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Art et arbitrage : quels enseignements tirer de la résolution des litiges sportifs?

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Art et arbitrage : quels enseignements tirer de la résolution des litiges sportifs?

KAUFMANN-KOHLER, Gabrielle

KAUFMANN-KOHLER, Gabrielle. Art et arbitrage : quels enseignements tirer de la résolution des litiges sportifs? In: Byrne-Sutton, Quentin, Geisinger-Mariéthoz, Fabienne. Resolution methods for art-related disputes . Zürich : Schulthess, 1999. p. 123-151

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:21859

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II

ART ET ARBITRAGE:

QUELS ENSEIGNEMENTS TIRER DE LA RESOLUTION DES LITIGES SPORTIFS?

GABRlELLEKAUFMANN-KoHLER,

Professeur à l'Université de Genève et avocate'

1. INTRODUCTION: POURQUOI LE SPORT?

Art et sport: quelle idée saugrenue de mêler le sport à un débat tout entier consacré au droit de l'art! Surprenante au premier abord, l'incursion dans le monde du sport se révélera pourtant fructueuse. Le droit du sport connaît une méthode de résolution des litiges par l'arbitrage qui a fait ses preuves.

La confrontation avec les différends en matière d'art permet de dégager un certain nombre de similitudes et de différences aussi, qui sont autant d'enseignements sur l'opportunité et les modalités du recours à l'arbitrage dans le domaine de l'art.

Cette contribution comprend deux volets; le premier examine l'expérience faite en matière d'arbitrage des conflits sportifs et le second étudie une éventuelle transposition aux différends du droit de l'art. Dans notre première partie, nous commencerons par une rapide typologie des litiges touchant au sport (ch. ZIA), puis nous poursuivrons par une description de l'arbitrage en matière de droit du sport (ch. 21B), pour passer ensuite à la seconde partie avec l'examen des divergences et des convergences entre le règlement des litiges dans le domaine du sport et dans celui de l'art (ch. 3/A), suivi d'une réflexion sur les leçons à tirer de

Associée de l'Etude Brunschwig Wittmer

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124 UNE JUSTICE DE PROXIMITE

l'expérience sportive pour les besoins du contentieux de l'art (ch. 3/B et 3/C) et d'une conclusion (ch. 4).

2. RÉSOLUTION DES LITIGES SPORTIFS

A. Typologie des litiges

Trois exemples illustreront mieux que de longs développements les types de litiges auxquels le sport peut donner lieu. Ces exemples ont tous fait l'objet de procédures devant le Tribunal arbitral du sport (TAS)'.

• Premier exemple: un athlète de haut niveau, détenteur d'un titre de champion du monde, conclut un contrat de sponsoring avec un fabricant d'équipement. Invoquant le fait que l'athlète s'est mis à pratiquer, à titre complémentaire, un autre sport de compétition dans lequel il n'utilise pas l'équipement du fabricant, Ce dernier résilie le contrat sans délai.

Contestant la validité de la résiliation, l'athlète entend obtenir l'exécution du contrat et réclame le paiement des indemnités et primes qui lui étaient dues contractuellement jusqu'au terme prévu2

• Deuxième exemple: un skieur a un accident lors d'un slalom géant et considère que ses blessures sont telles qu'elles compromettent la poursuite de sa carrière sportive. Il saisit le TAS pour réclamer des dommages-intérêts aux organisateurs de la course3.

• Troisième et dernier exemple: une nageuse américaine est suspendue pour une durée de deux ans par la Fédération internationale de natation pour usage d'anabolisants. Elle fait appel de cette décision devant le TAS en invoquant la violation des règles de procédure par les instances de la Fédération. Sans contester l'absorption de substances interdites, elle demande la levée de la suspension, faisant valoir qu'aucune faute ne peut lui être reprochée'.

Sur la confidentialité des procédures devant le TAS, voir paragraphe B Oi) d ci- dessous, étant précisé que, bien que l'auteur exerce certaines fonctions au sein du TAS, aucun aspect confidentiel n'est bien entendu rapporté ici.

ArbÜrage TAS 91/45. publié in Tribunal Arbitral du Sport, Recueil des sentences du TAS 1986-1998, BemelLa Haye 1998.

,

Arbitrage TAS 96/155, non publié.

Arbitrage TAS 961156, non publié.

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UNE JUSTICE DE PROXIMITE 125

Ces exemples sont représentatifs de trois catégories de litiges :

• Tout d'abord, les litiges contractuels. Outre l'exemple choisi ici, nous aurions pu penser à des différends issus d'un contrat d'organisation d'une manifestation sportive, d'un contrat de management de sportifs, d'une concession de droits de télévision, parmi d'autres.

• Ensuite, les litiges non contractuels mettant en cause une responsabilité délictuelle, en l'occurrence celle de l'organisateur d'une manifestation sportive.

• Enfin, les litiges non contractuels de nature particulières, très fréquents en matière de sport', puisqu'ils résultent de la contestation de décisions d'instances sportives7.

Cette trilogie n'est pas sans ressembler aux catégories de litiges traitées dans les contributions qui précèdent'. Cela est évident pour les litiges de nature contractuelle. Que le substrat soit sportif ou artistique, la résolution des litiges contractuels doit répondre à des besoins comparables et tenir compte d'impératifs similaires. Quant aux litiges délictuels en matière sportive, on peut les comparer aux différends relatifs aux droits des artistes, à savoir droit de suite, droit moral et droits d'auteur. Les litiges non contractuels particuliers, enfin, pourraient être mis en parallèle, non sans ignorer les différences, avec les actions en restitution de biens culturels volés ou exportés illicitement.

En droit suisse, ils relèvent du droit de l'association (ATF 119 II 271). Toutefois, cela est sans pertinence pour nos propos.

