cn tel que :
∀Z∈Cn : |A(Z)|
L(Z)2 ≤|A(Z0)| L(Z0)2
a. Soit (z0,· · ·, zn−1) = Z0 et j entier entre 0 et n−1. On note Z1 le polygone obtenu à partir deZ en remplaçantzj parzj+λ(zj+1−zj−1)(avec unλ réel) sans changer les autres valeurs. Montrer queA(Z1) =A(Z0).
b. Montrer queZ0 est équilatéral.
c. Montrer l'inégalité isopérimétrique pour les polygones :
∀Z ∈Cn, 4π|A(Z)| ≤L(Z)2
Ce qui prouve l'inégalité demandée pour le cas des polygones. Cette inégalité se généralise à d'autres courbes.
Corrigé
Partie I. Calculs préliminaires.
1. a. Après réduction au même dénominateur, l'expression qu'on nous demande d'éva- luer se met sous la forme
sin (k+ε)πn cos πn de plus,cos πn
>0etk+ε∈J0, nKentraînesin (k+ε)πn≥0.
b. Formons le tableau de variations de la fonctionf dénie dans[0,π2[ parf(x) = tanx−x. Elle estC∞dans son domaine avec f0(x) = tan2x≥0. Cette fonction est donc croissante doncf(x)≥0pour tous les xdu domaine. Le cas particulier desxde la forme πn conduit à l'inégalité demandée.
2. Dans cette questionZ= (z0,· · · , zn−1)est un polygone régulier.
a. Un polygone régulier direct est équilatéral car tous les côtés ont la même longueur.
|zj+1−zj|=|a||ωj+1−ωj|=|a||ω−1|= 2|a|sinπ n
Le calcul est analogue et le résultat est le même dans le cas d'un polygone régulier indirect.
b. Un polygone régulier est l'image par similitude d'un polygone régulier inscrit sur le cercle unité. Il est inscrit dans le cercle de centrebet de rayon |a|.
c. On obtientben sommant les axes des points du polygone
n−1
X
k=0
zi=a
n−1
X
k=0
ωk
!
+nb=b car
n−1
X
k=0
ωk =ωn−1 ω−1 = 0 On en déduit
b= 1 n
n−1
X
k=0
zi etz0=a+b⇒a=z0−b= 1
n((n−1)z0−z1− · · · −zn−1) 3. Le polygone à quatre côtés proposé dans l'exemple est équilatéral car le calcul montre
que tous les côtés ont la même longueur√
5. On peut remarquer que c'est un losange (diagonales perpendiculaires).
Si ce losange était un polygone régulier, sonbserait nul d'après la question précédente.
Il apparait alors que les|zi−b|valent 1ou2 au lieu d'être égaux à un même|a|. Le
losange de l'exemple est donc équilatéral mais non régulier. Les deux notions ne sont pas équivalentes : un polygone régulier est équilatéral mais un polygone équilatéral n'est pas forcément régulier.
4. La quantité qu'on nous demande d'évaluer est une somme de termes en progression géométrique. La raison estωp qui est toujours une racine n-ième de l'unité. Lorsque cette raison n'est pas1la somme est donc nulle. On conclut donc :
S(p) = 1
√n
n−1
X
k=0
(ωp)k=
( 0 sip6≡0 modn
√nsip≡0 modn
5. Transformons le membre de gauche de l'égalité à vérier
√1 n
n−1
X
k=0
ωjk zbk = 1
n
n−1
X
k=0
ωjk
n−1
X
l=0
¯ ωkl
zl
!
= 1
n−1
n
X
k=0 n−1
X
l=0
ωk(j−l)zl
= 1 n
n−1
X
l=0 n−1
X
k=0
ωj−lk zl= 1
n
n−1
X
l=0
S(j−l)zl=zj
car la seuleS(j−l)non nulle correspond àl=j et elle vaut√ n.
Partie II. Inégalité isopérimétrique.
1. Commezk+1zk =zk+1zk, on a A(Z) =−A(Z). D'autre part :
(zk+1+c)(zk+c) =zk+1zk+|c|2+zk+1c+czk
donc
A(Z+c) =A(Z) + Im c
n−1
X
k=0
zk+1
!
+ Im c
n−1
X
k=0
zk
!
Or, commezn=z0,
n−1
X
k=0
zk+1=
n−1
X
k=0
zk
et les complexes dans les parties imaginaires sont conjugués. Les parties imaginaires s'annulent etA(Z+c) =A(Z).
2. Dans cette question,Z est un polygone régulier.
a. On a déjà vu que pour un polygone régulier|zk+1−zk|= 2|a|sin πn
. On en tire L(Z) = 2n|a|sinπ
n
E(Z) = 4n|a|2sin2π n
On sait d'après la question 1 de cette partie que leb disparaitra du calcul de A pour un polygone régulier. On a donc, dans le cas direct :
A(Z) =|a|2 2 Im
n−1
X
k=0
ωk+1−k
!
= n
2|a|2Im(ω) = n 2|a|2sin
2π n
Dans le cas direct, le résultat est aecté d'un−1.
b. D'après les résultats de la question précédente, après simplication,
|A(Z)|
L(Z)2 = sin πn
8nsin2 πn = cos πn 4nsin πn
|A(Z)|
E(Z) = cos πn 4 sin πn
L(Z)2 E(Z) =n 3. On peut utiliser l'inégalité de Cauchy-Schwarz pour majorerL(Z),
L(Z) =
n−1
X
k=0
1× |zk+1−zk| ≤ v u u t
n−1
X
k=0
12 v u u t
n−1
X
k=0
|zk+1−zk|2=√ np
E(Z)
On en déduit l'inégalité demandée en élevant au carré.