6 Outre les sentences dans le Recueil TAS, précité nole 2, voir not. Rebagliad cl .c.IQ, 12 février 1998, 13 Mealey's International Arbitration Report, 1998, p. BI;

Samuelssoo et consorts cl Fédération internationale de hockey sur glace, 18 février 1998, 13 Mealey's International Arbitration Report. 1998, p. B 4.

Une autre catégorie, qui est sans incidence pour la suite de notre discussion, a pris de l'importance; il s'agit de différends entre organismes sportifs sur la délimitation de leurs compétences et de contestations par les membres d'une organisation à propos de dispositions statutaires ou réglementaires adoptées par llorganisation.

Voir les contributions de Daniel Shapiro, Lawrence A. Kaye, Norman Palmer el Robin Fry.

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B. Arbitrage des conflits sportifs devant le TAS

(i) Evolution du droit du sport et création d'un mécanisme d'arbitrage Professionnalisation, médiatisation et commercialisation, autant de phénomènes qui ont entraîné la juridicisation et la judiciarisation du sport.

Ou plus simplement: le sport, qui a longtemps bénéficié d'une sorte d'immunité juridique, n'échappe plus aujourd'hui au droit et à la justice.

Certains dirigeants sportifs l'ont compris et ont cherché à mettre en oeuvre une justice à la mesure du sport. Par là, ils évitaient que des litiges comme ceux que nous avons décrits plus haut soient portés devant des tribunaux judiciaires d'Etats différents, ayant des régimes de procédure, de conflits de lois et de droit matériel divergents, sans parler des sensibilités et perceptions qui varient forcément.

C'est ainsi qu'en 1983, sous l'impulsion du Comité international olympique (CIO), naquit le TAS, institution arbitrale consacrée à la résolution des litiges liés au sport'. Il connut des débuts tranquilles, jusqu'au jour où la première fédération internationale inséra dans ses statuts une clause soumettant à une procédure arbitrale devant le TAS toute contestation d'une décision prise par la fédération à l'encontre d'un athlète. D'autres fédérations suivirent. En 1994, une refonte du règlement d'arbitrage permit d'augmenter l'efficacité de la procédure. Simultanément, une réforme des structures détachait le TAS du CIO pour le placer sous l'égide d'un Conseil international de l'arbitrage du sport, dont les composantes reflètent la

9 Sur le règlement des litiges en matière de sport en général et le TAS en particulier, voir notamment Tribunal arbitral du sport, Guide de l'arbitrage, Lausanne 1996; Gérald SIMON, L'arbitrage des conflits sportifs, Rey. arb. 1995, p. 185; Jean-Philippe ROCHAT, Tribunal arbitral du sport: quelle procédure pour quel litige, Bull. ASA Special Series no .. lI, 1998, p. 11; id., Le règlement des litiges en matière sportive, Louis DALLEVES, Mario LUVINI, Henry PETER, Jean-Philippe ROCHAT, Il diritto dello sport, Lugano 1994, p. 3; Kéba MBAYE, Pourquoi le Tribunal Arbitral du Sport?

Bull. ASA 1990, p. 114; Urs SCHERRER, Rechtsfragen des organisierten Sportlebens in der Schweiz. Zurich 1982, pp. 150ss.; Jean-Pierre KARAQUlLLO, Le droit du sport, 2eme éd., Paris 1997, pp. 9855.; Thomas SUMMERER, Internationales Sportrecht var dem staatlichen Richter in der Bundesrepublik Deutschland, Schweiz, USA und England, Munich 1990, pp. 29ss. et pp. 57ss.; Aaron N. WISE, Bruce S. MEYER, International Sports Law and Business, La Haye 1997, pp. 1447ss.; Edward GRAYSON, Sport and the Law, 2èmc éd. Londres 1994, pp. 251ss.;(James NAFZIGER, International Sports Law -a ProceS5 for Resolving Disputes, ICL<~ 1996,p. 130; Bruno SIMMA, The Court of Arbitration (or Sport, Festschri([ Seidl-Hohenveldern, Cologne 1988, p. 573.

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diversité du monde sportiflO L'acte constitutif de ce conseil a été signé par l'ensemble des fédérations olympiques, soit plus d'une trentaine, qui toutes contribuent au financement de l'institution arbitrale. Parmi ces fédérations, environ une vingtaine jusqu'à présent ont inséré des clauses arbitrales dans leurs statuts.

Le TAS a son siège en Suisse et des bureaux décentralisés en Australie et aux Etats-Unis. Il met également en oeuvre une instance spéciale pour la durée de certaines manifestations sportives, tels les Jeux olympiques". Ses activités et les procédures qu'il gère sont régies par le Code de l'arbitrage en matière de sport (ci-après le Code). A ce jour, il compte une vingtaine d'arbitrages par an, dont la moitié se conclut par des accords ou retraits, le reste donnant lieu à des sentences.

(ii) Caracténstiques de l'arbitrage du TAS

En quoi l'arbitrage est-il plus propice à la résolution des litiges sportifs que la justice étatique? Nous ne retiendrons ici que les principaux éléments intéressant la comparaison avec les différends du droit de l'art. Parmi ces éléments, nous distinguerons les considérations de procédure des aspects matériels. Commençons par la procédure.

a. Gestion active

En dépit de son nom, le TAS n'est pas un tribunal arbitral, mais une institution d'arbitrage qui met en œuvre des tribunaux composés d'un ou trois arbitres chargés de trancher les litiges. Même s'il ne résout pas lui- même les litiges, le TAS gèrda procédure et suit de près le déroulement de l'arbitrage, un représentant du TAS assistant aux audiences et délibérations et procédant à la rédaction de la sentence en fonction du délibéré. Par rapport à d'autres institutions d'arbitrage, le TAS pratique ainsi une gestion résolument active. Cela permet d'assurer une certaine uniformité tant de la procédure que des solutions au fond, malgré le fait que les arbitres changent au gré des arbitrages.

10 Art. S4 Code de l'arbitrage en matière de sport (ci-après le Code), qui comprend le Statut des organes concourant au règlement des litiges en matière de sport et le Règlement de procédure.

II Art. S14-19 Code.

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b. Spécialisation

Les arbitres du TAS sont tous juristes, et ont, en principe, des connaissances particulières en matière de sport12Du professeur de droit du sport à l'avocat médaillé olympique de lutte, les voies de la spécialisation sont multiples.

L'exigence de spécialisation a pour but de garantir la qualité de la justice et l'efficacité du processus. Sa mise en œuvre n'est toutefois pas sans soulever deux types de difficultés. Tout d'abord, les spécialistes du droit du sport sont souvent issus des milieux sportifs. Nommés arbitres, ils sont donc susceptibles d'avoir des liens avec des instances sportives parties à l'arbitrage. Il y a ainsi, du fait même de la spécialisation, un risque de manque d'indépendance. Pour y parer, le Code prévoit l'obligation de l'arbitre de révéler toute circonstance pouvant compromettre son indépendance aux yeux des parties13 ainsi qu'une procédure de récusation!4.

Pour minimiser encore le risque, l'institution se doit de veiller attentivement au respect de l'indépendance lors de la constitution du tribunal arbitral.

Ensuite, pour assurer la spécialisation, le Code requiert que les arbitres soient choisis parmi 150 noms figurant sur une liste constituée par le Conseil international de l'arbitrage du sport sur la base des CV des arbitres potentielsI5L'existence d'une telle liste fermée a été vivement critiquée", à juste titre nous semble-t-il. Elle restreint le choix des parties et comporte, de par la limitation des papables, des risques de partialité17Pour répondre à ces

12 Art. S14-19 Code.

13 Art. R33 al. 1; voir aussi art. S18.

14 Art. R34.

15 Art. S1355.; art. R33 al. 2.

16 Ainsi tout récemment Urs SCHERRER, Sportrecht im Spannungsfeld von Spiel und Wirtschaft, SJZ 1998 294; Thomas SUMMERER, Frühjahrstagung 1996 des Konstanzer Arbeitskreises -Sportschiedsgerichtsbarkeit, SpuRt 1996, p. 180, où il est question de "closed-shop Mentalitatll, qui nuit à la crédibilité du TAS.

17 Voir néanmoins l'ATF 119 II 271, dans lequel le TF examine la question de la liste et conclut que, compte tenu de la diversité des organes sportifs dont émanent les propositions d1arbitres figurant sur la liste, celle-ci ne met pas en cause Jlindépendance du système.

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critiques, sans pour autant sacrifier l'impératif de spécialisation, il suffirait d'ouvrir la liste. Seuls les arbitres nommés par le TAS devraient alors y figurer, par opposition aux arbitres désignés par les parties, qui pourraient être choisis hors liste.

c. Uniformité du régime procédural

Tous les arbitrages du TAS, qu'ils aient matériellement lieu en Suisse, ou qu'ils se déroulent dans le pays d'un bureau décentralisé ou encore sur le site des Jeux olympiques, ont leur siège à Lausanne18Ils sont donc soumis au droit suisse de l'arbitrage, soit, dans le cas le plus fréquent où une des parties au moins est domiciliée à l'étranger, au chapitre 12 de la LDIp19. Ce siège immuable assure l'uniformité du régime procédural, non seulement au niv.eau du règlement institutionnel d'arbitrage, mais également de la loi nationale régissant l'instance et tout particulièrement les voies de recours à l'encontre des sentences. Toutes les sentences du TAS'o sont ainsi soumises au seul recours en annulation devant le Tribunal fédéral suisse comme instance unique21,

d. Confidentialité

Les arbitrages du TAS portant sur des litiges de nature contractuelle sont confidentiels. Le Code prévoit que les arbitres, les parties et le TAS ne divulgueront pas d'informations recueillies dans le cadre de la procédure à

18 Art. R28 Code; art. 7 Règlement pour la résolution des litiges survenant pendant les XVIIIe Jeux olympiques d'hiver à Nagano; sur la question de la fixation du siège en Suisse, alors que Jlarbitrage se déroule matériellement dans un autre Etat, voir not.

Gabrielle KAUFMANN-KOHLER, Arbitration Procedure: Identifying and Apptying the Law Goveming the Arbitration Procedure -The Role of the Law of the Place of Arbitration, ICCA Congress Series 1998 paraître); du même auteur, Le lieu de Jlarbilrage à l'aune de la mondialisation - Réflexions à propos de deux fonnes récentes d'arbitrage. Rev .• rb. 1998, p. 517.

19 Art. 176 al. 1 LDiP.

20 Sauf en matière d'arbitrage interne suisse. qui ne nous intéresse pas ici.

21 Art. 190 LDiP.

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des tiers et que les sentences ne seront pas publiées, sauf si la sentence elle- même le prévoit ou si toutes les parties y consentent". Cette disposition s'applique également aux litiges de nature délictuelle23

En revanche, 'pour les procédures dites d'appel, à savoir les contestations de décisions d'instances sportives, la règle est in1(ersée: sauf accord contraire des parties, la sentence est publiée par le T AS'4. En effet, par leur nature, ces litiges sont souvent déjà dans le domaine public. A cela s'ajoute que le développement uniforme du droit du sport au sens strict est forcément tributaire d'une certaine publicité.

e. Compétence

Quoique l'arbitrage s'impose de plus en plus comme le mode de règlement des litiges en matière internationale et que l'arbitrage involontaire ou !lwithout privityU prenne de ['ampleur25, on considère encore aujourd'hui la justice étatique comme la règle et l'arbitrage comme l'exception. Cette exception se justifie par l'accord des parties, accord qui fonde la compétence du tribunal arbitral.