L'égalité se produit si les|zk+1−zk|sont proportionnels à la suite constante1c'est à dire égaux entre eux ou encore si et seulement si le polygone est équilatéral.
4. a. Notons j la variable locale à la somme dénissant A pour utiliser plus commo- dément la question I.5. Comme toutes les sommes se font sur des indices entre0 etn−1, on se permet de ne pas écrire les ensembles sur lesquels on somme pour alléger un peu les formules
zj+1zj= 1 n
X
k,l
ωj+1k
bzk ω−jl bzl= 1
n X
k,l
ωk−lj ωkbzkbzl
En sommant surj, on peut encore utiliser I.4.
X
j
zj+1zj = 1 n
X
k,l
X
j
ωk−lj
nsik=lsinon0
ωkzbkbzl=X
k
ωkzbkbzk
En prenant la partie imaginaire, on a bien : A(Z) = 1
2
n−1
X
k=0
sin 2kπ
n
|bzk|2
PourE, on commence par examiner la somme des carrés des modules
|zj|2= 1 n
X
k,l
ωjk
zbk ω−jl zbl= 1
n X
k,l
ωk−lj bzkbzl
On en déduit comme plus haut avec I.4., X
j
|zj|2=X
k
|zbk|2
Par circularité, cette somme est aussi celle de1àn. On en déduit alors, en utilisant encore le travail fait surP
jzj+1zj : E(Z) =X
j
|zj+1|2+|zj|2−2 Re (zj+1zj)
= 2X
j
|bzj|2−2 Re
X
j
zj+1zj
= 2X
j
|bzj|2−2X
k
cos 2kπ
n
|bzk|2
= 2X
k
1−cos
2kπ n
|bzk|2= 4X
k
sin2 kπ
n
|bzk|2 b. La relation demandée est facile à prouver. Elle vient de la sommation des relations
sin2 kπ
n
−tanπ n
1 2sin
2kπ n
= sin2 kπ
n
−tanπ n
sin kπ
n
cos kπ
n
= sin kπ
n sin kπ
n
−tanπ n
cos kπ
n
c. Comme 0≤ kπn ≤πpour lesk entre0 et n, on a sin kπn
≥0. Le résultat de la question I.1.a. avecε= 1, montre (avec la question précédente etE(Z)>0) que
E(Z)−4 tanπ n
A(Z)≥0⇒ A(Z)
E(Z)≤ 1 4 tan πn
De même avecε= 1,
E(Z) + 4 tanπ n
A(Z)≥0⇒ −A(Z)
E(Z)≤ 1 4 tan πn On en déduit la majoration avec la valeur absolue deA(Z).
5. a. ÉvaluonsA(Z1)en notant par de simples· · · les termes deA(Z0)qui ne sont pas modiés
A(Z1) =1 2Im
(zj+λ(zj+1−zj−1))zj−1+zj+1(zj+λ(zj+1−zj−1)) +· · ·
=A(Z0) +λ
2 Im ((zj+1−zj−1)zj−1) +zj+1(zj+1−zj−1)
=A(Z0) +λ
2Im (zj+1zj−1−zj+1zj−1) =A(Z0) b. D'après la propriété fondamentale deZ0 et la question précédente (conservation
duA), on déduit que pour tous lesZ1dénis comme dans la question précédente avecj etλarbitraires :
A(Z1) =A(Z0)
|A(Z1)|
L(Z1)2 ≤ |A(Z0)| L(Z0)2
⇒L(Z0)≤L(Z1)
⇒ |zj+1−zj|+|zj−zj−1|<|zj+1−zj0|+|z0j−zj−1| Il reste à montrer que cela ne peut se produire que siZ0 est équilatéral.
Comme les longueurs se conservent par similitude, on peut supposer quezj+1=k etzj−1=−kaveckréel. On notea= Re(zj)etb= Im(zj). On peut alors prendre z0j=zj+t avectréel carzj+1−zj1 est réel. L'expression se simplie
f(t) =|zj+1−zj0|+|zj0 −zj−1|=p
(k−a−t)2+b2+p
(k+a+t)2+b2 et on doit avoirf(0)< f(t)pour toutt6= 0. Ceci entraînef0(0) = 0.
Or
f0(0) =−k−a
|k−z|+ k+a
|k+z| D'où
(k−a)|k+z|= (k+a)|k−z| ⇒(k−a)2 (k+a)2+b2
= (k+a)2 (k−a)2+b2
⇒(k−a)2= (k+a)2⇒a= 0
⇒ |zj+1−zj|=p
k2+b2=p
(−k)2+b2=|zj−zj+1|
Ceci étant valable pour tous lesj, le polygoneZ0 est bien équilatéral.
c. Comme le polygoneZ0est équilatéral, il réalise un cas d'égalité dans la formule de Cauchy-Schwarz de la question II.3. On en déduit queL(Z0)2=nE(Z0). Utilisons alors l'inégalité de 4.c.
|A(Z)|
L(Z)2 ≤ |A(Z0)|
L(Z0)2 = |A(Z0)|
nE(Z0) ≤ 1
4ntan πn ≤ 1 4π d'après la deuxième partie de la question I.1.