La compétence d'un tribunal arbitral créé sous l'égide du TAS peut résulter de trois types d'accord. Tout d'abord, pour les litiges contractuels, d'une clause d'arbitrage insérée dans un contrat signé des deux parties.

Ensuite, pour les litiges délictuels (et dans une bien moindre mesùre aussi les litiges contractuels), d'une convention d'arbitrage ou d'un compromis arbitral conclu après la survenance du différend. Enfin, pour les

22 Art. R 43. Cela dit, la réalité est plus compliquée, car on ne peut exclure des situations où une partie a l'obligation de révéler à un tiers (une banque. une assurance, par exemple) certaines données ayant trait à l'arbitrage. En outre. il est des situations dans lesquelles une partie a un intérêt légitime à se prévaloir d1une sentence face à des tiers (outre dans le cadre d'une action en annulation ou en exécution de la sentence, également dans une action ultérieure liée, par exemple à l'encontre d'un garant). Une bonne règle de confidentialité devrait donc être assortie d'un certain nombre d'exceptions (sur le sujet, voir par exemple.

Van

PAULSSON, Nigel RAWDING, The Trouble wÎth Confidentiality, [

A'b. Int. 1995, pp. 303. 340: Peter SHERIDAN, Privacy and Confidentiality . Recent Developments: The Divergence between English and Australian Law Confinned, lnt. A.

L. R. 1998. pp. 171·177).

13 Ces deux types de litiges faisant l'objet de la même procédure dite d'arbitrage ordinaire (art. 27, 3855.).

24 Art. R59 al. 4.

25 Jan Paulsson. Arbitration Without Privity. ICSID 1995. pp. 232-257.

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contestations de décisions d'organismes sportifs ou arbitrages d'appel, de clauses d'arbitrage insérées dans les statuts ou règlements de ces organismes, constitués en associations ou dans une forme analogue26:'

Dans cette troisième hypothèse, la disposition statutaire fait souvent, mais non toujours, l'objet d'une acceptation écrite de l'athlète, qui n'est généralement pas membre (direct) de l'association27Ce dernier pan de l'arbitrage sportif, dont l'importance va croissant, doit son essor à l'organisation très structurée, monopolistique du monde du sport, qui a grandement facilité l'introduction de cette méthode de résolution des . différends".

f. Durée et coût

Comparés à beaucoup d'autres procédures, les arbilrages du TAS sont rapides. Les appels sont généralement clos en quatre mois. Les procédures ordinaires (litiges contractuels et délictuels) durent en moyenne six à douze mois. Ces durées comprennent parfois le temps nécessaire à une expertise scientifique, notamment en matière de dopage.

Mais même ces durées relativement courtes sont souvent trop longues.

Le rythme de la compétition de haut niveau peut en effet requérir une prise de décision plus rapide. C'est pourquoi, s'appuyant sur l'article 183 LDIP, le Code prévoit que les arbitres -ou avant la constitution du tribunal arbitral, le

. Z6 Sur le sujet, voir en particulier, Stephan NETZLE, Jurisdiclion of arbitral tribunals in sports mallers: arbitration agreements by reference to regulations of sports organisations, Bull. ASA, Special Series no. 11, 1998. p. 45; Rémy WYLER, La convention d'arbitrage en droit du sport, RDS 1997·1, fascicule l, pp. 45-62.

27 Il est généralement membre d'un club, qui est lui membre d'une fédération nationale. qui est à son tour membre d'une fédération internationale. Cette déclaration peut être requise dans le cadre de l'octroi de la licence du sportif (exemple: Fédération internationale de ski) ou de l'inscription à une manifestation sportive donnée (exemple:

Jeux olympiques).

28 La structure du sport organisé se compose de deux hiérarchies pyramidales, la pyramide des fédérations, segmentée par discipline, et la pyramide olympique, divisée par pays el chapeautée par le CIO, Ioules deux monopolistiques (quoique ce monopole ne soit plus incontesté). Sur les structures du sport, voir not. Michael WILL. Les structures du sport international, Louis DALLEVES, Margareta BADDELEY (éds) , Chapitres choisis de droit du sport, Genève 1993, p. 21.

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132 UNE JUSTICE DE PROXIMITE

TAS peuvent prononcer des mesures provisionnelles, en cas d'extrême urgence même sans audition préalable de la partie adversé',

Toujours sous l'angle de la rapidité, mentionnons encore que les sentences prononcées dans le cadre des Jeux olympiques sont en principe rendues dans les 24 heures suivant le dépôt de la requête d'arbitrage, une décision provisoire précédant souvent la sentence30En statuant dans des délais aussi brefs, le TAS respecte les impératifs liés au déroulement de la manifestation.

Enfin, la procédure d'appel est gratuite; quant aux procédures ordinaires, elles sont généralement moins onéreuses que des procédures comparables dans d'autres institutions d'arbitrage. Cela s'explique par le fait que l'institution, financée par différents organismes sportifs, supporte une large part des coûts de la procédure. En outre, le TAS dispose d'un fonds destiné à contribuer aux frais d'avocat d'athlètes qui n'auraient pas de

moyeQs~suffisants.

g. Uniformisation du droit matériel

Passons maintenant aux acquis de droit matériel et commençons par nous interroger sur le droit applicable au fond du litige. En vertu du Code, le tribunal arbitral statue dans les affaires contractuelles "selon les règles de droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon le droit suisse", les parties pouvant aussi autoriser les arbitres à trancher en équité3I La référence au droit suisse en l'absence d'élection de droit surprendra maint internationaliste, tant elle constitue la négation du principe de proximité32

Elle présente toutefois l'avantage de la simplicité et de la prévisibilité et est, par là, assez caractéristique des objectifs poursuivis par le TAS. Pour le surplus, l'application du droit matériel dans les litiges contractuels portés devant cette instance ne se distingue pas de n'importe quel autre arbitrage commercial international.

29 Ces mesures ex parte pouvant être revues après l'audition de la partie adverse, qui doit nécessairement suivre roctroi de mesures rendues prononcées en procédure non contradictoire (art. R37).

30 Art. 18 et 14 Règlement pour la résolution des litiges survenant pendant les Jeux olympiques.

31 Art. R45.

32 Selon lequel un contrat est rattaché au droit avec lequel il présente les liens les plus étroits (p. ex. art. 187 al. 1 LDIP).

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'-'

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Les arbitrages d'appel sont en revanche plus spécifiques. On y constate à nouveau le souci de prévisibilité au détriment des liens les plus étroits, mais on y trouve surtout la référence aux règlements sportifs. Les arbitres sont en effet appelés à se fonder en premier lieu sur -ces règlements, qui émanent principalement des fédérations internationales, du CIO, des fédérations nationales, et des Comités, nationaux olympiques.

Subsidiairement, ils appliquent les règles de droit choisies par les parties et, à défaut, le droit de l'Etat du siège de l'organisme sportif en cause33Quant aux arbitralles menés pendant les Jeux olympiques, ils sont résolus en vertu

"de la Charte olympique, des règlements applicables, des principes généraux du droit et des règles de droit dont [le tribunal arbitral] estime l'application

l ,,34

appropnee .

Bien que le droit étatique ne soit pas absent des dispositions que nous venons de rappeler, dans les sentences du TAS il joue un rôle tout à fait marginal. Pourquoi? Avant tout, parce que le débat s'épuise généralement dans l'application ou l'interprétation d'une règle sportive, à savoir d'une règle posée par un organisme privé. A cela s'ajoute que les arbitres font facilement appel à des principes généraux, sans référence à un droit national, même lorsqu'il ne statue pas selon le Règlement des Jeux olympiques, qui les y

. , 3 5

autonse expressement .

Lorsqu'elles sont édictées par les fédérations internationales ou par le CIO, les règles sportives ont, de par la structure du sport organisé, vocation à s'appliquer de manière universelle (bien que fragmentée par discipline sportive pour les fédérations). A partir de cette constatation, certains concluent à l'existence d'un ordre juridique transnational, appelé {ex sportiva

3J Art. R58.

]4 Art. 17 Règlement pour la résolution des litiges survenant pendant les Jeux olympiques. Sur le sujet, voir notamment, Gabrielle KAUFMANN-KOHLER, Atlanta et l'arbitrage ou les premières expériences de la division olympique du Tribunal Arbitral du Sport, Bull. ASA 1996, pp. 433-447, plus particulièrement p. 437; du même auteur.

Nagano et l'arbitrage - ou vers une justice de proximité, Bull. ASA 1998, pp. 311-324, plus particulièrement pp. 318-319.

35 Sentences 91/56 et 96/005, Recueil précité note 2.

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par analogie avec la lex mercaforia du commerce international36Ont-ils raison? Ont-ils tort? Notre propos n'est pas de répondre ici à cette vaste question. Pour les besoins de la comparaison entre litiges du droit du sport et du droit de l'art, il suffit d'observer que l'activité du TAS, institution spécialisée en matière de contentieux sportif international, favorise le développement de principes et de règles uniformes.

Quelques exemples tirés de sentences TAS l'illustrent bien. Ainsi, en matière de dopage37, deux principes se dégagent des sentences examinées: la responsabilité objective du sportif justifiant l'imposition d'une sanction sans condition de faute38 et la prise en compte de la faute pour déterminer la gravité de la sanction'·. Par ailleurs, au fil des décisions, la jurisprudence s'est attachée à définir les droits procéduraux des athlètes face aux instances sportives: celles-ci ne s~uraient imposer de sanctions sans base réglementaire claire40, ni audition de l'athlète41; leurs actions doivent être

36 Thomas SUMMERER, Internationales Sportrecht - eine dritte Rechtsordnung?, Mélanges Hanisch, Cologne 1994, pp. 267-26955. pour un exposé des différentes positions sur J'existence d'une telle lex sportiva; voir en outre id.. Internationales Sporlrecht vor dem staatlichen Richter in der Bundesrepublik Deutschland, Schweii, USA und England, Munich 1989, pp. 955S: Alegria BORRAS, Existe-t-il un droit international du sport?, Mélanges Rigaux, Bruxelles 1993, p. 111; Michael WILL, Rechtsgrundlagen der Bindung nationaler Verbande an internationale Sporlverbandsregeln, Dieter REUTER (éd.), Einbindung des nationalen Sportrechts in internationale Bezüge, Heidelberg 1987.

37 Sur les problèmes juridiques de la lutte contre le dopage, voir notamment Louis DALLEVES. Problèmes juridiques de la lutte contre le dopage. DALLEVES. LUVINI, PETER, ROCHAT. précités note 9; Klaus VIEWEG (éd.). Doping -Realitat und Recht, Berlin 1998, contenant notamment les contributions de Margareta BADDELEY, Athletenrechte und Doping aus der Sicht des schweizerischen Rechts, p. 307 et de Stefan NETZLE, Wie h~ilt es das Internationale Sportsschiedsgericht mit dem Doping? p. 197.

38 Sauf si le règlement applicable requiert la faute (sentence 94/129, Recueil précité note 2), où les arbitres se prononcent de manière générale en faveur de la responsabilité objective (cons. 16), mais l'excluent en l'occurrence en raison du libellé de la disposition pertinente (cons. 175s.). La responsabilité Objective est admise même lorsque le texte applicable ne prévoit pas expressément le caractère objectif de la responsabilité (sentence 95/122, Recueil précité note 2). Autres sentences reconnaissant la responsabilité objective: sentences 91/56. 92/63. 95/147, 95/141. 95/150. Recueil précité note 2.

39 Sentences 92163. 94/129. 95/141. 95/150. 96/149. Recueil précité note 2.

40 Sentences 94/129, 98/002, Recueil précité note 2.

41 Sentences 91153. 91156. 92/63, 96/005. Recueil précité note 2.

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UNE JUSTICE DE PROXIMITE 135

prévisibles", de telle sorte qu'elles doivent notamment éviter des changements abrupts de pratiques bien établies" ou encore s'abstenir de créer des expectatives qu'elles décevront par la suite".

Le développement de telles règles présuppose, tout d'abord, une certaine cohérence de la jurisprudence, qu'il incombe à l'institution d'assurer malgré le fait que les arbitres changent d'une procédure à une autre. C'est là une des raisons de la gestion particulièrement active qui caractérise la pratique du TAS's. Ce développement implique ensuite la publicité des décisions. C'est pourquoi les sentences rendues dans les procédures d'appel ne sont pas'confidentielles46 et font l'objet de publication.

3. TRANSPOSITION AUX LITIGES DU DROIT DE L'ART?

A, Convergences et divergences

Peut-on transposer l'expérience faite en matière de sport au droit de J'art?

Dans quelle mesure? Pour répondre, tentons une comparaison entre les deux domaines, Il y a bien sûr des convergences et des divergences,

Les convergences d'abord. Dans des registres différents, bien sûr, le sport et l'art véhiculent tous deux des valeurs autres que marchandes, des aspirations humaines qui transcendent les contingences matérielles; le droit et les juristes y font figure d'intrus". El pourtant, ces dernières décennies, tous deux ont subi une commercialisation comparable, mettant en jeu des intérêts économiques importants", Une évolution qui, pour l'art comme pour le sport, ne va pas sans son lot croissant de conflits d'ordre juridique.

42

45

Sentences 98/002, 96/001, Recueil précité note 2.

Loc, cit.

Sentence 96/153, Recueil précité note 2.

Voir paragraphe 2.B.(ij).a ci·dessus.

Voir paragraphe 2,B.(ii)d ci-dessus,

47 Ainsi notamment. en rapport avec la rédaction et négociation des contrats de prêt d'oeuvres d'art, Norman PALMER, Art Loans, Martine BRIAT, Judith A. FREEDBERG (éds). Les aspects juridiques du commerce international de l'art. Paris 1996. pp, 2995S.

48 Quentin BYRNE-SUTION, Marc-André RENOLD (éds), L'expertise dans la vente d'objets d'art, Zurich 1992, p. 5,

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136 UNE JUSTICE DE PROXIMITE

Dans les deux domaines et contrairement à d'autres matières du commerce international, nombre de ces conflits ne sont pas issus de relations contractuelles. En droit de l'art, il s'agit-là des litiges ayant trait aux droits des artistes, droit d'auteur, droit moral et droit de suite ainsi qu'à la restitution de biens culturels volés ou illicitement exportés.

C'est dans le cadre du tr~fic illicile d'objets culturels que se fait tout particulièrement sentir - autre aspect de convergence - le besoin ,d'uniformisation, très présent aussi dans le droit du sport, en raison des solutions divergentes auxquelles aboutit l'application du droit matériel national4'. Par ailleurs, plus encore que le contentieux sportif, les différends en matière d'art soulèvent fréquemment des questions de fait et de droit complexes, dont la résolution requiert des connaissances spécialisées. Grâce à de telles connaissances, le résultat gagne en qualité el le processus en efficacité.

Efficacité, nous voilà au dernier point de convergence d'une certaine importance. La nécessité d'un règlement efficace, rapide s'impose avec une force toute spécifique dans le contexte sportif. Elle existe toutefois également dans le contentieux concernant les objets d'art et biens culturels, comme dans pratiquement toutes les branches du commerce international de nos jours où, face à l'accélération du temps, le rythme de la résolution des litiges ne répond plus aux attentes des opérateurs.

Passons maintenant aux divergences, dont les principales sont au nombre de deux. Tout d'abord, l'organisation très structurée du milieu sportif; qui ne se retrouve pas dans le monde de l'art. Non que ce dernier soit dépourvu de structures. Au contraire, tant au niveau national qu'international, les associations professionnelles d'experts, de marchands d'art, les fédérations de musées, sociétés de perceptions sont autant d'éléments d'organisation. Mais cela reste une organisation plurielle, où la composante monopolistique typique du sport fait défaut.

49 Ces divergences ont trait en dernière analyse â la règle de droit matériel sur l'acquisition a non domino, ainsi qu'à la non-application par les tribunaux du pays de situation du bien de la législation protectrice du pays d'origine. Sur le sujet, voir nOlamment Pierre LALIVE, La Convention UNIDROIT sur les biens culturels volés ou illicitement exportés (du 24 juin 1995), RSDIE 1997, pp. 13,22; Guido CARDUCCI, La restitution internationale des biens culturels et des objets d1art. Paris 1997, pp. 1475s.;

Kurt SIEHR, The Protection of Cultural Heritage and International Commerce, International Journal of Cultural Ptoperty. 1997, pp. 304-325; Quentin BYRNE- SUTTON, Le trafic international des biens culturels sous l'angle de leur revendication par l'Etat d'origine, Zurich 1988.

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UNE JUSTICE DE PROXIMITE 137

La seconde divergence a trait au rôle important des Etats, tout à fait absent des procédures sportives. L'Etat est un intervenant de première importance en matière d'action en restitution de biens culturels volés ou illicitement exportés, puisqu'il y apparaît généralement comme demandeur.

B. Avantages et inconvénients de l'arbitrage en matière d'art

Si, en se fondant sur les convergences et nonobstant les divergences, on avait recours à l'arbitrage pour régler les litiges du droit de l'art, quels en seraient les avantages et inconvénients par rapport aux procédures judiciaires étatiques? Il dépasserait le cadre de cette contribution que de dresser un inventaire complet des avantages et inconvénients comparatifs de l'arbitrage. Notons simplement quelques considérations, qui nous semblent particulièrement pertinentes dans notre contexte, tout en distinguant entre litiges contractuels et non contractuels.

(i) Litiges contractuels

Pour les litiges contractuelss• entre commerçants ou professionnels, l'opportunité du recours à l'arbitrage ne fait guère de doute. Elle s'impose non tant par comparaison avec le droit du sport, que par référence à l'arbitrage commercial international en généraisi. En effet, les litiges contractuels relevant du droit de l'art ne sont pas différents de tant d'autres conflits du commerce international, pour lesquels l'arbitrage constitue

50 A titre d'exemples de litiges contractuels en mauere de droit de l'art, voir notamment l'ATF 112 Il 347 (action en dommages-intérêts contre un expert ayant mal évalué une lampe Gallé); de Balkany v. Christie Manson & Woods Ltd., non publié, mais discuté par Nonnan PALMER, Misattribution and the Meaning of Forgery: the de Balkany Litigation, Art Antiquity and Law 1996, p. 49 (action en restitution du prix instituée contre une maison de vente par l'acheteur d'un tableau attribué à Schiele, mais dont la majeure partie de la surface avait été recouverte par un autre peintre; à noter que l'aclion invoquait concurremment une responsabilité délictuelle); Goldreyer v.

Amsterdam Stedelijk Museum et al., non publié, car transigé, notamment en raison des frais de la procédure judiciaire aux Etats-Unis, discuté par Caroline FORDERER, Goldreyer settles for 100.000 Dollars, Art Antiquity and Law 1997, pp. 185·192 (action en dommages~intéréts par le restaurateur dlun tableau de Bamet Newman, dont la qualité de la restauration était publiquement mise en cause par le musée ayant commandité le travail; le restaurateur invoquait également une responsabilité pour acte illicite).

51 Sur le recours à l'ar?itrage en matière de droit de Ilart, voir le rapport de François RIGAUX, qui précède, etl.Quentin BYRNE-SUTTON, Arbitration and Mediation of Art- Related Disputes, Arbitration International 1998, p. 447. (

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138 UNE JUSTICE DE PROXIMITE

aujourd'hui le mode de résolution52Cela dit, les avantages suivants sont plus spécifiquement pertinents:

• la spécialisation: parce que le choix des arbitres appartient aux parties (directement ou par le biais de l'institution qu'elles ont désignée à cet effet) le tribunal pourra être constitué d'un ou plusieurs spécialistes. Faut- il nommer des experts en matière d'art comme arbitres plutôt que des juristes spécialisés en la'matière? C'est un long débat. Il nous semble plus sage qu'au moins le président du tribunal arbitral soit un juriste. En effet, la gestion de la procédure nécessite un certain savoir-faire et les questions de fait sont presque toujours liées à des questions de droit, les secondes définissant les premières. Sur les questions de fait, telles par exemple l'authenticité ou l'estimation d'une oeuvre, le tribunal pourra toujours désigner un expert ou entendre les experts des parties, ou encore faire les deux53

• La confidentialité: l'arbitrage permet d'assurer la confidentialité de la procédure. En effet, dans la règle, tant l'existence de l'arbitrage, que les écritures, documents et autres informations échangés pendant la procédure et la sentence sont de nature confident. elle. Il est vrai, toutefois, que certains systèmes juridiques ne connaissent pas cette règle et que d'autres l'assortissent d'exceptions, dont l'étendue varieS4. Dès lors, si les parties tiennent à la confidentialité, il est prudent qu'elles en conviennent expressément, de préférence dans la clause arbitrale, ou à défaut par référence à un règlement d'arbitrage garantissant le caractère

52 Cela dit par rapport à la voie du règlement judiciaire par les tribunaux étatiques, non par rapport à la méthode de résolution que constitue la négociation entre parties et qui est de loin la plus fréquente.

53 La situation est évidemment différente lorsque les parties choisissent de procéder par expere determina/ion, non par la voie de l'arbitrage (sur le sujet. voir notamment John KENDALL. Expert Determination: hs Use in Resolving Art and Antiquity Disputes, Art and Antiquity Law 1997, p. 325 et du même auteur, Expert Determination, Zème éd., Londres 1996, pp. 62-74.

54 Sur le sujet, voir les auteurs cités à la note 22.

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UNE JUSTICE DE PROXIMITE 139

confidentiel de la procéduress

, ou encore dans le cadre de l'acte de mission des arbitres56.

L'efficacit : parce qu'il ne connaît pas d'appel, l'arbitrage est en principe plus rapide que la justice étatique. Un règlement de procédure arbitrale bien conçu permettra d'augmenter encore l'efficacité, notamment mais non exclusivement par des possibilités d'arbitrage accéléré.

Quid des inconvénients? Le marché de l'art est peu formaliste. Nombre de contrats y sont passés oralement. Or. en règle générale. la convention d'arbitrage doit revêtir la forme écrite57Pour être liés par une convention d'arbitrage valable. il faudra donc que les opérateurs commerciaux recourent plus systématiquement au contrat écrit. ou concluent un compromis arbitral après la survenance du litige. ou encore confirment leur volonté de soumettre leur différend à l'arbitrage en début de procédure, pratique fréquente devant le TAS lorsque la validité de la convention d'arbitrage est sujette à caution. Parmi ces trois possibilités, seule la première impose l'arbitrage. même si le défendeur tente de s'y soustraire une fois le litige surgi. Les deux autres présupposent sa coopération, qui à ce stade sera souvent compromise en pratique.

Pour les litiges contractuels opposant un professionnel ou commerçant et un consommateur, à savoir un particulier conc1uant un contrat pour son usage personnel. l'opportunité de l'arbitrage soulève encore d'autres

55 Les différents règlements d'arbitrage adoptent des solutions très différentes sur la

/~ confidentialité. Le règlement OMPI (art. 52, 73-76) contient des dispositions très '1 élaborées sur la confidentialité, en raison de la nature des Litiges de propriété

!

inlellectuelle. qui impliquent souvent des secrets d'affaires; le règlement CCIG (Chambre de commerce et d'industrie de Genève; art. 4) et le Code TAS (art. R43 ne concernant

.

que les procédures ordinaires) contiennent une règle générale de confidentialité; le règlement CCI 1998 (art. 20(7) et 21(3» prévoit, outre que les audiences ne sont pas ouvertes aux personnes étrangères à la procédure, ce qui constitue un principe généralement appliqué, que les arbitres prennent toutes mesures pour protéger les secrets d'affaires et infonnations confidelllielles.

56 Ce d'autant plus qu'il n'est pas toujours possible de prévoir sous quel régime juridique la question de la confidentialité de l'arbitrage surgira. Elle pourra en particulier se poser dans le cadre d'une procédure connexe, action judiciaire ou arbitrage.

"

Art. 178 al. 1 LDIP (tout moyen de communication "qui permet d'en établir la

preuve par un texte"); art. 11(1) et (2) Convention de New York pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères; art. 7 Loi~type CNUDCI sur l'arbilrage commercial international.

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140 UNE JUSTICE DE PROXIMITE

questions. Parmi celles-ci figurent notamment la définition du consommateur dans le coqtexte particulier du marché de l'art et l'arbitrabilité des litiges ayant trait au droit de la consommation. Ce n'est que par un examen approfondi de ces questions et des données pratiques de la consommation en matière d'art que l'on déterminera le ou les modes de règlement des litiges les mieux adaptés à ces besoins.

(ii) Litiges non contractuels

Passons maintenan.aux litiges non contractuels, parmi lesquels on compte certains différends ayant trait aux droits des artistes, telle une action en cessation fondée sur le droit d'auteur58, et tout le contentieux relatif aux objets d'art et biens culturels volés ou illicitement exportés59Au sujet de ces

58 A titre d'exemples de litiges portant sur les droits des artistes, voir notamment Rogers v. Koons et al., 1992 V.S. App. LEXIS 5792 (2nd Cir. 1992) (action pour violation de droits d'auteur et concurrence déloyale par un photographe contre Jeff Koons, dont une oeuvre sculptée copiait la reproduction sur carte postale dlune des photographies); Serra v. V.S. General Services Administration, 847 F.2d 1045 (Znd Cir.

1988) (action de Serra fondée notamment sur le droit d'auteur et la liberté d'expression en raison du déplacement d'une sculpture créée pour (et initialement installée) en un lieu public donné); Carter et al. V. Helmsley·Spear, lnc., 861 F. Supp. 303 (S.D.N.Y. 1994) (action fondée sur le droit d'auteur instituée contre le propriétaire et le gérant d'un immeuble par plusieurs artistes cherchant à prévenir, tout d'abord par mesures provisionnelles urgentes, l'enlèvement et la destruction de leurs oeuvres installées dans le hall de l'immeuble et commanditées par un gérant précédent).

59 A titre d'exemples de litiges portant sur le statut et la propriété de biens culturels, voir notamment Govemment of Peru v. Johnson et aL, 720 F. Supp, 810 (c'n.Cai. 1989) (action de l'Etat péruvien tendant à obtenir la restitution d'objets d'art précolombiens acquis par un citoyen américain et saisis en douane); Autocephalous Greek-Orthodox Church of Cyprus [et comme co-demanderesse la République de Chypre] v. Goldberg &

Feldman Fine Arts, Inc. (action en restitution de mosaïques byzantines volées d'une église cypriote pendant l'occupation militaire turque du nord de l'île dans les années 70);

Attorney General of New Zealand v. Ortiz and others, (1982) 3 Ali ER 432 et (1983) 2 AlI ER 93 (action en restitution intentée à Londres par la Nouvelle Zélande contre l'acquéreur et potentiel revendeur d'une sculpture Maori et Sotheby mandatée pour la revente, précédée de mesures provisionnelles interdisant la vente); Appellationsgericht Basel-Stadt 18.8.1995, BJM 1997. p. 17 et RSDIE 1997, p. 492, note lvo SCHWANDER (recours en réforme et recours de droit public au Tribunal fédéral rejetés le 22.5.1996) (action en restitution de cinq stèles funéraires intentée par la Turquie contre l'Antikenmuseum de Bâle, où ces stèles prétendument déterrées en Turquie au début des années 70 se trouvaient exposées); Kingdom of Spain v, Christie, Manson & Woods Ud., (1986) 1 W.L.R. 1120 (Ch.D.) (action par laquelle l'Espa'gne obtint un jugement déclarant que le tableau de Goya Marquesa de Santa Crnz avait été exporté sur la base de documents qui constituaient des faux, déclaration qui permit d'éviter que le tableau soit vendu aux enchères à Londres); Stato francese c. Ministero per i beni culturali e

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